CA Rennes, 3e ch. com., 4 novembre 2025, n° 24/01338
RENNES
Arrêt
Autre
3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°318
N° RG 24/01338 - N° Portalis DBVL-V-B7I-USNS
(Réf 1ère instance : 2023004058)
M. [Y] [O]
E.U.R.L. CJAD INVEST
S.A.S. STAFF COURTAGE
C/
S.A.R.L. ABE
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me VERRANDO
Me RINEAU
Copie certifiée conforme délivrée
le :
à : TC de [Localité 8]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Sophie RAMIN, Conseiller,
Assesseur : Madame Cécile HALLER, Conseillère, désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Rennes du 26 mai 2025
GREFFIER :
Madame Frédérique HABARE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 10 juin 2025, devant M. Alexis CONTAMINE, Président de chambre, et Madame Sophie RAMIN, Conseillère, magistrats tenant seuls l'audience en la formation double rapporteurs, sans opposition des parties, et qui ont rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 04 novembre 2025, après avoir été prorogé le 23 Septembre 2025, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur [Y] [O]
né le 21 Septembre 1985 à [Localité 11]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Camille SUDRON substituant Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Julia LEVEQUE substituant Me Anne Sophie FINOCCHIARO de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau D'ANGERS
E.U.R.L. CJAD INVEST
immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le n°840 710 438, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Camille SUDRON substituant Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Julia LEVEQUE substituant Me Anne Sophie FINOCCHIARO de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau D'ANGERS
S.A.S. STAFF COURTAGE
immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le n°499 204 816, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Camille SUDRON substituant Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Julia LEVEQUE substituant Me Anne Sophie FINOCCHIARO de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau D'ANGERS
INTIMÉE :
S.A.R.L. ABE
immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n°805 155 884, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Bernard RINEAU de la SELARL TURENNE AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
M. [F] a créé les sociétés [Localité 9] assur et Courtage assur.
La société [Localité 9] assur exerce l'activité d'agent général d'assurances et est propriétaire de droits de créances afférents à un portefeuille d'agent général de la compagnie Gan exploité à [Localité 9] (35) et [Localité 10] (44).
La société Courtage assur a pour activité le courtage en assurances et en financements et est propriétaire d'un portefeuille de courtage d'assurance qu'elle exploite à [Localité 9] et [Localité 10].
En 2012, M. [O] qui travaillait pour la SMABTP a été recruté pour développer l'activité de ces sociétés dans la région nantaise.
En 2014, la société ABE a été créée ; elle a pour activité le courtage et l'intermédiation en assurances et l'intermédiation financière. Elle est également propriétaire d'un portefeuille de courtage en assurance qu'elle exploite à [Localité 10]. Sa création avait pour objectif, notamment, de développer une branche spécialisée de l'assurance construction auprès de l'ingénierie du BTP, et plus généralement des professions intellectuelles du bâtiment.
M. [O] a pris des participations dans les sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE (ainsi que des parts de SCI) soit directement soit au travers de la société CJAD Invest.
Il est devenu le gérant de la société Courtage assur.
Le 15 septembre 2021, en raison de dissensions entre associés majoritaires, un protocole de cession de titres des sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur, ABE et des SCI Ker [Localité 9] et Ker [Localité 10], détenus par M. [O] et sa société CJAD Invest, cédants, a été conclu au profit de la société ABE et de MM. [F], [N], [I] et [R], cessionnaires.
La date de réalisation de la cession était fixée au 31 décembre 2021.
Par le protocole, M. [O] s'engageait à quitter ses fonctions de gérant de la société Courtage assur moyennant rémunération de l'exercice 2021.
Ce protocole a prévu un « engagement de non concurrence » des cédants :
- avec une interdiction d'approcher ou de conseiller en matière d'assurance les clients de [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE,
- et une interdiction de conseiller en matière d'assurance construction (dommage-ouvrage et responsabilité civile décennale) tant en qualité d'intermédiaire d'assurance, de salarié, de commissionnaire, d'indicateur ou de mandataire des entreprises sur le secteur de la France métropolitaine jusqu'au 31 décembre 2024.
Postérieurement à ce protocole et selon le registre national des entreprises produit de la société ABE, la société ABE a absorbé à compter du 4 juillet 2022 les sociétés Courtage assur, Invest Vie et RV Courtage.
Il n'est pas contesté que la société [Localité 9] assur a également été absorbée par la société ABE postérieurement au protocole de cession.
Par convention de cession du 3 février 2023, M. [O] et la société CJAD Invest ont acquis la majorité des titres d'une société Staff courtage à [Localité 8] ayant pour activité le courtage en assurance toute branche. M. [O] en est devenu le président.
Par lettre du 14 avril 2023, la société ABE venant aux droits des sociétés [Localité 9] assur et Courtage assur après fusion, a mis en demeure M. [O], en son nom et en qualité de gérant de la société CJAD Invest, afin qu'il procède sous 20 jours à la cession de l'intégralité des actions détenues par l'intermédiaire de la société CJAD Invest au capital de la société Staff courtage, qu'il démissionne de son mandat de président et cesse toute activité directe ou indirecte au service de cette dernière. Il lui était également demandé une indemnité de 400 000 €.
Par lettre recommandée du 11 mai 2023, la société ABE a mis en demeure la société Staff courtage de cesser toutes ses activités en matière de courtage et de conseil en assurance construction.
Le 22 mai 2023, sur autorisation du président du tribunal de commerce de Nantes, la société ABE a assigné M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage à bref délai aux fins, notamment, de cessation de leur activité en violation de l'engagement de non-concurrence et d'indemnisation.
Par jugement du 5 février 2024, le tribunal de commerce de Nantes a :
- rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
- condamné la société ABE à verser à M. [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 € en raison de la faute contractuelle provoquée par divulgation de pièces confidentielles,
- constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
- jugé que M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST ont violé leur engagement de non-concurrence intégré au protocole du 15 septembre 2021,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de 20 000 € à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
- jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime en son application en l'état,
- rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de président de STAFF COURTAGE,
- condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5 000 € par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
- dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
- débouté la société ABE de toutes ses autres demandes,
- déboute M. [O] et la société CJAD INVEST de toutes leurs autres demandes, y compris reconventionnelles,
- dit n'y avoir pas lieu à écarter l'exécution provisoire,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST à payer à la société ABE la somme de 5 000 € par application des dispositions de 1' article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST aux dépens dont frais de greffe liquidés à 100,32 euros toutes taxes comprises.
Par déclaration du 7 mars 2024, la société CJAD Invest, M. [O] et Staff Courtage ont interjeté appel. Par ses premières conclusions, la société ABE a formé appel incident.
Le tribunal de commerce de Nantes, en raison de l'appel formé, a déclaré irrecevable une demande d'interprétation et de rectification d'erreur matérielle de M. [O] et des sociétés Staff courtage et CJAD Invest.
Il est noté que le tribunal de commerce de Nantes a, par ailleurs, été amené à statuer sur plusieurs litiges parallèles concernant tant l'exécution du protocole de cession que la liquidation de l'astreinte.
Les dernières conclusions des appelants ont été déposées le 5 juin 2025 ; celles de l'intimée, le 30 mai 2025.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 juin 2025.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Sur la recevabilité des conclusions de dernière heure
Par conclusions du 6 juin 2025, la société ABE a demandé « le rejet des communications des appelants des 4 et 5 juin 2025 ».
Elle fait valoir qu'au titre du respect des droits de la défense, il est nécessaire de rejeter les conclusions déposées le 4 juin 2025 à 18h08 et 18h11 par les appelants et celles déposées en sus le 5 juin 2025 à 8h42 avant le prononcé de la clôture le même jour. Elle relève qu'après un report de clôture au 5 juin 2025 pour lui permettre de répondre à de précédentes conclusions tardives des appelants, elle a conclu le 30 mai 2025 ; elle reproche aux appelants d'avoir répliqué la veille et le jour même de la clôture, la plaçant dans l'impossibilité insurmontable d'y répondre.
Par conclusions du 10 juin 2025, les appelants demandent le rejet de la demande de rejet de leurs conclusions des 4 et 5 juin 2025 et que celles-ci soient « jugées » recevables.
Ils font valoir qu'il n'existe aucun motif de rejet des écritures transmises avant la clôture alors même qu'ils n'ont fait que répondre aux écritures déposées par les intimés le 30 mai 2025, sans que de nouvelles demandes ou arguments ne soient développés.
Selon l'article 802 du code de procédure civile dans sa version applicable à l'instance, après la clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.
En application de l'article15 du code de procédure civile,
« les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense. »
Aux termes de l'article 16, alinéas 1 et 2, du code de procédure civile :
« Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. »
Il se déduit de la combinaison de ces articles que les conclusions et le dépôt de nouvelles pièces sont par principe recevables jusqu'au prononcé de la clôture sauf à établir des circonstances particulières caractérisant une atteinte portée au principe de la contradiction.
A la suite de l'avis de fixation du 4 avril 2025, annonçant la clôture au 15 mai suivant, les appelants ont conclu le 14 mai 2025.
La clôture prévue pour le 15 mai 2025 a été reportée au 5 juin 2025 pour permettre à l'intimée de répliquer.
L'intimée a adressé une sommation de communiquer et une itérative sommation de communiquer aux appelants les 15 et 21 mai 2025 auxquelles il a été partiellement répondu le 23 mai 2025. Il a été communiqué une attestation de l'expert-comptable de la société Staff courtage sur la présentation de ses comptes pour l'exercice 2024.
L'intimée a déposé des conclusions le vendredi 30 mai 2025 en présentant, notamment, des demandes d'irrecevabilité de « demandes et développements » se rapportant à la première partie de la clause litigieuse de non concurrence ainsi que ceux visant à répondre à l'appel incident, et en adressant 26 nouvelles pièces dont des pièces comptables.
Les appelants ont répondu par des conclusions n°4 déposées le mercredi 4 juin 2025 à 18h08, veille de la clôture, et ont communiqué 5 nouvelles pièces : l'attestation de l'expert-comptable de la société Staff courtage susévoquée déjà mentionnée dans ses écritures par l'intimée elle-même ainsi que, notamment, les conditions particulières d'un contrat AXA pour vérifier la date d'engagement de celle-ci (cf infra). Les autres pièces communiquées ne sont relatives qu'aux sommations de communiquer évoquées supra.
Dans la partie discussion de ces conclusions n°4, l'appelant a ajouté, par rapport aux conclusions déposées le 14 mai 2025 :
- un paragraphe page 47 et un paragraphe page 60 pour répondre succinctement aux commentaires de l'intimée sur l'exercice comptable 2024 de la société Staff courtage,
- 8 lignes page 73 pour évoquer de nouveau le refus de communiquer les contrats de travail complet de deux salariés,
- page 75 à 82, des nouveaux paragraphes ayant trait pour l'essentiel à des discussions d'analyse factuelle sur les exemples pris par l'intimée (dont certains nouveaux) pour démontrer la souscription de contrats d'assurance en violation de la clause litigieuse. Les appelants reprennent leur argumentaire pour dire que ces contrats ont été conclu postérieurement à la fin de l'engagement de non-concurrence de M. [O]. C'est notamment dans ce cadre que la pièce relative au contrat AXA ci-dessus évoquée a été communiquée. Il est toutefois noté que malgré le trait de marge les identifiant comme nouveaux, de nombreux paragraphes étaient pourtant déjà compris dans les conclusions du 14 mai 2025. De la même manière, le paragraphe page 82 marqué comme ajouté, comprend également pour partie des arguments de réponse déjà compris dans leurs précédentes écritures avec une actualisation relative à la prise en compte du résultat de l'exercice 2024 de la société Staff courtage,
- page 92 et 93, 5 lignes évoquent de manière redondante l'absence de communication du bilan ABE 2024 pour appuyer l'argument de la carence probatoire de la société ABE pour justifier de son préjudice.
Aucune demande de report de clôture n'a été formalisée par l'intimée à la suite du dépôt de ces conclusions avant son prononcé.
Le lendemain matin, jour de la clôture mais avant le prononcé de celle-ci, les appelants ont déposé à nouveau des conclusions, intitulées « conclusions récapitulatives n°4 ». Aucune nouvelle pièce n'a été communiquée.
Ces nouvelles conclusions comportent, page 67, un paragraphe de onze lignes pour contester le calcul réalisé par la société ABE concernant la part d'assurance construction de l'activité de la société Staff courtage.
Il en résulte que la remise par les appelants, juste avant la clôture, de conclusions ne comportant aucune nouvelle demande, ajoutant quelques paragraphes explicatifs, parmi 101 pages d'écritures, qui ne font que reprendre pour l'essentiel des arguments à l'appui de moyens déjà débattus, et accompagnées de la communication de pièces non déterminantes dont l'une, l'attestation de l'expert-comptable, plus importante, avait déjà fait l'objet d'analyses de la part de l'intimée, n'a pas porté atteinte au principe de la contradiction.
En conséquence, il convient de rejeter la demande de rejet des « conclusions n°4 » et des « conclusions récapitulatives n°4 » des appelants, lesquelles seront déclarées recevables.
Les dernières conclusions déposées le 5 juin 2025 seront prises en compte.
La société CJAD Invest, M. [O] et la société Staff courtage demandent à la cour de :
- recevoir la société CJAD Invest, M. [Y] [O] et la société Staff courtage en leur appel du jugement en date du 05 février 2024 rendu par le tribunal de commerce de Nantes, le dire bien fondé, et y faisant droit,
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
o * Rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
o * Rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de président de STAFF COURTAGE ;
o * Débouté la société ABE de toutes ses autres demandes,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
o * Condamné la société ABE à verser à Monsieur [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 euros en raison de la faute contractuelle provoquée par la divulgation de pièces confidentielles,
o * Constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
o * Jugé que Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST ont violé l'engagement de non-concurrence intégré au protocole du 15 septembre 2021,
o * Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
o * Jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime à son application en l'état,
o * Condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommage-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 euros par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
o * Dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
o * Débouté Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST de toutes leurs autres demandes, y compris reconventionnelle,
o * Dit n'y avoir pas lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision
à intervenir,
o * Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST à payer à la société ABE la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
o * Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST aux dépens dont frais de greffe liquidés à 100.32 euros toutes taxes comprises,
Ce faisant la décision est également critiquée en ce qu'elle comporte une confusion entre les motifs et le dispositif ayant justifié le dépôt devant le tribunal de commerce de Nantes d'une requête en interprétation et rectification d'erreur matérielle rédigée comme suit :
- interpréter les chefs de jugement suivants inscrits dans le dispositif du jugement en date du 05 février 2024 (RG n°2023004058) rendu par le tribunal de commerce de Nantes :
* Juger que la clause est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace, et donc illégitime en son application en l'état ;
* Condamne M. [O] et la société CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommage ouvrage) sur les départements de la [Localité 7] Atlantique et de l'Ille et Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024 »
- rectifier l'erreur matérielle affectant le jugement rendu le 5 février 2024 par le tribunal de commerce de Nantes (RG n°2023004058) en modifiant l'erreur matérielle affectant le chef de jugement suivant :
* Condamne M. [O] et la société CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommage ouvrage) sur les départements de la [Localité 7] Atlantique et de l'Ille et Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024 ».
De la manière suivante : « Condamne M. [O] et la société CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommage ouvrage) sur les départements de la [Localité 7] Atlantique et de l'Ille et Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2023 ».
Et statuant à nouveau,
Au préalable,
- rejeter des débats la pièce adverse n°6 intitulée « accord de confidentialité » communiquée par la société ABE, dont la divulgation était interdite aux termes d'un accord de confidentialité,
- juger l'existence d'une faute caractérisée commise par la société ABE consistant à verser aux débats un accord de confidentialité, de nature à engager sa responsabilité contractuelle,
- condamner la société ABE au paiement de la somme de 20.000 € au profit de la société Staff courtage au titre de la violation délibérée des termes de l'accord de confidentialité,
A titre principal, concernant le défaut de validité de la clause de non-concurrence post-contractuelle :
- juger la clause de non-concurrence litigeuse disproportionnée au regard de son périmètre géographique extrêmement large correspondant à la France entière,
- juger la clause de non-concurrence litigeuse disproportionnée au regard de sa durée d'application de 3 ans et 3 mois,
- juger que la clause de non-concurrence litigieuse est disproportionnée au regard de la généralité des termes employés, et quant aux intérêts réels et légitimes des sociétés ABE et Courtage assur à protéger,
- juger la clause de non-concurrence litigeuse disproportionnée en ce qu'elle prive M. [O] de toute possibilité d'exercer une activité dans son domaine de compétence, à savoir le secteur de l'assurance construction,
- juger que la clause de non-concurrence litigieuse est dépourvue de toute validité, car ne respectant pas les conditions de validité édictées par la jurisprudence en la matière,
- juger nulle et de nul effet la clause de non-concurrence post-contractuelle stipulée aux termes du protocole de cession régularisé le 15 septembre 2021,
Et en conséquence de la nullité de la clause de non-concurrence
litigieuse :
- juger que l'application de la clause de non-concurrence litigieuse a privé M. [O] de la possibilité de poursuivre une activité professionnelle dans le domaine de l'assurance construction pendant 3 ans et 3 mois, alors que cette clause est nulle et de nul effet,
- juger que l'application de cette lause de non-concurrence illicite a généré un préjudice économique certain souffert par M. [O], au titre du manque à gagner correspondant au développement d'une activité en matière d'assurance construction,
- condamner la société ABE au paiement de la somme de 142.757,41 € au profit de M. [O] au titre de la marge que ce dernier aurait dû générer pendant 3 ans et 3 mois s'il avait été en mesure de poursuivre une activité professionnelle dans son domaine de compétence de l'assurance construction,
A titre subsidiaire, et si par extraordinaire, la cour d'appel de céans jugeait la clause litigieuse valable :
- juger que les activités exercées par la société Staff courtage à la date de signature du protocole de cession en date du 15 septembre 2021, renfermant la clause litigieuse, étaient exploitées auprès d'une clientèle distincte que celle composant le portefeuille de clients des sociétés ABE et Courtage assur, et qu'elles ne contrevenaient pas aux intérêts des sociétés ABE et Courtage assur en cours à cette date,
- juger que les activités exercées par la société Staff courtage depuis la signature du protocole de cession renfermant la clause de non-concurrence litigieuse jusqu'à ce jour ne s'inscrivent pas en violation des termes de la clause de non-concurrence litigieuse,
- juger que M. [O] et la société CJAD Invest n'ont commis aucune violation de la clause de non-concurrence litigieuse,
- juger que la société ABE échoue à démontrer l'existence des préjudices dont elle demande réparation, tant dans leur principe que dans leur quantum,
En tout état de cause :
- condamner la société ABE au paiement de la somme de 30.000 € au profit de la société Staff courtage au titre de la violation délibérée des termes de l'accord de confidentialité,
- juger que les multiples actions judiciaires et actions hostiles réalisées par les dirigeants du Groupe ABE ont généré un préjudice moral certain souffert par M. [O],
- condamner la société ABE au paiement de la somme de 50.000 € au profit de M. [O] au titre du préjudice moral,
- débouter la société ABE de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre de la société Staff courtage, M. [O] ou la société CJAD Invest,
Et rejetant toute demande contraire comme irrecevable et en toute hypothèse mal fondée,
- condamner la société ABE à payer à M. [O], la société CJAD Invest et la société Staff courtage la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société ABE aux entiers dépens de première instance et d'appel en vertu de l'article 699 du code de procédure civile.
La société ABE demande à la cour de :
- juger irrecevables, comme nouvelles au stade de l'appel, les demandes et développements se rapportant à la première partie de la clause, dont la validité ne peut donc pas être mise en doute,
- juger irrecevables, comme tardifs, au visa de l'article 641 du code de procédure civile, et pièces, tous les développements des appelants visant à répondre à l'appel incident inclus aux conclusions de la société ABE notifiées le 3 septembre 2024.
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nantes le 5 février 2024 en ce qu'il a :
Constaté que la clause de non-concurrence n=est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
Jugé que Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST ont violé l'engagement de non-concurrence intégré au protocole du 15 septembre 2021,
Débouté Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST de toutes leurs autres demandes, y compris reconventionnelles,
Dit n'y avoir pas lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision à
intervenir,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
Rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
Condamné la société ABE à verser à Monsieur [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 € en raison de la faute contractuelle provoquée par la divulgation de pièces confidentielles,
Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de seulement 20.000 € à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
Jugé disproportionnée dans le temps et dans l'espace la clause de
non-concurrence,
Rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de Président de STAFF COURTAGE,
Condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 € par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
Débouté la société ABE de toutes ses autres demandes,
En conséquence et statuant à nouveau :
- juger que la clause de non-concurrence insérée au protocole conclu le 15 septembre 2021 entre la société ABE d'une part, et M. [O] et la société CJAD Invest d'autre part, est valide,
En conséquence :
- condamner M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage in solidum, ou bien l'une ou l'autre, à verser à la société ABE une somme
de 740 000 € à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi du fait de la violation de la clause de concurrence,
A titre subsidiaire sur cette demande, si toutefois la cour devait juger ne pas être suffisamment éclairé sur le préjudice subi, et sans que cela puisse être reproché à la société ABE :
- allouer une somme de 300 000 € à titre de réparation partielle,
Et avant-dire droit sur les préjudices uniquement :
- désigner tel expert judiciaire qui lui plaira avec mission :
De se faire remettre par les parties ou tout tiers l'ensemble des éléments, documents, et informations qu'il estimera utiles ou nécessaires à l'exécution de sa mission ;
D'interroger toute personne, y compris les salariés de STAFF COURTAGE, Monsieur [C], les co-contractants, et les tiers,
D'évaluer quelle aurait été l'incidence de l'acquisition par ABE de 100% du capital de la société STAFF COURTAGE, au niveau de la contribution future aux résultats, sur quatre exercices à compter de l'exercice 2023,
D'évaluer plus généralement évaluer l'ensemble des gains et économies probables réalisées par ABE à ce titre, sur cette même période 2023-2026,
D'évaluer le chiffre d'affaires réalisé par la société STAFF COURTAGE, depuis sa prise de contrôle par Monsieur [O], ou encore via la société ASSUR & MOI, en lien avec des clients ABE ou avec le domaine de l'assurance de construction, et des perspectives de chiffre d'affaires dans ce même domaine découlant des agissements interdits commis jusqu'au 31 décembre 2024,
D'évaluer les préjudices soufferts par la société ABE, tant patrimonial qu'extra patrimonial,
Répondre à tous dires écrits des parties et au besoin, entendre tous
sachants,
Rédiger un pré-rapport, le soumettre aux parties et leur laisser un délai d'un mois minimum aux fins de communication de leurs observations,
Fixer à 1 500 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert et dire que la consignation devra intervenir dans les quinze jours de la demande faite par le Greffier,
Dire que les opérations d'expertise devront commencer à compter de la notification de la consignation de la provision,
Dire que l'expert dressera de ses opérations un rapport qu'il devra déposer au Greffe dans les quatre mois de la date de notification de la consignation de la provision,
En tout état de cause :
- condamner M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage , in solidum ou bien l'un à défaut des autres, à payer la somme de 78 000 euros au titre des frais dont le montant a été justifié, conformément à l'article 9 du protocole, avec intérêt de 5%,
- débouter M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage in solidum à payer à la société ABE la somme de 100 000 € au titre des frais sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ou bien 20 000 € si la Cour fait droit à la demande présentée ci-dessus pour 78 000 €,
- confirmer M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage in solidum aux dépens.
Il est renvoyé aux dernières écritures des parties visées supra pour l'exposé complet de leurs moyens et prétentions.
DISCUSSION
Il est rappelé qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile dans sa version applicable à l'instance, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
La cour ne répondra pas aux éventuelles demandes, moyens et arguments mentionnés dans la partie de l'exposé du litige et de la procédure dans les écritures des parties, non reprises dans la partie discussion et au dispositif.
Cependant, la cour est tenue d'examiner d'office la demande de « juger irrecevables, comme tardifs, au visa de l'article 641 code de procédure civile, et pièces [sic], tous les développements des appelants visant à répondre à l'appel incident inclus aux conclusions de la société ABE notifiées le 3 septembre 2024 ».
En effet, selon l'article 910 du code de procédure civile, dans sa version applicable au litige,
« L'intimé à un appel incident ou à un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite pour remettre ses conclusions au greffe. »
L'irrecevabilité n'a pas été soulevée devant le conseiller de la mise en état ni relevé d'office par celui-ci. Il appartient à la cour de répondre à la demande.
Les appelants ne répondent pas sur cette demande.
Il apparaît que la société ABE a formé appel incident dans le délai qui lui était imparti, par conclusions déposées le 3 septembre 2024.
Les appelants ont déposé leurs conclusions postérieures le 4 décembre 2024, soit, en application des règles de calcul des délais fixées par l'article 641 du code de procédure civile, un jour après le délai imparti par l'article 910 susvisé.
Les conclusions tardives de l'appelant, intimé à un appel incident, ne sont irrecevables qu'en tant qu'elles ne développent pas son appel principal. La cour doit rechercher si ces conclusions répondaient à l'appel incident ou si elles n'étaient pas destinées au moins en partie à développer l'appel principal.
L'appel incident tend à l'infirmation du jugement en ce qu'il a :
1- rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
2 - Condamné la société ABE à verser à Monsieur [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 euros en raison de la faute contractuelle provoquée par la divulgation de pièces confidentielles,
3 - Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
4 - Jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime en son application en l'état,
5 - rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y]
[O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de
STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de Président de STAFF COURTAGE,
6 - Condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 euros par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
7 - Dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
8 - Débouté la société ABE de toutes ses autres demandes,
Il s'agit pour les chefs de jugement critiqués ci-dessus 2, 3, 4 et 7 de demandes d'infirmation déjà formées par les appelants pour lesquels ceux-ci avaient développé moyens et arguments dans leurs conclusions antérieures. Aucune irrecevabilité n'est retenue.
Pour les chefs de jugements critiqués ci-dessus 5 et 6, les nouveaux arguments développés par les appelants dans leurs conclusions postérieures à celles de l'intimée, qui tendent seulement à écarter une indemnisation supérieure ou les sanctions au titre de la violation de la clause de non concurrence, ne sont que la conséquence de leurs demandes d'infirmation au titre de l'appel principal. Aucune irrecevabilité n'est retenue.
Quant au chef de jugement critiqué 1 ci-dessus, les appelants ayant sollicité une somme plus importante au titre de la violation de l'accord de confidentialité par leur appel principal, leurs arguments étaient également déjà pour partie dans les débats. Aucune irrecevabilité n'est retenue.
Ils convient de rejeter la demande de « juger irrecevables, comme tardifs, au visa de l'article 641 code de procédure civile, et pièces [sic], tous les développements des appelants visant à répondre à l'appel incident inclus aux conclusions de la société ABE notifiées le 3 septembre 2024 »
La clause de non-concurrence
Le protocole de cession du 15 septembre 2021 stipule en son article 7.5 « engagement de non-concurrence » :
« L'assurance relative aux métiers de la construction représente le c'ur de métier des sociétés Courtage assur et ABE.
Aussi, comme conséquence de la réalisation de la cession, à peine de dommages-intérêts et sans préjudice du droit de faire cesser toute infraction à cette interdiction, les cédants s'interdisent, de quelque manière et de quelque façon que ce soit, pour lui-même ou pour le compte de tiers, jusqu'au 31 décembre 2024 :
- d'approcher ou de conseiller en matière d'assurance tant en qualité d'intermédiaire d'assurance, de salarié, de commissionnaire ou de mandataire avec ou sans souscription de contrats à la clé, les clients actuels des sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE,
- de conseiller en matière d'assurance construction, dont l'assurance dommage ouvrage et l'assurance responsabilité civile décennale tant en qualité d'intermédiaire d'assurance, de salarié, de commissionnaire, d'indicateur ou de mandataire des entreprises sur le secteur de la France métropolitaine.
Les cédants s'engagent à respecter l'ensemble des dispositions de cet article sauf dérogation accordée préalablement par tous les cessionnaires.
La présente clause de non-concurrence ne saurait être considérée comme caduque au motif qu'elle ne prévoit pas de contrepartie financière dès lors qu'elle ne s'inscrit pas dans le cadre et ne trouve pas sa cause dans un contrat de travail.
Plus généralement, les cédants s'obligent au titre de cette clause de non-concurrence à une attitude loyale à l'égard des cessionnaires et des sociétés. »
Sur la demande de « juger irrecevables, comme nouvelles au stade de l'appel, les demandes et développements se rapportant à la première partie de la clause, dont la validité ne peut donc pas être mise en doute »
Il se déduit des écritures de l'intimée, qu'il est reproché aux appelants de critiquer la première partie de l'interdiction posée par la clause susvisée pour en contester la validité, ce qu'ils n'auraient pas fait en première instance.
L'article 564 du code de procédure civile dispose :
« A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
L'article 565 du même code précise cependant :
« Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. »
Aux termes du jugement, M. [O] et les société CJAD Invest et Staff courtage demandaient la nullité de la clause de non-concurrence.
Les appelants demandent à la cour l'infirmation du jugement notamment en ce qu'il a « constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence » et en ce qu'il a « jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée » sans en tirer la conséquence de la nullité, et prétendent à la nullité de la clause.
Il ne s'agit donc pas d'une demande nouvelle et les appelants sont en droit de présenter des nouveaux moyens ou arguments pour la soutenir.
Cette demande d'irrecevabilité est rejetée.
Sur la validité de la clause
Le tribunal ne pouvait réduire le champ d'application de la clause de non-concurrence dès lors que seule sa nullité était invoquée par M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage en cas d'illicéité de la clause.
Pour ce seul motif, le jugement sera infirmé en ce qu'il a :
- constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
- jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime en son application en l'état,
- rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de président de STAFF COURTAGE,
- condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 i par mois de retard à compter d' un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
- dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage font valoir que la clause de non-concurrence est nulle au motif principal de sa disproportion. Ils soulignent que la clause, qui présente un caractère doublement contraignant, n'a pas uniquement pour but de protéger une clientèle en place et les intérêts légitimes de la société ABE, et qu'elle interdit à M. [O] l'exercice d'une activité au périmètre extrêmement large, rendant impossible une activité professionnelle dans son domaine de compétence, sans limitation suffisante dans le temps et dans l'espace.
En application de l'article 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Il résulte de ces articles et du principe de la liberté d'entreprendre qu'une clause de non-concurrence, conclue par un dirigeant ou un associé à l'occasion d'une cession de titres sociaux, n'est valable qu'à condition d'être limitée dans le temps et dans l'espace et d'être proportionnée aux intérêts légitimes à protéger.
L'appréciation de l'intérêt légitime du créancier de l'obligation de non-concurrence exige de vérifier si la clause est nécessitée par les risques concurrentiels que représente le débiteur à l'égard du créancier.
De manière plus générale, la clause de non-concurrence se trouve justifiée par la protection d'informations confidentielles, d'un savoir-faire ou d'une clientèle.
C'est au créancier qu'il revient d'établir son intérêt légitime.
L'acte de cession avait pour objet de transférer les titres détenus par M. [O] et la société CJAD Invest dans les sociétés [Localité 9] assur, ABE et Courtage assur.
Les titres de la société [Localité 9] assur et de la société Courtage assur ont été cédés à la société ABE elle-même ; ceux de la société ABE ont été repris par elle-même (par réduction de capital) et par M. [I] et [R]. Le prix fixé pour les titres des sociétés, hors SCI, était de 4 108 000 euros.
La clause de non concurrence insérée dans un acte de cession doit avoir pour objectif de limiter la possibilité pour les cédants d'exercer concurremment les activités objet des sociétés dont ils ont cédé les titres moyennant le prix de cession.
Les intérêts légitimes à protéger s'entendent de ceux existants ou prévisibles au moment de la rédaction et de l'acceptation de la clause.
En l'espèce, il s'agit uniquement des intérêts des trois sociétés cessionnaires lors de la conclusion du protocole. Il ne peut être fait référence aux intérêts actuels de la société ABE telle que recomposée après les diverses fusions intégrant, non seulement [Localité 9] assur et Courtage assur mais également des sociétés tierces, fusions non évoquées dans le protocole ni même en introduction de la clause elle-même.
S'agissant de la société [Localité 9] assur, il n'est pas contesté qu'elle était peu active lors de la cession et elle n'est pas évoquée en introduction de la clause de non-concurrence.
Il n'est pas discuté (p.35 conclusions appelants) que la société ABE avait développé une activité auprès de bureaux d'études et autres professions intellectuelles du bâtiment, pour leur couverture au titre de l'assurance en responsabilité civile décennale, à visée métropolitaine.
Il n'est pas plus discuté que la société Courtage assur, dont les titres détenus par M. [O] et la société CJAD Invest (43%) ont été repris par la société ABE, avait développé une activité auprès d'entreprises de travaux pour leur protection en responsabilité civile décennale.
M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage soutiennent toutefois que l'activité de la société Courtage assur était limitée à l'Ille et Vilaine et à la [Localité 7] Atlantique, et qu'elle ne s'adressait pas aux autres professions de la construction (promoteurs, professions intellectuelles etc).
La société ABE produit un post LinkedIn par lequel la société Courtage assur est présentée comme « experts de l'assurance des métiers du bâtiment (gros oeuvre et second oeuvre), nous travaillons main dans la main avec de nombreuses entreprises dans le grand ouest » (pièce 46).
Ce n'est qu'après la fusion des sociétés, postérieure à la cession, que le « groupe » ABE a communiqué sur le développement d'une activité pour « tous les professionnels du bâtiment », tel que revendiqué sur LinkedIn (pièce 46 3/3).
La société ABE produit encore un tableau (pièce 59), non daté, qui n'est pas présenté comme contemporain de la cession mais plutôt contemporain de la procédure (page 63 intimée), sur lequel elle dit avoir répertorié ses clients en France. La réalité des chiffres contenus n'est pas discutée par les appelants. Il apparaît que les 6 283 clients éparpillés sur l'ensemble du territoire national, sont situés, pour plus de la majorité en Ille et Vilaine (2257) et dans la [Localité 7] Atlantique (1328). Les départements du Morbihan (219) et des Côtes d'Armor (370) arrivent ensuite.
Ce tableau démontre au besoin que si la société ABE prospecte sur la France entière, son activité est toujours centrée sur deux départements principaux : Ille et Vilaine et [Localité 7] Atlantique.
La société ABE ne produit aucune autre information pour justifier de l'activité réelle de la société Courtage assur ou de la société ABE lors de la cession.
Il s'en déduit que l'intérêt légitime à protéger ne pouvait être qu'en lien avec les activités :
- liée à l'assurance construction,
- concernant la clientèle composée des professions intellectuelles du bâtiment sur toute la France métropolitaine,
- concernant la clientèle composée des entreprises de gros 'uvre et second 'uvre en Ille et Vilaine et [Localité 7] Atlantique, voire dans le Morbihan et en Côtes d'Armor.
Or la clause ne permettait aucune activité pour M. [O] en matière :
- d'assurance générale pour les clients actuels des sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE, soit dans un domaine de compétence non justifié par l'intimée,
- d'assurance construction sur la France métropolitaine, alors que des limitations territoriales s'imposaient pour l'assurance construction à l'égard des professions du gros 'uvre et second 'uvre,
et ce, de la réalisation de la cession prévue au protocole le 31 décembre 2021, et jusqu'au 31 décembre 2024, soit pendant trois ans.
Au jour de la cession, et selon le curriculum vitae produit, M. [O] avait acquis 12 ans d'expérience dans le domaine de l'assurance de la construction ; il avait auparavant travaillé dans des domaines plus variés de l'assurance.
De par son expérience dans le domaine de l'assurance de la construction à la SMABTP puis dans les sociétés dont les titres ont été cédés, M. [O] a démontré une capacité à développer les activités qui lui ont été confiées dans le cadre de la prospection et de la gestion des portefeuilles clients en matière d'assurance construction. Il a mis en place, à cet effet, des processus éprouvés. Il représentait, en cela, un fort risque concurrentiel pour les sociétés dont il a cédé les titres.
Toutefois, la clause de non concurrence en ce qu'elle excède les intérêts légitimes à protéger et imposait à M. [O] de renoncer à toute activité en matière d'assurance de construction, métier en soi en raison de sa technicité et qu'il exerçait depuis douze ans, à l'égard de tout professionnel du bâtiment (professions intellectuelles, gros 'uvre, second 'uvre) et limitait, en outre, son activité en matière d'assurance générale pour les groupes clients des sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE, ce, sur la France métropolitaine, et qui plus est, pour une durée de trois ans, est manifestement disproportionnée.
Il est relevé que M. [O], dans un courriel du 26 mai 2021, a, au cours des négociations en vue de la signature du protocole de cession, mentionné une « clause de non concurrence : trois ans », sans indiquer ce qu'elle pouvait recouvrir, et qui ne s'inscrivait que dans le cadre d'une valorisation des titres à 5 066 766 euros. Il ne peut en être déduit qu'il a proposé la clause telle que rédigée au protocole, sachant qu'il ressort des échanges de courriels entre les parties une négociation difficile compte tenu des dissensions antérieures, ni a fortiori qu'il ait renoncé à pouvoir invoquer le caractère illicite de la clause.
En conséquence, il convient de prononcer la nullité de la clause de non-concurrence.
Dès lors, la responsabilité contractuelle de M. [O] et de la société CJAD Invest ou délictuelle de la société Staff courtage au titre de la violation de la clause ne peut trouver à s'appliquer.
La société ABE a fait valoir un préjudice global au titre de la violation principale de la clause de non-concurrence et de ses conséquences. Sans qu'il soit besoin d'entrer dans le détail de son argumentation et en raison de l'illicéité de la clause, l'ensemble de ses demandes à titre de dommages et intérêts au titre de la violation de la clause de non-concurrence et au titre de l'article 9 du protocole (garantie du fait personnel) doivent être rejetées ainsi, a fortiori, que sa demande de provision et de désignation d'un expert judiciaire pour évaluer son préjudice.
Sur la demande reconventionnelle au titre de la violation d'un accord de confidentialité
La société Staff courtage fait valoir la responsabilité contractuelle par la société ABE pour la violation d'un accord de confidentialité conclu avec elle. Outre la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté « l'accord de confidentialité « lui-même et les « comptes sociaux de la société Staff courtage au 31 décembre 2021 produites par la société ABE », elle demande une indemnisation au titre de ladite violation.
Le droit à la preuve ne peut justifier la production d'éléments portant atteinte à un secret qu'à la condition que cette production soit nécessaire, ou indispensable, à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit proportionnée au but poursuivi et aux intérêts antinomiques en présence.
La société ABE produit un accord de confidentialité, non daté, signé entre la société Staff courtage et elle par lequel elle s'interdit * directement ou indirectement (par le biais d'une filiale ou holding ou partenaire) à compter de la signature du présent accord et pour une durée de trois ans (...) :
- toute communication à des tiers, courtiers, agents, compagnies, audit et/ou consultants des informations recueillies,
- toute utilisation ou cession des données confiées +.
Il n'est pas discuté que cet accord évoque diverses données économiques de la société Staff courtage, des informations sur sa clientèle et la réparation de son activité et qu'il y était annexé divers documents également soumis à la confidentialité dont le bilan clos au 31 décembre 2022 et celui clos au 31 décembre 2021.
Il n'est pas discuté par la société ABE que cet accord a été signé le 27 septembre 2022 de sorte que l'interdiction de divulgation courait jusqu'au 27 septembre 2025.
Il s'agit d'une interdiction de divulgation à tous tiers à l'accord, ce, en raison de l'insertion d'une virgule après « tiers » et non de deux points avant l'énumération, et surtout d'une interdiction d'utilisation des données confiées, l'ensemble impliquant l'interdiction de toute production en justice.
Il doit être vérifié si la production des pièces est nécessaire ou indispensable au litige, ce qui s'apprécie au regard des autres éléments de preuve disponibles.
S'agissant des « comptes sociaux de la société Staff courtage au 31 décembre 2021 » (pièce 15 devenue 54 en appel), la société ABE fait elle-même valoir dans ses écritures que « les bilans sont habituellement publiés au greffe ». Il lui appartenait donc de démontrer qu'ils avaient fait l'objet d'une demande de confidentialité auprès du greffe du tribunal de commerce et qu'elle ne pouvait les obtenir par un autre biais pour justifier d'un éventuel intérêt à les produire malgré l'accord de confidentialité. A défaut, la pièce 54 produite par ABE sera écartée des débats.
S'agissant des mentions de l'accord de confidentialité en lui-même ainsi que des deux pièces annexées (pièce 6 (l'accord), 6 bis (tableau risque/commission) et 6 ter (bilan 31/12/2022)), il appartenait à la société ABE de démontrer son impossibilité à obtenir les informations mentionnées par un autre biais que par la divulgation de l'accord.
Il est relevé que le bilan au 31 décembre 2022 a finalement été produit par les appelants. Cette pièce ne sera pas écartée des débats.
Pour le surplus, par le seul rappel des principes applicables en matière de preuve et de production de pièces soumises à la confidentialité, et de son intérêt à les produire, elle ne fait valoir aucune argumentation factuelle à ce titre dans ses écritures (p.99,100,101). En tout état de cause, la part de l'activité « assurance construction » de la société Staff courtage mentionnée dans l'accord de confidentialité, ressort des propres écritures des appelants ainsi que de celles déposées en première instance comme il sera vu ci-après.
Les pièces 6 et 6bis produites par ABE seront écartées des débats.
Le jugement de première instance sera infirmé afin de viser la bonne numérotation des pièces écartées.
Il est relevé qu'aucune sanction n'était prévue par l'accord en cas de violation de celui-ci.
La société Staff courtage réclame le paiement d'une somme de 20 000 euros en raison de cette violation, en alléguant l'existence d'un « préjudice certain », sans préciser sa nature, résultant de la divulgation des informations sur lesquelles elle a bâti son modèle économique.
Ce disant, elle ne justifie pas que la divulgation d'informations à la seule destination de la justice ait pu lui causer un préjudice économique voire même moral.
Le rejet des pièces suffit à éviter toute révélation d'informations du secret des affaires par une décision de justice.
Le jugement de première instance sera infirmé en ce qu'il a condamné la société ABE à payer une somme de 5 000 euros à la société Staff courtage et le surplus de la demande sera rejeté.
Sur la demande reconventionnelle de M. [O] aux fins d'indemnisation au titre d'un manque à gagner
M. [O] fait valoir un manque à gagner résultant de l'application d'une clause de non concurrence illicite en ce qu'il n'a pu générer un chiffre d'affaires dans son domaine de compétence et se dégager une juste rémunération depuis septembre 2021. Il considère que ce manque à gagner correspond à une perte de marge brute correspondant elle-même à la marge qu'il aurait pu atteindre s'il avait pu développer une activité en matière de construction, par comparaison avec le chiffre d'affaires moyen qu'il générait pour la société Courtage assur.
La société ABE fait valoir que M. [O] n'a pu subir aucun préjudice économique puisqu'il n'a, de facto, pas tenu compte de la clause de non-concurrence.
L'étendue du préjudice subi par le débiteur d'une clause de non-concurrence annulée s'apprécie à l'aune de la violation éventuelle de ladite clause pendant la période de son application. Il appartient au créancier de la clause de démontrer l'effectivité de la violation.
Il est rappelé que M. [O] et la société CJAD Invest ont acquis les titres de la société Staff courtage le 3 février 2023.
A cette date, les statuts de la société Staff courtage prévoyaient que celle-ci avait pour objet divers pans de l'assurance en générale mais également « les assurances de dommages » dont la garantie du constructeur, ou encore les « assurances construction ». Ces statuts, mis à jour selon assemblées générales du 28 juin 2024, ont maintenu cet objet social.
Dans les conclusions n°3 des appelants, produites devant le tribunal et versées aux débats par la société ABE, ceux-ci intégraient un tableau de ventilation du portefeuille de la clientèle de la société Staff courtage établissant que sur le volume de commissions total (150 744,85 euros), le volume de commissions pour la protection tout risque chantier, l'assurance responsabilité civile décennale, responsabilité civile promoteur, dommages-ouvrage et multirisques * Cmistes + s'élevait à un montant total de 82 734,05 euros.
Les appelants soutiennent que ce tableau correspond à l'état des commissions pour l'exercice 2022, soit avant le rachat de la société Staff courtage ; ils ne sont pas démentis sur ce point.
Il apparaît qu'au jour du rachat, M. [O] avait une parfaite connaissance de ce qu'il devrait s'impliquer dans une société dont l'objet social et l'activité effective était contraire aux interdictions posées par la clause de non-concurrence.
Les appelants font valoir que M. [O] ou la société CJAD Invest n'ont pu tirer profit du fait que la société Staff courtage a signé des contrats d'assurance dommages-ouvrage ou tout risque chantier avant son rachat. Si M. [O] n'a pu en tirer de commissions, la conclusion de ces contrats participaient à l'économie générale de la société Staff courtage et à la constitution de sa clientèle. Or, la clause de non-concurrence susvisée ne lui interdisait pas seulement de conclure des contrats mais lui interdisait, de fait, toute participation dans la gestion des contrats relatifs à l'assurance construction.
Par ailleurs, les appelants admettent que la société Staff courtage a signé, depuis le rachat, des contrats responsabilité civile décennale pour une clientèle du Sud de la France, en contravention avec la clause de non-concurrence.
Ils admettent encore que la société Staff courtage a souscrit des contrats d'assurance construction avec des acteurs du secteur de la construction tels des constructeurs de maison individuelle.
Au 31 décembre 2023, le chiffre d'affaires de la société Staff courtage est demeuré quasiment identique à celui de l'exercice précédent (180 335 euros au lieu de 182 338 euros). Si le résultat d'exploitation est négatif c'est en raison de l'augmentation des charges sociales du personnel. (Pièce 21 bis)
Selon la seule attestation de l'expert-comptable de la société Staff courtage, puisque le bilan n'a pas été produit, le chiffre d'affaires au 31 décembre 2024 a atteint 232 976 euros.
Le chiffre d'affaires de la société Staff courtage a ainsi fortement progressé. Le résultat net un temps négatif en 2023, est redevenu positif au 31 décembre 2024, à hauteur de 40 272 euros.
Par ailleurs, il apparaît que la société CJAD Invest a constitué une société Assur et moi le 28 mai 2022 ayant pour objet le conseil, le courtage et la gestion d'assurances pour les particuliers, professionnels et entreprises.
La société ABE justifie par diverses pièces de ce que la société Staff courtage directement ou par l'intermédiaire de la société Assur et moi a soit récupéré des clients ABE soit démarché des clients potentiels en matière d'assurance construction avant l'échéance de la clause de non-concurrence.
Pour exemple :
- Yisi par mandat de remplacement du 19 avril 2024,
- M. [T] par mandant de remplacement du 20 septembre 2024,
- Saladino group par l'intermédiaire de la société Assur et moi (négociation antérieure au 1er janvier 2025),
- Qualispace services selon mandat de remplacement du 28 octobre
2024.
Les appelants soutiennent que le point de départ des nouveaux contrats étaient postérieurs à l'expiration de la clause de non-concurrence et couraient donc à compter du 1er janvier 2025, ce qui justifierait, pour ne pas perdre une année d'engagement, les démarches antérieures auprès de potentiels clients.
Toutefois, ces démarches participent bien d'une violation de la clause.
L'ensemble de ces éléments permet de considérer que malgré la clause de non-concurrence, M. [O] et la société CJAD Invest ont réussi à maintenir une activité dans le domaine de l'assurance de la construction, limitant d'autant l'impact de l'illicéité de ladite clause.
Toutefois, cette clause illicite a nécessairement freiné les capacités d'expansion de M. [O] et de ses sociétés et de fait, la rémunération à laquelle pouvait prétendre M. [O], seul demandeur à l'indemnisation.
Ses revenus en qualités d'associé et/ou gérant selon les avis d'imposition sur les revenus 2022 et 2023, sont faibles ou inexistants.
Il n'est pas contesté par l'intimée que M. [O] bénéficiait avant la cession de contrats de mandat de sous-courtier et de sous-agent lui permettant de bénéficier d'une rémunération par rétrocession de commissions à hauteur, à ses dires, de la moitié du chiffre d'affaires réalisé.
Les appelants justifient des états comptables de « l'entreprise [O] [Y] » révélant qu'il générait au titre de ces commissions un chiffre d'affaires moyen annuel entre 2015 et 2021 de 99 830 euros.
Il n'est pas non plus contesté que la marge brute réalisée par la société Staff courtage s'établissait à 56 % du chiffre d'affaires tel qu'attesté par son expert-comptable.
Il en déduit qu'il aurait pu bénéficier, sans la clause, d'une marge brute, qu'il convient de rapporter à trois ans et non à trois ans et trois mois, de 131 776 euros.
Il doit toutefois être tenu compte du fait que M. [O] ne justifie pas qu'il aurait été en mesure de retrouver immédiatement une activité professionnelle de même nature, lui permettant d'atteindre une telle somme, dès la réalisation de la cession. Il doit également être tenu compte du fait qu'il a, par le non-respect de la clause de non concurrence, permis à la société qu'il a acquise, si ce n'est de dégager un résultat important, à tout le moins de développer son chiffre d'affaires augurant des perspectives encourageantes à venir.
En conséquence, au vu de l'ensemble de ces éléments et en tenant compte de l'imprécision des chiffres soumis à l'analyse, et notamment de l'absence de bilan comptable 2024 pour la société Staff courtage, voire pour la société Assur et moi, il convient de lui allouer une somme de 20 000 euros.
La société ABE sera condamnée à payer cette somme de 20 000 euros à M. [O] au titre de l'indemnisation de l'application de la clause de non concurrence illicite et le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de cette demande reconventionnelle.
Sur la demande reconventionnelle de M. [O] d'indemnisation d'un préjudice moral résultant des « actions judiciaires et des actions hostiles » de la société ABE
M. [O] fait valoir qu'outre la présente procédure, la société ABE a retenu abusivement le restant dû du prix de cession, ce qui l'a contraint à agir devant le tribunal de commerce de Nantes, puis l'a assigné en liquidation de l'astreinte, le fragilisant à titre personnel et économiquement.
Ce disant, alors au surplus que la cour n'est pas saisie, dans la présente instance, des autres litiges mentionnés, M. [O] ne démontre aucune intention malveillante ou hostile à dessein de la société ABE, seule à la cause à l'exclusion de ses associés, ni d'abus de celle-ci dans la défense de ses droits.
En outre, le certificat médical du 16 février 2024 relevant une asthénie de M. [O] qui ne fait que reprendre ses propres explications, est insuffisant à établir le lien de causalité avec le comportement de la société ABE.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de M. [O] au titre d'un préjudice moral.
Dépens et frais irrépétibles
La société ABE succombe principalement à l'instance.
Il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société CJAD Invest et M. [O] aux dépens et frais irrépétibles.
La société ABE sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Il convient de condamner à la société ABE à payer à M. [O], la société CJAD Invest et la société Staff courtage, ensemble, la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Rejette la demande de la société ABE d'irrecevabilité des conclusions des appelants des 4 et 5 juin 2025,
Rejette la demande de la société ABE de « juger irrecevables, comme tardifs, au visa de l'article 641 code de procédure civile, et pièces, tous les développements des appelants visant à répondre à l'appel incident inclus aux conclusions de la société ABE notifiées le 3 septembre 2024 »,
Rejette la demande de la société ABE de « juger irrecevables, comme nouvelles au stade de l'appel, les demandes et développements se rapportant à la première partie de la clause, dont la validité ne peut donc pas être mise en doute »,
Infirme le jugement en ce qu'il a :
- rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
- condamné la société ABE à verser à M. [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 euros en raison de la faute contractuelle provoquée par divulgation de pièces confidentielles,
- constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
- jugé que M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST ont violé leur engagement de non-concurrence intégré au protocole du 15 septembre 2021,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
- jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime en son application en l'état,
- rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de président de STAFF COURTAGE,
- condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 euros par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
- dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
- rejeté la demande d'indemnisation de M. [O] au titre de l'illicéité de la clause de non concurrence,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST à payer à la société ABE la somme de 5 000 euros par application des dispositions de 1'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST aux dépens,
Confirme le jugement pour le surplus des dispositions soumises à la cour,
Prononce la nullité de la clause de non-concurrence inscrite au protocole de cession du 15 septembre 2021,
Rejette l'ensemble des demandes de la société ABE au titre de la violation de la clause de non-concurrence,
Rejette des débats les pièces 6, 6bis et 54 produites par la société ABE,
Rejette la demande de la société Staff courtage d'indemnisation au titre de la violation de l'accord de confidentialité,
Condamne la société ABE à payer à M. [Y] [O] une somme de 20 000 euros au titre de l'indemnisation de l'application de la clause de non concurrence illicite,
Condamne la société ABE aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne la société ABE à payer à M. [Y] [O], la société CJAD Invest et la société Staff courtage, ensemble, la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles,
Rejette toute autre demande des parties,
Le Greffier, Le Président,
ARRÊT N°318
N° RG 24/01338 - N° Portalis DBVL-V-B7I-USNS
(Réf 1ère instance : 2023004058)
M. [Y] [O]
E.U.R.L. CJAD INVEST
S.A.S. STAFF COURTAGE
C/
S.A.R.L. ABE
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me VERRANDO
Me RINEAU
Copie certifiée conforme délivrée
le :
à : TC de [Localité 8]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Sophie RAMIN, Conseiller,
Assesseur : Madame Cécile HALLER, Conseillère, désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Rennes du 26 mai 2025
GREFFIER :
Madame Frédérique HABARE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 10 juin 2025, devant M. Alexis CONTAMINE, Président de chambre, et Madame Sophie RAMIN, Conseillère, magistrats tenant seuls l'audience en la formation double rapporteurs, sans opposition des parties, et qui ont rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 04 novembre 2025, après avoir été prorogé le 23 Septembre 2025, par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur [Y] [O]
né le 21 Septembre 1985 à [Localité 11]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Camille SUDRON substituant Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Julia LEVEQUE substituant Me Anne Sophie FINOCCHIARO de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau D'ANGERS
E.U.R.L. CJAD INVEST
immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le n°840 710 438, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Camille SUDRON substituant Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Julia LEVEQUE substituant Me Anne Sophie FINOCCHIARO de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau D'ANGERS
S.A.S. STAFF COURTAGE
immatriculée au RCS de [Localité 8] sous le n°499 204 816, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Camille SUDRON substituant Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Julia LEVEQUE substituant Me Anne Sophie FINOCCHIARO de la SELAS FIDAL, Plaidant, avocat au barreau D'ANGERS
INTIMÉE :
S.A.R.L. ABE
immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n°805 155 884, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Bernard RINEAU de la SELARL TURENNE AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES
M. [F] a créé les sociétés [Localité 9] assur et Courtage assur.
La société [Localité 9] assur exerce l'activité d'agent général d'assurances et est propriétaire de droits de créances afférents à un portefeuille d'agent général de la compagnie Gan exploité à [Localité 9] (35) et [Localité 10] (44).
La société Courtage assur a pour activité le courtage en assurances et en financements et est propriétaire d'un portefeuille de courtage d'assurance qu'elle exploite à [Localité 9] et [Localité 10].
En 2012, M. [O] qui travaillait pour la SMABTP a été recruté pour développer l'activité de ces sociétés dans la région nantaise.
En 2014, la société ABE a été créée ; elle a pour activité le courtage et l'intermédiation en assurances et l'intermédiation financière. Elle est également propriétaire d'un portefeuille de courtage en assurance qu'elle exploite à [Localité 10]. Sa création avait pour objectif, notamment, de développer une branche spécialisée de l'assurance construction auprès de l'ingénierie du BTP, et plus généralement des professions intellectuelles du bâtiment.
M. [O] a pris des participations dans les sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE (ainsi que des parts de SCI) soit directement soit au travers de la société CJAD Invest.
Il est devenu le gérant de la société Courtage assur.
Le 15 septembre 2021, en raison de dissensions entre associés majoritaires, un protocole de cession de titres des sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur, ABE et des SCI Ker [Localité 9] et Ker [Localité 10], détenus par M. [O] et sa société CJAD Invest, cédants, a été conclu au profit de la société ABE et de MM. [F], [N], [I] et [R], cessionnaires.
La date de réalisation de la cession était fixée au 31 décembre 2021.
Par le protocole, M. [O] s'engageait à quitter ses fonctions de gérant de la société Courtage assur moyennant rémunération de l'exercice 2021.
Ce protocole a prévu un « engagement de non concurrence » des cédants :
- avec une interdiction d'approcher ou de conseiller en matière d'assurance les clients de [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE,
- et une interdiction de conseiller en matière d'assurance construction (dommage-ouvrage et responsabilité civile décennale) tant en qualité d'intermédiaire d'assurance, de salarié, de commissionnaire, d'indicateur ou de mandataire des entreprises sur le secteur de la France métropolitaine jusqu'au 31 décembre 2024.
Postérieurement à ce protocole et selon le registre national des entreprises produit de la société ABE, la société ABE a absorbé à compter du 4 juillet 2022 les sociétés Courtage assur, Invest Vie et RV Courtage.
Il n'est pas contesté que la société [Localité 9] assur a également été absorbée par la société ABE postérieurement au protocole de cession.
Par convention de cession du 3 février 2023, M. [O] et la société CJAD Invest ont acquis la majorité des titres d'une société Staff courtage à [Localité 8] ayant pour activité le courtage en assurance toute branche. M. [O] en est devenu le président.
Par lettre du 14 avril 2023, la société ABE venant aux droits des sociétés [Localité 9] assur et Courtage assur après fusion, a mis en demeure M. [O], en son nom et en qualité de gérant de la société CJAD Invest, afin qu'il procède sous 20 jours à la cession de l'intégralité des actions détenues par l'intermédiaire de la société CJAD Invest au capital de la société Staff courtage, qu'il démissionne de son mandat de président et cesse toute activité directe ou indirecte au service de cette dernière. Il lui était également demandé une indemnité de 400 000 €.
Par lettre recommandée du 11 mai 2023, la société ABE a mis en demeure la société Staff courtage de cesser toutes ses activités en matière de courtage et de conseil en assurance construction.
Le 22 mai 2023, sur autorisation du président du tribunal de commerce de Nantes, la société ABE a assigné M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage à bref délai aux fins, notamment, de cessation de leur activité en violation de l'engagement de non-concurrence et d'indemnisation.
Par jugement du 5 février 2024, le tribunal de commerce de Nantes a :
- rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
- condamné la société ABE à verser à M. [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 € en raison de la faute contractuelle provoquée par divulgation de pièces confidentielles,
- constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
- jugé que M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST ont violé leur engagement de non-concurrence intégré au protocole du 15 septembre 2021,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de 20 000 € à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
- jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime en son application en l'état,
- rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de président de STAFF COURTAGE,
- condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5 000 € par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
- dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
- débouté la société ABE de toutes ses autres demandes,
- déboute M. [O] et la société CJAD INVEST de toutes leurs autres demandes, y compris reconventionnelles,
- dit n'y avoir pas lieu à écarter l'exécution provisoire,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST à payer à la société ABE la somme de 5 000 € par application des dispositions de 1' article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST aux dépens dont frais de greffe liquidés à 100,32 euros toutes taxes comprises.
Par déclaration du 7 mars 2024, la société CJAD Invest, M. [O] et Staff Courtage ont interjeté appel. Par ses premières conclusions, la société ABE a formé appel incident.
Le tribunal de commerce de Nantes, en raison de l'appel formé, a déclaré irrecevable une demande d'interprétation et de rectification d'erreur matérielle de M. [O] et des sociétés Staff courtage et CJAD Invest.
Il est noté que le tribunal de commerce de Nantes a, par ailleurs, été amené à statuer sur plusieurs litiges parallèles concernant tant l'exécution du protocole de cession que la liquidation de l'astreinte.
Les dernières conclusions des appelants ont été déposées le 5 juin 2025 ; celles de l'intimée, le 30 mai 2025.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 juin 2025.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Sur la recevabilité des conclusions de dernière heure
Par conclusions du 6 juin 2025, la société ABE a demandé « le rejet des communications des appelants des 4 et 5 juin 2025 ».
Elle fait valoir qu'au titre du respect des droits de la défense, il est nécessaire de rejeter les conclusions déposées le 4 juin 2025 à 18h08 et 18h11 par les appelants et celles déposées en sus le 5 juin 2025 à 8h42 avant le prononcé de la clôture le même jour. Elle relève qu'après un report de clôture au 5 juin 2025 pour lui permettre de répondre à de précédentes conclusions tardives des appelants, elle a conclu le 30 mai 2025 ; elle reproche aux appelants d'avoir répliqué la veille et le jour même de la clôture, la plaçant dans l'impossibilité insurmontable d'y répondre.
Par conclusions du 10 juin 2025, les appelants demandent le rejet de la demande de rejet de leurs conclusions des 4 et 5 juin 2025 et que celles-ci soient « jugées » recevables.
Ils font valoir qu'il n'existe aucun motif de rejet des écritures transmises avant la clôture alors même qu'ils n'ont fait que répondre aux écritures déposées par les intimés le 30 mai 2025, sans que de nouvelles demandes ou arguments ne soient développés.
Selon l'article 802 du code de procédure civile dans sa version applicable à l'instance, après la clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.
En application de l'article15 du code de procédure civile,
« les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense. »
Aux termes de l'article 16, alinéas 1 et 2, du code de procédure civile :
« Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. »
Il se déduit de la combinaison de ces articles que les conclusions et le dépôt de nouvelles pièces sont par principe recevables jusqu'au prononcé de la clôture sauf à établir des circonstances particulières caractérisant une atteinte portée au principe de la contradiction.
A la suite de l'avis de fixation du 4 avril 2025, annonçant la clôture au 15 mai suivant, les appelants ont conclu le 14 mai 2025.
La clôture prévue pour le 15 mai 2025 a été reportée au 5 juin 2025 pour permettre à l'intimée de répliquer.
L'intimée a adressé une sommation de communiquer et une itérative sommation de communiquer aux appelants les 15 et 21 mai 2025 auxquelles il a été partiellement répondu le 23 mai 2025. Il a été communiqué une attestation de l'expert-comptable de la société Staff courtage sur la présentation de ses comptes pour l'exercice 2024.
L'intimée a déposé des conclusions le vendredi 30 mai 2025 en présentant, notamment, des demandes d'irrecevabilité de « demandes et développements » se rapportant à la première partie de la clause litigieuse de non concurrence ainsi que ceux visant à répondre à l'appel incident, et en adressant 26 nouvelles pièces dont des pièces comptables.
Les appelants ont répondu par des conclusions n°4 déposées le mercredi 4 juin 2025 à 18h08, veille de la clôture, et ont communiqué 5 nouvelles pièces : l'attestation de l'expert-comptable de la société Staff courtage susévoquée déjà mentionnée dans ses écritures par l'intimée elle-même ainsi que, notamment, les conditions particulières d'un contrat AXA pour vérifier la date d'engagement de celle-ci (cf infra). Les autres pièces communiquées ne sont relatives qu'aux sommations de communiquer évoquées supra.
Dans la partie discussion de ces conclusions n°4, l'appelant a ajouté, par rapport aux conclusions déposées le 14 mai 2025 :
- un paragraphe page 47 et un paragraphe page 60 pour répondre succinctement aux commentaires de l'intimée sur l'exercice comptable 2024 de la société Staff courtage,
- 8 lignes page 73 pour évoquer de nouveau le refus de communiquer les contrats de travail complet de deux salariés,
- page 75 à 82, des nouveaux paragraphes ayant trait pour l'essentiel à des discussions d'analyse factuelle sur les exemples pris par l'intimée (dont certains nouveaux) pour démontrer la souscription de contrats d'assurance en violation de la clause litigieuse. Les appelants reprennent leur argumentaire pour dire que ces contrats ont été conclu postérieurement à la fin de l'engagement de non-concurrence de M. [O]. C'est notamment dans ce cadre que la pièce relative au contrat AXA ci-dessus évoquée a été communiquée. Il est toutefois noté que malgré le trait de marge les identifiant comme nouveaux, de nombreux paragraphes étaient pourtant déjà compris dans les conclusions du 14 mai 2025. De la même manière, le paragraphe page 82 marqué comme ajouté, comprend également pour partie des arguments de réponse déjà compris dans leurs précédentes écritures avec une actualisation relative à la prise en compte du résultat de l'exercice 2024 de la société Staff courtage,
- page 92 et 93, 5 lignes évoquent de manière redondante l'absence de communication du bilan ABE 2024 pour appuyer l'argument de la carence probatoire de la société ABE pour justifier de son préjudice.
Aucune demande de report de clôture n'a été formalisée par l'intimée à la suite du dépôt de ces conclusions avant son prononcé.
Le lendemain matin, jour de la clôture mais avant le prononcé de celle-ci, les appelants ont déposé à nouveau des conclusions, intitulées « conclusions récapitulatives n°4 ». Aucune nouvelle pièce n'a été communiquée.
Ces nouvelles conclusions comportent, page 67, un paragraphe de onze lignes pour contester le calcul réalisé par la société ABE concernant la part d'assurance construction de l'activité de la société Staff courtage.
Il en résulte que la remise par les appelants, juste avant la clôture, de conclusions ne comportant aucune nouvelle demande, ajoutant quelques paragraphes explicatifs, parmi 101 pages d'écritures, qui ne font que reprendre pour l'essentiel des arguments à l'appui de moyens déjà débattus, et accompagnées de la communication de pièces non déterminantes dont l'une, l'attestation de l'expert-comptable, plus importante, avait déjà fait l'objet d'analyses de la part de l'intimée, n'a pas porté atteinte au principe de la contradiction.
En conséquence, il convient de rejeter la demande de rejet des « conclusions n°4 » et des « conclusions récapitulatives n°4 » des appelants, lesquelles seront déclarées recevables.
Les dernières conclusions déposées le 5 juin 2025 seront prises en compte.
La société CJAD Invest, M. [O] et la société Staff courtage demandent à la cour de :
- recevoir la société CJAD Invest, M. [Y] [O] et la société Staff courtage en leur appel du jugement en date du 05 février 2024 rendu par le tribunal de commerce de Nantes, le dire bien fondé, et y faisant droit,
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
o * Rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
o * Rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de président de STAFF COURTAGE ;
o * Débouté la société ABE de toutes ses autres demandes,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
o * Condamné la société ABE à verser à Monsieur [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 euros en raison de la faute contractuelle provoquée par la divulgation de pièces confidentielles,
o * Constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
o * Jugé que Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST ont violé l'engagement de non-concurrence intégré au protocole du 15 septembre 2021,
o * Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
o * Jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime à son application en l'état,
o * Condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommage-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 euros par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
o * Dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
o * Débouté Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST de toutes leurs autres demandes, y compris reconventionnelle,
o * Dit n'y avoir pas lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision
à intervenir,
o * Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST à payer à la société ABE la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
o * Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST aux dépens dont frais de greffe liquidés à 100.32 euros toutes taxes comprises,
Ce faisant la décision est également critiquée en ce qu'elle comporte une confusion entre les motifs et le dispositif ayant justifié le dépôt devant le tribunal de commerce de Nantes d'une requête en interprétation et rectification d'erreur matérielle rédigée comme suit :
- interpréter les chefs de jugement suivants inscrits dans le dispositif du jugement en date du 05 février 2024 (RG n°2023004058) rendu par le tribunal de commerce de Nantes :
* Juger que la clause est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace, et donc illégitime en son application en l'état ;
* Condamne M. [O] et la société CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommage ouvrage) sur les départements de la [Localité 7] Atlantique et de l'Ille et Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024 »
- rectifier l'erreur matérielle affectant le jugement rendu le 5 février 2024 par le tribunal de commerce de Nantes (RG n°2023004058) en modifiant l'erreur matérielle affectant le chef de jugement suivant :
* Condamne M. [O] et la société CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommage ouvrage) sur les départements de la [Localité 7] Atlantique et de l'Ille et Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024 ».
De la manière suivante : « Condamne M. [O] et la société CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommage ouvrage) sur les départements de la [Localité 7] Atlantique et de l'Ille et Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2023 ».
Et statuant à nouveau,
Au préalable,
- rejeter des débats la pièce adverse n°6 intitulée « accord de confidentialité » communiquée par la société ABE, dont la divulgation était interdite aux termes d'un accord de confidentialité,
- juger l'existence d'une faute caractérisée commise par la société ABE consistant à verser aux débats un accord de confidentialité, de nature à engager sa responsabilité contractuelle,
- condamner la société ABE au paiement de la somme de 20.000 € au profit de la société Staff courtage au titre de la violation délibérée des termes de l'accord de confidentialité,
A titre principal, concernant le défaut de validité de la clause de non-concurrence post-contractuelle :
- juger la clause de non-concurrence litigeuse disproportionnée au regard de son périmètre géographique extrêmement large correspondant à la France entière,
- juger la clause de non-concurrence litigeuse disproportionnée au regard de sa durée d'application de 3 ans et 3 mois,
- juger que la clause de non-concurrence litigieuse est disproportionnée au regard de la généralité des termes employés, et quant aux intérêts réels et légitimes des sociétés ABE et Courtage assur à protéger,
- juger la clause de non-concurrence litigeuse disproportionnée en ce qu'elle prive M. [O] de toute possibilité d'exercer une activité dans son domaine de compétence, à savoir le secteur de l'assurance construction,
- juger que la clause de non-concurrence litigieuse est dépourvue de toute validité, car ne respectant pas les conditions de validité édictées par la jurisprudence en la matière,
- juger nulle et de nul effet la clause de non-concurrence post-contractuelle stipulée aux termes du protocole de cession régularisé le 15 septembre 2021,
Et en conséquence de la nullité de la clause de non-concurrence
litigieuse :
- juger que l'application de la clause de non-concurrence litigieuse a privé M. [O] de la possibilité de poursuivre une activité professionnelle dans le domaine de l'assurance construction pendant 3 ans et 3 mois, alors que cette clause est nulle et de nul effet,
- juger que l'application de cette lause de non-concurrence illicite a généré un préjudice économique certain souffert par M. [O], au titre du manque à gagner correspondant au développement d'une activité en matière d'assurance construction,
- condamner la société ABE au paiement de la somme de 142.757,41 € au profit de M. [O] au titre de la marge que ce dernier aurait dû générer pendant 3 ans et 3 mois s'il avait été en mesure de poursuivre une activité professionnelle dans son domaine de compétence de l'assurance construction,
A titre subsidiaire, et si par extraordinaire, la cour d'appel de céans jugeait la clause litigieuse valable :
- juger que les activités exercées par la société Staff courtage à la date de signature du protocole de cession en date du 15 septembre 2021, renfermant la clause litigieuse, étaient exploitées auprès d'une clientèle distincte que celle composant le portefeuille de clients des sociétés ABE et Courtage assur, et qu'elles ne contrevenaient pas aux intérêts des sociétés ABE et Courtage assur en cours à cette date,
- juger que les activités exercées par la société Staff courtage depuis la signature du protocole de cession renfermant la clause de non-concurrence litigieuse jusqu'à ce jour ne s'inscrivent pas en violation des termes de la clause de non-concurrence litigieuse,
- juger que M. [O] et la société CJAD Invest n'ont commis aucune violation de la clause de non-concurrence litigieuse,
- juger que la société ABE échoue à démontrer l'existence des préjudices dont elle demande réparation, tant dans leur principe que dans leur quantum,
En tout état de cause :
- condamner la société ABE au paiement de la somme de 30.000 € au profit de la société Staff courtage au titre de la violation délibérée des termes de l'accord de confidentialité,
- juger que les multiples actions judiciaires et actions hostiles réalisées par les dirigeants du Groupe ABE ont généré un préjudice moral certain souffert par M. [O],
- condamner la société ABE au paiement de la somme de 50.000 € au profit de M. [O] au titre du préjudice moral,
- débouter la société ABE de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre de la société Staff courtage, M. [O] ou la société CJAD Invest,
Et rejetant toute demande contraire comme irrecevable et en toute hypothèse mal fondée,
- condamner la société ABE à payer à M. [O], la société CJAD Invest et la société Staff courtage la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société ABE aux entiers dépens de première instance et d'appel en vertu de l'article 699 du code de procédure civile.
La société ABE demande à la cour de :
- juger irrecevables, comme nouvelles au stade de l'appel, les demandes et développements se rapportant à la première partie de la clause, dont la validité ne peut donc pas être mise en doute,
- juger irrecevables, comme tardifs, au visa de l'article 641 du code de procédure civile, et pièces, tous les développements des appelants visant à répondre à l'appel incident inclus aux conclusions de la société ABE notifiées le 3 septembre 2024.
- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nantes le 5 février 2024 en ce qu'il a :
Constaté que la clause de non-concurrence n=est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
Jugé que Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST ont violé l'engagement de non-concurrence intégré au protocole du 15 septembre 2021,
Débouté Monsieur [Y] [O] et la société CJAD INVEST de toutes leurs autres demandes, y compris reconventionnelles,
Dit n'y avoir pas lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision à
intervenir,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
Rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
Condamné la société ABE à verser à Monsieur [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 € en raison de la faute contractuelle provoquée par la divulgation de pièces confidentielles,
Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de seulement 20.000 € à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
Jugé disproportionnée dans le temps et dans l'espace la clause de
non-concurrence,
Rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de Président de STAFF COURTAGE,
Condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 € par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
Débouté la société ABE de toutes ses autres demandes,
En conséquence et statuant à nouveau :
- juger que la clause de non-concurrence insérée au protocole conclu le 15 septembre 2021 entre la société ABE d'une part, et M. [O] et la société CJAD Invest d'autre part, est valide,
En conséquence :
- condamner M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage in solidum, ou bien l'une ou l'autre, à verser à la société ABE une somme
de 740 000 € à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi du fait de la violation de la clause de concurrence,
A titre subsidiaire sur cette demande, si toutefois la cour devait juger ne pas être suffisamment éclairé sur le préjudice subi, et sans que cela puisse être reproché à la société ABE :
- allouer une somme de 300 000 € à titre de réparation partielle,
Et avant-dire droit sur les préjudices uniquement :
- désigner tel expert judiciaire qui lui plaira avec mission :
De se faire remettre par les parties ou tout tiers l'ensemble des éléments, documents, et informations qu'il estimera utiles ou nécessaires à l'exécution de sa mission ;
D'interroger toute personne, y compris les salariés de STAFF COURTAGE, Monsieur [C], les co-contractants, et les tiers,
D'évaluer quelle aurait été l'incidence de l'acquisition par ABE de 100% du capital de la société STAFF COURTAGE, au niveau de la contribution future aux résultats, sur quatre exercices à compter de l'exercice 2023,
D'évaluer plus généralement évaluer l'ensemble des gains et économies probables réalisées par ABE à ce titre, sur cette même période 2023-2026,
D'évaluer le chiffre d'affaires réalisé par la société STAFF COURTAGE, depuis sa prise de contrôle par Monsieur [O], ou encore via la société ASSUR & MOI, en lien avec des clients ABE ou avec le domaine de l'assurance de construction, et des perspectives de chiffre d'affaires dans ce même domaine découlant des agissements interdits commis jusqu'au 31 décembre 2024,
D'évaluer les préjudices soufferts par la société ABE, tant patrimonial qu'extra patrimonial,
Répondre à tous dires écrits des parties et au besoin, entendre tous
sachants,
Rédiger un pré-rapport, le soumettre aux parties et leur laisser un délai d'un mois minimum aux fins de communication de leurs observations,
Fixer à 1 500 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert et dire que la consignation devra intervenir dans les quinze jours de la demande faite par le Greffier,
Dire que les opérations d'expertise devront commencer à compter de la notification de la consignation de la provision,
Dire que l'expert dressera de ses opérations un rapport qu'il devra déposer au Greffe dans les quatre mois de la date de notification de la consignation de la provision,
En tout état de cause :
- condamner M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage , in solidum ou bien l'un à défaut des autres, à payer la somme de 78 000 euros au titre des frais dont le montant a été justifié, conformément à l'article 9 du protocole, avec intérêt de 5%,
- débouter M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- condamner M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage in solidum à payer à la société ABE la somme de 100 000 € au titre des frais sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ou bien 20 000 € si la Cour fait droit à la demande présentée ci-dessus pour 78 000 €,
- confirmer M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage in solidum aux dépens.
Il est renvoyé aux dernières écritures des parties visées supra pour l'exposé complet de leurs moyens et prétentions.
DISCUSSION
Il est rappelé qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile dans sa version applicable à l'instance, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
La cour ne répondra pas aux éventuelles demandes, moyens et arguments mentionnés dans la partie de l'exposé du litige et de la procédure dans les écritures des parties, non reprises dans la partie discussion et au dispositif.
Cependant, la cour est tenue d'examiner d'office la demande de « juger irrecevables, comme tardifs, au visa de l'article 641 code de procédure civile, et pièces [sic], tous les développements des appelants visant à répondre à l'appel incident inclus aux conclusions de la société ABE notifiées le 3 septembre 2024 ».
En effet, selon l'article 910 du code de procédure civile, dans sa version applicable au litige,
« L'intimé à un appel incident ou à un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui lui en est faite pour remettre ses conclusions au greffe. »
L'irrecevabilité n'a pas été soulevée devant le conseiller de la mise en état ni relevé d'office par celui-ci. Il appartient à la cour de répondre à la demande.
Les appelants ne répondent pas sur cette demande.
Il apparaît que la société ABE a formé appel incident dans le délai qui lui était imparti, par conclusions déposées le 3 septembre 2024.
Les appelants ont déposé leurs conclusions postérieures le 4 décembre 2024, soit, en application des règles de calcul des délais fixées par l'article 641 du code de procédure civile, un jour après le délai imparti par l'article 910 susvisé.
Les conclusions tardives de l'appelant, intimé à un appel incident, ne sont irrecevables qu'en tant qu'elles ne développent pas son appel principal. La cour doit rechercher si ces conclusions répondaient à l'appel incident ou si elles n'étaient pas destinées au moins en partie à développer l'appel principal.
L'appel incident tend à l'infirmation du jugement en ce qu'il a :
1- rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
2 - Condamné la société ABE à verser à Monsieur [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 euros en raison de la faute contractuelle provoquée par la divulgation de pièces confidentielles,
3 - Condamné in solidum Monsieur [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
4 - Jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime en son application en l'état,
5 - rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y]
[O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de
STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de Président de STAFF COURTAGE,
6 - Condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 euros par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
7 - Dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
8 - Débouté la société ABE de toutes ses autres demandes,
Il s'agit pour les chefs de jugement critiqués ci-dessus 2, 3, 4 et 7 de demandes d'infirmation déjà formées par les appelants pour lesquels ceux-ci avaient développé moyens et arguments dans leurs conclusions antérieures. Aucune irrecevabilité n'est retenue.
Pour les chefs de jugements critiqués ci-dessus 5 et 6, les nouveaux arguments développés par les appelants dans leurs conclusions postérieures à celles de l'intimée, qui tendent seulement à écarter une indemnisation supérieure ou les sanctions au titre de la violation de la clause de non concurrence, ne sont que la conséquence de leurs demandes d'infirmation au titre de l'appel principal. Aucune irrecevabilité n'est retenue.
Quant au chef de jugement critiqué 1 ci-dessus, les appelants ayant sollicité une somme plus importante au titre de la violation de l'accord de confidentialité par leur appel principal, leurs arguments étaient également déjà pour partie dans les débats. Aucune irrecevabilité n'est retenue.
Ils convient de rejeter la demande de « juger irrecevables, comme tardifs, au visa de l'article 641 code de procédure civile, et pièces [sic], tous les développements des appelants visant à répondre à l'appel incident inclus aux conclusions de la société ABE notifiées le 3 septembre 2024 »
La clause de non-concurrence
Le protocole de cession du 15 septembre 2021 stipule en son article 7.5 « engagement de non-concurrence » :
« L'assurance relative aux métiers de la construction représente le c'ur de métier des sociétés Courtage assur et ABE.
Aussi, comme conséquence de la réalisation de la cession, à peine de dommages-intérêts et sans préjudice du droit de faire cesser toute infraction à cette interdiction, les cédants s'interdisent, de quelque manière et de quelque façon que ce soit, pour lui-même ou pour le compte de tiers, jusqu'au 31 décembre 2024 :
- d'approcher ou de conseiller en matière d'assurance tant en qualité d'intermédiaire d'assurance, de salarié, de commissionnaire ou de mandataire avec ou sans souscription de contrats à la clé, les clients actuels des sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE,
- de conseiller en matière d'assurance construction, dont l'assurance dommage ouvrage et l'assurance responsabilité civile décennale tant en qualité d'intermédiaire d'assurance, de salarié, de commissionnaire, d'indicateur ou de mandataire des entreprises sur le secteur de la France métropolitaine.
Les cédants s'engagent à respecter l'ensemble des dispositions de cet article sauf dérogation accordée préalablement par tous les cessionnaires.
La présente clause de non-concurrence ne saurait être considérée comme caduque au motif qu'elle ne prévoit pas de contrepartie financière dès lors qu'elle ne s'inscrit pas dans le cadre et ne trouve pas sa cause dans un contrat de travail.
Plus généralement, les cédants s'obligent au titre de cette clause de non-concurrence à une attitude loyale à l'égard des cessionnaires et des sociétés. »
Sur la demande de « juger irrecevables, comme nouvelles au stade de l'appel, les demandes et développements se rapportant à la première partie de la clause, dont la validité ne peut donc pas être mise en doute »
Il se déduit des écritures de l'intimée, qu'il est reproché aux appelants de critiquer la première partie de l'interdiction posée par la clause susvisée pour en contester la validité, ce qu'ils n'auraient pas fait en première instance.
L'article 564 du code de procédure civile dispose :
« A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
L'article 565 du même code précise cependant :
« Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. »
Aux termes du jugement, M. [O] et les société CJAD Invest et Staff courtage demandaient la nullité de la clause de non-concurrence.
Les appelants demandent à la cour l'infirmation du jugement notamment en ce qu'il a « constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence » et en ce qu'il a « jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée » sans en tirer la conséquence de la nullité, et prétendent à la nullité de la clause.
Il ne s'agit donc pas d'une demande nouvelle et les appelants sont en droit de présenter des nouveaux moyens ou arguments pour la soutenir.
Cette demande d'irrecevabilité est rejetée.
Sur la validité de la clause
Le tribunal ne pouvait réduire le champ d'application de la clause de non-concurrence dès lors que seule sa nullité était invoquée par M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage en cas d'illicéité de la clause.
Pour ce seul motif, le jugement sera infirmé en ce qu'il a :
- constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
- jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime en son application en l'état,
- rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de président de STAFF COURTAGE,
- condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 i par mois de retard à compter d' un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
- dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage font valoir que la clause de non-concurrence est nulle au motif principal de sa disproportion. Ils soulignent que la clause, qui présente un caractère doublement contraignant, n'a pas uniquement pour but de protéger une clientèle en place et les intérêts légitimes de la société ABE, et qu'elle interdit à M. [O] l'exercice d'une activité au périmètre extrêmement large, rendant impossible une activité professionnelle dans son domaine de compétence, sans limitation suffisante dans le temps et dans l'espace.
En application de l'article 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ; ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Il résulte de ces articles et du principe de la liberté d'entreprendre qu'une clause de non-concurrence, conclue par un dirigeant ou un associé à l'occasion d'une cession de titres sociaux, n'est valable qu'à condition d'être limitée dans le temps et dans l'espace et d'être proportionnée aux intérêts légitimes à protéger.
L'appréciation de l'intérêt légitime du créancier de l'obligation de non-concurrence exige de vérifier si la clause est nécessitée par les risques concurrentiels que représente le débiteur à l'égard du créancier.
De manière plus générale, la clause de non-concurrence se trouve justifiée par la protection d'informations confidentielles, d'un savoir-faire ou d'une clientèle.
C'est au créancier qu'il revient d'établir son intérêt légitime.
L'acte de cession avait pour objet de transférer les titres détenus par M. [O] et la société CJAD Invest dans les sociétés [Localité 9] assur, ABE et Courtage assur.
Les titres de la société [Localité 9] assur et de la société Courtage assur ont été cédés à la société ABE elle-même ; ceux de la société ABE ont été repris par elle-même (par réduction de capital) et par M. [I] et [R]. Le prix fixé pour les titres des sociétés, hors SCI, était de 4 108 000 euros.
La clause de non concurrence insérée dans un acte de cession doit avoir pour objectif de limiter la possibilité pour les cédants d'exercer concurremment les activités objet des sociétés dont ils ont cédé les titres moyennant le prix de cession.
Les intérêts légitimes à protéger s'entendent de ceux existants ou prévisibles au moment de la rédaction et de l'acceptation de la clause.
En l'espèce, il s'agit uniquement des intérêts des trois sociétés cessionnaires lors de la conclusion du protocole. Il ne peut être fait référence aux intérêts actuels de la société ABE telle que recomposée après les diverses fusions intégrant, non seulement [Localité 9] assur et Courtage assur mais également des sociétés tierces, fusions non évoquées dans le protocole ni même en introduction de la clause elle-même.
S'agissant de la société [Localité 9] assur, il n'est pas contesté qu'elle était peu active lors de la cession et elle n'est pas évoquée en introduction de la clause de non-concurrence.
Il n'est pas discuté (p.35 conclusions appelants) que la société ABE avait développé une activité auprès de bureaux d'études et autres professions intellectuelles du bâtiment, pour leur couverture au titre de l'assurance en responsabilité civile décennale, à visée métropolitaine.
Il n'est pas plus discuté que la société Courtage assur, dont les titres détenus par M. [O] et la société CJAD Invest (43%) ont été repris par la société ABE, avait développé une activité auprès d'entreprises de travaux pour leur protection en responsabilité civile décennale.
M. [O] et les sociétés CJAD Invest et Staff courtage soutiennent toutefois que l'activité de la société Courtage assur était limitée à l'Ille et Vilaine et à la [Localité 7] Atlantique, et qu'elle ne s'adressait pas aux autres professions de la construction (promoteurs, professions intellectuelles etc).
La société ABE produit un post LinkedIn par lequel la société Courtage assur est présentée comme « experts de l'assurance des métiers du bâtiment (gros oeuvre et second oeuvre), nous travaillons main dans la main avec de nombreuses entreprises dans le grand ouest » (pièce 46).
Ce n'est qu'après la fusion des sociétés, postérieure à la cession, que le « groupe » ABE a communiqué sur le développement d'une activité pour « tous les professionnels du bâtiment », tel que revendiqué sur LinkedIn (pièce 46 3/3).
La société ABE produit encore un tableau (pièce 59), non daté, qui n'est pas présenté comme contemporain de la cession mais plutôt contemporain de la procédure (page 63 intimée), sur lequel elle dit avoir répertorié ses clients en France. La réalité des chiffres contenus n'est pas discutée par les appelants. Il apparaît que les 6 283 clients éparpillés sur l'ensemble du territoire national, sont situés, pour plus de la majorité en Ille et Vilaine (2257) et dans la [Localité 7] Atlantique (1328). Les départements du Morbihan (219) et des Côtes d'Armor (370) arrivent ensuite.
Ce tableau démontre au besoin que si la société ABE prospecte sur la France entière, son activité est toujours centrée sur deux départements principaux : Ille et Vilaine et [Localité 7] Atlantique.
La société ABE ne produit aucune autre information pour justifier de l'activité réelle de la société Courtage assur ou de la société ABE lors de la cession.
Il s'en déduit que l'intérêt légitime à protéger ne pouvait être qu'en lien avec les activités :
- liée à l'assurance construction,
- concernant la clientèle composée des professions intellectuelles du bâtiment sur toute la France métropolitaine,
- concernant la clientèle composée des entreprises de gros 'uvre et second 'uvre en Ille et Vilaine et [Localité 7] Atlantique, voire dans le Morbihan et en Côtes d'Armor.
Or la clause ne permettait aucune activité pour M. [O] en matière :
- d'assurance générale pour les clients actuels des sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE, soit dans un domaine de compétence non justifié par l'intimée,
- d'assurance construction sur la France métropolitaine, alors que des limitations territoriales s'imposaient pour l'assurance construction à l'égard des professions du gros 'uvre et second 'uvre,
et ce, de la réalisation de la cession prévue au protocole le 31 décembre 2021, et jusqu'au 31 décembre 2024, soit pendant trois ans.
Au jour de la cession, et selon le curriculum vitae produit, M. [O] avait acquis 12 ans d'expérience dans le domaine de l'assurance de la construction ; il avait auparavant travaillé dans des domaines plus variés de l'assurance.
De par son expérience dans le domaine de l'assurance de la construction à la SMABTP puis dans les sociétés dont les titres ont été cédés, M. [O] a démontré une capacité à développer les activités qui lui ont été confiées dans le cadre de la prospection et de la gestion des portefeuilles clients en matière d'assurance construction. Il a mis en place, à cet effet, des processus éprouvés. Il représentait, en cela, un fort risque concurrentiel pour les sociétés dont il a cédé les titres.
Toutefois, la clause de non concurrence en ce qu'elle excède les intérêts légitimes à protéger et imposait à M. [O] de renoncer à toute activité en matière d'assurance de construction, métier en soi en raison de sa technicité et qu'il exerçait depuis douze ans, à l'égard de tout professionnel du bâtiment (professions intellectuelles, gros 'uvre, second 'uvre) et limitait, en outre, son activité en matière d'assurance générale pour les groupes clients des sociétés [Localité 9] assur, Courtage assur et ABE, ce, sur la France métropolitaine, et qui plus est, pour une durée de trois ans, est manifestement disproportionnée.
Il est relevé que M. [O], dans un courriel du 26 mai 2021, a, au cours des négociations en vue de la signature du protocole de cession, mentionné une « clause de non concurrence : trois ans », sans indiquer ce qu'elle pouvait recouvrir, et qui ne s'inscrivait que dans le cadre d'une valorisation des titres à 5 066 766 euros. Il ne peut en être déduit qu'il a proposé la clause telle que rédigée au protocole, sachant qu'il ressort des échanges de courriels entre les parties une négociation difficile compte tenu des dissensions antérieures, ni a fortiori qu'il ait renoncé à pouvoir invoquer le caractère illicite de la clause.
En conséquence, il convient de prononcer la nullité de la clause de non-concurrence.
Dès lors, la responsabilité contractuelle de M. [O] et de la société CJAD Invest ou délictuelle de la société Staff courtage au titre de la violation de la clause ne peut trouver à s'appliquer.
La société ABE a fait valoir un préjudice global au titre de la violation principale de la clause de non-concurrence et de ses conséquences. Sans qu'il soit besoin d'entrer dans le détail de son argumentation et en raison de l'illicéité de la clause, l'ensemble de ses demandes à titre de dommages et intérêts au titre de la violation de la clause de non-concurrence et au titre de l'article 9 du protocole (garantie du fait personnel) doivent être rejetées ainsi, a fortiori, que sa demande de provision et de désignation d'un expert judiciaire pour évaluer son préjudice.
Sur la demande reconventionnelle au titre de la violation d'un accord de confidentialité
La société Staff courtage fait valoir la responsabilité contractuelle par la société ABE pour la violation d'un accord de confidentialité conclu avec elle. Outre la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté « l'accord de confidentialité « lui-même et les « comptes sociaux de la société Staff courtage au 31 décembre 2021 produites par la société ABE », elle demande une indemnisation au titre de ladite violation.
Le droit à la preuve ne peut justifier la production d'éléments portant atteinte à un secret qu'à la condition que cette production soit nécessaire, ou indispensable, à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit proportionnée au but poursuivi et aux intérêts antinomiques en présence.
La société ABE produit un accord de confidentialité, non daté, signé entre la société Staff courtage et elle par lequel elle s'interdit * directement ou indirectement (par le biais d'une filiale ou holding ou partenaire) à compter de la signature du présent accord et pour une durée de trois ans (...) :
- toute communication à des tiers, courtiers, agents, compagnies, audit et/ou consultants des informations recueillies,
- toute utilisation ou cession des données confiées +.
Il n'est pas discuté que cet accord évoque diverses données économiques de la société Staff courtage, des informations sur sa clientèle et la réparation de son activité et qu'il y était annexé divers documents également soumis à la confidentialité dont le bilan clos au 31 décembre 2022 et celui clos au 31 décembre 2021.
Il n'est pas discuté par la société ABE que cet accord a été signé le 27 septembre 2022 de sorte que l'interdiction de divulgation courait jusqu'au 27 septembre 2025.
Il s'agit d'une interdiction de divulgation à tous tiers à l'accord, ce, en raison de l'insertion d'une virgule après « tiers » et non de deux points avant l'énumération, et surtout d'une interdiction d'utilisation des données confiées, l'ensemble impliquant l'interdiction de toute production en justice.
Il doit être vérifié si la production des pièces est nécessaire ou indispensable au litige, ce qui s'apprécie au regard des autres éléments de preuve disponibles.
S'agissant des « comptes sociaux de la société Staff courtage au 31 décembre 2021 » (pièce 15 devenue 54 en appel), la société ABE fait elle-même valoir dans ses écritures que « les bilans sont habituellement publiés au greffe ». Il lui appartenait donc de démontrer qu'ils avaient fait l'objet d'une demande de confidentialité auprès du greffe du tribunal de commerce et qu'elle ne pouvait les obtenir par un autre biais pour justifier d'un éventuel intérêt à les produire malgré l'accord de confidentialité. A défaut, la pièce 54 produite par ABE sera écartée des débats.
S'agissant des mentions de l'accord de confidentialité en lui-même ainsi que des deux pièces annexées (pièce 6 (l'accord), 6 bis (tableau risque/commission) et 6 ter (bilan 31/12/2022)), il appartenait à la société ABE de démontrer son impossibilité à obtenir les informations mentionnées par un autre biais que par la divulgation de l'accord.
Il est relevé que le bilan au 31 décembre 2022 a finalement été produit par les appelants. Cette pièce ne sera pas écartée des débats.
Pour le surplus, par le seul rappel des principes applicables en matière de preuve et de production de pièces soumises à la confidentialité, et de son intérêt à les produire, elle ne fait valoir aucune argumentation factuelle à ce titre dans ses écritures (p.99,100,101). En tout état de cause, la part de l'activité « assurance construction » de la société Staff courtage mentionnée dans l'accord de confidentialité, ressort des propres écritures des appelants ainsi que de celles déposées en première instance comme il sera vu ci-après.
Les pièces 6 et 6bis produites par ABE seront écartées des débats.
Le jugement de première instance sera infirmé afin de viser la bonne numérotation des pièces écartées.
Il est relevé qu'aucune sanction n'était prévue par l'accord en cas de violation de celui-ci.
La société Staff courtage réclame le paiement d'une somme de 20 000 euros en raison de cette violation, en alléguant l'existence d'un « préjudice certain », sans préciser sa nature, résultant de la divulgation des informations sur lesquelles elle a bâti son modèle économique.
Ce disant, elle ne justifie pas que la divulgation d'informations à la seule destination de la justice ait pu lui causer un préjudice économique voire même moral.
Le rejet des pièces suffit à éviter toute révélation d'informations du secret des affaires par une décision de justice.
Le jugement de première instance sera infirmé en ce qu'il a condamné la société ABE à payer une somme de 5 000 euros à la société Staff courtage et le surplus de la demande sera rejeté.
Sur la demande reconventionnelle de M. [O] aux fins d'indemnisation au titre d'un manque à gagner
M. [O] fait valoir un manque à gagner résultant de l'application d'une clause de non concurrence illicite en ce qu'il n'a pu générer un chiffre d'affaires dans son domaine de compétence et se dégager une juste rémunération depuis septembre 2021. Il considère que ce manque à gagner correspond à une perte de marge brute correspondant elle-même à la marge qu'il aurait pu atteindre s'il avait pu développer une activité en matière de construction, par comparaison avec le chiffre d'affaires moyen qu'il générait pour la société Courtage assur.
La société ABE fait valoir que M. [O] n'a pu subir aucun préjudice économique puisqu'il n'a, de facto, pas tenu compte de la clause de non-concurrence.
L'étendue du préjudice subi par le débiteur d'une clause de non-concurrence annulée s'apprécie à l'aune de la violation éventuelle de ladite clause pendant la période de son application. Il appartient au créancier de la clause de démontrer l'effectivité de la violation.
Il est rappelé que M. [O] et la société CJAD Invest ont acquis les titres de la société Staff courtage le 3 février 2023.
A cette date, les statuts de la société Staff courtage prévoyaient que celle-ci avait pour objet divers pans de l'assurance en générale mais également « les assurances de dommages » dont la garantie du constructeur, ou encore les « assurances construction ». Ces statuts, mis à jour selon assemblées générales du 28 juin 2024, ont maintenu cet objet social.
Dans les conclusions n°3 des appelants, produites devant le tribunal et versées aux débats par la société ABE, ceux-ci intégraient un tableau de ventilation du portefeuille de la clientèle de la société Staff courtage établissant que sur le volume de commissions total (150 744,85 euros), le volume de commissions pour la protection tout risque chantier, l'assurance responsabilité civile décennale, responsabilité civile promoteur, dommages-ouvrage et multirisques * Cmistes + s'élevait à un montant total de 82 734,05 euros.
Les appelants soutiennent que ce tableau correspond à l'état des commissions pour l'exercice 2022, soit avant le rachat de la société Staff courtage ; ils ne sont pas démentis sur ce point.
Il apparaît qu'au jour du rachat, M. [O] avait une parfaite connaissance de ce qu'il devrait s'impliquer dans une société dont l'objet social et l'activité effective était contraire aux interdictions posées par la clause de non-concurrence.
Les appelants font valoir que M. [O] ou la société CJAD Invest n'ont pu tirer profit du fait que la société Staff courtage a signé des contrats d'assurance dommages-ouvrage ou tout risque chantier avant son rachat. Si M. [O] n'a pu en tirer de commissions, la conclusion de ces contrats participaient à l'économie générale de la société Staff courtage et à la constitution de sa clientèle. Or, la clause de non-concurrence susvisée ne lui interdisait pas seulement de conclure des contrats mais lui interdisait, de fait, toute participation dans la gestion des contrats relatifs à l'assurance construction.
Par ailleurs, les appelants admettent que la société Staff courtage a signé, depuis le rachat, des contrats responsabilité civile décennale pour une clientèle du Sud de la France, en contravention avec la clause de non-concurrence.
Ils admettent encore que la société Staff courtage a souscrit des contrats d'assurance construction avec des acteurs du secteur de la construction tels des constructeurs de maison individuelle.
Au 31 décembre 2023, le chiffre d'affaires de la société Staff courtage est demeuré quasiment identique à celui de l'exercice précédent (180 335 euros au lieu de 182 338 euros). Si le résultat d'exploitation est négatif c'est en raison de l'augmentation des charges sociales du personnel. (Pièce 21 bis)
Selon la seule attestation de l'expert-comptable de la société Staff courtage, puisque le bilan n'a pas été produit, le chiffre d'affaires au 31 décembre 2024 a atteint 232 976 euros.
Le chiffre d'affaires de la société Staff courtage a ainsi fortement progressé. Le résultat net un temps négatif en 2023, est redevenu positif au 31 décembre 2024, à hauteur de 40 272 euros.
Par ailleurs, il apparaît que la société CJAD Invest a constitué une société Assur et moi le 28 mai 2022 ayant pour objet le conseil, le courtage et la gestion d'assurances pour les particuliers, professionnels et entreprises.
La société ABE justifie par diverses pièces de ce que la société Staff courtage directement ou par l'intermédiaire de la société Assur et moi a soit récupéré des clients ABE soit démarché des clients potentiels en matière d'assurance construction avant l'échéance de la clause de non-concurrence.
Pour exemple :
- Yisi par mandat de remplacement du 19 avril 2024,
- M. [T] par mandant de remplacement du 20 septembre 2024,
- Saladino group par l'intermédiaire de la société Assur et moi (négociation antérieure au 1er janvier 2025),
- Qualispace services selon mandat de remplacement du 28 octobre
2024.
Les appelants soutiennent que le point de départ des nouveaux contrats étaient postérieurs à l'expiration de la clause de non-concurrence et couraient donc à compter du 1er janvier 2025, ce qui justifierait, pour ne pas perdre une année d'engagement, les démarches antérieures auprès de potentiels clients.
Toutefois, ces démarches participent bien d'une violation de la clause.
L'ensemble de ces éléments permet de considérer que malgré la clause de non-concurrence, M. [O] et la société CJAD Invest ont réussi à maintenir une activité dans le domaine de l'assurance de la construction, limitant d'autant l'impact de l'illicéité de ladite clause.
Toutefois, cette clause illicite a nécessairement freiné les capacités d'expansion de M. [O] et de ses sociétés et de fait, la rémunération à laquelle pouvait prétendre M. [O], seul demandeur à l'indemnisation.
Ses revenus en qualités d'associé et/ou gérant selon les avis d'imposition sur les revenus 2022 et 2023, sont faibles ou inexistants.
Il n'est pas contesté par l'intimée que M. [O] bénéficiait avant la cession de contrats de mandat de sous-courtier et de sous-agent lui permettant de bénéficier d'une rémunération par rétrocession de commissions à hauteur, à ses dires, de la moitié du chiffre d'affaires réalisé.
Les appelants justifient des états comptables de « l'entreprise [O] [Y] » révélant qu'il générait au titre de ces commissions un chiffre d'affaires moyen annuel entre 2015 et 2021 de 99 830 euros.
Il n'est pas non plus contesté que la marge brute réalisée par la société Staff courtage s'établissait à 56 % du chiffre d'affaires tel qu'attesté par son expert-comptable.
Il en déduit qu'il aurait pu bénéficier, sans la clause, d'une marge brute, qu'il convient de rapporter à trois ans et non à trois ans et trois mois, de 131 776 euros.
Il doit toutefois être tenu compte du fait que M. [O] ne justifie pas qu'il aurait été en mesure de retrouver immédiatement une activité professionnelle de même nature, lui permettant d'atteindre une telle somme, dès la réalisation de la cession. Il doit également être tenu compte du fait qu'il a, par le non-respect de la clause de non concurrence, permis à la société qu'il a acquise, si ce n'est de dégager un résultat important, à tout le moins de développer son chiffre d'affaires augurant des perspectives encourageantes à venir.
En conséquence, au vu de l'ensemble de ces éléments et en tenant compte de l'imprécision des chiffres soumis à l'analyse, et notamment de l'absence de bilan comptable 2024 pour la société Staff courtage, voire pour la société Assur et moi, il convient de lui allouer une somme de 20 000 euros.
La société ABE sera condamnée à payer cette somme de 20 000 euros à M. [O] au titre de l'indemnisation de l'application de la clause de non concurrence illicite et le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de cette demande reconventionnelle.
Sur la demande reconventionnelle de M. [O] d'indemnisation d'un préjudice moral résultant des « actions judiciaires et des actions hostiles » de la société ABE
M. [O] fait valoir qu'outre la présente procédure, la société ABE a retenu abusivement le restant dû du prix de cession, ce qui l'a contraint à agir devant le tribunal de commerce de Nantes, puis l'a assigné en liquidation de l'astreinte, le fragilisant à titre personnel et économiquement.
Ce disant, alors au surplus que la cour n'est pas saisie, dans la présente instance, des autres litiges mentionnés, M. [O] ne démontre aucune intention malveillante ou hostile à dessein de la société ABE, seule à la cause à l'exclusion de ses associés, ni d'abus de celle-ci dans la défense de ses droits.
En outre, le certificat médical du 16 février 2024 relevant une asthénie de M. [O] qui ne fait que reprendre ses propres explications, est insuffisant à établir le lien de causalité avec le comportement de la société ABE.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de M. [O] au titre d'un préjudice moral.
Dépens et frais irrépétibles
La société ABE succombe principalement à l'instance.
Il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société CJAD Invest et M. [O] aux dépens et frais irrépétibles.
La société ABE sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Il convient de condamner à la société ABE à payer à M. [O], la société CJAD Invest et la société Staff courtage, ensemble, la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Rejette la demande de la société ABE d'irrecevabilité des conclusions des appelants des 4 et 5 juin 2025,
Rejette la demande de la société ABE de « juger irrecevables, comme tardifs, au visa de l'article 641 code de procédure civile, et pièces, tous les développements des appelants visant à répondre à l'appel incident inclus aux conclusions de la société ABE notifiées le 3 septembre 2024 »,
Rejette la demande de la société ABE de « juger irrecevables, comme nouvelles au stade de l'appel, les demandes et développements se rapportant à la première partie de la clause, dont la validité ne peut donc pas être mise en doute »,
Infirme le jugement en ce qu'il a :
- rejeté des débats la pièce n°6 intitulée accord de confidentialité et la pièce n°15 intitulée comptes sociaux de la société STAFF COURTAGE au 31 décembre 2021 produites par la société ABE,
- condamné la société ABE à verser à M. [Y] [O] et à la société CJAD INVEST la somme de 5.000 euros en raison de la faute contractuelle provoquée par divulgation de pièces confidentielles,
- constaté que la clause de non-concurrence n'est pas contestée par les parties dans sa réalité et son existence,
- jugé que M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST ont violé leur engagement de non-concurrence intégré au protocole du 15 septembre 2021,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et CJAD INVEST à verser à la société ABE la somme forfaitaire de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la violation manifeste de leur engagement,
- jugé que la clause de non-concurrence est explicitement disproportionnée dans le temps et dans l'espace et donc illégitime en son application en l'état,
- rejeté les demandes formées par la société ABE de voir M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST de se défaire de la propriété de STAFF COURTAGE, et de voir M. [O] démissionner de son mandat social de président de STAFF COURTAGE,
- condamné M. [O] et CJAD INVEST à cesser leur activité dans le domaine de l'assurance construction (assurance décennale et dommages-ouvrage) sur les départements de la [Localité 7]-Atlantique et l'Ille-et-Vilaine, et ce jusqu'au 31 décembre 2024, sous astreinte de 5.000 euros par mois de retard à compter d'un délai de trente jours calendaires suivants signification de la présente décision,
- dit que le juge se réserve le droit de liquider ladite astreinte,
- rejeté la demande d'indemnisation de M. [O] au titre de l'illicéité de la clause de non concurrence,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST à payer à la société ABE la somme de 5 000 euros par application des dispositions de 1'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum M. [Y] [O] et la société CJAD INVEST aux dépens,
Confirme le jugement pour le surplus des dispositions soumises à la cour,
Prononce la nullité de la clause de non-concurrence inscrite au protocole de cession du 15 septembre 2021,
Rejette l'ensemble des demandes de la société ABE au titre de la violation de la clause de non-concurrence,
Rejette des débats les pièces 6, 6bis et 54 produites par la société ABE,
Rejette la demande de la société Staff courtage d'indemnisation au titre de la violation de l'accord de confidentialité,
Condamne la société ABE à payer à M. [Y] [O] une somme de 20 000 euros au titre de l'indemnisation de l'application de la clause de non concurrence illicite,
Condamne la société ABE aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne la société ABE à payer à M. [Y] [O], la société CJAD Invest et la société Staff courtage, ensemble, la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles,
Rejette toute autre demande des parties,
Le Greffier, Le Président,