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CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 4 novembre 2025, n° 25/10006

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 25/10006

4 novembre 2025

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 4 NOVEMBRE 2025

(n° / 2025 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/10006 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLPJA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 mai 2025 -Tribunal de commerce de CRETEIL - RG n° 2025P00560

APPELANTE

S.A.R.L. AMIR, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de CRÉTEIL sous le numéro 889 705 364,

Dont le siège social est situé [Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010,

Assistée de Me Delphine MARATRAY-BACCUZAT, avocate au barreau de PARIS, toque : B1066,

INTIMÉS

Société S21Y, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de CRÉTEIL sous le numéro 813 660 693,

Dont le siège social est situé [Adresse 4]

[Localité 6]

Non constituée

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

[Adresse 1]

[Localité 3]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 octobre 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,

Madame Constance LACHEZE, conseillère,

Madame Isabelle ROHART, conseillère,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Isabelle ROHART dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

MINISTERE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Monsieur Christophe DELATTRE, avocat général, qui a fait connaître ses observations orales complétant l'avis écrit du 24 juillet 2025.

ARRÊT :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Sur saisine du ministère public, par jugement du 28 mai 2025, le tribunal de commerce de Créteil a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Amir exerçant une activité de restauration rapide, désigné la société S21Y prise en la personne de Me [G] en qualité de liquidateur judiciaire et fixé la date de cessation des paiements au 28 novembre 2023.

La société Amir a interjeté appel le 4 juin 2025, intimant le liquidateur judiciaire et le ministère public.

Par jugement du 18 juin 2025, le tribunal de commerce de Créteil a autorisé la poursuite de l'activité pour une durée de 3 mois.

Par ordonnance du 11 septembre 2025, le délégataire du Premier Président a arrêté l'exécution provisoire attachée au jugement déféré.

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA le 7 juillet 2025, de la société Amir par lesquelles elle demande à la cour de':

- annuler le jugement, sans effet dévolutif,

-à titre subsidiaire, infirmer le jugement, et dire qu'elle n'est pas en état de cessation des paiements,

- à titre infiniment subsidiaire, ouvrir une procédure de redressement judiciaire en lieu et place de la liquidation judiciaire,

- dire n'y avoir lieu à désignation d'un administrateur judiciaire,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

La société S21Y prise en la personne de Me [G] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Amir n'a pas constitué avocat et s'est abstenue d'adresser une note à la cour.

Par avis notifié par RPVA le 23 juillet 2025, le ministère public déclarait s'en rapporter, mais à l'audience, oralement, il a critiqué le jugement en ce que le tribunal ne s'est pas livré, comme la loi l'y invite, à une comparaison entre le passif exigible et l'actif disponible, en ce qu'il a ouvert une liquidation judiciaire sans caractériser l'impossibilité d'un redressement et en ce qu'il a fixé la date de cessation des paiements au 28 novembre 2023, sans avoir invité la société débitrice à donner son avis, contrairement aux dispositions de l'article L.631-8 du code de commerce.

SUR CE,

Sur les demandes de nullité du jugement.

La société Amir explique que le commissaire de justice a remis l'assignation à un salarié, M.[B], de nationalité afghane, qui n'a pas compris l'importance de ce pli et ne l'a pas remis immédiatement au dirigeant, de sorte que l'audience s'est déroulée en son absence. Elle critique le jugement en ce qu'il a prononcé sa liquidation judiciaire sans élément la concernant.

Elle considère que sa convocation est irrégulière au motif qu'elle a été convoquée à comparaître devant le tribunal, alors qu'elle aurait dû être convoquée en chambre du conseil et demande de prononcer la nullité du jugement.

Elle demande également que soit prononcée la nullité de l'assignation et du jugement, au motif que M.[B] auquel l'assignation a été remise ne parle pas le français et qu'il n'était pas une personne habilitée à recevoir l'acte.

Elle soutient, en conséquence, que l'acte introductif n'a pas été correctement délivré et que cette irrégularité lui a causé un préjudice.

Sur ce,

Selon l'article 654 du code de procédure civile, la signification doit être faite à personne. La signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal, à un fondé de pouvoir de ce dernier, ou à toute autre personne habilitée à cet effet.

En l'espèce, l'assignation a été délivrée à personne habilitée c'est-à-dire à un salarié identifié de la société Amir. Il est de jurisprudence constante que la signification d'un jugement à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à toute personne habilitée sans que le commissaire de justice ait à vérifier la qualité déclarée par la personne à qui est remise la copie de l'assignation.

Il s'ensuit que l'assignation a été valablement délivrée et que la demande de nullité, sur ce fondement sera rejetée.

S'agissant de la demande de nullité fondée sur le fait que la société Amir a été convoquée non pas en chambre du conseil , mais devant le tribunal, il résulte de l'article L.621-1 du code de commerce que «le tribunal statue sur l'ouverture de la procédure, après avoir entendu ou dûment appelé en chambre du conseil le débiteur ('.)».

En l'espèce, si la convocation ne précise pas que la société Amir devait comparaître en chambre du conseil, néanmoins il résulte des mentions contenues dans le jugement que les débats ont eu lieu en chambre du conseil, de sorte qu'aucune nullité ne peut être encourue.

En conséquence, la société Amir sera déboutée de ses demandes de nullité.

Sur l'état de cessation des paiements.

La société Amir conteste être en état de cessation des paiements, ce qui est attesté par son expert comptable. Elle soutient que son passif exigible était constitué d'une dette Urssaf d'un montant de 12.203 euros qui a été réglée, qu'il n'existe aucun passif exigible à ce jour, que les loyers et les dettes courantes sont régulièrement payés.

Elle fait valoir que son actif disponible s'élève à la somme de 32. 116,95 euros et qu'elle n'est donc pas en état de cessation des paiements.

Sur ce,

Il résulte de l'article L. 631-1 du code de commerce que la cessation des paiements se définit comme étant l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, mais que le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en état de cessation des paiements.

En l'espèce, selon les éléments versés au débat, il n'existe pas de passif exigible et il résulte des pièces communiquées que le passif Urssaf mentionné dans le jugement a été réglé, de sorte que la société Amir ne se trouve pas en état de cessation des paiements, ainsi que l'atteste, de façon circonstanciée et précise, son expert comptable.

Le jugement sera donc infirmé et il n'y a pas lieu à ouverture à son égard d'une procédure collective.

Les dépens seront mis à la charge du Trésor Public.

Aucune considération ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Rejette les demandes de nullité du jugement,

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau,

Constate que la société Amir n'est pas en état de cessation des paiements,

Dit n'y avoir lieu à ouverture à son égard d'une procédure collective,

Dit que les dépens seront à la charge du Trésor Public,

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Liselotte FENOUIL

Greffière

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT

Présidente

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