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Décisions

CA Rennes, 3e ch. com., 4 novembre 2025, n° 25/02795

RENNES

Arrêt

Autre

CA Rennes n° 25/02795

4 novembre 2025

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N°314

N° RG 25/02795 - N° Portalis DBVL-V-B7J-V6UH

(Réf 1ère instance : 2024003152)

S.A.S. PETIT FER 1

C/

L'AGENT COMPTABLE

S.E.L.A.S. CLEOVAL

MINISTERE PUBLIC

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me VERRANDO

Copie certifiée conforme délivrée

le :

à :

TC Vannes

Parquet général

Petit Fer 1

Agent Comptable

Cléoval

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Sophie RAMIN, Conseiller,

Assesseur : Mme Constance DESMORAT, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Julie ROUET, lors des débats et lors du prononcé

MINISTERE PUBLIC :

Monsieur Yves DELPERIE, avocat général, auquel l'affaire a été régulièrement communiquée, entendu en ses observations.

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Septembre 2025 devant Mme Constance DESMORAT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 04 Novembre 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

S.A.S. PETIT FER 1 immatriculée au RCS de Vannes sous le n° 838 158 152, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Jérôme CLERC de la SELARL LX POITIERS-ORLEANS, Plaidant, avocat au barreau de POITIERS

INTIMÉS :

L'agent comptable responsable du pôle de recouvrement spécialisé représentant la direction départementale des finances publiques du Morbihan

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N'ayant pas constitué avocat bien que régulièrement assigné par acte de commissaire de Justice en date du 24 juin 2025 remis à personne morale

S.E.L.A.S. CLEOVAL prise en la personne de Me [L] [F] ès qualité de mandataire au redressement judiciaire de la société PETIT FER 1 désignée par jugement du tribunal de commerce de Vannes du 7 mai 2025

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N'ayant pas constitué avocat bien que régulièrement assigné par acte de commissaire de Justice en date du 24 juin 2025 remis à personne morale

MINISTERE PUBLIC représenté par Monsieur le Procureur Général près la cour d'appel de Rennes

FAITS ET PROCÉDURE

Le 25 mars 2022, un avis de mise en recouvrement de la somme de 107 680 euros a été adressé à la société Petit Fer 1 par le pôle de recouvrement de la direction départementale des finances publiques du Morbihan. Cette somme fait suite à une proposition de rectification au titre de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée.

Les 22 août, 2 septembre et 6 septembre 2022, une transaction a été signée entre la société Petit Fer 1, la direction départementale des finances publiques et le comptable public du Morbihan arrêtant la somme due à 92 879 euros payable dans le délai de 24 mois.

Le 24 septembre 2024, l'administration fiscale a informé la société Petit Fer 1 de la caducité de la transaction.

Considérant que l'actif disponible de la société Petit Fer 1 n'était pas suffisant pour faire face au passif exigible et en l'absence de bien immobilier saisissable, le comptable du pôle de recouvrement spécialisé du Morbihan a assigné le 2 décembre 2024 la société Petit Fer 1 aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, subsidiairement, d'une procédure de redressement judiciaire.

Par jugement du 7 mai 2025, le tribunal de commerce de Vannes a :

- Constaté l'état de cessation des paiements de la société Petit Fer 1, et ouvert à son égard une procédure de redressement judiciaire,

- Fixé au 7 novembre 2023, la date de cessation de ses paiements,

- Désigné pour cette procédure les organes suivants :

- Juge Commissaire : M. Legentil,

- Juge Commissaire suppléant : M. Dumoulin,

- Mandataire judiciaire : SELAS Cleoval prise en la personne de Maître [F] - [Adresse 1],

- Commissaire de Justice : SELAS Astree prise en la personne de Maître Ruellan - [Adresse 4],

- Dit, conformément aux dispositions de l'article L.631-9 du code de commerce, que le commissaire de justice devra réaliser l'inventaire et la prisée prévus à l'article L.622-6 dudit code, et lui impartit un délai d'un mois à compter du prononcé du présent jugement pour les transmettre au Greffe en vue de leur dépôt et dit qu'il pourra, en tant que de besoin, s'adjoindre, à ses frais, tout sapiteur de son choix,

- Invité, le cas échéant, conformément aux dispositions des articles L.631-9-1 et L.621-4 du code de commerce, le comité social et économique ou, à défaut, les salariés, à désigner un représentant parmi les salariés de l'entreprise, et dit qu'en cas de carence, il appartiendra au chef d'entreprise d'en dresser procès-verbal, conformément aux textes sus-visés,

- Dit et jugé qu'en application des dispositions de l'article L.631-15 du code de commerce, l'affaire sera rappelée, en chambre du Conseil, avant l'expiration d'un délai de deux mois à compter du prononcé du présent jugement, soit à l'audience du 9 juillet 2025, à quatorze heures, afin qu'il soit statué sur l'éventuelle poursuite de la période d'observation au vu de tout document justifiant de la capacité financière de la société débitrice à poursuivre ladite période d'observation, et notamment d'un compte d'exploitation et de ses relevés de banque pour la période postérieure au prononcé de son redressement judiciaire, et dit et juge qu'il appartiendra à la Société débitrice, en l'absence d'administrateur, d'établir le rapport prévu par cet article,

- Fixé à dix-huit mois à compter du prononcé du présent jugement le délai au cours duquel le liquidateur devra établir, après avoir sollicité les observations du débiteur, la liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente,

- Ordonné la signification du présent jugement à la diligence du Greffe, par acte de Commissaire de Justice à la société Petit Fer 1, ainsi que sa communication par tout moyen au Ministère Public, au mandataire judiciaire, au Directeur départemental des Finances Publiques et au Commissaire de Justice ci-dessus désigné, outre les autres mesures de publicité prévues par la Loi, et ce, nonobstant toutes voies de recours,

- Ordonné l'emploi des entiers dépens afférents au présent jugement et aux mesures de publicité subséquentes, en frais privilégié de procédure.

La société Petit Fer 1 a interjeté appel le 19 mai 2025.

Les dernières conclusions de la société Petit Fer 1 sont en date du 14 août 2025.

Le ministère public a rendu son avis le 8 juillet 2025.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 4 septembre 2025.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

La société Petit Fer 1 demande à la cour de :

- Juger la société Petit Fer 1 recevable et bien fondée en son appel,

- Infirmer le jugement en toutes ses dispositions critiquées et particulièrement en ce qu'il a :

- Constaté l'état de cessation des paiements de la société Petit Fer 1, et ouvre à son égard une procédure de redressement judiciaire,

- Fixé au 7 novembre 2023, la date de cessation de ses paiements,

- Désigné pour cette procédure les organes suivants :

- Juge Commissaire : M. Legentil,

- Juge Commissaire suppléant : M. Dumoulin,

- Mandataire judiciaire : SELAS Cleoval prise en la personne de Maître [F] - [Adresse 1],

- Commissaire de Justice : SELAS Astree prise en la personne de Maître Ruellan - [Adresse 4],

- Dit, conformément aux dispositions de l'article L.631-9 du code de commerce, que le commissaire de justice devra réaliser l'inventaire et la prisée prévus à l'article L.622-6 dudit code, et lui impartit un délai d'un mois à compter du prononcé du présent jugement pour les transmettre au Greffe en vue de leur dépôt et dit qu'il pourra, en tant que de besoin, s'adjoindre, à ses frais, tout sapiteur de son choix,

- Invité, le cas échéant, conformément aux dispositions des articles L.631-9-1 et L.621-4 du code de commerce, le comité social et économique ou, à défaut, les salariés, à désigner un représentant parmi les salariés de l'entreprise, et dit qu'en cas de carence, il appartiendra au chef d'entreprise d'en dresser procès-verbal, conformément aux textes sus-visés,

- Dit et jugé qu'en application des dispositions de l'article L.631-15 du code de commerce, l'affaire sera rappelée, en chambre du Conseil, avant l'expiration d'un délai de deux mois à compter du prononcé du présent jugement, soit à l'audience du 9 juillet 2025, à quatorze heures, afin qu'il soit statué sur l'éventuelle poursuite de la période d'observation au vu de tout document justifiant de la capacité financière de la société débitrice à poursuivre ladite période d'observation, et notamment d'un compte d'exploitation et de ses relevés de banque pour la période postérieure au prononcé de son redressement judiciaire, et dit et juge qu'il appartiendra à la Société débitrice, en l'absence d'administrateur, d'établir le rapport prévu par cet article,

- Fixé à dix-huit mois à compter du prononcé du présent jugement le délai au cours duquel le liquidateur devra établir, après avoir sollicité les observations du débiteur, la liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente,

- Ordonné la signification du présent jugement à la diligence du Greffe, par acte de Commissaire de Justice à la société Petit Fer 1, ainsi que sa communication par tout moyen au Ministère Public, au mandataire judiciaire, au Directeur départemental des Finances Publiques et au Commissaire de Justice ci-dessus désigné, outre les autres mesures de publicité prévues par la Loi, et ce, nonobstant toutes voies de recours,

- Ordonné l'emploi des entiers dépens afférents au présent jugement et aux mesures de publicité subséquentes, en frais privilégié de procédure

Et statuant à nouveau :

- Juger n'y avoir lieu à l'ouverture d'une procédure collective en l'absence d'état de cessation des paiements,

En tout état de cause, et rejetant toute demande contraire comme irrecevable et en toute hypothèse mal fondée :

- Débouter le Pôle de Recouvrement spécialisé du Morbihan et la SELAS Cleoval prise en la personne de Maître [F] es-qualités, de toutes leurs demandes,

- Condamner le Pôle de Recouvrement spécialisé du Morbihan à verser à la société Petit Fer 1 la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner le Pôle de Recouvrement spécialisé du Morbihan aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le ministère public est d'avis de confirmer le jugement.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

DISCUSSION

La société Cléoval et l'agent comptable du pôle de recouvrement spécialisé du Morbihan n'ayant pas conclu au fond sont réputés s'approprier les motifs du jugement en application de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile.

1- Sur l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire

La société Petit Fer 1 fait valoir que la créance de l'administration fiscale n'est ni certaine ni exigible, contrairement à ce qu'a soutenu le comptable du pôle de recouvrement spécialisé en première instance.

Elle ajoute que la situation a évolué et qu'elle dispose à présent d'un actif disponible.

La société Petit Fer 1 est une société commerciale qui peut faire l'objet d'une procédure de redressement judiciaire.

Article L.631-1 du code de commerce

Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.

Cette condition s'apprécie, s'il y a lieu, pour le seul patrimoine engagé par l'activité ou les activités professionnelles.

La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de classes de parties affectées, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30. La demande prévue au quatrième alinéa de l'article L. 626-29 peut être formée par le débiteur ou l'administrateur judiciaire.

L'état de cessation des paiements s'apprécie au jour où la juridiction statue. (Cf : Com 06/10/1992 90-18.992, jurisprudence constante)

La caducité de la transaction prononcée le 24 septembre 2024 par le comptable des finances publiques a rendu la créance immédiatement exigible.

Le 19 juin 2025, le comptable des finances publiques a déclaré sa créance au passif de la société Petit Fer 1 pour la somme de 14 661, 41 euros ce qui démontre que la société a payé la créance fiscale en majeure partie ainsi que cela ressort des échanges de courriels du 6 mai 2025 entre le pôle de recouvrement spécialisé et la société Petit Fer 1.

Le 19 juin 2025 également, la société Petit Fer 1 a vendu un bien immobilier pour la somme de 200 000 euros.

Le relevé de compte de la société Petit Fer 1 détenu par le notaire mentionne que la somme 17 641,41 euros est affectée au paiement de la créance fiscale et que la société percevra la somme de 150 268,34 euros au titre du solde du prix de vente.

Si en l'état rien ne démontre que la créance fiscale a été effectivement payée par la société Petit Fer 1, cette dernière justifie disposer d'une réserve de crédit qui doit être considérée comme un actif disponible.

Ainsi, la société Petit Fer 1 dispose de l'actif suffisant pour faire face au passif exigible constitué de la seule créance fiscale.

Par conséquent, l'état de cessation des paiements n'est pas caractérisé et une procédure de redressement judiciaire n'a pas lieu d'être ouverte.

Le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions soumises à la cour.

2- Sur les frais et les dépens

Le comptable du pôle de recouvrement spécialisé du Morbihan, partie succombante, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

Il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement du tribunal de commerce en toutes ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Dit qu'en application de l'article R.661-7 du code de commerce, la présente décision sera notifiée aux parties et au procureur général à la diligence du greffier de la cour dans les huit jours de son prononcé et qu'une copie de la présente décision sera transmise dans les huit jours de son prononcé au greffier du tribunal de commerce de Vannes pour l'accomplissement des mesures de publicité et d'avis prévues par l'article R.621-7 du code de commerce,

Rejette les autres demandes des parties,

Condamne le comptable du pôle de recouvrement spécialisé du Morbihan aux dépens de première instance et d'appel,

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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