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CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 4 novembre 2025, n° 25/07111

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 25/07111

4 novembre 2025

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 8

ARRÊT DU 4 NOVEMBRE 2025

(n° / 2025 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/07111 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLGOZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 mars 2025 -Tribunal de commerce de Créteil - RG n° 2025J00258

APPELANTE

S.A.R.L. AUDITEURS ASSOCIÉS COMMISSAIRE AUX COMPTES, société à responsabilité limitée, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 529 061 053,

Dont le siège social est situé [Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocate au barreau de PARIS, toque : B0515,

Assistée de Me Rudi PFORTNER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1108,

INTIMÉS

S.E.L.A.S. BL & ASSOCIES, prise en la personne de Maître [S] [Y], en qualité d'administrateur judiciaire de la société AUDITEURS ASSOCIES COMMISSAIRE AUX COMPTES,

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de CRETEIL sous le numéro 898 429 816,

Dont le siège social est situé [Adresse 3]

[Localité 9]

S.E.L.A.R.L. JSA, prise en la personne de Maître [R] [T], en qualité de mandataire judiciaire de la société AUDITEURS ASSOCIES COMMISSAIRE AUX COMPTES,

Dont l'étude est située [Adresse 5]

[Localité 10]

Représentées par Me Valerie DUTREUILH, avocat au barreau de PARIS, toque : C0479,

Assistées de Me Esther CLAUDEL, avocat au barreau de PARIS, toque : C0479,

L'ASSOCIATION FR DIRECTEURS CHEFS CREDI (AFDCC)

Située [Adresse 2]

[Localité 6]

Non constituée

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

[Adresse 4]

[Localité 8]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 septembre 2025, en audience publique, devant la cour, composée de :

Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,

Madme Constance LACHEZE, conseillère,

Monsieur François VARICHON, conseiller,

Qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL

ARRET :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

FAITS ET PROCÉDURE

La SARL Auditeurs Associés Commissaires aux Comptes (ci-après la société AACC), créée en 2011, exerce une activité d'expertise comptable, d'audit et de commissariat aux comptes.

Sur assignation du 8 octobre 2024 de l'association AFDCC, invoquant une créance de 4.076 euros, et par jugement du 19 mars 2025, le tribunal de commerce de Créteil a constaté l'état de cessation des paiements, ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société AACC, fixé provisoirement au 10 novembre 2023 la date de cessation des paiements, désigné la SELARL JSA, en la personne de Me [T], en qualité de mandataire judiciaire, la SELAS BL & Associés, en la personne de Me [Y], en qualité d'administrateur judiciaire et dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de redressement judiciaire.

Le 10 avril 2025, la société AACC a relevé appel de ce jugement.

Le 22 juillet 2025, le tribunal de commerce de Créteil a dit n'y avoir lieu à la conversion de la procédure en liquidation judiciaire et a autorisé la poursuite de la période d'observation, puis le 3 septembre 2025, a prolongé la période d'observation de six mois.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 29 septembre 2025, la société AACC demande à la cour de juger son appel recevable et bien fondé, infirmer le jugement en toutes ses dispositions, statuant à nouveau, juger que son actif disponible est supérieur à son passif exigible, dire n'y avoir lieu à redressement judiciaire, rejeter la demande de la société AFDCC sollicitant l'ouverture d'une procédure collective à son encontre, débouter la société AFDCC de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 22 septembre 2025, la SELARL JSA, ès qualités, et la SELAS BL & Associés, ès qualités, demandent à la cour de prendre acte de ce qu'ils s'en rapportent à justice quant à l'infirmation du jugement, en cas d'infirmation du jugement ouverture, fixer l'émolument de la SELARL JSA, ès qualités, à la somme de 2.351,25 euros et condamner la société AACC au paiement de ladite somme, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dont distraction au profit de Me Dutreuilh, avocat, ainsi qu'aux entiers dépens.

La déclaration d'appel a été signifiée à l'association AFDCC (à personne morale) le 13 mai 2025, sans que cette dernière ne constitue avocat.

Le ministère public a visé le dossier le 30 septembre 2025 sans faire d' observations.

Ainsi qu'elle y avait été autorisée par la cour, la société Auditeurs Associés Commissaires aux comptes a communiqué en délibéré le dernier relevé complet de son compte au LCL.

SUR CE,

- Sur l'état de cessation des paiements

L'article L.631-1 du code de commerce définit la cessation des paiements comme l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.

En cas d'appel, l'état de cessation des paiements s'apprécie au jour où la cour statue.

La société AACC conteste être en cessation des paiements. Elle fait état dans ses écritures:

- d'un actif disponible de 52.300 euros constitué d'un solde de compte bancaire, d'avances en compte courant apportées par son président M.[P] et de la remise par ce dernier d'un chèque de 30.000 euros destiné à être encaissé par la société en cas de besoin de trésorerie. Elle a actualisé à l'audience son actif disponible à la somme de 65.104,19 euros, montant du solde créditeur de son compte bancaire au 26 septembre 2025 suite à l'encaissement de deux virements;

- d'un passif exigible qu'elle évalue à un maximum de 42.904,72 euros, sans préjuger de l'existence de contestations .

Selon les organes de la procédure le passif déclaré s'élève à 47. 843,86 euros, dont 1.300 euros à titre provisionnel, soit un passif exigible de 46.543 euros se décomposant comme suit :

- à titre privilégié :

- PRS : 3 086 euros (TVA) échu ;

- PRS : 1 901 euros (IS) échu et 1 200 euros de provisionnel ;

- PRS : 2 200 euros (CFE) échu et 100 euros de provisionnel ;

- AG2R La Mondiale : 5 713 euros échu ;

- Urssaf : 12 908 euros échu ;

- Bailleur : 9 861 euros échu ;

- à titre chirographaire :

- AFDCC : 3 639,13 euros échu ;

- ISCD : 5 840 euros échu ;

- OFFI : 1 375 euros échu.

Ils exposent que la saisie-attribution qui avait été pratiquée sur le compte de la société le 10 novembre 2023 avait révélé un solde débiteur de -23.327,93 euros, que la société ne justifie pas de la facilité de caisse de 20.000 euros allèguée, que les virements mensuels cumulés au profit de M.[P], son dirigeant, sont importants rapportés à la trésorerie disponible, que les avances en compte faites par M.[P] sont moindres que les virements à son profit, mais que l'encaissement à intervenir du chèque de 30.000 euros invoqué par l'appelante, s'il était concrétisé, pourrait permettre à la société AACC de faire face à son passif exigible.

- sur le passif exigible

Le passif exigible à prendre en compte pour apprécier l'existence un état de cessation des paiements est au maximum de 46.543 euros. L'écart avec le montant de 42.904,72 euros évoqué par la société AACC tient à la créance de 3.639,13 euros de la société AFDCC, créancier poursuivant. La société AACC soutient qu'une transaction est intervenue avec ce créancier aux termes de laquelle la société AFDCC s'est engagée à émettre une facture d'avoir de 2.250 euros à l'attention de la société AACC et à émettre une facture de 2.000 euros HT à l'attention de M.[P], ce dernier s'engageant personnellement à régler cette dernière sous deux jours. Le protocole joint au dossier n'est pas signé et il n'est pas justifié en l'état d'une renonciation de la société AFDCC à sa créance , raison pour laquelle la cour retiendra par sécurité un passif exigible de 46.543 euros.

- sur l'actif disponible

Il ressort des documents actualisés, que le compte de la société AACC ouvert dans les livres de la banque LCL présentait au 26 septembre 2025 un solde créditeur de 64.104,19 euros, qui n'intégre pas le chèque de 30.000 euros évoqué dans les écritures de la société appelante, puisque ce chèque n'a pas été remis à l'encaissement.A la date du relevé les salaires du mois de septembre, évalués à environ 6.000 euros par le dirigeant, n'avaient pas encore été payés, mais à supposer leur exigibilité imminente, le solde du compte bancaire de la société resterait créditeur de 58.104 euros, soit un montant suffisant pour faire face au passif exigible.

La société AACC n'est donc pas en cessation des paiements au jour des débats devant la cour. En conséquence, le jugement ayant ouvert une procédure de redressement judiciaire doit être infirmé en toutes ses dispositions. Statuant à nouveau, la cour juge n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure collective à l'égard de la société AACC.

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société AACC qui s'est abstenue de comparaître en première instance et qui a négocié un protocole transactionnel avec le créancier poursuivant, seulement après l'ouverture du redressement judiciaire, supportera les entiers dépens.

Elle devra en outre acquitter auprès de la SELARL JSA, ès qualités, le droit fixe de 2.351,25 euros qui lui est dû dès l'ouverture de la procédure et qui lui reste acquis en dépit de l'infirmation de la décision ouvrant le redressement judiciaire. Les organes de la procédure ont par ailleurs été contraints d'exposer des frais d'avocat pour assurer la défense de la société en appel. La société AACC sera en conséquence condamnée à verser une indemnité procédurale de 2.000 euros aux organes de la procédure

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la société Auditeurs Associés Commissaires aux comptes n'est pas en cessation des paiements,

En conséquence, dit n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire à l'égard de la société Auditeurs Associés Commissaires aux comptes,

Condamne la société Auditeurs Associés Commissaires aux comptes aux dépens qui pourront être recouvrés directement par Maître Dutreuilh, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société Auditeurs Associés Commissaires aux comptes à payer à la SELARL JSA, ès qualités, le montant du droit fixe soit 2.351,25 euros HT, et à verser au mandataire judiciaire et à l'administrateur judiciaire, ès qualités, pris ensemble, une indemnité procédurale de 2.000 euros.

Liselotte FENOUIL

Greffière

Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT

Présidente

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