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Décisions

Cass. com., 10 octobre 2000, n° 97-10.245

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Dumas

Rapporteur :

Boinot

Avocat général :

Jobard

Cass. com. n° 97-10.245

9 octobre 2000

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par acte du 24 novembre 1990, la société Macore a cédé son fonds de commerce à la société de Palmas Structor ; que celle-ci s'est engagée à acheter tout le stock, dont une partie du prix devait être payée par lettres de change échelonnées du 31 mai 1991 au 31 décembre 1991, tirées par la société Macore sur la société de Palmas Structor ; qu'en raison de difficultés avec la société Macore affectant ces stocks, la société de Palmas Structor a demandé des prorogations d'échéance de ces "traites" qui avaient été avalisées par le Crédit agricole de La Réunion (Crédit agricole) sans indication du bénéficiaire de la garantie ; que le Crédit agricole lui a octroyé, le 31 décembre 1991, un prêt d'un montant de 6 900 000 francs qu'elle a porté au crédit de son compte ; qu'il lui a également accordé une avance sur marchandises ; qu'une transaction étant intervenue entre la société de Palmas Structor et la société Macore, la société de Palmas Structor a renoncé à toutes contestation sur les stocks et admis qu'il n'y avait plus d'obstacle au règlement, par le Crédit agricole, des "traites" acceptées ; qu'à la suite de la mise en redressement judiciaire de la société de Palmas Structor le 10 juin 1992, le Crédit agricole a déclaré sa créance pour un montant qui a été contesté par la société de Palmas Structor, laquelle a fait appel de l'ordonnance du juge-commissaire ;

Attendu que la société de Palmas Structor fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande de réintégration, dans le compte courant, du prêt et des avances sur marchandises que lui avait consentis le Crédit agricole, alors, selon le pourvoi, d'une part, que toutes les créances certaines et liquides, nées d'opérations juridiques passées entre deux personnes qui sont en compte courant doivent, en raison du caractère de généralité de ce compte, être passées en compte, en l'absence d'affectation spéciale prévue par celles-ci ; qu'en décidant que les avances sur marchandises accordées par acte sous seing privé n'entreraient pas en compte, dès lors que cet acte ne le prévoyait pas expressément, la cour d'appel a, par suite, violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'en affirmant au surplus, que la société de Palmas Structor se serait engagée à rembourser le prêt de 6 900 000 francs "sans pouvoir solliciter son intégration dans le compte courant", sans préciser sur quelles pièces elle fondait un accord des parties pour faire exception, s'agissant de ce prêt, à la règle de la généralité du compte courant, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;


Mais attendu, en premier lieu, qu'il résulte des écritures de la société de Palmas Structor que le prêt litigieux avait été porté au crédit de son compte, entraînant alors une réduction de son débit ; que, ce prêt ayant gardé son autonomie, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que son montant n'avait pas à être à nouveau porté en réduction du découvert ;

Et attendu, en second lieu, qu'en ce qui concerne les avances sur marchandises dont la société de Palmas Structor demandait la réintégration dans le compte courant, il ne résulte pas de ses écritures devant la cour d'appel qu'elles n'aient pas été délivrées, comme le prêt précité, par inscription de leurs montants au crédit du compte courant, aucun élément n'ayant été invoqué pour justifier que cette délivrance soit intervenue par un accroissement du découvert ;


D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;


Sur le quatrième moyen :


Attendu que la société de Palmas Structor fait grief à l'arrêt de ne pas avoir sursis à statuer sur sa demande, alors, selon le pourvoi, que, dans ses conclusions signifiées le 20 septembre 1995, la société de Palmas Structor faisait valoir que la procédure engagée devant le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis tendait non seulement à voir engager la responsabilité du Crédit agricole, mais également à faire admettre que les sûretés prises par la banque avaient été consenties pour une dette antérieurement contractée et étaient nulles en application de larticle 107-6 de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;


Mais attendu que, par motifs adoptés du premier juge, la cour d'appel a décidé qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer, seul le tribunal ayant compétence pour déclarer nuls une hypothèque ou un nantissement ; que le moyen n'est pas fondé ;


Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 1907 du Code civil, ensemble l'article 4 de la loi du 28 décembre 1966 et l'article 2 du décret du 4 septembre 1985 ;

Attendu que, pour rejeter la contestation de la société de Palmas Structor relative au taux des intérêts
conventionnellement accepté, la cour d'appel relève que le Crédit agricole établit que, par acte sous seing privé du 15 mai 1991, la société de Palmas Structor a bénéficié d'une ouverture de crédit en compte courant d'un montant de 1 000 000 francs renvoyant aux conditions générales de banque et que la société de Palmas Structor ne peut sérieusement soutenir n'avoir pas eu connaissance de ce dernier document alors qu'elle a reconnu le contraire dans sa demande d'ouverture de compte ;


Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle n'avait pas constaté que ledit document comportait mention du taux effectif global applicable à l'ouverture de crédit du 15 mai 1991, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;


Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :


Vu les articles 1131 et 1134 du Code civil ;


Attendu que, pour rejeter la contestation de la société de Palmas Structor relative aux dates de valeur
conventionnellement acceptées, la cour d'appel relève que le Crédit agricole établit que, par acte sous seing privé du 15 mai 1991, la société de Palmas Structor a bénéficié d'une ouverture de crédit en compte courant d'un montant de 1.000.000 F renvoyant aux conditions générales de banque et que la société de Palmas Structor ne peut sérieusement soutenir n'avoir pas eu connaissance de ce dernier document alors qu'elle a reconnu le contraire dans sa demande d'ouverture de compte ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle n'avait pas constaté que ledit document comportait mention des dates de valeur applicables à l'ouverture de crédit du 15 mai 1991, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;


Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :


Vu l'article 1352 du Code civil, ensemble l'article 130, alinéa 6, du Code de commerce ;


Attendu que, pour rejeter la contestation de la société de Palmas Structor relative au montant de la créance du Crédit agricole, la cour d'appel relève qu'il est constant que la société de Palmas Structor a convenu par écrit qu'il n'existait plus, compte tenu de la transaction intervenue, d'obstacle à ce que le Crédit agricole règle des effets de commerce avalisés sans indication du nom du bénéficiaire de l'aval ; qu'après avoir donné cet accord, la société de Palmas Structor ne peut plus invoquer les dispositions de l'article 130 du Code de commerce auxquelles elle a implicitement mais nécessairement renoncé ;


Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, l'article 130, alinéa 6, du Code de commerce ne formulant pas une règle de preuve, la présomption qu'il instaure ne peut être contredite par une renonciation implicite, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 novembre 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;


Condamne la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) de la Réunion aux dépens ;


Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette sa demande ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille.

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