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CA Colmar, ch. 1 a, 5 novembre 2025, n° 25/00273

COLMAR

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CA Colmar n° 25/00273

5 novembre 2025

MINUTE N° 439/25

Copie exécutoire à

- la SCP CAHN ET ASSOCIES

Copie à M. le PG

Arrêt notifié aux parties

Le 05.11.2025

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRET DU 05 Novembre 2025

Numéro d'inscription au répertoire général : 1 A N° RG 25/00273 - N° Portalis DBVW-V-B7J-IOKZ

Décision déférée à la Cour : 17 Décembre 2024 par le Tribunal judiciaire de COLMAR - Chambre commerciale

APPELANT :

Monsieur [Y] [O]

[Adresse 4]

Représenté par Me Thierry CAHN de la SCP CAHN ET ASSOCIES, avocat à la Cour

INTIMES :

S.A.S. [Z] & ASSOCIÉS, prise en la personne de Maître [B] [Z], mandataire judiciaire [Adresse 2]

non représentée, assignée par le commissaire de justice à personne habilitée le 03.03.2025

Monsieur le Procureur Général

[Adresse 6]

assigné par le commissaire de justice à personne habilitée le 03.03.2025

PARTIE MISE EN CAUSE :

Monsieur [N] [T]

[Adresse 5]

non représenté, assigné en l'étude du commissaire de justice le 15.05.2025

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Octobre 2025, en chambre du conseil, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. WALGENWITZ, Président de chambre.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. WALGENWITZ, Président de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller

Mme RHODE, Conseillère, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE

Ministère Public :

représenté lors des débats par M. VANNIER, avocat général, qui a fait connaître son avis et dont les conclusions écrites ont été communiquées aux parties.

ARRET :

- Rendu par défaut

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par M. Franck WALGENWITZ, président et Mme Régine VELLAINE, cadre greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

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Monsieur [Y] [O], domicilié au [Adresse 3] à [Localité 8], est immatriculé au RCS de [Localité 7] en tant qu'entrepreneur individuel depuis le 27 avril 2017 (numéro SIREN 502 426 778), pour l'exploitation d'une activité de récupération et négoce de fers et métaux, achat et vente de véhicules d'occasion et de pièces détachées, vide grenier, vente en non sédentaire de brocante et tous produits non alimentaires et non réglementés.

'

Le 7 février 2024, Monsieur [N] [T] saisissait par voie de requête la chambre commerciale du tribunal judiciaire de COLMAR afin de faire constater l'état de cessation des paiements de Monsieur [Y] [O] et obtenir l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, ou à défaut, de liquidation judiciaire.'Au cours de l'audience, Monsieur [N] [T], par l'intermédiaire de son conseil, soutenait que Monsieur [Y] [O] était débiteur à son égard de la somme de 2 200 euros, montant fixé par décision du tribunal de proximité de SELESTAT en date du 27 août 2021, dont la tentative de recouvrement par huissier s'était avérée infructueuse.

'

Monsieur [Y] [O] n'était pas comparant et n'était pas non plus représenté.

''

Par jugement réputé contradictoire du 17 décembre 2024, la chambre commerciale du tribunal judiciaire de COLMAR a :

'- constaté l'état de cessation des paiements du patrimoine professionnel de Monsieur [Y] [O] ;'

- constaté l'état de surendettement du patrimoine personnel de Monsieur [Y] [O] ;'

- constaté que les conditions de l'article L.711-1 du code de la consommation sont réunies ;

- constaté que la distinction des deux patrimoines de Monsieur [Y] [O] n'est pas strictement respectée ;

- constaté l'impossibilité manifeste du redressement du patrimoine professionnel et du patrimoine personnel de Monsieur [Y] [O] au sens de l'article L.640-1 du code de commerce ;

- ordonné en conséquence l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire du patrimoine professionnel et du patrimoine personnel de Monsieur [Y] [O] ;

- fixé provisoirement, pour le patrimoine professionnel, la date de cessation des paiements au 17 juin 2023 ;

- dit que le présent jugement emporte interdiction de payer toute créance dont l'origine serait antérieure au présent jugement ;

- désigné Madame [I] [E] en qualité de juge-commissaire et Monsieur [K] [M] en qualité de juge commissaire suppléant ;

- désigné la SAS [Z] & Associés, prise en la personne de Maître [B] [Z], [Adresse 2], en qualité de liquidateur ;

- invité les salariés à désigner leur représentant qui communiquera son nom et son adresse au Greffe de la Chambre Commerciale de ce Tribunal (L 621-4 du Code de Commerce) ;

- fixé à huit mois à compter de ce jour le délai laissé au liquidateur pour établir la liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente ;

- ordonné la cessation immédiate de l'activité ;

- dit que la clôture de la procédure devra intervenir dans un délai de 30 mois à compter de la présente décision ;

- rappelé que le liquidateur tient informé au moins tous les 3 mois, le juge commissaire, le débiteur et le Ministère Public du déroulement des opérations ;

- dit que pour la durée de la procédure, le siège social de l'entreprise est réputé fixé au domicile du mandataire (L 641-9 (II) alinéa 2) ;

- désigné pour procéder à l'inventaire avec prisée du patrimoine professionnel prévu par l'article L.622-6 du Code de Commerce, la SELARL ALSA JURIS 67, demeurant [Adresse 1], Huissier de justice ;

- dit que l'inventaire devra être fait et déposé dans un délai maximum de 21 jours à compter de la présente décision ;

- dit que le liquidateur devra établir dans le mois de sa désignation un rapport sur la situation du débiteur, qui sera déposé au greffe ;

- ordonné l'exécution des formalités de notification et de publicité prévues par les articles R 621-6, R 621-7 et R 621-8 du Code de Commerce ;

- déclaré le présent jugement exécutoire par provision ;

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.'

Par l'intermédiaire de son conseil, Monsieur [Y] [O] a interjeté appel du jugement par déclaration au greffe le 7 janvier 2025 et saisissait la première présidente de la Cour d'appel de COLMAR d'une demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu par la chambre commerciale du tribunal judiciaire de COLMAR le 17 décembre 2024.

'

Par ordonnance de référé du 28 mai 2025, la présidente de chambre de la Cour d'appel de COLMAR, agissant sur délégation de Madame la première présidente, a rejeté cette demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement déféré. '

'

Au terme de ses dernières écritures du 28 avril 2025, transmises par voie électronique le même jour, Monsieur [Y] [O] sollicite de la Cour d'appel de :

RECEVOIR l'appel et le dire bien fondé ;

REJETER l'intégralité des demandes, fins et conclusions de Monsieur [N] [T]

INFIRMER l'entier jugement ;

Et, statuant à nouveau :

CONSTATER qu'il n'est nullement en état de cessation des paiements ;

CONSTATER qu'il n'est nullement en état de surendettement ;

En conséquence,

ORDONNER n'y avoir lieu à l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire ou de redressement judiciaire à l'encontre de Monsieur [O] ;

Si par extraordinaire, la Cour devait ne pas faire droit à l'argumentation de Monsieur [O] :

ORDONNER l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de Monsieur [O] et non de liquidation judiciaire ;'

En tout état de cause :

CONDAMNER Monsieur [T] aux entiers frais et dépens ainsi que d'avoir à payer la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.'

Au soutien de son appel, il expose que':

- il est en capacité de solder la dette de 2 200 euros due à Monsieur [N] [T], par paiements échelonnés, percevant 1 500 euros par mois et ne supportant aucune charge, car résidant dans une caravane sur un terrain mis à sa disposition à titre gratuit,

- il conteste les autres créances inscrites au titre de son passif professionnel, celles-ci ne résultant d'aucun élément sérieusement probant, de sorte qu'il n'est ainsi pas en état de cessation des paiements ou de surendettement.

'

Monsieur [Y] [O] a fait signifier'par le commissaire de justice :

- le 3 mars 2025 à personne habilitée, l'avis de convocation aux avocats et l'avis de fixation du 27 février 2025, l'ordonnance de fixation du 27 février 2025, l'avis de sa déclaration d'appel du 7 janvier 2025 et le récapitulatif de la déclaration d'appel, à la SAS [Z] & ASSOCIES, mandataires judiciaires et à M. le Procureur Général,

- le 30 avril 2025 à personne habilitée, ses dernières conclusions du 28 avril 2025, à la SAS [Z] & ASSOCIES, mandataires judiciaires et à M. le Procureur Général et le 15 mai 2025, en son étude, à Monsieur [N] [T].'

'

Ni la SAS [Z] & ASSOCIES, prise en la personne de Me [B] [Z] en qualité de mandataire judiciaire, ni Monsieur [N] [T] ne s'est constitué intimé et ne s'est fait représenter à l'instance.

'

Le parquet général a déposé des écritures datées du 21 août 2025 et transmises par voie électronique le 22 août 2025 concluant au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.'

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Par ordonnance du 16 septembre 2025, la procédure a été clôturée et l'affaire renvoyée à l'audience de plaidoirie du 6 octobre 2025.

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La Cour se référera aux dernières écritures des parties pour plus ample exposé des faits de la procédure et de leurs prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE :

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Monsieur [Y] [O] s'oppose à la mise en place d'une procédure de rétablissement personnel qui ne saurait dès lors être ordonnée.

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Aussi, il y a lieu de vérifier d'une part, s'il présente une situation professionnelle susceptible d'entraîner un redressement ou une liquidation judiciaire et d'autre part, quelle est sa situation financière personnelle et si elle est susceptible d'être considérée comme suffisamment obérée pour l'ouverture d'une procédure de surendettement.

Aux termes de l'article L.640-1 du code de commerce, la liquidation judiciaire est 'ouverte à tout débiteur ['] en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible'. La cessation de paiement est caractérisée par 'l'impossibilité pour le débiteur de faire face à son passif exigible avec son actif disponible', conformément à l'article L.631-1 du même code et est appréciée au jour où la juridiction statue (Com. 9 mai 1987, com. 30 juin 2009, n°08-14-121).

'

En l'espèce, il ressort du rapport établi par Me [Z], que le passif de Monsieur [Y] [O] ne se compose pas uniquement de la créance de Monsieur [N] [T], mais comporte de nombreuses dettes pour un montant global, selon l'état des créances fourni, de 288 135,14 euros à la date du 7 juillet 2025.

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Sur ce montant, contrairement à ce que soutient Monsieur [Y] [O] devant la cour, force est de constater qu'il a formé des contestations devant le liquidateur que pour un montant de créance de 22'893,26 euros, de sorte qu'à minima le passif exigible, non contesté, s'élève à 260 241,88 euros (notamment 3 163 euros à l'égard de l'URSSAF, 37 400 euros à l'égard de la société de Transports Guthmann qui a inscrit un nantissement sur le fonds de commerce en garantie d'une créance de 236 395 euros et 195 478 euros à l'égard de la société Velocita Energies).

S'agissant de l'actif professionnel disponible, il ressort du rapport, ainsi que de l'inventaire dressé par la SELARL ALSA JURIS, qu'il est insuffisant pour apurer le passif exigible, en ce qu'il ne comporte que 900 euros présents sur des comptes bancaires et 3 véhicules, dont la valeur est estimée à 5 800 euros.

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Le fait que Monsieur [Y] [O] ait précisé disposer de ressources de 1 500 euros mensuellement, qu'il ne supporterait aucune charge, car résidant dans sa caravane sur un terrain mis à sa disposition à titre gratuit, est sans emport.

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La cour ne peut dès lors que constater que Monsieur [Y] [O] n'est pas en capacité d'apurer son passif par le biais d'une procédure de redressement judiciaire, étant précisé que le mandataire indiquait dans son premier rapport que l'activité de Monsieur [O] avait été interrompue brutalement car il avait été victime d'un infarctus, de sorte qu'au regard de l'importance des dettes, la procédure de liquidation judiciaire se justifie pleinement.

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Les articles L711-1 et suivants du code de la consommation réglementent la procédure de surendettement applicable aux personnes physiques de bonne foi, dans l'impossibilité de faire face à l'ensemble de leurs dettes, professionnelles ou non-professionnelles, exigibles ou à échoir. Les conditions de cette procédure doivent être vérifiées 'en fonction de l'actif du patrimoine personnel et de l'ensemble des dettes exigibles ou à échoir dont le recouvrement peut être poursuivi sur cet actif', conformément à l'alinéa 2 2° de l'article L681-1 du code de commerce précédemment cité.

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La bonne foi de Monsieur [Y] [O] n'est pas discutée.

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Monsieur [Y] [O] ne déclare aucun patrimoine personnel, occupant à titre gratuit une caravane et indiquant percevoir une rémunération mensuelle de 1 500 euros, sans avoir à supporter de charges.

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Au regard du montant des dettes telles que précisées et détaillées plus haut, la cour ne peut que constater, à l'instar des premiers juges, que Monsieur [Y] [O] se trouve en état de surendettement au titre de son patrimoine personnel.

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Aussi, Monsieur [Y] [O] étant en état de cessation des paiements au titre de son patrimoine professionnel et en état de surendettement au titre de son patrimoine personnel, grevé de dettes d'origine professionnelle, les premiers juges ont, à juste titre, ordonné l'ouverture d'une procédure unique de liquidation judiciaire sur le patrimoine professionnel et personnel, au regard de l'impossibilité manifeste d'un redressement judiciaire et de la confusion des patrimoines.

'

Les dépens seront employés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

'

'

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

'

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 17 décembre 2024 par la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Colmar

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

'

Le cadre greffier : le Président :

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