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Décisions

Cass. 2e civ., 6 novembre 2025, n° 24-10.933

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Martinel

Rapporteur :

M. Riuné

Avocat général :

M. Brun

Avocats :

SCP Foussard et Froger, Me Carbonnier

Cass. 2e civ. n° 24-10.933

5 novembre 2025

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Basse-Terre, 29 novembre 2023), M. [K] a confié la défense de ses intérêts à Mme [U] (l'avocate), dans deux procédures en matière familiale.

2. Deux conventions d'honoraires ont été signées le 18 février 2020.

3. Par un courriel du 7 juin 2020, l'avocate a mis fin à sa mission.

4. Par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 7 juin 2020, M. [K] a exercé son droit à rétractation pour les deux conventions d'honoraires.

5. L'avocate a saisi le bâtonnier de son ordre en fixation de ses honoraires.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

6. M. [K] fait grief à l'ordonnance de fixer à la somme de 1 397,30 euros le montant des honoraires restant dus par lui-même à l'avocate, de le condamner à payer à l'avocate la somme de 1 397,30 euros et de rejeter ses demandes visant à ce qu'il soit jugé que l'avocate n'apporte pas la preuve d'une demande expresse d'accomplissement de diligences pendant le délai de rétractation, qu'elle n'est pas fondée à réclamer des honoraires et que les sommes versées par lui-même doivent lui être remboursées par l'avocate, majorées des intérêts prévus à l'article L. 242-4 du code de la consommation depuis le 7 juin 2020, alors « qu'aucune somme ne peut être réclamée ou conservée par le professionnel, au titre de diligences accomplies pendant le délai de rétractation, si le consommateur n'a pas expressément demandé que le contrat soit exécuté pendant ce délai ; pour rejeter la demande de remboursement des sommes versées à l'avocate, fixer le montant des honoraires dus pour ses diligences et condamner M. [K] au paiement d'une somme au titre du solde, l'ordonnance relève qu'il résulte du règlement d'une facture et d'un acompte et d'un mail du 19 février 2020 que M. [K] a demandé l'exécution de la prestation avant l'expiration du délai de rétractation ; qu'en statuant ainsi par des motifs impropres à établir que M. [K] a expressément demandé que le contrat soit exécuté avant la fin du délai de rétractation, le premier président de la cour d'appel a violé les articles L. 221-18, L. 221-24 et L. 221-25 du code de la consommation. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 221-18, L. 221-20, L. 221-24 et L. 221-25 du code de la consommation, le deuxième et le quatrième dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

7. Selon le premier et le deuxième de ces textes, le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours, porté à 12 mois lorsque les informations relatives au droit de rétractation ne lui ont pas été fournies, pour exercer ce droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts, s'agissant d'un contrat de prestation de services, que ceux prévus à l'article L. 221-25.

8. Aux termes du quatrième, si le consommateur souhaite que l'exécution d'une prestation de services ou d'un contrat mentionné au premier alinéa de l'article L. 221-4 commence avant la fin du délai de rétractation mentionné à l'article L. 221-18, le professionnel recueille sa demande expresse par tout moyen pour les contrats conclus à distance et sur papier ou sur support durable pour les contrats conclus hors établissement. Le consommateur, qui a exercé son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services ou d'un contrat mentionné au premier alinéa de l'article L. 221-4 dont l'exécution a commencé, à sa demande expresse, avant la fin du délai de rétractation, verse au professionnel un montant correspondant au service fourni jusqu'à la communication de sa décision de se rétracter ; ce montant est proportionné au prix total de la prestation convenu dans le contrat. Si le prix total est excessif, le montant approprié est calculé sur la base de la valeur marchande de ce qui a été fourni. Aucune somme n'est due par le consommateur ayant exercé son droit de rétractation si sa demande expresse n'a pas été recueillie en application du premier alinéa ou si le professionnel n'a pas respecté l'obligation d'information prévue au 4° de l'article L. 221-5.

9. Pour fixer les honoraires restant dus par M. [K] à l'avocate à la somme de 1 397,30 euros, l'ordonnance, par motifs adoptés, constate que les deux conventions d'honoraires ne contiennent aucune disposition relative au droit de rétractation du client.

10. Par motifs adoptés, elle énonce que le client consommateur qui exerce son droit de rétractation pour des prestations non achevées dont l'exécution a commencé, à sa demande expresse, avant la fin du délai de rétractation verse au professionnel un montant correspondant au service fourni jusqu'à la communication de sa décision de se rétracter.

11. Par motifs adoptés, elle relève que M. [K] a, par le règlement de la totalité d'une facture de 1 085 euros TTC, par le règlement d'un acompte de 100 euros, sur une autre facture, et par son courrier électronique du 19 février, justifié de sa demande d'exécution de la prestation avant l'expiration du délai de rétractation.

12. Par motifs propres, elle retient que M. [K] est bien fondé à invoquer son droit à rétractation mais qu'il demeure néanmoins redevable du paiement des honoraires dus à l'avocate pour les diligences effectuées jusqu'à l'annonce, le 7 juin 2020, de son dessaisissement.

13. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser que M. [K] avait renoncé expressément au bénéfice du délai de rétractation, alors qu'il avait retenu, par des motifs non contestés, que celui-ci était bien fondé à invoquer le droit de rétractation prévu pour les contrats conclus à distance, le premier président a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle dit l'action entreprise recevable, l'ordonnance rendue le 29 novembre 2023, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Basse-Terre ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;

Condamne Mme [U] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé publiquement le six novembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

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