CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 5 novembre 2025, n° 23/02882
TOULOUSE
Arrêt
Autre
05/11/2025
ARRÊT N° 25/ 415
N° RG 23/02882
N° Portalis DBVI-V-B7H-PUEM
MD/MP
Décision déférée du 28 Février 2023
JMEE de [Localité 7] 21/00820
A. RIBEYRON
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le 05/11/2025
à
Me Gilles [Localité 8]
Me Florence SIMEON
Me Catherine HOULL
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 1
***
ARRÊT DU CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
SAS G.D'EAU
[Adresse 9]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Jean françois MOREL de l'ASSOCIATION CABINET DECHARME, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE (plaidant) et par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant)
INTIMES
Monsieur [K] [F]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Madame [B] [S] épouse [F]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentés par Me Florence SIMEON de la SCP CAMBRIEL GERBAUD-COUTURE ZOUANIA SIMEON, avocate au barreau de TARN-ET-GARONNE
GROUPAMA D'OC
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Catherine HOULL de la SELARL CATHERINE HOULL & ASSOCIES, avocate au barreau de TARN-ET-GARONNE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 02 juin 2025 en audience publique, devant la cour composée de :
M. DEFIX, président
S. LECLERCQ, conseillère
N. ASSELAIN, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière : lors des débats M. POZZOBON
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après avis aux parties
- signé par M. DEFIX, président et par M. POZZOBON, greffière
EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Au cours de l'année 2011, M. [K] [F] et Mme [B] [S] épouse [F] ont confié à la Sas G.d'Eau exerçant sous l'enseigne 'Eau et technique 82", la réalisation d'une piscine dans l'immeuble leur appartenant, sis [Adresse 4], à [Localité 7] (82) moyennant paiement d'un prix total de 23 984,50 euros toutes taxes comprises, selon facture du 20 septembre 2011.
À la date d'ouverture du chantier, la société G.d'Eau était assurée auprès de Groupama d'Oc, puis a résilié la police d'assurance le 31 décembre 2014 pour être garantie par la société Qbe insurance.
Par courriel du 12 mai 2012, M. [F] s'est plaint que la coque était vrillée car non posée de niveau en largeur et en longueur, constituant un préjudice esthétique.
Selon transaction du 19 décembre 2012, M. et Mme [F] ont accepté de recevoir la somme de 3 000 euros de la part de la société G.d'Eau 'pour préjudice esthétique' et se sont engagés à ne pas engager de recours judiciaire en responsabilité de ce chef.
En 2014, le fabricant de la coque, la société Decopiscines, est intervenue pour effectuer des réparations sur la coque, M. [F] ayant signalé un problème d'osmose et de fissuration de buses.
Par courrier du 18 mars 2017 remis en main propre à la société G.d'Eau, M. [F] a fait état de l'aggravation des désordres constatés depuis six ans (défaut de niveau, osmose, fuites, détérioration des pièces plastiques de raccordement) et a mis en demeure l'entrepreneur de procéder à des réparations d'importance dans le cadre de la garantie décennale.
En 2020, plusieurs investigations ont été menées relativement à l'existence d'une fuite et à l'affaissement/basculement du bassin.
Par actes du 4 mai 2021, après avoir dénoncé des désordres, M. et Mme [F] ont fait assigner la société G.d'Eau devant le juge des référés
Par acte du 14 juin 2021, la société G.d'Eau a appelé la société Qbe aux fins d'expertise commune.
Par ordonnance du 8 juillet 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Montauban a désigné M. [N] [D] en qualité d'expert judiciaire.
Le 29 août 2022, l'expert a rendu son rapport.
-:-:-:-
Par actes d'huissier du 21 septembre 2021, M. [K] [F] et Mme [B] [S] épouse [F] ont fait assigner la Sas G.d'Eau et la compagnie Groupama d'Oc devant le tribunal judiciaire de Montauban, aux fins de les voir condamner à les indemniser de leur entier préjudice sur la base du rapport d'expertise à intervenir.
Par conclusions d'incident du 21 décembre 2022, la société G.d'Eau a saisi le juge de la mise en état, aux fins de voir :
- débouter les époux [F] de leur demande indemnitaire au titre du déversement de leur bassin et de la fuite d'eau de la nage à contre-courant comme se heurtant respectivement à l'autorité de la chose jugée et à la forclusion,
- réserver les dépens et dire qu'ils suivront le sort de l'instance principale.
Par conclusions d'incident du 26 décembre 2022, la compagnie Groupama d'Oc a demandé au juge de la mise en état de :
- débouter la société G.d'Eau de ses demandes contre Groupama d'Oc comme étant irrecevables du fait de la chose jugée attachée au protocole régularisé et de la forclusion atteignant le problème de la fuite de la nage à contre-courant,
- condamner tous succombants au règlement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions d'incident du 23 janvier 2023, M. et Mme [F] ont demandé au juge de la mise en état de :
- débouter la société G.d'Eau et la compagnie Groupama d'Oc de l'ensemble de leurs demandes,
- juger leur action recevable et non forclose,
- condamner solidairement la société G.d'Eau et la compagnie Groupama d'Oc à leur payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
-:-:-:-
Par ordonnance du 28 février 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Montauban a :
- dit irrecevable l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société 'G d'eau - eau et technique 82" au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant,
- dit recevable l'action de M. et Mme [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société 'G'd'eau - eau et technique 82" au titre de l'affaiblissement des plages de la piscine par défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton et précarité de l'épaisseur de celle-ci,
- condamné in solidum la société 'G d'eau - eau et technique 82" et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc, à payer à M. et Mme [F] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700, 1° du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société 'G d'eau - eau et technique 82" et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc aux dépens de l'incident,
- renvoyé l'affaire à la conférence de mise en état du 16 mars 2023 pour conclusions au fonds de M. et Mme [F] en réplique aux conclusions de la société 'G d'eau - eau et technique 82" et de la compagnie Groupama d'Oc.
Le juge de la mise en état a considéré :
- sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée du protocole, en raison des termes de la transaction et d'un courriel de M. [F] que le protocole concernait un préjudice esthétique et qu'eu égard à l'aggravation des désordres dénoncés par assignation du 14 juin 2021 non existants lors de la signature du protocole, l'autorité de la chose jugée de la transaction ne pouvait être opposée aux maîtres de l'ouvrage relativement à l'apparition de nouveaux désordres,
- sur la fin de non-recevoir tirée de l'écoulement du délai décennal, que la réception des travaux sans réserve avait eu lieu le 30 septembre 2011 et que les époux [F] avaient fait assigner en référé la société G.d'Eau par acte du 14 juin 2021 soit pendant le délai d'épreuve de 10 ans, mais que le désordre initial de basculement de la coque ne présentait pas le caractère de gravité requis par l'article 1792 du code civil, rendant les époux [F] irrecevables à agir pour ce poste de désordre au titre de la responsabilité décennale, et retenu de même pour les autres désordres allégués, hormis celui relatif au défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton et la précarité de son épaisseur.
Par requête du 9 mars 2023, la Sas G.d'Eau a saisi le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Montauban aux fins de :
- retrancher de l'ordonnance du 28 février 2023 les développements disant irrecevables l'action des époux [F] au titre de la responsabilité de constructeur de la société G.d'Eau concernant le basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant et disant recevables l'action des époux [F] au titre de la responsabilité de constructeur de la société G.d'Eau concernant l'affaissement des plages de la piscine par défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton et précarité de l'épaisseur de celle-ci,
- compléter ladite ordonnance en ajoutant le rejet de la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction du 19 décembre 2012,
- statuer sur la demande omise au terme de l'ordonnance en déclarant irrecevable comme forclose la demande des époux [F] au titre de la nage à contre-courant au titre de l'article 1792-4 du code civil.
Par ordonnance rectificative du 18 juillet 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Montauban a :
- retranché des motifs de l'ordonnance du 28 février [Immatriculation 2]/00820 le paragraphe figurant en page 6 dans la partie intitulée 'Sur la fin de non-recevoir tirée de l'écoulement du délai décennal' et concernant le défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton positionnée autour de la piscine, la précarité de l'épaisseur de celle-ci et l'affaissement des plages,
- retranché du dispositif de l'ordonnance du 28 février [Immatriculation 2]/00820 le paragraphe suivant:
' Disons recevable l'action de M. et Mme [F] au titre de la responsabilité de constructeur de la société G d'Eau - Eau et Technique 82 au titre de l'affaissement des plages de la piscine par défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton et précarité de l'épaisseur de celle-ci',
- rejeté la demande de retranchement des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 relatifs à la qualification des désordres au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant et la demande en omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant,
- rejeté la demande de retranchement du dispositif de l'ordonnance du 28 février 2023 RG : 21/820 du paragraphe 'Disons irrecevable l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G d'Eau - Eau et Technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant',
- rectifié le dispositif de l'ordonnance du juge de la mise en état du 28 février 2023 comme suit:
' rejetons la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue le 19 décembre 2012 entre d'une part M. et Mme [F] et d'autre part, la société G d'Eau - Eau et Technique 82",
- dit que les dépens resteront à la charge du Trésor public,
- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état électronique du 21 septembre 2023, pour conclusions de M. et Mme [F].
Pour statuer ainsi, le juge de la mise en état a considéré :
- s'agissant de la fin de non-recevoir tirée de l'écoulement du délai décennal, que l'appréciation de la forclusion de la demande exigeait de déterminer si les désordres allégués présentaient un caractère évolutif,
- les seuls désordres concernés par la fin de non-recevoir de la société G d'eau étaient le déversement du bassin de la piscine et la fuite d'eau de la nage à contre-courant et que ni l'assureur 'ni les époux [F]' n'avaient repris dans le dispositif de leurs écritures les moyens tendant à l'irrecevabilité de l'action en responsabilité concernant les plages de la piscine, de sorte que les développements relatifs à l'affaissement des plages de la piscine par défaut de ferraillage et épaisseur de la ceinture béton sont ultra petita et doivent être retirés de l'ordonnance,
- que les motifs de l'ordonnance comportent un paragraphe relatif à l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue entre les maîtres de l'ouvrage et l'entrepreneur évoquant l'inopposabilité de cette fin de non-recevoir, de sorte que le dispositif de l'ordonnance doit être rectifié et indiquer le rejet de cette fin de non-recevoir.
-:-:-:-
Par déclaration du 3 août 2023, la Sas G.d'Eau a relevé appel, en sollicitant 'l'infirmation, la réformation, voire l'annulation pour excès de pouvoir ou tout autre motif' de :
1. L'ordonnance du 28 février 2023 telle que rectifiée par l'ordonnance du 18 juillet 2023, en ce qu'elle a :
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue le 19 décembre 2012 entre d'une part les époux [F] et d'autre part la société G d'eau - eau et technique 82 ;
- dit irrecevable l'action de [K] [F] et de [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G d'eau - eau et technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant;
- condamné in solidum la société G d'eau - eau et technique 82 et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc à payer à M. et Mme [F] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700, 1° du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société G d'eau- eau et technique 82 et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc, aux dépens de l'incident,
2. L'ordonnance rectificative du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a :
- rejeté la demande de retranchement des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 relatifs à la qualification des désordres au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau de nage à contre-courant et la demande d'omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant,
- rejeté la demande de retranchement du dispositif de l'ordonnance du 28 février [Immatriculation 2]/00820 du paragraphe "Disons irrecevables l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G D'Eau - Eau et Technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant",
Selon avis du 15 septembre 2023, l'affaire a été fixée à bref délai selon les modalités des articles 904-1 et 905 du code de procédure civile.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 20 novembre 2023, la Sas G.d'Eau, appelante, demande à la cour de :
- débouter M. et Mme [F] et Groupama d'Oc de l'intégralités de leurs prétentions contraires aux présentes,
- annuler pour excès de pouvoir :
* l'ordonnance du 28 février 2023 telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a dit irrecevable l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [L] tendant à la mobilisation de la responsabilité du constructeur de la société G d'eau- eau et technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant,
* l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a :
' rejeté la demande de retranchement des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 relatifs à la qualification des désordres au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau de nage à contre-courant et la demande d'omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant,
' rejeté la demande de retranchement du dispositif de l'ordonnance du 28 février 2023 du paragraphe « Disons irrecevable l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité du constructeur de la société G d'eau- eau et technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant »,
- évoquer l'examen de la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action de M. et Mme [F] contre la société G.d'Eau au titre de la fuite du réseau de la nage à contre-courant,
Complétant la décision du 28 février 2023 sur ce point,
- rejeter comme irrecevable l'action des époux [F] contre la société G.d'Eau au titre de la fuite du réseau de la nage à contre-courant en raison de sa forclusion,
- à titre subsidiaire concernant cette fin de non-recevoir, réformer l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande d'omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant,
- réformer l'ordonnance du 28 février 2023, telle que complétée par l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a :
* rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue le 19 décembre 2012 entre d'une part M. et Mme [F] et d'autre part la société 'G d'eau- eau et technique 82",
* condamné in solidum la société 'G d'eau ' eau et technique 82" et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc à payer aux époux [F] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700, 1° du code de procédure civile,
* condamné in solidum la société 'G d'eau ' eau et technique 82" et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc, aux dépens de l'incident,
Statuant à nouveau sur les chefs réformés,
- rejeter comme irrecevable l'action de M. et Mme [F] contre la société G.d'Eau au titre du déversement de la coque de leur bassin comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée de la transaction du 19 décembre 2012,
- débouter M. et Mme [F] de l'intégralité de leurs demandes,
- condamner M. et Mme [F] aux dépens de l'ordonnance du 28 février 2023,
À titre subsidiaire, dans l'hypothèse de l'infirmation et non de l'annulation de l'ordonnance du 18 juillet 2023 sur ce point,
- compléter l'ordonnance du 28 février 2023,
- rejeter comme irrecevable l'action de M. et Mme [F] contre la société G.d'Eau au titre de la fuite du réseau de la nage à contre-courant en raison de sa forclusion,
Ajoutant aux décisions déférées,
- condamner in solidum M. [K] [F] et Mme [B] [F] née [S] à payer à la Sas G.d'Eau la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700, alinéa 1er du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. [K] [F] et Mme [B] [F] née [S] à payer aux dépens d'appel et ordonner qu'ils soient recouvrés par le conseil de la Sas G.d'Eau selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile.
À l'appui de ses prétentions, l'appelante soutient que :
Sur l'annulation pour excès de pouvoir des décisions des 28 février et 18 juillet 2023,
- le juge s'est arrogé des attributions que le dispositif normatif lui refuse, commettant une violation particulièrement grave de la loi et permettant l'annulation de la décision même si elle ne pourrait faire l'objet d'un appel immédiat,
- tel est le cas lorsque le tribunal statue hors des limites de ses attributions,
- la cour peut connaître d'une demande en nullité lorsque la décision qui lui est déférée est susceptible d'appel,
- ce n'est que lorsque la décision n'est pas susceptible d'appel immédiat que le pouvoir de la cour est limité à son annulation,
- le premier juge n'a pas statué, à tort, sur la fin de non-recevoir tenant à la forclusion de l'action des époux [F] au visa de l'article 1793-4-1 du code civil qui relève pourtant des pouvoirs que lui confère l'article 789 du code de procédure civile,
- il a examiné les conditions d'application de la garantie décennale pour l'écarter au titre des désordres relatifs au basculement de la coque et de la fuite de la piscine, or le moyen tiré du défaut de gravité ne constitue pas une fin de non-recevoir mais une défense au fond, il n'appartenait pas au juge de la mise en état de statuer sur ce moyen,
- le premier juge a donc commis un excès de pouvoir en déclarant irrecevable l'action au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant,
- il ne pouvait donc refuser de retrancher des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 les développements relatifs à l'examen de cette défense au fond,
- la cour doit donc annuler les chefs des deux décisions qui lui sont déférés à ce titre sans pouvoir user de son pouvoir d'évocation, puisqu'elle n'a pas plus de pouvoirs que le juge dont appel,
- le juge de la mise en état a commis un excès de pouvoir négatif en refusant de statuer sur l'omission de statuer sur la forclusion de l'action au titre des dommages relatifs à la nage à contre-courant dans sa décision du 18 juillet 2023,
- la cour doit annuler cette disposition et l'examiner dans le cadre de son pouvoir d'évocation
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée,
- aux termes du protocole transactionnel du 19 décembre 2012, M. et Mme [F] ont renoncé à rechercher la responsabilité de la société G.d'Eau au titre du préjudice esthétique résultant du défaut de niveau de la coque en contrepartie d'une indemnité de 3000 euros,
- il ressort des conclusions de l'expert judiciaire que le désordre reste esthétique et non décennal et que son évolution n'est pas démontrée, aucun fait nouveau n'a donc remis en cause les termes de la transaction du 19 décembre 2012 et l'autorité de la chose jugée qui y est attachée,
- la cour doit donc réformer la décision du 28 février 2023 telle que modifiée par celle du 18 juillet 2023 et déclarer irrecevable l'action de M. et Mme [F] au titre du déversement du bassin comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée de la transaction du 19 décembre 2012,
Sur la forclusion de l'action de M. et Mme [F] au titre de la nage à contre-courant,
- M. [F] fixe la date de réception tacite au paiement des travaux par chèque du 30 septembre 2011,
- dans l'assignation tant en référé qu'au fond, M. et Mme [F] n'ont évoqué que des défauts affectant le bassin et n'ont jamais mentionné de fuites des canalisations,
- l'expert judiciaire conclut que la fuite sur la canalisation d'injection de la nage à contre-courant n'a aucun lien avec les fuites alléguées du bassin,
- toute demande au titre de ce désordre est forclose puisqu'il n'a pas fait l'objet d'une demande en justice le visant précisément dans les dix ans de la réception, soit avant le 30 septembre 2021,
- la cour, évoquant ce chef de litige après annulation de l'ordonnance du 18 juillet 2023 rejetant la demande d'omission de statuer présentée, devra compléter la décision du 28 février 2023 et déclarer irrecevable comme forclose l'action de M. et Mme [F] au titre de la fuite du réseau de nage à contre-courant.
Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 2 novembre 2023, M. [K] [F] et Mme [B] [S] épouse [F], intimés, demandent à la cour, au visa des articles 1792 et suivants, 2044 et suivants du code civil et 789 du code de procédure civile, de :
Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et en tout cas mal fondées,
- confirmer l'ordonnance du 28 février 2023 en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction, et l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle
a complété les dispositions de l'ordonnance du 28 février 2023 concernant le rejet de la fin de
non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction,
- confirmer l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande de la société G d'eau en omission de statuer sur la forclusion de M. et Mme [F] sur leur demande au titre de la nage à contre-courant,
- confirmer l'ordonnance du 28 février 2023 quant aux condamnations prononcées au titre des frais irrépétibles et des dépens,
- débouter la société G.d'Eau de ses demandes de réformation contraires,
- statuer ce que de droit sur la demande de la société G.d'Eau en annulation pour excès de pouvoir de l'ordonnance du 28 février 2023 en ce qu'elle a jugé irrecevable l'action de M. et Mme [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G d'eau au titre du basculement de la coque et de la fuite, et en annulation des dispositions de l'ordonnance du 18 juillet 2023 ayant rejeté le retranchement sur ce chef,
- débouter la société G.d'Eau de sa demande en annulation pour excès de pouvoir de l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande de la société G.d'Eau en omission de statuer sur la forclusion de M. et Mme [F] sur leur demande au titre de la nage à contre-courant,
Ou, subsidiairement, en cas d'évocation de cette demande,
- juger irrecevable la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action de M. et Mme [F] au titre de la fuite sur la nage à contre-courant, et les juger non forclos sur ce chef,
- débouter la société G.d'Eau de sa demande de condamnation de M. et Mme [F] au paiement de frais irrépétibles et des dépens,
- condamner la société G.d'Eau au paiement de la somme de 2.500 euros au profit de M. et Mme [F] par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société G.d'Eau aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Florence Simeon, avocat sur son affirmation de droit.
À l'appui de leurs prétentions, les intimés soutiennent que :
Sur la fin de non-recevoir alléguée,
- une transaction ne règle que les différends s'y trouvant compris, or la renonciation à recours visée au protocole d'accord est circonscrite aux faits indemnisés, à savoir en l'espèce le défaut de niveau de l'ouvrage causant un préjudice esthétique,
- les désordres relatifs aux plages ne sont pas mentionnés dans le protocole puisqu'ils n'existaient pas à cette époque,
- ce n'est que depuis 3,5 ans que l'abri ne ferme plus en raison de dégâts nouvellement apparus,
- le protocole ne portait pas sur des désordres issus de malfaçons constructives mises en évidence par l'expertise judiciaire,
- l'expert judiciaire a relevé une impropriété à destination pour laquelle il préconise une démolition-reconstruction de l'ouvrage,
- la société G d'eau aurait dû investiguer sur l'origine du problème de niveau qui consistait en un support défaillant ayant entraîné un basculement de la coque piscine et des désordres sur les plages,
- l'acceptation d'indemnisation pour préjudice esthétique ne peut avoir pour conséquence de priver une partie de son droit d'action en responsabilité pour indemnisation d'un ouvrage qui s'est révélé, dans le temps, impropre à sa destination du fait des malfaçons,
Sur la forclusion alléguée,
- tant dans l'assignation en référé que dans celle au fond, ils ont fait état d'une fuite,
- la fuite est due à un problème de raccord au niveau de l'insertion entre le tuyau et la coque,
- l'expert a fait appel à un sapiteur qui a confirmé l'existence d'une fuite sur le réseau de nage à contre-courant,
- le fait d'avoir fait rechercher une fuite sur le réseau de la piscine en 2020 démontre bien que le désordre est survenu antérieurement,
- ils ne pouvaient mentionner que la fuite affectait le réseau de nage à contre-courant dans les actes introductifs d'instance puisque l'expertise judiciaire avait pour but d'en déterminer l'origine et en constater l'existence,
- la recherche de la fuite a été faite 'piscine vidée', alors que lorsque la piscine est pleine, et la nage à contre-courant en fonctionnement, la fuite est d'importance.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 novembre 2023, la compagnie Groupama d'Oc, intimée formant appel incident, demande à la cour, au visa de l'article 789 du code de procédure civile et des articles 1792 et suivants du code civil, de :
- prononcer l'irrecevabilité de l'appel en nullité pour excès de pouvoir des ordonnances de 28 février 2023 et 18 juillet 2023,
- confirmer l'ordonnance du 18 juillet 2023, telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a prononcé :
* concernant l'affaissement de la coque de la piscine, et la nage à contre-courant, l'irrecevabilité de l'action de M. et Mme [F],
* concernant les places de piscine, le défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton positionnée autour de la piscine, la précarité de l'épaisseur de celle-ci, le retranchement prononcé,
- infirmer l'ordonnance du 18 juillet 2023, telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande formulée au niveau de l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction du 19 décembre 2022,
Statuant à nouveau,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande du maître de l'ouvrage concernant les désordres intéressants la coque et les terrasses,
En tout état de cause,
- infirmer l'ordonnance du 28 février 2023 telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a mis à la charge de Groupama d'Oc les dépens de l'incident ainsi qu'une somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. et Mme [F] et la société G.d'Eau au règlement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de Maître Houll conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
À l'appui de ses prétentions, l'intimée formant appel incident soutient que :
- l'appel-nullité n'est pas recevable dans la mesure où les ordonnances du juge de la mise en étant attaquées sont susceptibles d'appel,
- il n'y a pas eu d'excès de pouvoir de la part du juge de la mise en état qui pouvait trancher la question de fond relative au caractère décennal des désordres allégués,
- du fait de ce protocole toutes les réclamations résultant d'un défaut de niveau de l'ouvrage, des conséquences du fait que la coque est vrillée, pour être prises en compte nécessitent la démonstration d'une aggravation du désordre initial, non établi en l'espèce, de sorte que les demandes relatives au défaut de niveau de l'ouvrage et de la pose vrillée de la coque sont irrecevables,
- si l'effet relatif des contrats interdit aux tiers de se prévaloir de l'autorité d'une transaction à
laquelle ils ne sont pas intervenus, ces mêmes tiers peuvent néanmoins invoquer la renonciation à un droit que renferme cette transaction.
MOTIVATION DE LA DÉCISION
- Sur la recevabilité de l' 'appel-nullité',
1. L'examen attentif de la déclaration d'appel fait apparaître que l'appelant a indiqué à titre d'objet de l'appel : 'l'infirmation, la réformation, voire l'annulation pour excès de pouvoir ou tout autre motif', tout en précisant les chefs des ordonnances critiqués et énonçant, dans le dispositif de ses conclusions, des prétentions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des ordonnances critiquées.
La voie de l'appel-nullité n'est ouverte qu'à l'encontre des décisions non susceptibles d'appel et dans la mesure où il est reproché au premier juge un excès de pouvoir.
En vertu de l'article 795 du code de procédure civile dans sa version en vigueur du 1er janvier 2021 au 1er septembre 2024, les ordonnances du juge de la mise en état ne peuvent être frappées d'appel qu'avec le jugement statuant sur le fond. Toutefois, elles sont susceptibles d'appel, dans les quinze jours à compter de leur signification, lorsqu'elles statuent sur une fin de non-recevoir. Lorsque la fin de non-recevoir a nécessité que soit tranchée au préalable une question de fond, l'appel peut porter sur cette question de fond.
Enfin, en vertu des articles 463 et 464 du code de procédure civile, la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s'il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens. La décision est notifiée comme le jugement et donne ouverture aux mêmes voies de recours que celui-ci. Il en va de même si le juge s'est prononcé sur des choses non demandées ou s'il a été accordé plus qu'il n'a été demandé.
En l'espèce, la société G.d'Eau a relevé appel de l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du 28 février 2023 telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 et celle du 18 juillet 2023 relativement à plusieurs fins de non-recevoir.
Dès lors, l'appel était immédiatement ouvert contre ces décisions et les chefs de dispositif attaqués. Les conditions de l'appel-nullité ne sont donc pas réunies.
Néanmoins, le présent appel peut s'analyser comme tendant à la réformation ou à l'annulation du jugement, conformément aux dispositions de l'article 542 du code de procédure civile dès lors que la déclaration d'appel comme le dispositif des conclusions de l'appelant visent précisément des chefs des ordonnances critiquées et l'objet du recours visant notamment la réformation des ordonnances..
Dans cette hypothèse, il y a lieu d'examiner les moyens développés par la société G.d'Eau visant l'irrecevabilité des demandes de M. et Mme [F] à son encontre en raison de la forclusion et de l'autorité de la chose jugée, ainsi que ceux développés par la société Groupama d'Oc qui a relevé appel incident.
2. Il est relevé que dans l'assignation signifiée à la société G.d'Eau, par acte d'huissier du 21 septembre 2021, M. et Mme [F] ont demandé à la voir condamner à les indemniser de leur entier préjudice sur la base du rapport d'expertise à intervenir, évoquant dans l'acte d'assignation 'les désordres affectant leur piscine ainsi que les périphériques plage et abri motorisé', 'un basculement de la coque et des baisses significatives et régulières du niveau de l'eau du bassin', 'un affaissement et un basculement de la piscine outre des fuites du bassin', tels que figurant également dans l'assignation par acte du 4 mai 2021 en référé pour désignation d'un expert judiciaire.
Dans leurs conclusions au fond du 15 décembre 2022, M. et Mme [F] ont notamment demandé au tribunal judiciaire, de
- juger que la société G.d'Eau a engagé sa responsabilité décennale à l'égard des époux [F],
- condamner la société G.d'Eau au paiement de la somme de 51.210,06 euros Ttc, à actualiser en fonction de l'évolution de l'indice BT01 entre la date d'émission des devis et le jugement à intervenir, outre celle de 16.250 euros Ttc, vétusté à déduire, en réparation du préjudice matériel subi par les époux [F] ;
- condamner la société G.d'Eau au paiement de la somme de 5.000 euros Ttc en réparation du préjudice de jouissance subi par les époux [F], outre celle de 1.500 euros Ttc au titre de leur préjudice moral.
M. et Mme [F] sollicitent la réparation des désordres suivants constatés par l'expert judiciaire:
- coque du bassin déversée,
- fissurations des plages et désaffleurements sur le revêtement,
- ceinture béton d'épaisseur précaire dans l'angle nord-est,
- fuites dans le réseau de nage à contre-courant,
- absence de ferraillage horizontal du béton dans l'angle le plus proche du garage.
3. Dans les conclusions d'incident devant le juge de la mise en état, la Sas G.d'Eau a demandé au juge de 'débouter les demandes présentées par les époux [F] au titre du déversement de leur bassin et de la fuite d'eau de la nage à contre-courant comme se heurtant respectivement à l'autorité de la chose jugée à la forclusion', invoquant comme moyens que :
Sur l'autorité de la chose jugée :
- les parties ont conclu une transaction le 19 décembre 2012 relativement à la déficience altimétrique, or l'expert judiciaire a conclu que l'état de la coque de la piscine n'était pas affecté d'un désordre décennal, sans exposer que la déficience altimétrique aurait évolué, et il résulterait des pièces du dossier que le désordre tenant à la vrille de la coque en raison d'une pose qui n'est pas de niveau existait dès l'origine et était visible dans ses conséquences. Il s'agirait donc seulement d'un désordre esthétique déjà indemnisé dans le cadre du protocole transactionnel,
Sur la forclusion :
- si la fuite de la nage à contre-courant est de nature décennale la difficulté est de déterminer si elle est survenue pendant le délai d'épreuve décennal,
- M. [F] fixe la date de réception tacite au paiement intervenu pour le solde le 30 septembre 2011,
- la fuite est minime et n'a pu être datée par l'expert judiciaire puisqu'elle est sans lien avec le niveau du bassin,
- la demande au titre de ce désordre est forclose pour n'avoir pas fait l'objet d'une demande en justice le visant précisément dans les dix ans de la réception.
4. Dans ses conclusions d'incident, la société Groupama d'Oc a demandé au juge de la mise en état de débouter la Sas G.d'Eau de l'ensemble de ses demandes, fins, et conclusions formulées à l'encontre de la compagnie Groupama d'Oc comme étant irrecevables du fait de l'autorité de la chose jugée attachée au protocole régularisé, et de la forclusion atteignant le problème de la fuite sur le réseau de la nage à contre-courant.
Elle a soulevé comme moyens que par le protocole transactionnel, le maître de l'ouvrage a renoncé à son droit d'agir en cas d'évolution des déformations initiales, coque et terrasses de la piscine et que seule une fuite sur la piscine avait été déclarée dans le délai décennal et non sur la nage à contre-courant, outre que cette dernière a été décelée par l'expert judiciaire après expiration du délai décennal.
Devant la cour d'appel, la Sas G.d'Eau sollicite l'annulation des chefs de dispositif des ordonnances attaquées qui ont statué sur l'action fondée sur le basculement de la coque/ déversement du bassin et la fuite du réseau de nage à contre-courant.
Quant à elle, la société Groupama d'Oc demande à la cour d'accueillir la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction du 19 décembre 2012 pour toutes les réclamations résultant du défaut de niveau de l'ouvrage.
- Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée relative au déversement du bassin,
5. L'article 2044 du code civil prévoit que « La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit ».
L'article 2048 du code civil dispose que « Les transactions se renferment dans leur objet: la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ».
L'article 2049 du code civil prévoit que les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé.
L'article 2052 du code civil dispose que « La transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet ».
Il résulte de ces dispositions qu'une transaction n'a autorité de la chose jugée qu'en ce qui concerne le différend qu'elle règle.
En l'espèce, le protocole d'accord transactionnel signé entre la société G.d'Eau d'une part et M. et Mme [F] d'autre part, le 19 décembre 2012 stipule que la Sas G.d'Eau 'consent une indemnité forfaitaire pour préjudice esthétique de 3 000 euros'. M. et Mme [F] 'renoncent à l'avoir en cours chez Eau et technique d'un montant de 432€90", que 'en contrepartie de l'exécution des présentes, les parties se déclarent intégralement satisfaites et remplies de tous leurs droits en raison du litige, objet de cette transaction. Les parties s'engagent à ne pas engager de recours judiciaire en responsabilité de ce chef-là'.
Le courriel envoyé par M. [F] à la société G.d'Eau le 15 mai 2012 décrit le préjudice esthétique : 'vous avez pu constater les malfaçons que je vous avais signalées à savoir que la coque est vrillée en raison d'une pose qui n'est pas de niveau en largeur mais aussi en longueur, il en résulte un préjudice esthétique incontestable qui est accentué par les plages et leurs propres désordres. Vous m'assurez que ces problèmes d'erreur de niveau n'affecteront pas la structure dans le temps mais cela reste hypothétique car, me semble-t-il, une piscine vieillit mieux si elle est bien posée que si elle est en torsion'.
Dans leurs conclusions au fond déposées en première instance, M. et Mme [F] ont demandé l'indemnisation du préjudice résultant du défaut de niveau de la piscine et de manière générale, des malfaçons tenant à l'absence de dalle béton en fondation, l'absence de ferraillage de la ceinture béton supérieure, la friabilité du béton et l'absence d'armature métallique, mis en évidence par le rapport d'expertise judiciaire. Ils indiquent que le protocole transactionnel concernait uniquement un préjudice esthétique et ne peut être opposé en cas d'affaissement de terrain provoqué par la poussée de la paroi latérale de la piscine, engendrant des désordres sur les plages.
Dans son rapport, l'expert judiciaire indique que :
- la coque du bassin est déversée,
- qu'il y a une différence d'altimétrie entre le côté est-sud et le côté est-nord,
- que l'angle à proximité du puits de décompression est plus haut que tout autre point de mesure et cela résulte en un affaissement de la piscine,
- que les fissures relevées dans un angle de la piscine sont la conséquence de l'affaissement d'appui,
- que l'affaissement d'appui a pu être provoqué par un terrassement ou une dénivellation du sol,
- qu'au regard du protocole d'accord et des courriers, cette malfaçon est initiale.
L'expert judiciaire estime que pour le basculement de la coque de la piscine, le caractère évolutif n'est pas totalement prouvé puisqu'il n'y a pas eu de relevé altimétrique à l'époque de la construction.
Toutefois, il ressort du rapport d'expertise judiciaire, que l'affaissement de la piscine a généré des fissures dans un angle de la piscine, outre que cet affaissement s'accompagne de l'affaissement des plages, et ce en raison de l'absence de ferraillage horizontal, outre une ceinture béton reposant sur du mortier friable dans l'angle.
Dès lors, il ne peut être opposé à M. et Mme [F] de fin de non-recevoir concernant les désordres fonctionnels et structurels provoqués par l'affaissement du bassin dont ils demandent réparation devant le tribunal judiciaire de Montauban.
L'ordonnance du 28 février 2023 telle que modifiée par l'ordonnance rectificative du 18 juillet 2023 sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue le 19 décembre 2012 entre d'une part les époux [F] et d'autre part la société G d'eau.
- Sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion relative à la fuite d'eau de la nage à contre-courant,
6. Dans les conclusions d'incident devant le juge de la mise en état, la Sas G.d'Eau a demandé au juge de la mise en état de débouter les époux [F] de leur demande au titre de la fuite d'eau de la nage à contre-courant comme se heurtant à la forclusion, invoquant comme moyens que :
- si la fuite de la nage à contre-courant est de nature décennale la difficulté est de déterminer si elle est survenue pendant le délai d'épreuve décennal,
- M. [F] fixe la date de réception tacite au paiement intervenu pour le solde le 30 septembre 2011,
- la fuite est minime et n'a pu être datée par l'expert judiciaire puisqu'elle est sans lien avec le niveau du bassin,
- la demande au titre de ce désordre est forclose pour n'avoir pas fait l'objet d'une demande en justice le visant précisément dans les dix ans de la réception.
En vertu de l'article 789 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur du 1er janvier 2020 au 1er septembre 2024, :
'Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
(...)
6° Statuer sur les fins de non-recevoir.
Lorsque la fin de non-recevoir nécessite que soit tranchée au préalable une question de fond, le juge de la mise en état statue sur cette question de fond et sur cette fin de non-recevoir. Toutefois, dans les affaires qui ne relèvent pas du juge unique ou qui ne lui sont pas attribuées, une partie peut s'y opposer. Dans ce cas, et par exception aux dispositions du premier alinéa, le juge de la mise en état renvoie l'affaire devant la formation de jugement, le cas échéant sans clore l'instruction, pour qu'elle statue sur cette question de fond et sur cette fin de non-recevoir. Il peut également ordonner ce renvoi s'il l'estime nécessaire. La décision de renvoi est une mesure d'administration judiciaire.
Le juge de la mise en état ou la formation de jugement statuent sur la question de fond et sur la fin de non-recevoir par des dispositions distinctes dans le dispositif de l'ordonnance ou du jugement. La formation de jugement statue sur la fin de non-recevoir même si elle n'estime pas nécessaire de statuer au préalable sur la question de fond. Le cas échéant, elle renvoie l'affaire devant le juge de la mise en état'.
La qualification de désordre décennal invoquée par M. et Mme [F] doit être examinée, en tant que condition d'application de la forclusion, et étant relevé que cette qualification n'incombait pas au tribunal dès lors qu'aucune des parties ne s'est opposée à ce que le juge de la mise en état examine cette question de fond, comme le leur permettait l'article 789 du code de procédure civile.
L'article 1792 du code civil énonce que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
L'article 1792-2 du code civil dispose que la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert.
Un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage.
L'article 1792-3 du code civil dispose que les autres éléments d'équipement de l'ouvrage font l'objet d'une garantie de bon fonctionnement d'une durée minimale de deux ans à compter de sa réception.
Dans leurs conclusions au fond de première instance, M. et Mme [F] demandent la réparation du préjudice découlant de la fuite localisée sur le réseau d'injection de la nage à contre-courant.
Dans son rapport, l'expert judiciaire indique que la recherche de fuites a mis en évidence que l'ensemble du réseau de filtration de la piscine était étanche hormis une fuite localisée sur le réseau d'injection de la nage à contre-courant, telle que mise en évidence par le laboratoire Turcato intervenu en février 2022. L'expert judiciaire indique que la date d'apparition de cette fuite n'est pas connue et qu'elle est due à un problème de raccord au niveau de l'insertion entre le tuyau et la coque. Il la qualifie de 'petite'.
Dès lors, ce désordre ne présente pas la gravité exigée par l'article 1792 du code civil, visé par la société Groupama dans ses conclusions d'incident devant le juge de la mise état.
7. La société G.d'Eau soutient dans ses conclusions devant le juge de la mise en état et devant la cour, que la forclusion doit être prononcée sur le fondement de l'article 1792-4-3 du code civil relatif à la responsabilité pour faute prouvée, soutenant donc incidemment que la garantie décennale ne pourrait s'appliquer à ce désordre relevant de la responsabilité contractuelle de droit commun. À ce titre, il sera relevé que dans leurs conclusions au fond devant le tribunal judiciaire de Montauban, M. et Mme [F] ont fondé leur action tant sur l'article 1792 que sur l'article 1231-1 du code civil.
En vertu de l'article 1792-4-3 du code civil, 'En dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux'.
Le premier juge a retenu à bon droit une réception tacite des travaux le 30 septembre 2011 lors du paiement du solde des travaux étant toutefois relevé que ce point aurait dû faire l'objet d'une disposition distincte dans le dispositif de son ordonnance comme l'impose l'article 789 précité.
Dans l'acte d'assignation au fond du 21 septembre 2021, M. et Mme [F] ont sollicité la condamnation de la société G.d'Eau et la société Groupama à les indemniser de leur entier préjudice sur la base du rapport d'expertise à intervenir.
S'ils ont fait assigner lesdites sociétés dans les dix ans de la réception des travaux pour les indemniser des préjudices révélés par l'expertise judiciaire, dont la fuite du réseau de nage à contre-courant révélée dans ledit rapport, il n'est toutefois pas démontré que cette fuite, révélée par la société Turcato intervenue le 18 février 2022, serait apparue avant le 30 septembre 2021.
Dès lors, l'ordonnance du 28 février 2023 sera confirmée en ce qu'elle a 'dit irrecevable l'action de [K] [F] et de [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G d'eau - eau et technique 82 au titre de la fuite du réseau nage à contre-courant', de même que l'ordonnance rectificative du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande de retranchement des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 relatifs à la qualification des désordres au titre de la fuite du réseau de nage à contre-courant.
En revanche, il convient d'infirmer l'ordonnance du 28 février 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande d'omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant fondée sur l'invocation par la Sas G d'eau de l'article 1792-4-3 du code civil et de déclarer l'action de M. et Mme [F] irrecevable à ce titre.
- Sur les dépens et frais irrépétibles,
8. L'ordonnance du 28 février 2023 sera confirmée en ce qu'elle a condamné in solidum aux dépens de l'incident la société G.d'Eau et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc ainsi qu'à payer à M. et Mme [F] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700, 1° du code de procédure civile.
9. La Sas G.d'Eau et la société Groupama d'Oc, parties principalement perdantes au sens de l'article 696 du code de procédure civile, seront condamnées, chacune pour moitié aux dépens d'appel.
Il convient d'autoriser Maître Florence Simeon à recouvrer directement contre les parties condamnées aux dépens, ceux dont elle justifie avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.
10. La Sas G.d'Eau, contre laquelle la demande de M. et Mme [F] est dirigée, est condamnée à leur payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
La Sas G.d'Eau et la société Groupama d'Oc seront déboutées de leur demande relative aux frais irrépétibles qu'elles ont exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme en toutes leurs dispositions, dans les limites de la saisine de la cour, l'ordonnance rendue le 28 février 2023 telle que rectifiée par l'ordonnance du 18 juillet 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Montauban sauf en ce que cette dernière a rejeté la demande d'omission de statuer sur la forclusion de l'action de M. et Mme [F] au titre de la nage à contre-courant.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que les travaux litigieux ont fait l'objet d'une réception tacite le 30 septembre 2011.
Déclare irrecevable, sur le fondement de l'article 1792-4-3 du code civil l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] au titre du désordre affectant la nage à contre-courant.
Condamne la Sas G.d'Eau et la société Groupama d'Oc, chacune pour moitié, aux dépens d'appel.
Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, Maître Florence Simeon à recouvrer directement contre les parties condamnés aux dépens, ceux dont il justifie avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.
Condamne la Sas G.d'Eau à payer à M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
Rejette les demandes formées par la Sas G.d'Eau et la société Groupama d'Oc au titre des frais irrépétibles qu'elles ont elles-mêmes exposés en appel.
La greffière Le président
M. POZZOBON M. DEFIX
.
ARRÊT N° 25/ 415
N° RG 23/02882
N° Portalis DBVI-V-B7H-PUEM
MD/MP
Décision déférée du 28 Février 2023
JMEE de [Localité 7] 21/00820
A. RIBEYRON
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le 05/11/2025
à
Me Gilles [Localité 8]
Me Florence SIMEON
Me Catherine HOULL
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 1
***
ARRÊT DU CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
SAS G.D'EAU
[Adresse 9]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Jean françois MOREL de l'ASSOCIATION CABINET DECHARME, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE (plaidant) et par Me Gilles SOREL, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant)
INTIMES
Monsieur [K] [F]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Madame [B] [S] épouse [F]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentés par Me Florence SIMEON de la SCP CAMBRIEL GERBAUD-COUTURE ZOUANIA SIMEON, avocate au barreau de TARN-ET-GARONNE
GROUPAMA D'OC
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Catherine HOULL de la SELARL CATHERINE HOULL & ASSOCIES, avocate au barreau de TARN-ET-GARONNE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 02 juin 2025 en audience publique, devant la cour composée de :
M. DEFIX, président
S. LECLERCQ, conseillère
N. ASSELAIN, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière : lors des débats M. POZZOBON
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, après avis aux parties
- signé par M. DEFIX, président et par M. POZZOBON, greffière
EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Au cours de l'année 2011, M. [K] [F] et Mme [B] [S] épouse [F] ont confié à la Sas G.d'Eau exerçant sous l'enseigne 'Eau et technique 82", la réalisation d'une piscine dans l'immeuble leur appartenant, sis [Adresse 4], à [Localité 7] (82) moyennant paiement d'un prix total de 23 984,50 euros toutes taxes comprises, selon facture du 20 septembre 2011.
À la date d'ouverture du chantier, la société G.d'Eau était assurée auprès de Groupama d'Oc, puis a résilié la police d'assurance le 31 décembre 2014 pour être garantie par la société Qbe insurance.
Par courriel du 12 mai 2012, M. [F] s'est plaint que la coque était vrillée car non posée de niveau en largeur et en longueur, constituant un préjudice esthétique.
Selon transaction du 19 décembre 2012, M. et Mme [F] ont accepté de recevoir la somme de 3 000 euros de la part de la société G.d'Eau 'pour préjudice esthétique' et se sont engagés à ne pas engager de recours judiciaire en responsabilité de ce chef.
En 2014, le fabricant de la coque, la société Decopiscines, est intervenue pour effectuer des réparations sur la coque, M. [F] ayant signalé un problème d'osmose et de fissuration de buses.
Par courrier du 18 mars 2017 remis en main propre à la société G.d'Eau, M. [F] a fait état de l'aggravation des désordres constatés depuis six ans (défaut de niveau, osmose, fuites, détérioration des pièces plastiques de raccordement) et a mis en demeure l'entrepreneur de procéder à des réparations d'importance dans le cadre de la garantie décennale.
En 2020, plusieurs investigations ont été menées relativement à l'existence d'une fuite et à l'affaissement/basculement du bassin.
Par actes du 4 mai 2021, après avoir dénoncé des désordres, M. et Mme [F] ont fait assigner la société G.d'Eau devant le juge des référés
Par acte du 14 juin 2021, la société G.d'Eau a appelé la société Qbe aux fins d'expertise commune.
Par ordonnance du 8 juillet 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Montauban a désigné M. [N] [D] en qualité d'expert judiciaire.
Le 29 août 2022, l'expert a rendu son rapport.
-:-:-:-
Par actes d'huissier du 21 septembre 2021, M. [K] [F] et Mme [B] [S] épouse [F] ont fait assigner la Sas G.d'Eau et la compagnie Groupama d'Oc devant le tribunal judiciaire de Montauban, aux fins de les voir condamner à les indemniser de leur entier préjudice sur la base du rapport d'expertise à intervenir.
Par conclusions d'incident du 21 décembre 2022, la société G.d'Eau a saisi le juge de la mise en état, aux fins de voir :
- débouter les époux [F] de leur demande indemnitaire au titre du déversement de leur bassin et de la fuite d'eau de la nage à contre-courant comme se heurtant respectivement à l'autorité de la chose jugée et à la forclusion,
- réserver les dépens et dire qu'ils suivront le sort de l'instance principale.
Par conclusions d'incident du 26 décembre 2022, la compagnie Groupama d'Oc a demandé au juge de la mise en état de :
- débouter la société G.d'Eau de ses demandes contre Groupama d'Oc comme étant irrecevables du fait de la chose jugée attachée au protocole régularisé et de la forclusion atteignant le problème de la fuite de la nage à contre-courant,
- condamner tous succombants au règlement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions d'incident du 23 janvier 2023, M. et Mme [F] ont demandé au juge de la mise en état de :
- débouter la société G.d'Eau et la compagnie Groupama d'Oc de l'ensemble de leurs demandes,
- juger leur action recevable et non forclose,
- condamner solidairement la société G.d'Eau et la compagnie Groupama d'Oc à leur payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
-:-:-:-
Par ordonnance du 28 février 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Montauban a :
- dit irrecevable l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société 'G d'eau - eau et technique 82" au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant,
- dit recevable l'action de M. et Mme [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société 'G'd'eau - eau et technique 82" au titre de l'affaiblissement des plages de la piscine par défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton et précarité de l'épaisseur de celle-ci,
- condamné in solidum la société 'G d'eau - eau et technique 82" et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc, à payer à M. et Mme [F] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700, 1° du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société 'G d'eau - eau et technique 82" et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc aux dépens de l'incident,
- renvoyé l'affaire à la conférence de mise en état du 16 mars 2023 pour conclusions au fonds de M. et Mme [F] en réplique aux conclusions de la société 'G d'eau - eau et technique 82" et de la compagnie Groupama d'Oc.
Le juge de la mise en état a considéré :
- sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée du protocole, en raison des termes de la transaction et d'un courriel de M. [F] que le protocole concernait un préjudice esthétique et qu'eu égard à l'aggravation des désordres dénoncés par assignation du 14 juin 2021 non existants lors de la signature du protocole, l'autorité de la chose jugée de la transaction ne pouvait être opposée aux maîtres de l'ouvrage relativement à l'apparition de nouveaux désordres,
- sur la fin de non-recevoir tirée de l'écoulement du délai décennal, que la réception des travaux sans réserve avait eu lieu le 30 septembre 2011 et que les époux [F] avaient fait assigner en référé la société G.d'Eau par acte du 14 juin 2021 soit pendant le délai d'épreuve de 10 ans, mais que le désordre initial de basculement de la coque ne présentait pas le caractère de gravité requis par l'article 1792 du code civil, rendant les époux [F] irrecevables à agir pour ce poste de désordre au titre de la responsabilité décennale, et retenu de même pour les autres désordres allégués, hormis celui relatif au défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton et la précarité de son épaisseur.
Par requête du 9 mars 2023, la Sas G.d'Eau a saisi le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Montauban aux fins de :
- retrancher de l'ordonnance du 28 février 2023 les développements disant irrecevables l'action des époux [F] au titre de la responsabilité de constructeur de la société G.d'Eau concernant le basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant et disant recevables l'action des époux [F] au titre de la responsabilité de constructeur de la société G.d'Eau concernant l'affaissement des plages de la piscine par défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton et précarité de l'épaisseur de celle-ci,
- compléter ladite ordonnance en ajoutant le rejet de la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction du 19 décembre 2012,
- statuer sur la demande omise au terme de l'ordonnance en déclarant irrecevable comme forclose la demande des époux [F] au titre de la nage à contre-courant au titre de l'article 1792-4 du code civil.
Par ordonnance rectificative du 18 juillet 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Montauban a :
- retranché des motifs de l'ordonnance du 28 février [Immatriculation 2]/00820 le paragraphe figurant en page 6 dans la partie intitulée 'Sur la fin de non-recevoir tirée de l'écoulement du délai décennal' et concernant le défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton positionnée autour de la piscine, la précarité de l'épaisseur de celle-ci et l'affaissement des plages,
- retranché du dispositif de l'ordonnance du 28 février [Immatriculation 2]/00820 le paragraphe suivant:
' Disons recevable l'action de M. et Mme [F] au titre de la responsabilité de constructeur de la société G d'Eau - Eau et Technique 82 au titre de l'affaissement des plages de la piscine par défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton et précarité de l'épaisseur de celle-ci',
- rejeté la demande de retranchement des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 relatifs à la qualification des désordres au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant et la demande en omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant,
- rejeté la demande de retranchement du dispositif de l'ordonnance du 28 février 2023 RG : 21/820 du paragraphe 'Disons irrecevable l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G d'Eau - Eau et Technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant',
- rectifié le dispositif de l'ordonnance du juge de la mise en état du 28 février 2023 comme suit:
' rejetons la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue le 19 décembre 2012 entre d'une part M. et Mme [F] et d'autre part, la société G d'Eau - Eau et Technique 82",
- dit que les dépens resteront à la charge du Trésor public,
- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état électronique du 21 septembre 2023, pour conclusions de M. et Mme [F].
Pour statuer ainsi, le juge de la mise en état a considéré :
- s'agissant de la fin de non-recevoir tirée de l'écoulement du délai décennal, que l'appréciation de la forclusion de la demande exigeait de déterminer si les désordres allégués présentaient un caractère évolutif,
- les seuls désordres concernés par la fin de non-recevoir de la société G d'eau étaient le déversement du bassin de la piscine et la fuite d'eau de la nage à contre-courant et que ni l'assureur 'ni les époux [F]' n'avaient repris dans le dispositif de leurs écritures les moyens tendant à l'irrecevabilité de l'action en responsabilité concernant les plages de la piscine, de sorte que les développements relatifs à l'affaissement des plages de la piscine par défaut de ferraillage et épaisseur de la ceinture béton sont ultra petita et doivent être retirés de l'ordonnance,
- que les motifs de l'ordonnance comportent un paragraphe relatif à l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue entre les maîtres de l'ouvrage et l'entrepreneur évoquant l'inopposabilité de cette fin de non-recevoir, de sorte que le dispositif de l'ordonnance doit être rectifié et indiquer le rejet de cette fin de non-recevoir.
-:-:-:-
Par déclaration du 3 août 2023, la Sas G.d'Eau a relevé appel, en sollicitant 'l'infirmation, la réformation, voire l'annulation pour excès de pouvoir ou tout autre motif' de :
1. L'ordonnance du 28 février 2023 telle que rectifiée par l'ordonnance du 18 juillet 2023, en ce qu'elle a :
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue le 19 décembre 2012 entre d'une part les époux [F] et d'autre part la société G d'eau - eau et technique 82 ;
- dit irrecevable l'action de [K] [F] et de [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G d'eau - eau et technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant;
- condamné in solidum la société G d'eau - eau et technique 82 et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc à payer à M. et Mme [F] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700, 1° du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société G d'eau- eau et technique 82 et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc, aux dépens de l'incident,
2. L'ordonnance rectificative du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a :
- rejeté la demande de retranchement des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 relatifs à la qualification des désordres au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau de nage à contre-courant et la demande d'omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant,
- rejeté la demande de retranchement du dispositif de l'ordonnance du 28 février [Immatriculation 2]/00820 du paragraphe "Disons irrecevables l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G D'Eau - Eau et Technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant",
Selon avis du 15 septembre 2023, l'affaire a été fixée à bref délai selon les modalités des articles 904-1 et 905 du code de procédure civile.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 20 novembre 2023, la Sas G.d'Eau, appelante, demande à la cour de :
- débouter M. et Mme [F] et Groupama d'Oc de l'intégralités de leurs prétentions contraires aux présentes,
- annuler pour excès de pouvoir :
* l'ordonnance du 28 février 2023 telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a dit irrecevable l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [L] tendant à la mobilisation de la responsabilité du constructeur de la société G d'eau- eau et technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant,
* l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a :
' rejeté la demande de retranchement des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 relatifs à la qualification des désordres au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau de nage à contre-courant et la demande d'omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant,
' rejeté la demande de retranchement du dispositif de l'ordonnance du 28 février 2023 du paragraphe « Disons irrecevable l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité du constructeur de la société G d'eau- eau et technique 82 au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant »,
- évoquer l'examen de la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action de M. et Mme [F] contre la société G.d'Eau au titre de la fuite du réseau de la nage à contre-courant,
Complétant la décision du 28 février 2023 sur ce point,
- rejeter comme irrecevable l'action des époux [F] contre la société G.d'Eau au titre de la fuite du réseau de la nage à contre-courant en raison de sa forclusion,
- à titre subsidiaire concernant cette fin de non-recevoir, réformer l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande d'omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant,
- réformer l'ordonnance du 28 février 2023, telle que complétée par l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a :
* rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue le 19 décembre 2012 entre d'une part M. et Mme [F] et d'autre part la société 'G d'eau- eau et technique 82",
* condamné in solidum la société 'G d'eau ' eau et technique 82" et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc à payer aux époux [F] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700, 1° du code de procédure civile,
* condamné in solidum la société 'G d'eau ' eau et technique 82" et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc, aux dépens de l'incident,
Statuant à nouveau sur les chefs réformés,
- rejeter comme irrecevable l'action de M. et Mme [F] contre la société G.d'Eau au titre du déversement de la coque de leur bassin comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée de la transaction du 19 décembre 2012,
- débouter M. et Mme [F] de l'intégralité de leurs demandes,
- condamner M. et Mme [F] aux dépens de l'ordonnance du 28 février 2023,
À titre subsidiaire, dans l'hypothèse de l'infirmation et non de l'annulation de l'ordonnance du 18 juillet 2023 sur ce point,
- compléter l'ordonnance du 28 février 2023,
- rejeter comme irrecevable l'action de M. et Mme [F] contre la société G.d'Eau au titre de la fuite du réseau de la nage à contre-courant en raison de sa forclusion,
Ajoutant aux décisions déférées,
- condamner in solidum M. [K] [F] et Mme [B] [F] née [S] à payer à la Sas G.d'Eau la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700, alinéa 1er du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. [K] [F] et Mme [B] [F] née [S] à payer aux dépens d'appel et ordonner qu'ils soient recouvrés par le conseil de la Sas G.d'Eau selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile.
À l'appui de ses prétentions, l'appelante soutient que :
Sur l'annulation pour excès de pouvoir des décisions des 28 février et 18 juillet 2023,
- le juge s'est arrogé des attributions que le dispositif normatif lui refuse, commettant une violation particulièrement grave de la loi et permettant l'annulation de la décision même si elle ne pourrait faire l'objet d'un appel immédiat,
- tel est le cas lorsque le tribunal statue hors des limites de ses attributions,
- la cour peut connaître d'une demande en nullité lorsque la décision qui lui est déférée est susceptible d'appel,
- ce n'est que lorsque la décision n'est pas susceptible d'appel immédiat que le pouvoir de la cour est limité à son annulation,
- le premier juge n'a pas statué, à tort, sur la fin de non-recevoir tenant à la forclusion de l'action des époux [F] au visa de l'article 1793-4-1 du code civil qui relève pourtant des pouvoirs que lui confère l'article 789 du code de procédure civile,
- il a examiné les conditions d'application de la garantie décennale pour l'écarter au titre des désordres relatifs au basculement de la coque et de la fuite de la piscine, or le moyen tiré du défaut de gravité ne constitue pas une fin de non-recevoir mais une défense au fond, il n'appartenait pas au juge de la mise en état de statuer sur ce moyen,
- le premier juge a donc commis un excès de pouvoir en déclarant irrecevable l'action au titre du basculement de la coque de la piscine et de la fuite du réseau nage à contre-courant,
- il ne pouvait donc refuser de retrancher des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 les développements relatifs à l'examen de cette défense au fond,
- la cour doit donc annuler les chefs des deux décisions qui lui sont déférés à ce titre sans pouvoir user de son pouvoir d'évocation, puisqu'elle n'a pas plus de pouvoirs que le juge dont appel,
- le juge de la mise en état a commis un excès de pouvoir négatif en refusant de statuer sur l'omission de statuer sur la forclusion de l'action au titre des dommages relatifs à la nage à contre-courant dans sa décision du 18 juillet 2023,
- la cour doit annuler cette disposition et l'examiner dans le cadre de son pouvoir d'évocation
Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée,
- aux termes du protocole transactionnel du 19 décembre 2012, M. et Mme [F] ont renoncé à rechercher la responsabilité de la société G.d'Eau au titre du préjudice esthétique résultant du défaut de niveau de la coque en contrepartie d'une indemnité de 3000 euros,
- il ressort des conclusions de l'expert judiciaire que le désordre reste esthétique et non décennal et que son évolution n'est pas démontrée, aucun fait nouveau n'a donc remis en cause les termes de la transaction du 19 décembre 2012 et l'autorité de la chose jugée qui y est attachée,
- la cour doit donc réformer la décision du 28 février 2023 telle que modifiée par celle du 18 juillet 2023 et déclarer irrecevable l'action de M. et Mme [F] au titre du déversement du bassin comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée de la transaction du 19 décembre 2012,
Sur la forclusion de l'action de M. et Mme [F] au titre de la nage à contre-courant,
- M. [F] fixe la date de réception tacite au paiement des travaux par chèque du 30 septembre 2011,
- dans l'assignation tant en référé qu'au fond, M. et Mme [F] n'ont évoqué que des défauts affectant le bassin et n'ont jamais mentionné de fuites des canalisations,
- l'expert judiciaire conclut que la fuite sur la canalisation d'injection de la nage à contre-courant n'a aucun lien avec les fuites alléguées du bassin,
- toute demande au titre de ce désordre est forclose puisqu'il n'a pas fait l'objet d'une demande en justice le visant précisément dans les dix ans de la réception, soit avant le 30 septembre 2021,
- la cour, évoquant ce chef de litige après annulation de l'ordonnance du 18 juillet 2023 rejetant la demande d'omission de statuer présentée, devra compléter la décision du 28 février 2023 et déclarer irrecevable comme forclose l'action de M. et Mme [F] au titre de la fuite du réseau de nage à contre-courant.
Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 2 novembre 2023, M. [K] [F] et Mme [B] [S] épouse [F], intimés, demandent à la cour, au visa des articles 1792 et suivants, 2044 et suivants du code civil et 789 du code de procédure civile, de :
Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et en tout cas mal fondées,
- confirmer l'ordonnance du 28 février 2023 en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction, et l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle
a complété les dispositions de l'ordonnance du 28 février 2023 concernant le rejet de la fin de
non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction,
- confirmer l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande de la société G d'eau en omission de statuer sur la forclusion de M. et Mme [F] sur leur demande au titre de la nage à contre-courant,
- confirmer l'ordonnance du 28 février 2023 quant aux condamnations prononcées au titre des frais irrépétibles et des dépens,
- débouter la société G.d'Eau de ses demandes de réformation contraires,
- statuer ce que de droit sur la demande de la société G.d'Eau en annulation pour excès de pouvoir de l'ordonnance du 28 février 2023 en ce qu'elle a jugé irrecevable l'action de M. et Mme [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G d'eau au titre du basculement de la coque et de la fuite, et en annulation des dispositions de l'ordonnance du 18 juillet 2023 ayant rejeté le retranchement sur ce chef,
- débouter la société G.d'Eau de sa demande en annulation pour excès de pouvoir de l'ordonnance du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande de la société G.d'Eau en omission de statuer sur la forclusion de M. et Mme [F] sur leur demande au titre de la nage à contre-courant,
Ou, subsidiairement, en cas d'évocation de cette demande,
- juger irrecevable la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action de M. et Mme [F] au titre de la fuite sur la nage à contre-courant, et les juger non forclos sur ce chef,
- débouter la société G.d'Eau de sa demande de condamnation de M. et Mme [F] au paiement de frais irrépétibles et des dépens,
- condamner la société G.d'Eau au paiement de la somme de 2.500 euros au profit de M. et Mme [F] par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société G.d'Eau aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Florence Simeon, avocat sur son affirmation de droit.
À l'appui de leurs prétentions, les intimés soutiennent que :
Sur la fin de non-recevoir alléguée,
- une transaction ne règle que les différends s'y trouvant compris, or la renonciation à recours visée au protocole d'accord est circonscrite aux faits indemnisés, à savoir en l'espèce le défaut de niveau de l'ouvrage causant un préjudice esthétique,
- les désordres relatifs aux plages ne sont pas mentionnés dans le protocole puisqu'ils n'existaient pas à cette époque,
- ce n'est que depuis 3,5 ans que l'abri ne ferme plus en raison de dégâts nouvellement apparus,
- le protocole ne portait pas sur des désordres issus de malfaçons constructives mises en évidence par l'expertise judiciaire,
- l'expert judiciaire a relevé une impropriété à destination pour laquelle il préconise une démolition-reconstruction de l'ouvrage,
- la société G d'eau aurait dû investiguer sur l'origine du problème de niveau qui consistait en un support défaillant ayant entraîné un basculement de la coque piscine et des désordres sur les plages,
- l'acceptation d'indemnisation pour préjudice esthétique ne peut avoir pour conséquence de priver une partie de son droit d'action en responsabilité pour indemnisation d'un ouvrage qui s'est révélé, dans le temps, impropre à sa destination du fait des malfaçons,
Sur la forclusion alléguée,
- tant dans l'assignation en référé que dans celle au fond, ils ont fait état d'une fuite,
- la fuite est due à un problème de raccord au niveau de l'insertion entre le tuyau et la coque,
- l'expert a fait appel à un sapiteur qui a confirmé l'existence d'une fuite sur le réseau de nage à contre-courant,
- le fait d'avoir fait rechercher une fuite sur le réseau de la piscine en 2020 démontre bien que le désordre est survenu antérieurement,
- ils ne pouvaient mentionner que la fuite affectait le réseau de nage à contre-courant dans les actes introductifs d'instance puisque l'expertise judiciaire avait pour but d'en déterminer l'origine et en constater l'existence,
- la recherche de la fuite a été faite 'piscine vidée', alors que lorsque la piscine est pleine, et la nage à contre-courant en fonctionnement, la fuite est d'importance.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 novembre 2023, la compagnie Groupama d'Oc, intimée formant appel incident, demande à la cour, au visa de l'article 789 du code de procédure civile et des articles 1792 et suivants du code civil, de :
- prononcer l'irrecevabilité de l'appel en nullité pour excès de pouvoir des ordonnances de 28 février 2023 et 18 juillet 2023,
- confirmer l'ordonnance du 18 juillet 2023, telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a prononcé :
* concernant l'affaissement de la coque de la piscine, et la nage à contre-courant, l'irrecevabilité de l'action de M. et Mme [F],
* concernant les places de piscine, le défaut de ferraillage horizontal de la ceinture béton positionnée autour de la piscine, la précarité de l'épaisseur de celle-ci, le retranchement prononcé,
- infirmer l'ordonnance du 18 juillet 2023, telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande formulée au niveau de l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction du 19 décembre 2022,
Statuant à nouveau,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande du maître de l'ouvrage concernant les désordres intéressants la coque et les terrasses,
En tout état de cause,
- infirmer l'ordonnance du 28 février 2023 telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a mis à la charge de Groupama d'Oc les dépens de l'incident ainsi qu'une somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum M. et Mme [F] et la société G.d'Eau au règlement d'une somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de Maître Houll conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
À l'appui de ses prétentions, l'intimée formant appel incident soutient que :
- l'appel-nullité n'est pas recevable dans la mesure où les ordonnances du juge de la mise en étant attaquées sont susceptibles d'appel,
- il n'y a pas eu d'excès de pouvoir de la part du juge de la mise en état qui pouvait trancher la question de fond relative au caractère décennal des désordres allégués,
- du fait de ce protocole toutes les réclamations résultant d'un défaut de niveau de l'ouvrage, des conséquences du fait que la coque est vrillée, pour être prises en compte nécessitent la démonstration d'une aggravation du désordre initial, non établi en l'espèce, de sorte que les demandes relatives au défaut de niveau de l'ouvrage et de la pose vrillée de la coque sont irrecevables,
- si l'effet relatif des contrats interdit aux tiers de se prévaloir de l'autorité d'une transaction à
laquelle ils ne sont pas intervenus, ces mêmes tiers peuvent néanmoins invoquer la renonciation à un droit que renferme cette transaction.
MOTIVATION DE LA DÉCISION
- Sur la recevabilité de l' 'appel-nullité',
1. L'examen attentif de la déclaration d'appel fait apparaître que l'appelant a indiqué à titre d'objet de l'appel : 'l'infirmation, la réformation, voire l'annulation pour excès de pouvoir ou tout autre motif', tout en précisant les chefs des ordonnances critiqués et énonçant, dans le dispositif de ses conclusions, des prétentions tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des ordonnances critiquées.
La voie de l'appel-nullité n'est ouverte qu'à l'encontre des décisions non susceptibles d'appel et dans la mesure où il est reproché au premier juge un excès de pouvoir.
En vertu de l'article 795 du code de procédure civile dans sa version en vigueur du 1er janvier 2021 au 1er septembre 2024, les ordonnances du juge de la mise en état ne peuvent être frappées d'appel qu'avec le jugement statuant sur le fond. Toutefois, elles sont susceptibles d'appel, dans les quinze jours à compter de leur signification, lorsqu'elles statuent sur une fin de non-recevoir. Lorsque la fin de non-recevoir a nécessité que soit tranchée au préalable une question de fond, l'appel peut porter sur cette question de fond.
Enfin, en vertu des articles 463 et 464 du code de procédure civile, la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s'il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens. La décision est notifiée comme le jugement et donne ouverture aux mêmes voies de recours que celui-ci. Il en va de même si le juge s'est prononcé sur des choses non demandées ou s'il a été accordé plus qu'il n'a été demandé.
En l'espèce, la société G.d'Eau a relevé appel de l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du 28 février 2023 telle que rectifiée par celle du 18 juillet 2023 et celle du 18 juillet 2023 relativement à plusieurs fins de non-recevoir.
Dès lors, l'appel était immédiatement ouvert contre ces décisions et les chefs de dispositif attaqués. Les conditions de l'appel-nullité ne sont donc pas réunies.
Néanmoins, le présent appel peut s'analyser comme tendant à la réformation ou à l'annulation du jugement, conformément aux dispositions de l'article 542 du code de procédure civile dès lors que la déclaration d'appel comme le dispositif des conclusions de l'appelant visent précisément des chefs des ordonnances critiquées et l'objet du recours visant notamment la réformation des ordonnances..
Dans cette hypothèse, il y a lieu d'examiner les moyens développés par la société G.d'Eau visant l'irrecevabilité des demandes de M. et Mme [F] à son encontre en raison de la forclusion et de l'autorité de la chose jugée, ainsi que ceux développés par la société Groupama d'Oc qui a relevé appel incident.
2. Il est relevé que dans l'assignation signifiée à la société G.d'Eau, par acte d'huissier du 21 septembre 2021, M. et Mme [F] ont demandé à la voir condamner à les indemniser de leur entier préjudice sur la base du rapport d'expertise à intervenir, évoquant dans l'acte d'assignation 'les désordres affectant leur piscine ainsi que les périphériques plage et abri motorisé', 'un basculement de la coque et des baisses significatives et régulières du niveau de l'eau du bassin', 'un affaissement et un basculement de la piscine outre des fuites du bassin', tels que figurant également dans l'assignation par acte du 4 mai 2021 en référé pour désignation d'un expert judiciaire.
Dans leurs conclusions au fond du 15 décembre 2022, M. et Mme [F] ont notamment demandé au tribunal judiciaire, de
- juger que la société G.d'Eau a engagé sa responsabilité décennale à l'égard des époux [F],
- condamner la société G.d'Eau au paiement de la somme de 51.210,06 euros Ttc, à actualiser en fonction de l'évolution de l'indice BT01 entre la date d'émission des devis et le jugement à intervenir, outre celle de 16.250 euros Ttc, vétusté à déduire, en réparation du préjudice matériel subi par les époux [F] ;
- condamner la société G.d'Eau au paiement de la somme de 5.000 euros Ttc en réparation du préjudice de jouissance subi par les époux [F], outre celle de 1.500 euros Ttc au titre de leur préjudice moral.
M. et Mme [F] sollicitent la réparation des désordres suivants constatés par l'expert judiciaire:
- coque du bassin déversée,
- fissurations des plages et désaffleurements sur le revêtement,
- ceinture béton d'épaisseur précaire dans l'angle nord-est,
- fuites dans le réseau de nage à contre-courant,
- absence de ferraillage horizontal du béton dans l'angle le plus proche du garage.
3. Dans les conclusions d'incident devant le juge de la mise en état, la Sas G.d'Eau a demandé au juge de 'débouter les demandes présentées par les époux [F] au titre du déversement de leur bassin et de la fuite d'eau de la nage à contre-courant comme se heurtant respectivement à l'autorité de la chose jugée à la forclusion', invoquant comme moyens que :
Sur l'autorité de la chose jugée :
- les parties ont conclu une transaction le 19 décembre 2012 relativement à la déficience altimétrique, or l'expert judiciaire a conclu que l'état de la coque de la piscine n'était pas affecté d'un désordre décennal, sans exposer que la déficience altimétrique aurait évolué, et il résulterait des pièces du dossier que le désordre tenant à la vrille de la coque en raison d'une pose qui n'est pas de niveau existait dès l'origine et était visible dans ses conséquences. Il s'agirait donc seulement d'un désordre esthétique déjà indemnisé dans le cadre du protocole transactionnel,
Sur la forclusion :
- si la fuite de la nage à contre-courant est de nature décennale la difficulté est de déterminer si elle est survenue pendant le délai d'épreuve décennal,
- M. [F] fixe la date de réception tacite au paiement intervenu pour le solde le 30 septembre 2011,
- la fuite est minime et n'a pu être datée par l'expert judiciaire puisqu'elle est sans lien avec le niveau du bassin,
- la demande au titre de ce désordre est forclose pour n'avoir pas fait l'objet d'une demande en justice le visant précisément dans les dix ans de la réception.
4. Dans ses conclusions d'incident, la société Groupama d'Oc a demandé au juge de la mise en état de débouter la Sas G.d'Eau de l'ensemble de ses demandes, fins, et conclusions formulées à l'encontre de la compagnie Groupama d'Oc comme étant irrecevables du fait de l'autorité de la chose jugée attachée au protocole régularisé, et de la forclusion atteignant le problème de la fuite sur le réseau de la nage à contre-courant.
Elle a soulevé comme moyens que par le protocole transactionnel, le maître de l'ouvrage a renoncé à son droit d'agir en cas d'évolution des déformations initiales, coque et terrasses de la piscine et que seule une fuite sur la piscine avait été déclarée dans le délai décennal et non sur la nage à contre-courant, outre que cette dernière a été décelée par l'expert judiciaire après expiration du délai décennal.
Devant la cour d'appel, la Sas G.d'Eau sollicite l'annulation des chefs de dispositif des ordonnances attaquées qui ont statué sur l'action fondée sur le basculement de la coque/ déversement du bassin et la fuite du réseau de nage à contre-courant.
Quant à elle, la société Groupama d'Oc demande à la cour d'accueillir la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction du 19 décembre 2012 pour toutes les réclamations résultant du défaut de niveau de l'ouvrage.
- Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée relative au déversement du bassin,
5. L'article 2044 du code civil prévoit que « La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit ».
L'article 2048 du code civil dispose que « Les transactions se renferment dans leur objet: la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu ».
L'article 2049 du code civil prévoit que les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé.
L'article 2052 du code civil dispose que « La transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet ».
Il résulte de ces dispositions qu'une transaction n'a autorité de la chose jugée qu'en ce qui concerne le différend qu'elle règle.
En l'espèce, le protocole d'accord transactionnel signé entre la société G.d'Eau d'une part et M. et Mme [F] d'autre part, le 19 décembre 2012 stipule que la Sas G.d'Eau 'consent une indemnité forfaitaire pour préjudice esthétique de 3 000 euros'. M. et Mme [F] 'renoncent à l'avoir en cours chez Eau et technique d'un montant de 432€90", que 'en contrepartie de l'exécution des présentes, les parties se déclarent intégralement satisfaites et remplies de tous leurs droits en raison du litige, objet de cette transaction. Les parties s'engagent à ne pas engager de recours judiciaire en responsabilité de ce chef-là'.
Le courriel envoyé par M. [F] à la société G.d'Eau le 15 mai 2012 décrit le préjudice esthétique : 'vous avez pu constater les malfaçons que je vous avais signalées à savoir que la coque est vrillée en raison d'une pose qui n'est pas de niveau en largeur mais aussi en longueur, il en résulte un préjudice esthétique incontestable qui est accentué par les plages et leurs propres désordres. Vous m'assurez que ces problèmes d'erreur de niveau n'affecteront pas la structure dans le temps mais cela reste hypothétique car, me semble-t-il, une piscine vieillit mieux si elle est bien posée que si elle est en torsion'.
Dans leurs conclusions au fond déposées en première instance, M. et Mme [F] ont demandé l'indemnisation du préjudice résultant du défaut de niveau de la piscine et de manière générale, des malfaçons tenant à l'absence de dalle béton en fondation, l'absence de ferraillage de la ceinture béton supérieure, la friabilité du béton et l'absence d'armature métallique, mis en évidence par le rapport d'expertise judiciaire. Ils indiquent que le protocole transactionnel concernait uniquement un préjudice esthétique et ne peut être opposé en cas d'affaissement de terrain provoqué par la poussée de la paroi latérale de la piscine, engendrant des désordres sur les plages.
Dans son rapport, l'expert judiciaire indique que :
- la coque du bassin est déversée,
- qu'il y a une différence d'altimétrie entre le côté est-sud et le côté est-nord,
- que l'angle à proximité du puits de décompression est plus haut que tout autre point de mesure et cela résulte en un affaissement de la piscine,
- que les fissures relevées dans un angle de la piscine sont la conséquence de l'affaissement d'appui,
- que l'affaissement d'appui a pu être provoqué par un terrassement ou une dénivellation du sol,
- qu'au regard du protocole d'accord et des courriers, cette malfaçon est initiale.
L'expert judiciaire estime que pour le basculement de la coque de la piscine, le caractère évolutif n'est pas totalement prouvé puisqu'il n'y a pas eu de relevé altimétrique à l'époque de la construction.
Toutefois, il ressort du rapport d'expertise judiciaire, que l'affaissement de la piscine a généré des fissures dans un angle de la piscine, outre que cet affaissement s'accompagne de l'affaissement des plages, et ce en raison de l'absence de ferraillage horizontal, outre une ceinture béton reposant sur du mortier friable dans l'angle.
Dès lors, il ne peut être opposé à M. et Mme [F] de fin de non-recevoir concernant les désordres fonctionnels et structurels provoqués par l'affaissement du bassin dont ils demandent réparation devant le tribunal judiciaire de Montauban.
L'ordonnance du 28 février 2023 telle que modifiée par l'ordonnance rectificative du 18 juillet 2023 sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la transaction conclue le 19 décembre 2012 entre d'une part les époux [F] et d'autre part la société G d'eau.
- Sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion relative à la fuite d'eau de la nage à contre-courant,
6. Dans les conclusions d'incident devant le juge de la mise en état, la Sas G.d'Eau a demandé au juge de la mise en état de débouter les époux [F] de leur demande au titre de la fuite d'eau de la nage à contre-courant comme se heurtant à la forclusion, invoquant comme moyens que :
- si la fuite de la nage à contre-courant est de nature décennale la difficulté est de déterminer si elle est survenue pendant le délai d'épreuve décennal,
- M. [F] fixe la date de réception tacite au paiement intervenu pour le solde le 30 septembre 2011,
- la fuite est minime et n'a pu être datée par l'expert judiciaire puisqu'elle est sans lien avec le niveau du bassin,
- la demande au titre de ce désordre est forclose pour n'avoir pas fait l'objet d'une demande en justice le visant précisément dans les dix ans de la réception.
En vertu de l'article 789 du code de procédure civile, dans sa version en vigueur du 1er janvier 2020 au 1er septembre 2024, :
'Lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :
(...)
6° Statuer sur les fins de non-recevoir.
Lorsque la fin de non-recevoir nécessite que soit tranchée au préalable une question de fond, le juge de la mise en état statue sur cette question de fond et sur cette fin de non-recevoir. Toutefois, dans les affaires qui ne relèvent pas du juge unique ou qui ne lui sont pas attribuées, une partie peut s'y opposer. Dans ce cas, et par exception aux dispositions du premier alinéa, le juge de la mise en état renvoie l'affaire devant la formation de jugement, le cas échéant sans clore l'instruction, pour qu'elle statue sur cette question de fond et sur cette fin de non-recevoir. Il peut également ordonner ce renvoi s'il l'estime nécessaire. La décision de renvoi est une mesure d'administration judiciaire.
Le juge de la mise en état ou la formation de jugement statuent sur la question de fond et sur la fin de non-recevoir par des dispositions distinctes dans le dispositif de l'ordonnance ou du jugement. La formation de jugement statue sur la fin de non-recevoir même si elle n'estime pas nécessaire de statuer au préalable sur la question de fond. Le cas échéant, elle renvoie l'affaire devant le juge de la mise en état'.
La qualification de désordre décennal invoquée par M. et Mme [F] doit être examinée, en tant que condition d'application de la forclusion, et étant relevé que cette qualification n'incombait pas au tribunal dès lors qu'aucune des parties ne s'est opposée à ce que le juge de la mise en état examine cette question de fond, comme le leur permettait l'article 789 du code de procédure civile.
L'article 1792 du code civil énonce que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
L'article 1792-2 du code civil dispose que la présomption de responsabilité établie par l'article 1792 s'étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d'équipement d'un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert.
Un élément d'équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l'un des ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s'effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage.
L'article 1792-3 du code civil dispose que les autres éléments d'équipement de l'ouvrage font l'objet d'une garantie de bon fonctionnement d'une durée minimale de deux ans à compter de sa réception.
Dans leurs conclusions au fond de première instance, M. et Mme [F] demandent la réparation du préjudice découlant de la fuite localisée sur le réseau d'injection de la nage à contre-courant.
Dans son rapport, l'expert judiciaire indique que la recherche de fuites a mis en évidence que l'ensemble du réseau de filtration de la piscine était étanche hormis une fuite localisée sur le réseau d'injection de la nage à contre-courant, telle que mise en évidence par le laboratoire Turcato intervenu en février 2022. L'expert judiciaire indique que la date d'apparition de cette fuite n'est pas connue et qu'elle est due à un problème de raccord au niveau de l'insertion entre le tuyau et la coque. Il la qualifie de 'petite'.
Dès lors, ce désordre ne présente pas la gravité exigée par l'article 1792 du code civil, visé par la société Groupama dans ses conclusions d'incident devant le juge de la mise état.
7. La société G.d'Eau soutient dans ses conclusions devant le juge de la mise en état et devant la cour, que la forclusion doit être prononcée sur le fondement de l'article 1792-4-3 du code civil relatif à la responsabilité pour faute prouvée, soutenant donc incidemment que la garantie décennale ne pourrait s'appliquer à ce désordre relevant de la responsabilité contractuelle de droit commun. À ce titre, il sera relevé que dans leurs conclusions au fond devant le tribunal judiciaire de Montauban, M. et Mme [F] ont fondé leur action tant sur l'article 1792 que sur l'article 1231-1 du code civil.
En vertu de l'article 1792-4-3 du code civil, 'En dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux'.
Le premier juge a retenu à bon droit une réception tacite des travaux le 30 septembre 2011 lors du paiement du solde des travaux étant toutefois relevé que ce point aurait dû faire l'objet d'une disposition distincte dans le dispositif de son ordonnance comme l'impose l'article 789 précité.
Dans l'acte d'assignation au fond du 21 septembre 2021, M. et Mme [F] ont sollicité la condamnation de la société G.d'Eau et la société Groupama à les indemniser de leur entier préjudice sur la base du rapport d'expertise à intervenir.
S'ils ont fait assigner lesdites sociétés dans les dix ans de la réception des travaux pour les indemniser des préjudices révélés par l'expertise judiciaire, dont la fuite du réseau de nage à contre-courant révélée dans ledit rapport, il n'est toutefois pas démontré que cette fuite, révélée par la société Turcato intervenue le 18 février 2022, serait apparue avant le 30 septembre 2021.
Dès lors, l'ordonnance du 28 février 2023 sera confirmée en ce qu'elle a 'dit irrecevable l'action de [K] [F] et de [B] [S] épouse [F] tendant à la mobilisation de la responsabilité de constructeur de la société G d'eau - eau et technique 82 au titre de la fuite du réseau nage à contre-courant', de même que l'ordonnance rectificative du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande de retranchement des motifs de l'ordonnance du 28 février 2023 relatifs à la qualification des désordres au titre de la fuite du réseau de nage à contre-courant.
En revanche, il convient d'infirmer l'ordonnance du 28 février 2023 en ce qu'elle a rejeté la demande d'omission de statuer sur la forclusion de cette action au titre de la nage à contre-courant fondée sur l'invocation par la Sas G d'eau de l'article 1792-4-3 du code civil et de déclarer l'action de M. et Mme [F] irrecevable à ce titre.
- Sur les dépens et frais irrépétibles,
8. L'ordonnance du 28 février 2023 sera confirmée en ce qu'elle a condamné in solidum aux dépens de l'incident la société G.d'Eau et son assureur, la compagnie Groupama d'Oc ainsi qu'à payer à M. et Mme [F] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700, 1° du code de procédure civile.
9. La Sas G.d'Eau et la société Groupama d'Oc, parties principalement perdantes au sens de l'article 696 du code de procédure civile, seront condamnées, chacune pour moitié aux dépens d'appel.
Il convient d'autoriser Maître Florence Simeon à recouvrer directement contre les parties condamnées aux dépens, ceux dont elle justifie avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.
10. La Sas G.d'Eau, contre laquelle la demande de M. et Mme [F] est dirigée, est condamnée à leur payer la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
La Sas G.d'Eau et la société Groupama d'Oc seront déboutées de leur demande relative aux frais irrépétibles qu'elles ont exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme en toutes leurs dispositions, dans les limites de la saisine de la cour, l'ordonnance rendue le 28 février 2023 telle que rectifiée par l'ordonnance du 18 juillet 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Montauban sauf en ce que cette dernière a rejeté la demande d'omission de statuer sur la forclusion de l'action de M. et Mme [F] au titre de la nage à contre-courant.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que les travaux litigieux ont fait l'objet d'une réception tacite le 30 septembre 2011.
Déclare irrecevable, sur le fondement de l'article 1792-4-3 du code civil l'action de M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] au titre du désordre affectant la nage à contre-courant.
Condamne la Sas G.d'Eau et la société Groupama d'Oc, chacune pour moitié, aux dépens d'appel.
Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, Maître Florence Simeon à recouvrer directement contre les parties condamnés aux dépens, ceux dont il justifie avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.
Condamne la Sas G.d'Eau à payer à M. [K] [F] et de Mme [B] [S] épouse [F] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
Rejette les demandes formées par la Sas G.d'Eau et la société Groupama d'Oc au titre des frais irrépétibles qu'elles ont elles-mêmes exposés en appel.
La greffière Le président
M. POZZOBON M. DEFIX
.