CA Poitiers, ch. soc., 6 novembre 2025, n° 22/01096
POITIERS
Arrêt
Autre
ARRET N° 291
N° RG 22/01096
N° Portalis DBV5-V-B7G-GQ7X
S.A.R.L. 100 % PISCINES
C/
[R]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
Chambre sociale
ARRÊT DU 06 NOVEMBRE 2025
Décision déférée à la cour : Jugement du 29 mars 2022 rendu par le conseil de prud'hommes - Formation de départage de LA ROCHELLE
APPELANTE :
S.A.R.L. 100% PISCINES
N° SIRET : 792 003 451
[Adresse 4]
[Localité 2]
Ayant pour avocat Me Emmanuelle MONTERAGIONI-LAMBERT de la SCP ELIGE LA ROCHELLE-ROCHEFORT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
INTIMÉE :
Madame [Z] [R]
Née le 27 mai 1980 à [Localité 6] (MAROC)
[Adresse 3]
[Adresse 7]
[Localité 1]
Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LX POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Alexandra DUPUY de la SELARL ALEXANDRA DUPUY, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 907 et 805 du code de procédure civile, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés, l'affaire a été débattue le 12 février 2025, en audience publique, devant :
Madame Françoise CARRACHA, présidente qui a présenté son rapport
Monsieur Nicolas DUCHATEL, conseiller
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Françoise CARRACHA, présidente
Madame Estelle LAFOND, conseillère
Monsieur Nicolas DUCHATEL, conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Patricia RIVIÈRE
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile que l'arrêt sera rendu le 17 avril 2025, la date du prononcé ayant été prorogée à plusieurs reprises, les parties avisées, pour l'arrêt être rendu le 06 novembre 2025,
- Signé par Madame Françoise CARRACHA, présidente, et par Madame Patricia RIVIERE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
La S.A.R.L. 100% Piscines est une société spécialisée dans la construction et l'entretien des piscines, relevant de la convention collective nationale des ouvriers du bâtiment du 7 mars 2018.
Mme [R] et M. [N], gérant de la société 100% Piscines, ont entretenu une relation de couple de décembre 2017 jusqu'en mars 2020.
Mme [R] a été embauchée par la société 100% Piscines le 1er septembre 2018 suivant contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de commerciale, coefficient 220, pour une durée de travail de 35 heures moyennant une rémunération de 1 736,62 euros brut, auquel s'ajoutent une prime pour apporteur d'affaire correspondant à 7 % du montant HT de la commande signée, une prime d'ancienneté selon les conditions prévues par la convention collective et un panier repas forfaitaire journalier de 8,10 euros.
Le 15 juillet 2020, Mme [R] et la société 100% Piscines ont signé une rupture conventionnelle avec effet au 31 août 2020.
Au moment de la rupture des relations contractuelles, la société employait à titre habituel moins de onze salarié.
Par requête du 22 janvier 2021, Mme [R] a saisi le conseil de prud'hommes de La Rochelle aux fins de voir reconnaître l'existence de faits de harcèlement moral, de travail dissimulé et d'obtenir la condamnation de la société 100% Piscines à lui verser diverses sommes et lui remettre des documents.
Par jugement du 29 mars 2022, le conseil de prud'hommes de La Rochelle statuant en formation de départage a :
- débouté la société 100% Piscines de sa demande d'injonction de communication de pages lisibles de sa pièce n°15 et de sa demande tendant à ce que la pièce soit écartée des débats,
- débouté Mme [R] de sa demande de sommation de communiquer les devis terrassement de septembre 2018 à juillet 2020 ainsi que les bons de commandes correspondants,
- débouté Mme [R] de sa demande de rappel de salaire pour la période de juillet à août 2020,
- condamné la société 100% piscines à payer à Mme [R] la somme de 600 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive de rémunération,
- condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] les sommes de 18 958,36 euros à titre de rappel de salaires impayés outre 1 895,84 euros au titre des congés payés afférents,
- débouté Mme [R] de sa demande de dommages et intérêts pour rétention abusive de la prime d'apporteur d'affaire,
- débouté Mme [R] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- débouté Mme [R] de sa demande de transmission sous astreinte des documents relatifs à l'assurance maladie et de dommages et intérêts pour rétention abusive,
- débouté Mme [R] de sa demande indemnitaire au titre d'un prétendu travail dissimulé,
- ordonné la remise par la société 100% Piscines à Mme [R] d'une attestation destinée à pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congé en double exemplaire et ce sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la notification ou de la signification du jugement, dans la limite de 60 jours sauf à ce qu'il soit statué à nouveau,
- débouté Mme [R] de sa demande indemnitaire au titre de la rétention abusive desdits documents,
- condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] la somme de 5 316,78 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence,
- condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] les intérêts de retard au taux légal à compter du 29 janvier 2021 sur les créances de salaire et à compter du jugement sur les créances indemnitaires,
- débouté la société 100% Piscines de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la société 100% Piscines aux entiers dépens de la présente instance et à payer à Mme [R] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration du 29 avril 2022, la SARL 100% piscines a relevé appel de cette décision.
Par ordonnance d'incident du 15 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a :
- rejeté la demande de suspension d'exécution provisoire présentée par la société 100% piscines,
- déclaré recevable la demande de radiation de Mme [R] sur le fondement de l'article 524 du code de procédure civile,
- constaté que la demande de radiation est devenue sans objet du fait de la saisie-attribution pratiquée le 23 août 2022,
- débouté la société 100% Piscines de sa demande tendant à voir ordonner la mise sous compte séquestre/Carpa de la somme objet de la saisie-attribution, en l'attente d'une décision définitive,
- condamné la société 100% Piscines aux dépens de l'incident.
La société 100% Piscines aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 janvier 2024, demande à la cour de :
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de La Rochelle en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'injonction à Mme [R] de communication de pages lisibles de sa pièce n°15 et de sa demande subséquente tendant à ce que ladite pièce soit écartée des débats,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [R] la somme de 600 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive de rémunération,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [R] la somme de 18 958,36 euros à titre de rappel de salaires impayés outre 1 895,84 euros au titre des congés payés afférents,
- infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la remise à Mme [R] d'une attestation destinée à Pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congé en double exemplaire et ce sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la notification ou signification de la présente décision, dans la limite de 60 jours sauf à ce qu'il soit statué à nouveau,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [R] la somme de 5 316,78 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [R] les intérêts de retard au taux légal à compter du 29 janvier 2021 sur les créances de salaire et à compter du jugement sur les créances indemnitaires,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée aux entiers dépens de la présente instance et à payer à Mme [R] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- confirmer pour le surplus.
En conséquence, statuant à nouveau,
- in limine litis, déclarer irrecevable la demande de Mme [R] visant à la voir condamner à lui verser la somme de 1 670,15 euros brut à titre de rappel de salaire pour les mois de juillet et août 2020 et 167,02 euros au titre des congés payés afférents,
- dire et juger qu'elle a versé à Mme [R] le solde de son bulletin de salaire du mois de juillet et août 2020 comprenant les conséquences financières de la rupture conventionnelle,
- enjoindre à Mme [R] de communiquer toutes les pages de sa pièce n°15 de manière lisible, à défaut écarter cette pièce des débats,
- enjoindre à Mme [R] de lui restituer le téléphone portable de fonction qui lui avait été remis, et tous les documents professionnels en sa possession et en particulier tous les dossiers-clients en cours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, 8 jours après la signification de l'arrêt à intervenir,
- se réserver le pouvoir de liquider l'astreinte,
- ou à défaut s'agissant du téléphone portable, condamner Mme [R] à lui verser la somme de 439 euros TTC en réparation de la non-restitution de son téléphone portable de fonction,
- condamner Mme [R] à lui verser la somme de 410,98 euros à titre de dommages et intérêts pour avoir endommagé l'ordinateur de M. [N] appartenant à la société,
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de Mme [R],
- condamner Mme [R] à lui verser une indemnité d'un montant de 4 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [R] aux dépens.
Mme [R], par conclusions notifiées le 26 octobre 2022, demande à la cour de :
- juger mal fondé l'appel de la société 100% Piscines,
- juger recevables et bien fondées ses demandes,
- juger son appel incident recevable et bien fondé,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de La Rochelle, en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui verser des dommages et intérêts pour rétention abusive de la rémunération,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui verser les sommes de 18 958,36 euros à titre de rappel de salaires impayés outre 1 895,84 euros au titre des congés payés afférents,
- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné à la société 100% Piscines de lui remettre l'attestation destinée à pôle emploi correctement remplie ainsi que le certificat de congé en double exemplaire et ce sous astreinte,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui verser à la somme de 5 316,78 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui payer les intérêts de retard au taux légal à compter du 29 janvier 2021 sur les créances de salaire et à compter du jugement sur les créances indemnitaires,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société 100% Piscines de ses demandes reconventionnelles,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui verser une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines aux entiers dépens,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de sommation de communiquer les devis terrassement de septembre 2018 à juillet 2020 ainsi que les bons de commandes correspondants,
- infirmer le jugement en ce qu'il l' a déboutée de sa demande de rappel de salaire pour la période de juillet à août 2020,
- infirmer le jugement concernant le quantum de la condamnation de la société 100% Piscines à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive de la rémunération,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour rétention abusive de la prime d'apporteur d'affaire,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de transmission sous astreinte des documents relatifs à l'assurance maladie et de dommages-intérêts pour rétention abusive,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé,
- infirmer le jugement concernant le quantum de l'astreinte à lui verser concernant la remise par la société 100% Piscines d'une attestation destinée à pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congé en double exemplaire,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire au titre de la rétention abusive de l'attestation destinée à pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congé en double exemplaire,
- infirmer le jugement concernant le quantum de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau et réformant sur ces points la décision entreprise
Sur la communication de documents,
- déclarer in limine litis recevables ses pièces 15 et 57 en l'absence de communication par la société 100% piscines des bons de commande et devis terrassement selon la sommation de communiquer et selon la charge de la preuve incombant à l'employeur,
- prendre acte du refus de la société 100% piscines de communiquer les bons de commande et devis terrassement piscine de septembre 2018 à juillet 2020 selon la décision du bureau de conciliation et d'orientation,
- sommer la société 100% piscines de communiquer les devis terrassement de septembre 2018 à juillet 2020 ainsi que les bons de commandes suivants : M. [F], 28 septembre 2018, M. [K], 31 octobre 2018, M. [O], 16 février 2019, M. [Y], 22 mars 2019,M. [J], 24 juin 2019, Mme [H], 18 juin 2019, M. [KM], 1er septembre 2019, M. [W], 18 octobre 2019, M. [S], 19 mars 2020, M. [A], mars 2020, M. [L], 24 avril 2020, M. [X], 4 août 2020, M. [I], 30 juillet 2020,
Sur le rappel de salaire au titre des salaires impayés
- condamner la société 100% piscines à lui payer la somme de 1 670,15 euros au titre des rappels des salaires pour la période de juillet et août 2020 inclus, outre 167,02 euros au titre des congés payés afférents selon la règle du 1/10ème,
- juger que la société 100% piscines a retenu abusivement sa rémunération (salaires de juillet et août 2020) et que cela lui a entraîné un préjudice moral et financier,
- condamner la société 10 0% piscines à lui payer une somme de 3 000 euros de dommages et intérêts au titre de la rétention abusive de la rémunération,
Sur la rétention abusive de la rémunération sur le rappel de salaire au titre des primes d'apporteur d'affaires
- juger que la société 100% piscines a retenu abusivement sa rémunération (primes d'apporteur d'affaires) et que cela lui a causé un préjudice moral et financier,
- condamner la société 100% piscines à lui payer une somme de 5 000 euros de dommages et intérêts au titre de la rétention abusive de la rémunération,
Sur le harcèlement moral et la violation de l'obligation de sécurité
- juger qu'elle a été victime de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie,
- condamner la société 100% piscines à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
Sur la rétention des documents d'assurance maladie
- juger que la rétention abusive des documents d'assurance-maladie a entraîné pour elle un préjudice moral et financier certain,
- condamner la société 100% piscines à transmettre son attestation de salaire à son assurance-maladie sous astreinte de 150 euros par jour de retard et réservant le droit de liquider l'astreinte prononcée au conseil de prud'hommes de La Rochelle,
- condamner la société 100% piscines à lui payer la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts au titre de la rétention abusive de ces documents,
Sur le travail dissimulé
- juger que le travail dissimulé est caractérisé,
- condamner la société 100 piscines à lui payer la somme de 15 950,34 euros au titre de l'indemnité forfaitaire au sens de l'article L.8223-1 du code du travail,
Sur la rétention des documents de fin de contrat
- juger que la rétention abusive des documents de fin de contrat a entraîné pour elle un préjudice moral et financier certain,
- condamner la société 100% piscines à lui transmettre son attestation destinée à pôle emploi correctement remplie, son bulletin de paie d'août 2020 et son certificat de congés en double exemplaire sous astreinte de 150 euros par jour de retard et réservant le droit de liquider l'astreinte prononcée au conseil de prud'hommes de La Rochelle,
- condamner la société 100% piscines à lui payer la somme de 1 500 euros de dommages et intérêts au titre de la rétention abusive de ces documents,
Au surplus
- débouter la société 100% piscines de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
- condamner la société 100% piscines à lui payer une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance, outre 3 000 euros en cause d'appel, les entiers dépens et les éventuels frais d'exécution de la décision à intervenir,
- assortir l'ensemble des condamnations des intérêts de droit à compter du jour de la demande,
- condamner la société 100% piscines aux entiers dépens et aux éventuels frais d'exécution de la décision à intervenir.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 janvier 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions des parties conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I Sur la procédure
Sur la demande d'irrecevabilité
En application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
La société 100% Piscines soulève au dispositif de ses conclusions l'irrecevabilité de la demande de Mme [R] visant à obtenir le paiement de la somme de 1 670,15 € bruts à titre de rappel de salaire pour les mois de juillet et août 2020 et 167,02 € au titre des congés payés y afférents, comme étant une demande nouvelle.
Cependant cette demande d'irrecevabilité de la demande de rappel de salaire de Mme [R] n'est pas évoquée dans la discussion par la société appelante qui en revanche en discute le bien-fondé, étant observé que cette demande de Mme [R] a été examinée par le conseil de prud'hommes et n'est donc pas nouvelle en cause d'appel.
La demande d'irrecevabilité formulée par la société 100% Piscines doit donc être rejetée.
Sur la demande d'injonction à Mme [R] de communiquer toutes les pages de sa pièce 15 de manière lisible ou à défaut d'écarter cette pièce
La cour, à l'examen des pièces produites de part et d'autre, constate comme les premiers juges que les photographies des bons de commandes et devis produits par Mme [R] (pièce n° 15) correspondent aux bons de commandes produits par la société 100% Piscines et que les devis de terrassements peuvent être rattachés aux bons de commandes des piscines figurant sur la même photographie en raison de l'identité des signatures portées sur les devis et bons de commandes.
Il doit être observé par ailleurs que la société 100% Piscines n'a jamais déféré à la sommation faite par le conseil de prud'hommes de communiquer les bons de commande de terrassement réclamés par Mme [R] au motif que celle-ci aurait dérobé ses archives. Outre que le vol allégué n'est pas établi, la plainte déposée ayant été classée sans suite pour absence de preuve suffisante, la société 100% Piscines a néanmoins été en mesure de produire plusieurs pièces provenant de ses archives, soit seize bons de commande et neuf factures correspondant précisément aux commandes figurant sur le tableau récapitulatif produit par Mme [R].
Au regard de ces éléments, il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a débouté la société 100% Piscines de sa demande d'injonction à Mme [R] de communication de pages lisibles de sa pièce n°15 et de sa demande tendant à ce que cette pièce soit écartée des débats.
Sur la demande de sommation à la société 100% Piscines de communiquer les devis terrassement de septembre 2018 à juillet 2020 et les bons de commandes correspondants
Mme [R] maintient cette demande en cause d'appel.
Dès lors que la société 100% Piscines n'a pas déféré à cette sommation faite par ordonnance du bureau de conciliation et d'orientation et que Mme [R] a néanmoins produit des éléments de preuve des commandes qu'elle a passées, il n'y a pas lieu à réitération de cette sommation, la décision déférée devant être confirmée sur ce point.
II Sur l'appel principal de la société 100% Piscines
Sur la prime au titre d'apporteur d'affaires
La société 100% Piscines reproche aux premiers juges d'avoir fait une mauvaise analyse de la clause d'apporteur d'affaires, et fait valoir au soutien de son appel essentiellement que :
- Mme [R] adopte un comportement déloyal en commettant un estoppel au détriment de la société, en ce qu'elle a elle-même écrit au comptable de la société pour donner le montant de sa prime de sorte qu'elle ne peut désormais se contredire au détriment de l'employeur en contestant le calcul de sa prime pour apporteur d'affaire dans plusieurs dossiers.
les commissions pour apporteur d'affaire ne prennent pas en compte dans l'assiette de calcul les travaux de terrassement qu'elle sous-traite à une société tierce. Toutefois, elle est dans l'incapacité de verser au dossier les bons de commande et devis terrassement piscine de septembre 2018 à juillet 2020, puisque Mme [R] a volé les archives.
Mme [R] objecte principalement que :
- la société est tenue de lui communiquer les éléments permettant le calcul exact des primes et commissions qui lui sont dues. Elle a également vendu la mise en place des piscines via les terrassements, de sorte que la prime pour apporteur d'affaires doit être calculée sur l'ensemble des ventes réalisées, incluant piscine et terrassement.
- les documents de la pièce 15 sont parfaitement lisibles et il revenait à la société 100% piscines de verser les devis et bons de commande qui sont en sa possession, ce qu'elle a toujours refusé de faire malgré l'injonction du conseil de prud'hommes de La Rochelle,
- elle n'a pas adopté deux positions contraires au détriment de la société 100% piscines, en ce qu'elle a toujours manifesté son intention de réclamer le versement de ses primes dont seule la société 100 % piscines déterminait le montant.
- la rétention abusive de sa rémunération ainsi que de ses primes d'apporteur, soit en l'espèce 25 899,88 euros de salaire outre les congés payés afférents d'un montant de 589,99 euros et les primes équivalents à 20 000 euros, est injustifiée et lui est préjudiciable, en ce que cette rétention lui a causé un préjudice financier et moral.
Sur ce,
La société 100% Piscine, alléguant du principe de l'estoppel, soutient que Mme [R] en cherchant à faire modifier le montant de ses commissions se contredit avec les instructions qu'elle a elle-même envoyées au comptable et ce, à son détriment, ce qui rend sa demande irrecevable.
La société 100% Piscines verse aux débats des mails signés '[Z]' adressés au comptable M. [T] [D] (acgesco) aux termes desquels, celle-ci sollicite la préparation de bulletins de salaire et indique, en ce qui concerne le sien, les montants de la prime à retenir s'agissant de huit clients, ces montants étant inférieurs à ceux réclamés devant le conseil de prud'hommes et en cause d'appel.
Il convient cependant d'observer que les mails sont adressés depuis l'adresse de l'employeur [M] [N] ([Courriel 5]) qu'ils concernent également les salaires d'autres personnes (prénommées [IB], [P], [V], [E] dont les jours d'absence sont précisés) et qu'ils sont relatifs à seulement 8 mois entre novembre 2018 et juin 2020. Il se déduit de ces constatations que Mme [R], salariée, agissait alors sous la subordination de son employeur M. [N], seul à même de connaître les temps de présence des salariés dans son entreprise et de déterminer le montant de la prime due.
Par ailleurs, Mme [R] ne s'est pas contredite au détriment de l'employeur devant les juridictions devant lesquelles elle a porté ses prétentions dans des termes identiques, de sorte que la société 100% Piscines n'est pas fondée à se prévaloir du principe de l'estoppel.
En application de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L'article 3 intitulé 'rémunération' du contrat de travail stipule que 'Mme [R] sera soumise à la durée légale du travail applicable dans l'entreprise.
Elle percevra à ce titre une rémunération brute mensuelle de 1 736,62 euros correspondant à son salaire de base et à un taux horaire brut de 11,45 euros.
S'ajoutent à cette rémunération une prime pour apporteur d'affaire correspondant à 7% du montant HT de la commande signée.(...).
Manifestement cette clause ne limite pas la prime d'apporteur d'affaire aux seules commandes signées portant sur la fourniture de piscines et d'accessoires et aucune exclusion n'est prévue pour les commandes signées relatifs aux travaux d'installation de piscine et de terrassement.
Il n'est pas contesté que Mme [R] a signé des bons de commandes portant sur la vente de piscines et d'accessoires ainsi que des bons de commande pour la réalisation des travaux de terrassement.
Certains devis signés par Mme [R] et les clients concernent tout à la fois la vente de la piscine et des accessoires ainsi que le coût du terrassement et de la mise en oeuvre (notamment devis [W], [RI], [B], [S], [L]).
Pour expliquer qu'aucune prime ne pouvait être due sur les travaux de terrassement, la société 100% Piscines allègue que ces travaux étaient sous- traités et qu'elle ne retirait donc aucun bénéfice sur ces prestations.
Elle ne verse cependant aucune pièce pour attester de contrats conclus avec des sous-traitants concernant les 'devis de terrassement piscine' ou les devis comportant des prestations de terrassement signés par Mme [R].
Les factures que produit la société 100% Piscines (pièce14) établissent que les travaux de terrassement ont été facturés par ses soins aux clients ainsi que la vente des piscines et accessoires pour des montants correspondant précisément aux devis avec bon pour accord des clients signés par Mme [R] (notamment factures [W], [S], [L], [A] ).
Il n'y a donc pas lieu de distinguer là où la clause contractuelle n'établit aucune distinction, de sorte que pour le calcul de la prime il convient de considérer que les 7% s'appliquent sur le montant HT de la commande signée par la salariée, sans qu'il y ait lieu d'exclure les travaux de terrassement.
En cause d'appel, comme en première instance, la société 100% Piscines ne produit aucune pièce qui vienne contredire utilement le calcul des rappels de primes présenté par Mme [R].
Il convient donc de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] la somme de 18 958,36 euros à titre de rappel de salaires et celles de 1 895,84 euros au titre des congés payés afférents.
La décision déférée doit également être confirmée en ce qu'elle a débouté Mme [R] de sa demande de dommages-intérêts pour rétention manifestement abusive de sa rémunération, en l'absence de revendication sur le montant de sa prime avant la saisine du conseil de prud'hommes et de démonstration d'un préjudice avéré.
Sur l'indemnité de non-concurrence
La société 100% Piscines reproche aux premiers juges de l'avoir condamnée à payer à Mme [R] une somme de 5 316,78 € au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et au soutien de son appel fait valoir essentiellement que :
- elle n'a jamais demandé à Mme [R] de respecter la clause de non-concurrence prévue dans son contrat de travail ;
- la clause est nulle en l'absence de rémunération correspondante, et le tribunal ne pouvait pas se substituer aux parties pour en fixer le montant ;
- Mme [R] a retrouvé immédiatement un emploi après la rupture conventionnelle, de sorte qu'elle ne justifie d'aucun préjudice, d'autant plus que l'interdiction avait été prévue pour une courte durée de 60 jours.
Mme [R] fait valoir en substance que son contrat de travail comporte une clause de non-concurrence sans prévoir aucune contrepartie financière, de sorte que la clause est nulle ; elle a cependant respecté les prescriptions de cette clause en n'exerçant pas d'activité concurrente à la société 100% piscines et est donc fondée à obtenir une contrepartie financière équivalente à deux mois de salaire.
Sur ce, en application du principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection légitime des intérêts de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, et qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulables.
La stipulation d'une clause de non-concurrence nulle est susceptible de causer au salarié un préjudice dont l'existence et l'évaluation relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond (Soc., 25 mai 2016, pourvoi n° 14-20.578).
Au cas présent le contrat de travail stipule à l'article 11 une clause de non-concurrence ainsi rédigée :
'Compte tenu de la nature de ses fonctions, Mme [R] s'engage à ne pas exercer d'activité concurrente à compter du départ effectif de l'entreprise, y compris dans le cas d'une dispense de préavis, pendant une durée de 60 jours.
Cette interdiction s'appliquera dans la limite de la zone géographique Région Nouvelle Aquitaine'.
Il est manifeste que cette clause ne comporte aucune contrepartie financière ce qui lui enlève tout caractère obligatoire et lui fait encourir la nullité. Toutefois cette nullité est relative en ce qu'elle ne peut pas être invoquée par la société 100% Piscines qui a inséré une telle clause au contrat de travail.
L'acte de rupture conventionnelle ne prévoit aucune renonciation de la société 100% Piscines à la clause de non-concurrence et l'employeur ne justifie pas d'une telle renonciation exprimée au plus tard à la date de rupture fixée par la convention au 30 août 2020.
Par ailleurs la société 100% Piscines n'allègue pas que Mme [R] ait contrevenu à cette clause.
Mme [R] qui a respecté la clause de non-concurrence malgré son caractère illicite résultant de l'absence de contrepartie financière, peut prétendre à des dommages-intérêts si elle démontre avoir subi un préjudice.
Il résulte des pièces produites que Mme [R] a signé le 7 septembre 2020 un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de négociateur immobilier VRP avec la société France Agence 17 (Sarl), son lieu de travail étant situé dans la limite géographique définie par le département de la Charente-Maritime moyennant une rémunération variable sous la forme de commissions au regard du chiffre d'affaires hors taxes réalisé personnellement et en tout état de cause une rémunération mensuelle garantie, équivalente à 1 539,45 €, ce salaire mensuel brut minimum constituant une avance sur commission.
Il s'ensuit que Mme [R] a retrouvé quelques jours après la rupture du contrat de travail intervenue le 31 août 2020, un emploi dans le secteur de la négociation immobilière dans le même département que celui où elle travaillait auparavant, de sorte que son préjudice est limité à l'impossibilité de retrouver pendant 60 jours un emploi dans le secteur de la vente des piscines en région Nouvelle Aquitaine qu'elle connaissait bien depuis 2018.
Le préjudice qu'elle a ainsi subi du fait que l'employeur lui a imposé une clause nulle portant atteinte à sa liberté d'exercer une activité professionnelle sera compensé par l'allocation de dommages-intérêts d'un montant de 1 000 €, la décision déférée devant être infirmée en ce sens.
Sur les demandes de restitution d'objet et de documents
La société 100% Piscines qui sollicite que Mme [R] soit condamnée sous astreinte à lui restituer un téléphone portable de fonction et des documents professionnels, notamment les dossiers clients en cours, n'établit toujours pas devant la cour avoir mis à la disposition de Mme [R] un téléphone portable qui n'aurait pas été restitué, ni que celle-ci aurait emporté des dossiers clients en quittant la société.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société 100% Piscines de sa demande de restitution sous astreinte et de sa demande en paiement de la somme de 439 € TTC en réparation de l'absence de restitution du téléphone portable.
Sur la demande de dommages-intérêts pour l'ordinateur portable endommagé
Cette demande n'est pas fondée dès lors qu'aucune pièce n'établit que Mme [R] a endommagé un ordinateur portable appartenant à M. [N]. La plainte déposée le 28 septembre 2020 par celui-ci aux termes de laquelle il indique que Mme [R] s'est énervée le jour de la rupture conventionnelle et a jeté son ordinateur portable par terre est contredite par l'attestation de Mme [FP], présente ce jour-là, qui précise que la détérioration d'un ordinateur est une 'pure invention'.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société 100% Piscines de ce chef.
III Sur l'appel incident de Mme [R]
Sur la demande de rappel de salaires au titre des mois de juillet et août 2020 et les dommages-intérêts pour rétention abusive de rémunération
Mme [R] soutient que :
- la société est de mauvaise foi lorsqu'elle prétend que la difficulté concernant le paiement du salaire du mois de juillet est de son fait,
- une erreur dans la régularisation a été réalisée par la société, puisqu'il reste un montant impayé de 1 670,15 euros : les rémunérations afférentes au mois de juillet et août 2020 sont respectivement de 2 842,04 euros et 8 057,84 euros. Le décompte fait par la société est : 8 057,84 + 1 171,89 (correspondant au chèque du mois de juillet déclaré perdu) = 4 229,73. Or, le décompte aurait dû être : 8 057,84 + 2 842,04 - 5 000 = 5 899,88 €. Il reste donc un reliquat de salaire de 1 670,15 euros (5 899,88 - 4 229,73),
- le paiement tardif de salaires justifie l'allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. Elle a reçu un chèque d'un montant de 1 117,89 euros pour le mois de juillet, alors qu'elle aurait dû percevoir 2 842,04 euros. De plus, lorsqu'elle a voulu encaisser ce chèque, il avait été déclaré comme perdu par la société.
La société 100% Piscines répond principalement que :
- le salaire versé à Mme [R] pour le mois de juin était supérieur de 1 670,15 euros à celui qu'elle devait initialement percevoir, le surplus venant donc en déduction du salaire versé au mois de juillet,
- le solde du mois de juillet a été réglé en octobre 2021, puisque M. [N] avait fait opposition au chèque donné le 22 septembre 2020 qu'il pensait perdu, Mme [R] tardant à l'encaisser. Concernant le salaire du mois d'août 2020, ce dernier a été versé en octobre 2021 car Mme [R] a tardé à apporter des éléments sur sa situation du 17 au 31 août 2020.
Sur ce, en application des dispositions de l'article L.3242-1 alinéa 3 du code du travail, le paiement de la rémunération est effectué une fois par mois.
Mme [R] qui maintient sa demande en paiement d'une somme de 1 670,15 € au titre d'un rappel de salaires pour la période de juillet et août 2020, outre 167, 02 € de congés payés afférents, n'apporte aucune contradiction sérieuse à la motivation du conseil de prud'hommes selon laquelle les bulletins de paie versés au dossier établissent qu'il lui était dû pour les mois de juin, juillet et août 2020 une somme globale de 12 436 € et qu'il est justifié que la société 100% Piscines lui a versé :
- le 10 juillet 2020 une somme de 3 206,27 € par chèque présenté à l'encaissement le 10 juillet 2020 (pièce 13 de Mme [R]),
- le 10 septembre 2020 une somme de 5 000 € par chèque (pièce 21 de Mme [R]),
- le 7 octobre 2021 un chèque bancaire de 4 229,73 € (pièce 19 de Mme [R]),
soit la somme totale de 12 436 €.
La décision déférée doit donc être confirmée en ce qu'elle a retenu que Mme [R], qui ne conteste pas avoir perçu pour le mois de juin une somme supérieure (3 206,27 €) à celle figurant sur son bulletin de salaire (1 536,12 €), devait être déboutée de sa demande de rappel de salaires à hauteur de 1670,15 €.
Il est établi par les pièces produites et non valablement contestées par la société 100% Piscines que Mme [R] a perçu le paiement de ses salaires des mois de juillet et août 2020 avec retard ce qui lui a été préjudiciable. Les premiers juges ont justement apprécié à la somme de 600 € la réparation du préjudice subi par Mme [R] du fait de ces paiements tardifs.
Sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».
Le régime probatoire du harcèlement moral est posé par l'article L. 1154-1 du code du travail qui prévoit que dès lors que le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il en résulte que le salarié n'est tenu que d'apporter au juge des éléments permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral et qu'il ne supporte pas la charge de la preuve de celui-ci.
De ce fait, le juge doit :
- en premier lieu examiner la matérialité des faits allégués par le salarié en prenant en compte tous les éléments invoqués y compris les certificats médicaux,
- puis, qualifier juridiquement ces éléments en faits susceptibles, dans leur ensemble, de faire présumer un harcèlement moral,
- enfin, examiner les éléments de preuve produits par l'employeur pour déterminer si ses agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et si ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il est constant que peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de management par un supérieur hiérarchique dès lors qu'elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Mme [R] au titre du harcèlement moral allégué présente les faits suivants :
a) Elle a subi un comportement managérial dénigrant et humiliant en ce que :
- elle devait utiliser la boîte mail de M. [N] afin qu'il puisse contrôler son travail,
Si des pièces du dossier établissent que des mails ont été envoyés par Mme [R] depuis l'adresse ([Courriel 5], il n'est pas démontré que cela résultait d'une exigence de M. [N].
Il n'est pas établi que M. [N] ait interdit à Mme [R] d'afficher sa propre adresse sur sa carte de visite.
- sa ligne téléphonique personnelle a été coupée l'empêchant alors de gérer ses relations clientèles,
Comme le précise Mme [R], il était convenu au moment de la rupture conventionnelle qu'elle récupère sa ligne téléphonique qu'elle avait cédée à l'entreprise pour l'utiliser comme ligne professionnelle.
Mme [R] produit un courriel du 30 juillet 2020 adressé à M. [N] pour s'étonner que la carte Sim de la ligne téléphonique qu'elle a récupérée ait été changée.
Les pièces produites établissent que Mme [R] et la société 100% Piscines ont signé un formulaire de cession de ligne téléphonique le 29 juillet 2020, ce qui atteste de leur accord pour que Mme [R] reprenne la ligne.
Mme [R] produit un mail de SFR adressé à [Courriel 5] confirmant pour la ligne 0685374330 la mise en service d'une nouvelle carte Sim suite à une commande du 30 juillet 2020.
S'agissant de la reprise par un particulier de la ligne téléphonique professionnelle de la société, le changement intervenu concomitamment à la signature de la rupture conventionnelle ne revêt pas de caractère humiliant.
- M. [N] l'a humiliée en refusant de lui verser son salaire de juillet 2020.
Mme [R] produit le témoignage de Mme [U] qui indique avoir été témoin d'une conversation téléphonique entre M. [N] et son comptable au sujet du salaire du mois de juillet de Mme [R], M. [N] ayant ordonné au comptable de ne pas lui verser son salaire ni ses primes en disant 'qu'elle se démerde'.
b/ Elle a été victime de violences verbales,
Elle produit les témoignages de Mme [FP] qui indique avoir 'assisté à plusieurs reprises à des appels de M. [N] auxquels Mme [R] n'a pas répondu et que celle-ci après chaque appel se trouvait dans un état de panique, tremblement et frayeur'.
Ce témoignage n'est pas probant d'une violence verbale de M. [N] à l'égard de Mme [R] puisqu'il est indiqué que celle-ci ne répondait pas aux appels de celui-ci ; de même l'appel téléphonique que ce témoin a pris le 4 septembre [2020] pendant que Mme [R] conduisait ne caractérise pas une violence verbale à l'encontre de la salariée, étant observé que cet appel est intervenu en tout état de cause après la rupture du contrat de travail.
Mme [R] produit le témoignage de Mme [G] qui indique avoir été témoin de ce que 'M. [N] harcelait Mme [R] par messages et par des appels incessants ce qui mettait son amie dans un état de panique et de terreur'.
Ce témoin précise que 'M. [N] faisait du chantage professionnel, comme retarder les paiements des salaires, non paiement des primes sur des ventes signées par Mme [R]'.
Ce témoin indique également que son amie lui 'a téléphoné le samedi 2 mai, elle était en pleurs et m'annonçait que M. [N] [M] est venu à son domicile à 5H du matin récupérer la voiture de fonction, [Z] se retrouvait sans moyen de locomotion pour se déplacer vers son travail et honorer ses rendez-vous.
Elle précise également que 'le 27 août 2020, elle a reçu un appel téléphonique de [Z] paniquée, M. [N] était à sa porte suite à plusieurs appels téléphoniques dans la nuit du 26 au 27 août'.
Hormis les faits concernant le retard de paiement de la rémunération, il n'est pas établi que les autres faits relatés soient en lien avec l'activité professionnelle de Mme [R], dans la mesure où ils se sont produits pendant la période de rupture de la relation de couple qu'elle entretenait avec M. [N] et que par ailleurs il ne résulte pas du contrat de travail que Mme [R] ait eu à sa disposition un véhicule de fonction.
Mme [R] produit également six messages téléphoniques de M. [N] du 2 mai et du 7 mai dont deux appels vocaux manqués, un mail du 13 juillet 2020 et un échange de mail entre le 26 et le 27 août qui ne sont pas de nature à prouver un harcèlement moral de nature professionnelle.
c) la dégradation de son état de santé a été médicalement constatée,
Mme [R] justifie avoir été en arrêt de travail le 7 août 2020 et produit un certificat médical du docteur [C] daté du même jour qui indique 'Mme [R] présente une réaction anxio dépressive forte que la patiente associe avec un conflit avec son employeur depuis 5 mois. Son état impose un repos et des traitements adaptés'.
Ce certificat atteste de la dégradation de l'état de santé de Mme [R], que celle-ci associe à un conflit avec son employeur. Il apparaît cependant qu'à cette date elle venait de conclure une rupture conventionnelle avec la société 100% Piscines, représentée par M. [N]. En revanche, il ne peut pas être fait abstraction des circonstances conflictuelles de la rupture de sa relation de couple avec M. [N], telles que décrites dans les témoignages produits et de leur potentiel retentissement sur son état de santé.
Il résulte de l'ensemble de ces développements que le seul élément de fait tenant au retard volontaire apporté par la société 100% Piscines dans le paiement de la rémunération de Mme [R] en juillet 2020 ne permet pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral au préjudice de celle-ci.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral.
Sur la demande d'indemnisation pour rétention des documents relatifs à l'assurance maladie
Mme [R] fait valoir que l'employeur a méconnu son obligation de déclarer ses arrêts de travail à la CPAM, et qu'elle a subi un préjudice du fait de la rétention des documents relatifs à son arrêt maladie, car ni elle ni la CPAM n'ont reçu l'attestation de salaire établie par la société 100% Piscines, laquelle est obligatoire pour recevoir les indemnités journalières.
La société 100% Piscines répond que l'arrêt de travail de Mme [R] a été télétransmis à à la caisse primaire d'assurance maladie.
Sur ce, il résulte des pièces produites que l'arrêt de travail du 7 août 2020 de Mme [R] a été télétransmis directement à la caisse primaire d'assurance maladie le 7 août 2020. Après analyse des pièces produites, les premiers juges ont retenu par des motifs pertinents, non valablement remis en cause devant la cour par Mme [R], que celle-ci, qui ne s'est pas plainte, lors des mails adressés fin août début septembre 2020 à la société 100 % Piscines et au comptable, d'un défaut de transmission de l'attestation de salaire, ne justifiait pas à ce jour que la caisse primaire d'assurance maladie ne lui avait pas payé les indemnités journalières afférentes à son arrêt maladie du 7 au 16 août 2020 et que l'absence de règlement résultait du défaut de transmission de l'attestation de salaire par l'employeur.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Mme [R] de ses demandes de transmission sous astreinte de l'attestation de salaire et de dommages-intérêts pour rétention abusive.
Sur le travail dissimulé
Mme [R] maintient devant la cour sa demande en paiement d'une indemnité de 15 950,34 € sur le fondement de l'article L8223-1 du code du travail, en faisant valoir que l'employeur a commis intentionnellement une fraude fiscale en ne soumettant pas son salaire du mois de juin aux charges sociales.
Elle ne répond pas cependant à l'argumentation du conseil de prud'hommes qui a relevé que si le montant de 1 536,12 euros nets figurant sur le bulletin de salaire de juin 2020 ne correspond pas au chèque de 3 206,27 euros encaissé par elle le 10 juillet 2020, la différence s'élève à la somme de 1 670,15 euros et correspond exactement au montant de la commission sur chantier portée sur le bulletin de salaire du mois de juillet 2020.
Il s'ensuit que la somme de 1 670,15 euros payée en juillet 2020 en même temps que le salaire de juin 2020 a bien été déclarée sur le bulletin de paye du mois de juillet 2020 de sorte que la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle a débouté Mme [R] de sa demande indemnitaire sur le fondement de l'article L.8223-1 du code du travail.
Sur la remise des documents de fin de contrat et la demande de dommages-intérêts pour rétention abusive des dits documents
Mme [R] sollicite la confirmation du jugement du 29 mars 2022 en ce qu'il a ordonné la remise par la société 100% Piscines sous astreinte d'une attestation destinée à Pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congés en double exemplaire, et demande à nouveau à la cour de condamner la société 100% Piscines à la remise de ces documents sous astreinte.
Elle sollicite en outre la condamnation de la société 100% Piscines au paiement de dommages-intérêts d'un montant de 1 500 euros de dommages-intérêts pour rétention abusive de ces documents.
La société 100% Piscines produit le jugement rendu par le juge de l'exécution de La Rochelle le 6 octobre 2023 sur saisine de Mme [R] en liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du conseil de prud'hommes de La Rochelle le 29 mars 2022.
Il résulte du jugement du juge de l'exécution, définitif comme en atteste le certificat de non appel du 15 décembre 2023, que l'attestation destinée à Pôle emploi a été remise dans les délais prescrits par le jugement du conseil de prud'hommes de La Rochelle, que le certificat de congé en double exemplaire ne lui ayant été remis qu'en cours de procédure, l'astreinte correspondant à la non remise de ce document a été liquidée à 120 € et que Mme [R] a été déboutée de sa demande de dommages-intérêts.
Il s'ensuit que Mme [R], remplie de ses droits, est irrecevable en sa demande de condamnation de la société 100% Piscines à la remise sous astreinte desdits documents et que la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle débouté Mme [R] de sa demande indemnitaire au titre d'une rétention abusive de ces mêmes documents.
III Sur les demandes accessoires
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à payer à la société 100% Piscines les intérêts de retard au taux légal à compter du 29 janvier 2021 sur les créances de salaire et à compter de la décision sur les créances indemnitaires.
Les dispositions du jugement relatives aux dépens de première instance et à la condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile doivent également être confirmées.
La société 100% Piscines qui succombe partiellement en son appel principal et Mme [R] qui succombe en son appel incident, doivent supporter chacune la moitié des dépens de la procédure d'appel.
Il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rejette la demande d'irrecevabilité formulée in limine litis par la société 100% Piscines ;
Infirme le jugement rendu le 29 mars 2022 par la formation de départage du conseil de prud'hommes de La Rochelle en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] la somme de 5 316,78 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence ;
Statuant à nouveau de ce chef ;
Condamne la société 100% Piscines à payer à Mme [R] la somme de 1000 euros de dommages-intérêts au titre de la clause de non-concurrence illicite, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déclare Mme [R] irrecevable en sa demande de condamnation de la société 100% Piscines à la remise sous astreinte d'une attestation destinée à Pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congés en double exemplaire ;
Condamne la société 100% Piscines et Mme [R] chacune pour moitié aux dépens de la procédure d'appel ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,
N° RG 22/01096
N° Portalis DBV5-V-B7G-GQ7X
S.A.R.L. 100 % PISCINES
C/
[R]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
Chambre sociale
ARRÊT DU 06 NOVEMBRE 2025
Décision déférée à la cour : Jugement du 29 mars 2022 rendu par le conseil de prud'hommes - Formation de départage de LA ROCHELLE
APPELANTE :
S.A.R.L. 100% PISCINES
N° SIRET : 792 003 451
[Adresse 4]
[Localité 2]
Ayant pour avocat Me Emmanuelle MONTERAGIONI-LAMBERT de la SCP ELIGE LA ROCHELLE-ROCHEFORT, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
INTIMÉE :
Madame [Z] [R]
Née le 27 mai 1980 à [Localité 6] (MAROC)
[Adresse 3]
[Adresse 7]
[Localité 1]
Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LX POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Alexandra DUPUY de la SELARL ALEXANDRA DUPUY, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 907 et 805 du code de procédure civile, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés, l'affaire a été débattue le 12 février 2025, en audience publique, devant :
Madame Françoise CARRACHA, présidente qui a présenté son rapport
Monsieur Nicolas DUCHATEL, conseiller
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Françoise CARRACHA, présidente
Madame Estelle LAFOND, conseillère
Monsieur Nicolas DUCHATEL, conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Patricia RIVIÈRE
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile que l'arrêt sera rendu le 17 avril 2025, la date du prononcé ayant été prorogée à plusieurs reprises, les parties avisées, pour l'arrêt être rendu le 06 novembre 2025,
- Signé par Madame Françoise CARRACHA, présidente, et par Madame Patricia RIVIERE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
La S.A.R.L. 100% Piscines est une société spécialisée dans la construction et l'entretien des piscines, relevant de la convention collective nationale des ouvriers du bâtiment du 7 mars 2018.
Mme [R] et M. [N], gérant de la société 100% Piscines, ont entretenu une relation de couple de décembre 2017 jusqu'en mars 2020.
Mme [R] a été embauchée par la société 100% Piscines le 1er septembre 2018 suivant contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de commerciale, coefficient 220, pour une durée de travail de 35 heures moyennant une rémunération de 1 736,62 euros brut, auquel s'ajoutent une prime pour apporteur d'affaire correspondant à 7 % du montant HT de la commande signée, une prime d'ancienneté selon les conditions prévues par la convention collective et un panier repas forfaitaire journalier de 8,10 euros.
Le 15 juillet 2020, Mme [R] et la société 100% Piscines ont signé une rupture conventionnelle avec effet au 31 août 2020.
Au moment de la rupture des relations contractuelles, la société employait à titre habituel moins de onze salarié.
Par requête du 22 janvier 2021, Mme [R] a saisi le conseil de prud'hommes de La Rochelle aux fins de voir reconnaître l'existence de faits de harcèlement moral, de travail dissimulé et d'obtenir la condamnation de la société 100% Piscines à lui verser diverses sommes et lui remettre des documents.
Par jugement du 29 mars 2022, le conseil de prud'hommes de La Rochelle statuant en formation de départage a :
- débouté la société 100% Piscines de sa demande d'injonction de communication de pages lisibles de sa pièce n°15 et de sa demande tendant à ce que la pièce soit écartée des débats,
- débouté Mme [R] de sa demande de sommation de communiquer les devis terrassement de septembre 2018 à juillet 2020 ainsi que les bons de commandes correspondants,
- débouté Mme [R] de sa demande de rappel de salaire pour la période de juillet à août 2020,
- condamné la société 100% piscines à payer à Mme [R] la somme de 600 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive de rémunération,
- condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] les sommes de 18 958,36 euros à titre de rappel de salaires impayés outre 1 895,84 euros au titre des congés payés afférents,
- débouté Mme [R] de sa demande de dommages et intérêts pour rétention abusive de la prime d'apporteur d'affaire,
- débouté Mme [R] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- débouté Mme [R] de sa demande de transmission sous astreinte des documents relatifs à l'assurance maladie et de dommages et intérêts pour rétention abusive,
- débouté Mme [R] de sa demande indemnitaire au titre d'un prétendu travail dissimulé,
- ordonné la remise par la société 100% Piscines à Mme [R] d'une attestation destinée à pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congé en double exemplaire et ce sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la notification ou de la signification du jugement, dans la limite de 60 jours sauf à ce qu'il soit statué à nouveau,
- débouté Mme [R] de sa demande indemnitaire au titre de la rétention abusive desdits documents,
- condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] la somme de 5 316,78 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence,
- condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] les intérêts de retard au taux légal à compter du 29 janvier 2021 sur les créances de salaire et à compter du jugement sur les créances indemnitaires,
- débouté la société 100% Piscines de ses demandes reconventionnelles,
- condamné la société 100% Piscines aux entiers dépens de la présente instance et à payer à Mme [R] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
Par déclaration du 29 avril 2022, la SARL 100% piscines a relevé appel de cette décision.
Par ordonnance d'incident du 15 novembre 2022, le conseiller de la mise en état a :
- rejeté la demande de suspension d'exécution provisoire présentée par la société 100% piscines,
- déclaré recevable la demande de radiation de Mme [R] sur le fondement de l'article 524 du code de procédure civile,
- constaté que la demande de radiation est devenue sans objet du fait de la saisie-attribution pratiquée le 23 août 2022,
- débouté la société 100% Piscines de sa demande tendant à voir ordonner la mise sous compte séquestre/Carpa de la somme objet de la saisie-attribution, en l'attente d'une décision définitive,
- condamné la société 100% Piscines aux dépens de l'incident.
La société 100% Piscines aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 janvier 2024, demande à la cour de :
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de La Rochelle en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'injonction à Mme [R] de communication de pages lisibles de sa pièce n°15 et de sa demande subséquente tendant à ce que ladite pièce soit écartée des débats,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [R] la somme de 600 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive de rémunération,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [R] la somme de 18 958,36 euros à titre de rappel de salaires impayés outre 1 895,84 euros au titre des congés payés afférents,
- infirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la remise à Mme [R] d'une attestation destinée à Pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congé en double exemplaire et ce sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la notification ou signification de la présente décision, dans la limite de 60 jours sauf à ce qu'il soit statué à nouveau,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [R] la somme de 5 316,78 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [R] les intérêts de retard au taux légal à compter du 29 janvier 2021 sur les créances de salaire et à compter du jugement sur les créances indemnitaires,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes reconventionnelles,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée aux entiers dépens de la présente instance et à payer à Mme [R] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- confirmer pour le surplus.
En conséquence, statuant à nouveau,
- in limine litis, déclarer irrecevable la demande de Mme [R] visant à la voir condamner à lui verser la somme de 1 670,15 euros brut à titre de rappel de salaire pour les mois de juillet et août 2020 et 167,02 euros au titre des congés payés afférents,
- dire et juger qu'elle a versé à Mme [R] le solde de son bulletin de salaire du mois de juillet et août 2020 comprenant les conséquences financières de la rupture conventionnelle,
- enjoindre à Mme [R] de communiquer toutes les pages de sa pièce n°15 de manière lisible, à défaut écarter cette pièce des débats,
- enjoindre à Mme [R] de lui restituer le téléphone portable de fonction qui lui avait été remis, et tous les documents professionnels en sa possession et en particulier tous les dossiers-clients en cours, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, 8 jours après la signification de l'arrêt à intervenir,
- se réserver le pouvoir de liquider l'astreinte,
- ou à défaut s'agissant du téléphone portable, condamner Mme [R] à lui verser la somme de 439 euros TTC en réparation de la non-restitution de son téléphone portable de fonction,
- condamner Mme [R] à lui verser la somme de 410,98 euros à titre de dommages et intérêts pour avoir endommagé l'ordinateur de M. [N] appartenant à la société,
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de Mme [R],
- condamner Mme [R] à lui verser une indemnité d'un montant de 4 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [R] aux dépens.
Mme [R], par conclusions notifiées le 26 octobre 2022, demande à la cour de :
- juger mal fondé l'appel de la société 100% Piscines,
- juger recevables et bien fondées ses demandes,
- juger son appel incident recevable et bien fondé,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de La Rochelle, en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui verser des dommages et intérêts pour rétention abusive de la rémunération,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui verser les sommes de 18 958,36 euros à titre de rappel de salaires impayés outre 1 895,84 euros au titre des congés payés afférents,
- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné à la société 100% Piscines de lui remettre l'attestation destinée à pôle emploi correctement remplie ainsi que le certificat de congé en double exemplaire et ce sous astreinte,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui verser à la somme de 5 316,78 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui payer les intérêts de retard au taux légal à compter du 29 janvier 2021 sur les créances de salaire et à compter du jugement sur les créances indemnitaires,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société 100% Piscines de ses demandes reconventionnelles,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à lui verser une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines aux entiers dépens,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de sommation de communiquer les devis terrassement de septembre 2018 à juillet 2020 ainsi que les bons de commandes correspondants,
- infirmer le jugement en ce qu'il l' a déboutée de sa demande de rappel de salaire pour la période de juillet à août 2020,
- infirmer le jugement concernant le quantum de la condamnation de la société 100% Piscines à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive de la rémunération,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour rétention abusive de la prime d'apporteur d'affaire,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de transmission sous astreinte des documents relatifs à l'assurance maladie et de dommages-intérêts pour rétention abusive,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé,
- infirmer le jugement concernant le quantum de l'astreinte à lui verser concernant la remise par la société 100% Piscines d'une attestation destinée à pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congé en double exemplaire,
- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire au titre de la rétention abusive de l'attestation destinée à pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congé en double exemplaire,
- infirmer le jugement concernant le quantum de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau et réformant sur ces points la décision entreprise
Sur la communication de documents,
- déclarer in limine litis recevables ses pièces 15 et 57 en l'absence de communication par la société 100% piscines des bons de commande et devis terrassement selon la sommation de communiquer et selon la charge de la preuve incombant à l'employeur,
- prendre acte du refus de la société 100% piscines de communiquer les bons de commande et devis terrassement piscine de septembre 2018 à juillet 2020 selon la décision du bureau de conciliation et d'orientation,
- sommer la société 100% piscines de communiquer les devis terrassement de septembre 2018 à juillet 2020 ainsi que les bons de commandes suivants : M. [F], 28 septembre 2018, M. [K], 31 octobre 2018, M. [O], 16 février 2019, M. [Y], 22 mars 2019,M. [J], 24 juin 2019, Mme [H], 18 juin 2019, M. [KM], 1er septembre 2019, M. [W], 18 octobre 2019, M. [S], 19 mars 2020, M. [A], mars 2020, M. [L], 24 avril 2020, M. [X], 4 août 2020, M. [I], 30 juillet 2020,
Sur le rappel de salaire au titre des salaires impayés
- condamner la société 100% piscines à lui payer la somme de 1 670,15 euros au titre des rappels des salaires pour la période de juillet et août 2020 inclus, outre 167,02 euros au titre des congés payés afférents selon la règle du 1/10ème,
- juger que la société 100% piscines a retenu abusivement sa rémunération (salaires de juillet et août 2020) et que cela lui a entraîné un préjudice moral et financier,
- condamner la société 10 0% piscines à lui payer une somme de 3 000 euros de dommages et intérêts au titre de la rétention abusive de la rémunération,
Sur la rétention abusive de la rémunération sur le rappel de salaire au titre des primes d'apporteur d'affaires
- juger que la société 100% piscines a retenu abusivement sa rémunération (primes d'apporteur d'affaires) et que cela lui a causé un préjudice moral et financier,
- condamner la société 100% piscines à lui payer une somme de 5 000 euros de dommages et intérêts au titre de la rétention abusive de la rémunération,
Sur le harcèlement moral et la violation de l'obligation de sécurité
- juger qu'elle a été victime de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie,
- condamner la société 100% piscines à lui payer la somme de 20 000 euros au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
Sur la rétention des documents d'assurance maladie
- juger que la rétention abusive des documents d'assurance-maladie a entraîné pour elle un préjudice moral et financier certain,
- condamner la société 100% piscines à transmettre son attestation de salaire à son assurance-maladie sous astreinte de 150 euros par jour de retard et réservant le droit de liquider l'astreinte prononcée au conseil de prud'hommes de La Rochelle,
- condamner la société 100% piscines à lui payer la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts au titre de la rétention abusive de ces documents,
Sur le travail dissimulé
- juger que le travail dissimulé est caractérisé,
- condamner la société 100 piscines à lui payer la somme de 15 950,34 euros au titre de l'indemnité forfaitaire au sens de l'article L.8223-1 du code du travail,
Sur la rétention des documents de fin de contrat
- juger que la rétention abusive des documents de fin de contrat a entraîné pour elle un préjudice moral et financier certain,
- condamner la société 100% piscines à lui transmettre son attestation destinée à pôle emploi correctement remplie, son bulletin de paie d'août 2020 et son certificat de congés en double exemplaire sous astreinte de 150 euros par jour de retard et réservant le droit de liquider l'astreinte prononcée au conseil de prud'hommes de La Rochelle,
- condamner la société 100% piscines à lui payer la somme de 1 500 euros de dommages et intérêts au titre de la rétention abusive de ces documents,
Au surplus
- débouter la société 100% piscines de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
- condamner la société 100% piscines à lui payer une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance, outre 3 000 euros en cause d'appel, les entiers dépens et les éventuels frais d'exécution de la décision à intervenir,
- assortir l'ensemble des condamnations des intérêts de droit à compter du jour de la demande,
- condamner la société 100% piscines aux entiers dépens et aux éventuels frais d'exécution de la décision à intervenir.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 janvier 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions des parties conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I Sur la procédure
Sur la demande d'irrecevabilité
En application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
La société 100% Piscines soulève au dispositif de ses conclusions l'irrecevabilité de la demande de Mme [R] visant à obtenir le paiement de la somme de 1 670,15 € bruts à titre de rappel de salaire pour les mois de juillet et août 2020 et 167,02 € au titre des congés payés y afférents, comme étant une demande nouvelle.
Cependant cette demande d'irrecevabilité de la demande de rappel de salaire de Mme [R] n'est pas évoquée dans la discussion par la société appelante qui en revanche en discute le bien-fondé, étant observé que cette demande de Mme [R] a été examinée par le conseil de prud'hommes et n'est donc pas nouvelle en cause d'appel.
La demande d'irrecevabilité formulée par la société 100% Piscines doit donc être rejetée.
Sur la demande d'injonction à Mme [R] de communiquer toutes les pages de sa pièce 15 de manière lisible ou à défaut d'écarter cette pièce
La cour, à l'examen des pièces produites de part et d'autre, constate comme les premiers juges que les photographies des bons de commandes et devis produits par Mme [R] (pièce n° 15) correspondent aux bons de commandes produits par la société 100% Piscines et que les devis de terrassements peuvent être rattachés aux bons de commandes des piscines figurant sur la même photographie en raison de l'identité des signatures portées sur les devis et bons de commandes.
Il doit être observé par ailleurs que la société 100% Piscines n'a jamais déféré à la sommation faite par le conseil de prud'hommes de communiquer les bons de commande de terrassement réclamés par Mme [R] au motif que celle-ci aurait dérobé ses archives. Outre que le vol allégué n'est pas établi, la plainte déposée ayant été classée sans suite pour absence de preuve suffisante, la société 100% Piscines a néanmoins été en mesure de produire plusieurs pièces provenant de ses archives, soit seize bons de commande et neuf factures correspondant précisément aux commandes figurant sur le tableau récapitulatif produit par Mme [R].
Au regard de ces éléments, il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a débouté la société 100% Piscines de sa demande d'injonction à Mme [R] de communication de pages lisibles de sa pièce n°15 et de sa demande tendant à ce que cette pièce soit écartée des débats.
Sur la demande de sommation à la société 100% Piscines de communiquer les devis terrassement de septembre 2018 à juillet 2020 et les bons de commandes correspondants
Mme [R] maintient cette demande en cause d'appel.
Dès lors que la société 100% Piscines n'a pas déféré à cette sommation faite par ordonnance du bureau de conciliation et d'orientation et que Mme [R] a néanmoins produit des éléments de preuve des commandes qu'elle a passées, il n'y a pas lieu à réitération de cette sommation, la décision déférée devant être confirmée sur ce point.
II Sur l'appel principal de la société 100% Piscines
Sur la prime au titre d'apporteur d'affaires
La société 100% Piscines reproche aux premiers juges d'avoir fait une mauvaise analyse de la clause d'apporteur d'affaires, et fait valoir au soutien de son appel essentiellement que :
- Mme [R] adopte un comportement déloyal en commettant un estoppel au détriment de la société, en ce qu'elle a elle-même écrit au comptable de la société pour donner le montant de sa prime de sorte qu'elle ne peut désormais se contredire au détriment de l'employeur en contestant le calcul de sa prime pour apporteur d'affaire dans plusieurs dossiers.
les commissions pour apporteur d'affaire ne prennent pas en compte dans l'assiette de calcul les travaux de terrassement qu'elle sous-traite à une société tierce. Toutefois, elle est dans l'incapacité de verser au dossier les bons de commande et devis terrassement piscine de septembre 2018 à juillet 2020, puisque Mme [R] a volé les archives.
Mme [R] objecte principalement que :
- la société est tenue de lui communiquer les éléments permettant le calcul exact des primes et commissions qui lui sont dues. Elle a également vendu la mise en place des piscines via les terrassements, de sorte que la prime pour apporteur d'affaires doit être calculée sur l'ensemble des ventes réalisées, incluant piscine et terrassement.
- les documents de la pièce 15 sont parfaitement lisibles et il revenait à la société 100% piscines de verser les devis et bons de commande qui sont en sa possession, ce qu'elle a toujours refusé de faire malgré l'injonction du conseil de prud'hommes de La Rochelle,
- elle n'a pas adopté deux positions contraires au détriment de la société 100% piscines, en ce qu'elle a toujours manifesté son intention de réclamer le versement de ses primes dont seule la société 100 % piscines déterminait le montant.
- la rétention abusive de sa rémunération ainsi que de ses primes d'apporteur, soit en l'espèce 25 899,88 euros de salaire outre les congés payés afférents d'un montant de 589,99 euros et les primes équivalents à 20 000 euros, est injustifiée et lui est préjudiciable, en ce que cette rétention lui a causé un préjudice financier et moral.
Sur ce,
La société 100% Piscine, alléguant du principe de l'estoppel, soutient que Mme [R] en cherchant à faire modifier le montant de ses commissions se contredit avec les instructions qu'elle a elle-même envoyées au comptable et ce, à son détriment, ce qui rend sa demande irrecevable.
La société 100% Piscines verse aux débats des mails signés '[Z]' adressés au comptable M. [T] [D] (acgesco) aux termes desquels, celle-ci sollicite la préparation de bulletins de salaire et indique, en ce qui concerne le sien, les montants de la prime à retenir s'agissant de huit clients, ces montants étant inférieurs à ceux réclamés devant le conseil de prud'hommes et en cause d'appel.
Il convient cependant d'observer que les mails sont adressés depuis l'adresse de l'employeur [M] [N] ([Courriel 5]) qu'ils concernent également les salaires d'autres personnes (prénommées [IB], [P], [V], [E] dont les jours d'absence sont précisés) et qu'ils sont relatifs à seulement 8 mois entre novembre 2018 et juin 2020. Il se déduit de ces constatations que Mme [R], salariée, agissait alors sous la subordination de son employeur M. [N], seul à même de connaître les temps de présence des salariés dans son entreprise et de déterminer le montant de la prime due.
Par ailleurs, Mme [R] ne s'est pas contredite au détriment de l'employeur devant les juridictions devant lesquelles elle a porté ses prétentions dans des termes identiques, de sorte que la société 100% Piscines n'est pas fondée à se prévaloir du principe de l'estoppel.
En application de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L'article 3 intitulé 'rémunération' du contrat de travail stipule que 'Mme [R] sera soumise à la durée légale du travail applicable dans l'entreprise.
Elle percevra à ce titre une rémunération brute mensuelle de 1 736,62 euros correspondant à son salaire de base et à un taux horaire brut de 11,45 euros.
S'ajoutent à cette rémunération une prime pour apporteur d'affaire correspondant à 7% du montant HT de la commande signée.(...).
Manifestement cette clause ne limite pas la prime d'apporteur d'affaire aux seules commandes signées portant sur la fourniture de piscines et d'accessoires et aucune exclusion n'est prévue pour les commandes signées relatifs aux travaux d'installation de piscine et de terrassement.
Il n'est pas contesté que Mme [R] a signé des bons de commandes portant sur la vente de piscines et d'accessoires ainsi que des bons de commande pour la réalisation des travaux de terrassement.
Certains devis signés par Mme [R] et les clients concernent tout à la fois la vente de la piscine et des accessoires ainsi que le coût du terrassement et de la mise en oeuvre (notamment devis [W], [RI], [B], [S], [L]).
Pour expliquer qu'aucune prime ne pouvait être due sur les travaux de terrassement, la société 100% Piscines allègue que ces travaux étaient sous- traités et qu'elle ne retirait donc aucun bénéfice sur ces prestations.
Elle ne verse cependant aucune pièce pour attester de contrats conclus avec des sous-traitants concernant les 'devis de terrassement piscine' ou les devis comportant des prestations de terrassement signés par Mme [R].
Les factures que produit la société 100% Piscines (pièce14) établissent que les travaux de terrassement ont été facturés par ses soins aux clients ainsi que la vente des piscines et accessoires pour des montants correspondant précisément aux devis avec bon pour accord des clients signés par Mme [R] (notamment factures [W], [S], [L], [A] ).
Il n'y a donc pas lieu de distinguer là où la clause contractuelle n'établit aucune distinction, de sorte que pour le calcul de la prime il convient de considérer que les 7% s'appliquent sur le montant HT de la commande signée par la salariée, sans qu'il y ait lieu d'exclure les travaux de terrassement.
En cause d'appel, comme en première instance, la société 100% Piscines ne produit aucune pièce qui vienne contredire utilement le calcul des rappels de primes présenté par Mme [R].
Il convient donc de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] la somme de 18 958,36 euros à titre de rappel de salaires et celles de 1 895,84 euros au titre des congés payés afférents.
La décision déférée doit également être confirmée en ce qu'elle a débouté Mme [R] de sa demande de dommages-intérêts pour rétention manifestement abusive de sa rémunération, en l'absence de revendication sur le montant de sa prime avant la saisine du conseil de prud'hommes et de démonstration d'un préjudice avéré.
Sur l'indemnité de non-concurrence
La société 100% Piscines reproche aux premiers juges de l'avoir condamnée à payer à Mme [R] une somme de 5 316,78 € au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et au soutien de son appel fait valoir essentiellement que :
- elle n'a jamais demandé à Mme [R] de respecter la clause de non-concurrence prévue dans son contrat de travail ;
- la clause est nulle en l'absence de rémunération correspondante, et le tribunal ne pouvait pas se substituer aux parties pour en fixer le montant ;
- Mme [R] a retrouvé immédiatement un emploi après la rupture conventionnelle, de sorte qu'elle ne justifie d'aucun préjudice, d'autant plus que l'interdiction avait été prévue pour une courte durée de 60 jours.
Mme [R] fait valoir en substance que son contrat de travail comporte une clause de non-concurrence sans prévoir aucune contrepartie financière, de sorte que la clause est nulle ; elle a cependant respecté les prescriptions de cette clause en n'exerçant pas d'activité concurrente à la société 100% piscines et est donc fondée à obtenir une contrepartie financière équivalente à deux mois de salaire.
Sur ce, en application du principe fondamental de libre exercice d'une activité professionnelle, une clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection légitime des intérêts de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, et qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulables.
La stipulation d'une clause de non-concurrence nulle est susceptible de causer au salarié un préjudice dont l'existence et l'évaluation relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond (Soc., 25 mai 2016, pourvoi n° 14-20.578).
Au cas présent le contrat de travail stipule à l'article 11 une clause de non-concurrence ainsi rédigée :
'Compte tenu de la nature de ses fonctions, Mme [R] s'engage à ne pas exercer d'activité concurrente à compter du départ effectif de l'entreprise, y compris dans le cas d'une dispense de préavis, pendant une durée de 60 jours.
Cette interdiction s'appliquera dans la limite de la zone géographique Région Nouvelle Aquitaine'.
Il est manifeste que cette clause ne comporte aucune contrepartie financière ce qui lui enlève tout caractère obligatoire et lui fait encourir la nullité. Toutefois cette nullité est relative en ce qu'elle ne peut pas être invoquée par la société 100% Piscines qui a inséré une telle clause au contrat de travail.
L'acte de rupture conventionnelle ne prévoit aucune renonciation de la société 100% Piscines à la clause de non-concurrence et l'employeur ne justifie pas d'une telle renonciation exprimée au plus tard à la date de rupture fixée par la convention au 30 août 2020.
Par ailleurs la société 100% Piscines n'allègue pas que Mme [R] ait contrevenu à cette clause.
Mme [R] qui a respecté la clause de non-concurrence malgré son caractère illicite résultant de l'absence de contrepartie financière, peut prétendre à des dommages-intérêts si elle démontre avoir subi un préjudice.
Il résulte des pièces produites que Mme [R] a signé le 7 septembre 2020 un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de négociateur immobilier VRP avec la société France Agence 17 (Sarl), son lieu de travail étant situé dans la limite géographique définie par le département de la Charente-Maritime moyennant une rémunération variable sous la forme de commissions au regard du chiffre d'affaires hors taxes réalisé personnellement et en tout état de cause une rémunération mensuelle garantie, équivalente à 1 539,45 €, ce salaire mensuel brut minimum constituant une avance sur commission.
Il s'ensuit que Mme [R] a retrouvé quelques jours après la rupture du contrat de travail intervenue le 31 août 2020, un emploi dans le secteur de la négociation immobilière dans le même département que celui où elle travaillait auparavant, de sorte que son préjudice est limité à l'impossibilité de retrouver pendant 60 jours un emploi dans le secteur de la vente des piscines en région Nouvelle Aquitaine qu'elle connaissait bien depuis 2018.
Le préjudice qu'elle a ainsi subi du fait que l'employeur lui a imposé une clause nulle portant atteinte à sa liberté d'exercer une activité professionnelle sera compensé par l'allocation de dommages-intérêts d'un montant de 1 000 €, la décision déférée devant être infirmée en ce sens.
Sur les demandes de restitution d'objet et de documents
La société 100% Piscines qui sollicite que Mme [R] soit condamnée sous astreinte à lui restituer un téléphone portable de fonction et des documents professionnels, notamment les dossiers clients en cours, n'établit toujours pas devant la cour avoir mis à la disposition de Mme [R] un téléphone portable qui n'aurait pas été restitué, ni que celle-ci aurait emporté des dossiers clients en quittant la société.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société 100% Piscines de sa demande de restitution sous astreinte et de sa demande en paiement de la somme de 439 € TTC en réparation de l'absence de restitution du téléphone portable.
Sur la demande de dommages-intérêts pour l'ordinateur portable endommagé
Cette demande n'est pas fondée dès lors qu'aucune pièce n'établit que Mme [R] a endommagé un ordinateur portable appartenant à M. [N]. La plainte déposée le 28 septembre 2020 par celui-ci aux termes de laquelle il indique que Mme [R] s'est énervée le jour de la rupture conventionnelle et a jeté son ordinateur portable par terre est contredite par l'attestation de Mme [FP], présente ce jour-là, qui précise que la détérioration d'un ordinateur est une 'pure invention'.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société 100% Piscines de ce chef.
III Sur l'appel incident de Mme [R]
Sur la demande de rappel de salaires au titre des mois de juillet et août 2020 et les dommages-intérêts pour rétention abusive de rémunération
Mme [R] soutient que :
- la société est de mauvaise foi lorsqu'elle prétend que la difficulté concernant le paiement du salaire du mois de juillet est de son fait,
- une erreur dans la régularisation a été réalisée par la société, puisqu'il reste un montant impayé de 1 670,15 euros : les rémunérations afférentes au mois de juillet et août 2020 sont respectivement de 2 842,04 euros et 8 057,84 euros. Le décompte fait par la société est : 8 057,84 + 1 171,89 (correspondant au chèque du mois de juillet déclaré perdu) = 4 229,73. Or, le décompte aurait dû être : 8 057,84 + 2 842,04 - 5 000 = 5 899,88 €. Il reste donc un reliquat de salaire de 1 670,15 euros (5 899,88 - 4 229,73),
- le paiement tardif de salaires justifie l'allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. Elle a reçu un chèque d'un montant de 1 117,89 euros pour le mois de juillet, alors qu'elle aurait dû percevoir 2 842,04 euros. De plus, lorsqu'elle a voulu encaisser ce chèque, il avait été déclaré comme perdu par la société.
La société 100% Piscines répond principalement que :
- le salaire versé à Mme [R] pour le mois de juin était supérieur de 1 670,15 euros à celui qu'elle devait initialement percevoir, le surplus venant donc en déduction du salaire versé au mois de juillet,
- le solde du mois de juillet a été réglé en octobre 2021, puisque M. [N] avait fait opposition au chèque donné le 22 septembre 2020 qu'il pensait perdu, Mme [R] tardant à l'encaisser. Concernant le salaire du mois d'août 2020, ce dernier a été versé en octobre 2021 car Mme [R] a tardé à apporter des éléments sur sa situation du 17 au 31 août 2020.
Sur ce, en application des dispositions de l'article L.3242-1 alinéa 3 du code du travail, le paiement de la rémunération est effectué une fois par mois.
Mme [R] qui maintient sa demande en paiement d'une somme de 1 670,15 € au titre d'un rappel de salaires pour la période de juillet et août 2020, outre 167, 02 € de congés payés afférents, n'apporte aucune contradiction sérieuse à la motivation du conseil de prud'hommes selon laquelle les bulletins de paie versés au dossier établissent qu'il lui était dû pour les mois de juin, juillet et août 2020 une somme globale de 12 436 € et qu'il est justifié que la société 100% Piscines lui a versé :
- le 10 juillet 2020 une somme de 3 206,27 € par chèque présenté à l'encaissement le 10 juillet 2020 (pièce 13 de Mme [R]),
- le 10 septembre 2020 une somme de 5 000 € par chèque (pièce 21 de Mme [R]),
- le 7 octobre 2021 un chèque bancaire de 4 229,73 € (pièce 19 de Mme [R]),
soit la somme totale de 12 436 €.
La décision déférée doit donc être confirmée en ce qu'elle a retenu que Mme [R], qui ne conteste pas avoir perçu pour le mois de juin une somme supérieure (3 206,27 €) à celle figurant sur son bulletin de salaire (1 536,12 €), devait être déboutée de sa demande de rappel de salaires à hauteur de 1670,15 €.
Il est établi par les pièces produites et non valablement contestées par la société 100% Piscines que Mme [R] a perçu le paiement de ses salaires des mois de juillet et août 2020 avec retard ce qui lui a été préjudiciable. Les premiers juges ont justement apprécié à la somme de 600 € la réparation du préjudice subi par Mme [R] du fait de ces paiements tardifs.
Sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail « aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».
Le régime probatoire du harcèlement moral est posé par l'article L. 1154-1 du code du travail qui prévoit que dès lors que le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il en résulte que le salarié n'est tenu que d'apporter au juge des éléments permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral et qu'il ne supporte pas la charge de la preuve de celui-ci.
De ce fait, le juge doit :
- en premier lieu examiner la matérialité des faits allégués par le salarié en prenant en compte tous les éléments invoqués y compris les certificats médicaux,
- puis, qualifier juridiquement ces éléments en faits susceptibles, dans leur ensemble, de faire présumer un harcèlement moral,
- enfin, examiner les éléments de preuve produits par l'employeur pour déterminer si ses agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et si ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il est constant que peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de management par un supérieur hiérarchique dès lors qu'elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Mme [R] au titre du harcèlement moral allégué présente les faits suivants :
a) Elle a subi un comportement managérial dénigrant et humiliant en ce que :
- elle devait utiliser la boîte mail de M. [N] afin qu'il puisse contrôler son travail,
Si des pièces du dossier établissent que des mails ont été envoyés par Mme [R] depuis l'adresse ([Courriel 5], il n'est pas démontré que cela résultait d'une exigence de M. [N].
Il n'est pas établi que M. [N] ait interdit à Mme [R] d'afficher sa propre adresse sur sa carte de visite.
- sa ligne téléphonique personnelle a été coupée l'empêchant alors de gérer ses relations clientèles,
Comme le précise Mme [R], il était convenu au moment de la rupture conventionnelle qu'elle récupère sa ligne téléphonique qu'elle avait cédée à l'entreprise pour l'utiliser comme ligne professionnelle.
Mme [R] produit un courriel du 30 juillet 2020 adressé à M. [N] pour s'étonner que la carte Sim de la ligne téléphonique qu'elle a récupérée ait été changée.
Les pièces produites établissent que Mme [R] et la société 100% Piscines ont signé un formulaire de cession de ligne téléphonique le 29 juillet 2020, ce qui atteste de leur accord pour que Mme [R] reprenne la ligne.
Mme [R] produit un mail de SFR adressé à [Courriel 5] confirmant pour la ligne 0685374330 la mise en service d'une nouvelle carte Sim suite à une commande du 30 juillet 2020.
S'agissant de la reprise par un particulier de la ligne téléphonique professionnelle de la société, le changement intervenu concomitamment à la signature de la rupture conventionnelle ne revêt pas de caractère humiliant.
- M. [N] l'a humiliée en refusant de lui verser son salaire de juillet 2020.
Mme [R] produit le témoignage de Mme [U] qui indique avoir été témoin d'une conversation téléphonique entre M. [N] et son comptable au sujet du salaire du mois de juillet de Mme [R], M. [N] ayant ordonné au comptable de ne pas lui verser son salaire ni ses primes en disant 'qu'elle se démerde'.
b/ Elle a été victime de violences verbales,
Elle produit les témoignages de Mme [FP] qui indique avoir 'assisté à plusieurs reprises à des appels de M. [N] auxquels Mme [R] n'a pas répondu et que celle-ci après chaque appel se trouvait dans un état de panique, tremblement et frayeur'.
Ce témoignage n'est pas probant d'une violence verbale de M. [N] à l'égard de Mme [R] puisqu'il est indiqué que celle-ci ne répondait pas aux appels de celui-ci ; de même l'appel téléphonique que ce témoin a pris le 4 septembre [2020] pendant que Mme [R] conduisait ne caractérise pas une violence verbale à l'encontre de la salariée, étant observé que cet appel est intervenu en tout état de cause après la rupture du contrat de travail.
Mme [R] produit le témoignage de Mme [G] qui indique avoir été témoin de ce que 'M. [N] harcelait Mme [R] par messages et par des appels incessants ce qui mettait son amie dans un état de panique et de terreur'.
Ce témoin précise que 'M. [N] faisait du chantage professionnel, comme retarder les paiements des salaires, non paiement des primes sur des ventes signées par Mme [R]'.
Ce témoin indique également que son amie lui 'a téléphoné le samedi 2 mai, elle était en pleurs et m'annonçait que M. [N] [M] est venu à son domicile à 5H du matin récupérer la voiture de fonction, [Z] se retrouvait sans moyen de locomotion pour se déplacer vers son travail et honorer ses rendez-vous.
Elle précise également que 'le 27 août 2020, elle a reçu un appel téléphonique de [Z] paniquée, M. [N] était à sa porte suite à plusieurs appels téléphoniques dans la nuit du 26 au 27 août'.
Hormis les faits concernant le retard de paiement de la rémunération, il n'est pas établi que les autres faits relatés soient en lien avec l'activité professionnelle de Mme [R], dans la mesure où ils se sont produits pendant la période de rupture de la relation de couple qu'elle entretenait avec M. [N] et que par ailleurs il ne résulte pas du contrat de travail que Mme [R] ait eu à sa disposition un véhicule de fonction.
Mme [R] produit également six messages téléphoniques de M. [N] du 2 mai et du 7 mai dont deux appels vocaux manqués, un mail du 13 juillet 2020 et un échange de mail entre le 26 et le 27 août qui ne sont pas de nature à prouver un harcèlement moral de nature professionnelle.
c) la dégradation de son état de santé a été médicalement constatée,
Mme [R] justifie avoir été en arrêt de travail le 7 août 2020 et produit un certificat médical du docteur [C] daté du même jour qui indique 'Mme [R] présente une réaction anxio dépressive forte que la patiente associe avec un conflit avec son employeur depuis 5 mois. Son état impose un repos et des traitements adaptés'.
Ce certificat atteste de la dégradation de l'état de santé de Mme [R], que celle-ci associe à un conflit avec son employeur. Il apparaît cependant qu'à cette date elle venait de conclure une rupture conventionnelle avec la société 100% Piscines, représentée par M. [N]. En revanche, il ne peut pas être fait abstraction des circonstances conflictuelles de la rupture de sa relation de couple avec M. [N], telles que décrites dans les témoignages produits et de leur potentiel retentissement sur son état de santé.
Il résulte de l'ensemble de ces développements que le seul élément de fait tenant au retard volontaire apporté par la société 100% Piscines dans le paiement de la rémunération de Mme [R] en juillet 2020 ne permet pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral au préjudice de celle-ci.
Il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral.
Sur la demande d'indemnisation pour rétention des documents relatifs à l'assurance maladie
Mme [R] fait valoir que l'employeur a méconnu son obligation de déclarer ses arrêts de travail à la CPAM, et qu'elle a subi un préjudice du fait de la rétention des documents relatifs à son arrêt maladie, car ni elle ni la CPAM n'ont reçu l'attestation de salaire établie par la société 100% Piscines, laquelle est obligatoire pour recevoir les indemnités journalières.
La société 100% Piscines répond que l'arrêt de travail de Mme [R] a été télétransmis à à la caisse primaire d'assurance maladie.
Sur ce, il résulte des pièces produites que l'arrêt de travail du 7 août 2020 de Mme [R] a été télétransmis directement à la caisse primaire d'assurance maladie le 7 août 2020. Après analyse des pièces produites, les premiers juges ont retenu par des motifs pertinents, non valablement remis en cause devant la cour par Mme [R], que celle-ci, qui ne s'est pas plainte, lors des mails adressés fin août début septembre 2020 à la société 100 % Piscines et au comptable, d'un défaut de transmission de l'attestation de salaire, ne justifiait pas à ce jour que la caisse primaire d'assurance maladie ne lui avait pas payé les indemnités journalières afférentes à son arrêt maladie du 7 au 16 août 2020 et que l'absence de règlement résultait du défaut de transmission de l'attestation de salaire par l'employeur.
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté Mme [R] de ses demandes de transmission sous astreinte de l'attestation de salaire et de dommages-intérêts pour rétention abusive.
Sur le travail dissimulé
Mme [R] maintient devant la cour sa demande en paiement d'une indemnité de 15 950,34 € sur le fondement de l'article L8223-1 du code du travail, en faisant valoir que l'employeur a commis intentionnellement une fraude fiscale en ne soumettant pas son salaire du mois de juin aux charges sociales.
Elle ne répond pas cependant à l'argumentation du conseil de prud'hommes qui a relevé que si le montant de 1 536,12 euros nets figurant sur le bulletin de salaire de juin 2020 ne correspond pas au chèque de 3 206,27 euros encaissé par elle le 10 juillet 2020, la différence s'élève à la somme de 1 670,15 euros et correspond exactement au montant de la commission sur chantier portée sur le bulletin de salaire du mois de juillet 2020.
Il s'ensuit que la somme de 1 670,15 euros payée en juillet 2020 en même temps que le salaire de juin 2020 a bien été déclarée sur le bulletin de paye du mois de juillet 2020 de sorte que la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle a débouté Mme [R] de sa demande indemnitaire sur le fondement de l'article L.8223-1 du code du travail.
Sur la remise des documents de fin de contrat et la demande de dommages-intérêts pour rétention abusive des dits documents
Mme [R] sollicite la confirmation du jugement du 29 mars 2022 en ce qu'il a ordonné la remise par la société 100% Piscines sous astreinte d'une attestation destinée à Pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congés en double exemplaire, et demande à nouveau à la cour de condamner la société 100% Piscines à la remise de ces documents sous astreinte.
Elle sollicite en outre la condamnation de la société 100% Piscines au paiement de dommages-intérêts d'un montant de 1 500 euros de dommages-intérêts pour rétention abusive de ces documents.
La société 100% Piscines produit le jugement rendu par le juge de l'exécution de La Rochelle le 6 octobre 2023 sur saisine de Mme [R] en liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du conseil de prud'hommes de La Rochelle le 29 mars 2022.
Il résulte du jugement du juge de l'exécution, définitif comme en atteste le certificat de non appel du 15 décembre 2023, que l'attestation destinée à Pôle emploi a été remise dans les délais prescrits par le jugement du conseil de prud'hommes de La Rochelle, que le certificat de congé en double exemplaire ne lui ayant été remis qu'en cours de procédure, l'astreinte correspondant à la non remise de ce document a été liquidée à 120 € et que Mme [R] a été déboutée de sa demande de dommages-intérêts.
Il s'ensuit que Mme [R], remplie de ses droits, est irrecevable en sa demande de condamnation de la société 100% Piscines à la remise sous astreinte desdits documents et que la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle débouté Mme [R] de sa demande indemnitaire au titre d'une rétention abusive de ces mêmes documents.
III Sur les demandes accessoires
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à payer à la société 100% Piscines les intérêts de retard au taux légal à compter du 29 janvier 2021 sur les créances de salaire et à compter de la décision sur les créances indemnitaires.
Les dispositions du jugement relatives aux dépens de première instance et à la condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile doivent également être confirmées.
La société 100% Piscines qui succombe partiellement en son appel principal et Mme [R] qui succombe en son appel incident, doivent supporter chacune la moitié des dépens de la procédure d'appel.
Il n'y a pas lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rejette la demande d'irrecevabilité formulée in limine litis par la société 100% Piscines ;
Infirme le jugement rendu le 29 mars 2022 par la formation de départage du conseil de prud'hommes de La Rochelle en ce qu'il a condamné la société 100% Piscines à payer à Mme [R] la somme de 5 316,78 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence ;
Statuant à nouveau de ce chef ;
Condamne la société 100% Piscines à payer à Mme [R] la somme de 1000 euros de dommages-intérêts au titre de la clause de non-concurrence illicite, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déclare Mme [R] irrecevable en sa demande de condamnation de la société 100% Piscines à la remise sous astreinte d'une attestation destinée à Pôle emploi correctement remplie ainsi que d'un certificat de congés en double exemplaire ;
Condamne la société 100% Piscines et Mme [R] chacune pour moitié aux dépens de la procédure d'appel ;
Dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,