CA Bordeaux, 2e ch. civ., 6 novembre 2025, n° 24/01289
BORDEAUX
Autre
Autre
2ème CHAMBRE CIVILE
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Maître [Y] [R]
C/
Monsieur [B] [K] [J]
S.E.L.A.R.L. PHILAE
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N° RG 24/01289 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NV3Z
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DU 06 NOVEMBRE 2025
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ORDONNANCE
---------------
Nous, Jacques BOUDY, Président chargé de la mise en état de la 2ème CHAMBRE CIVILE de la Cour d'Appel de Bordeaux, assisté de Marie-Laure MIQUEL, Greffier.
Avons ce jour, dans l'affaire opposant :
Maître [Y] [R]
né le 06 Mars 1962 à [Localité 10]
de nationalité Française
Profession : Notaire
demeurant [Adresse 3]
Représenté par Me Xavier LAYDEKER de la SELARL LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX
Défendeur à l'incident,
Appelant d'un jugement (R.G. 22/05396) rendu le 05 mars 2024 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 11] suivant déclaration d'appel en date du 19 mars 2024,
à :
Monsieur [B] [K] [J]
né le 08 Novembre 1966 à [Localité 12]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 8]
[Localité 9]
Représenté par Me Laurence TASTE-DENISE de la SCP RMC ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX
Défendeur à l'incident,
S.E.L.A.R.L. PHILAE
dont le siège est situé [Adresse 7], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BORDEAUX sous le numéro 444 809 792, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
ès qualités de liquidateur à la procédure de liquidation judiciaire de Monsieur [B] [J], nommée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de Bordeaux en date du 23 août 2006
demeurant [Adresse 7]
Représentée par Me Victoire DEFOS DU RAU de la SELAS CABINET LEXIA, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée à l'audience par Me Pierre LANÇON, avocat au barreau de BORDEAUX
Demanderesse à l'incident,
Intimés,
rendu l'ordonnance contradictoire suivante après que l'incident ait été débattu devant Nous, à l'audience de mise en état en date du 24 septembre 2025.
Vu le jugement rendu le 5 mars 2024 par lequel le tribunal judiciaire de Bordeaux a :
- déclaré irrecevable les conclusions de M. [J],
- déclaré irrecevables les demandes formées par Mme [I] et Maître [R] à l'égard de M. [J],
- déclaré inopposable à la liquidation judiciaire de M. [J], le paiement du prix versé suite à la vente de l'immeuble sis [Adresse 4] à [Localité 13], cadastré section C n°[Cadastre 1] et [Cadastre 2], aux termes d'un acte authentique reçu par Maître [Y] [R], notaire associé de la société civile professionnelle '[Y] [R], [O] [N], [X] [L], [M] [A], [C] [A] et [F] [D] [U]' le 23 mai 2019, enregistré et publié le 3 juil 2019 au service de la publicité foncière de [Localité 11] sous le numéro de dépot 2019 D10624 volume 2019 P05826,
- condamné Mme [I] à payer à la Selarl Philae, es qualité de liquidateur de M. [J] la somme de 260 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2022,
- condamné Maître [R] à relever intégralement indemne Mme [I] de cette condamnation,
- débouté la Selarl Philae, es qualité de liquidateur de M. [J] de ses demandes à l'égard de Maître [R],
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné in solidum Mme [I] et Maître [E] à payer à la Selarl Philae, es qualité de liquidateur de M. [J], la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Maître [R] à payer à Mme [I] une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum Mme [I] et Maître [R] aux dépens,
- condamné Maître [R] à relever intégralement indemne Mme [I] de sa condamnation aux dépens et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit ;
Vu l'appel interjeté le 19 mars 2024 par M. [R] ;
Vu les conclusions d'incident notifiées le 22 septembre 2025 par lesquelles la Selarl Philae demande au conseiller de la mise en état, sur le fondement des articles 142,138 et 139 du code de procédure civile :
- d'ordonner à Maître [R] de délivrer le justificatif du paiement de la somme de 65 000 euros correspondant à la valeur de l'usufruit revenant à Mme [S] épouse [J] du chef de la répartition du prix de vente de l'immeuble sis [Adresse 6] (Gironde), ladite vente ayant été reçue par le notaire susnommé aux termes d'un acte en date du 29 mai 2019, ledit justificatif faisant apparaître l'identité du bénéficiaire de ce paiement, ainsi que les coordonnées du ou des comptes bancaires au crédit du ou desquels a été viré par sa comptabilité le prix de vente de 325 000 euros, outre l'identité de son ou de ses leurs titulaires,
- de dire que cette production devra intervenir dans un délai de 15 jours à compter de la signification à partie de ladite ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard pendant un délai d'un mois,
- de se réserver la liquidation d'astreinte,
- de condamner Maître [R] au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'incident ;
Vu les conclusions d'incident notifiées le 18 septembre 2025 aux termes desquelles Me [R] demande au conseiller de la mise en état, sur le fondement des articles 138, 139, 142, 698, 699 et 700 du code de procédure civile de :
- débouter la Selarl Philae de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la Selarl Philae à lui verser une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions d'incident notifiées le 24 septembre 2025 aux termes desquelles la selarl Philae sollicite :
- d'ordonner à Maître [R] de délivrer le justificatif du paiement de la somme de 65 000 euros correspondant à la valeur de l'usufruit revenant à Mme [S] épouse [J] du chef de la répartition du prix de vente de l'immeuble sis [Adresse 5] [Localité 14] (Gironde), ladite vente ayant été reçue par le notaire susnommé aux termes d'un acte en date du 29 mai 2019, ledit justificatif faisant apparaître l'identité du bénéficiaire de ce paiement, ainsi que les coordonnées du ou des comptes bancaires au crédit du ou desquels a été viré par sa comptabilité le prix de vente de 325 000 euros, outre l'identité de son ou de ses titulaires,
- de dire que cette production devra intervenir dans un délai de 15 jours à compter de la signification à partie de ladite ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard pendant un délai d'un mois,
- à titre subsidiaire, ordonner à Me [Y] [R] de délivrer les justificatifs de l'ensemble des virements auxquels il a procédé sur le ou les compte(s) dont M. [B] [J] est titulaire pour procéder au paiement du prix de vente dudit immeuble ainsi que les coordonnées du ou des compte(s) en question,
- de se réserver la liquidation d'astreinte,
- de condamner Maître [R] au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'incident ;
SUR CE :
1. Il convient au préalable de rappeler que le 23 mai 2019, Me [Y] [R], notaire, a reçu un acte de vente émanant de Madame [S], usufruitière, et de Monsieur [J], nu-propriétaire, d'un immeuble sis [Adresse 6] moyennant un prix total de 325 000 euros, au profit de Mme [G] [I].
En raison de l'usufruit de Mme [S], il devait lui revenir la somme de 65 000 € tandis que la valeur de la nue-propriété détenue par son fils, M. [B] [J], s'élevait à 260 000 €.
2. Or, à la date de la vente, ce dernier se trouvait sous le coup d'une procédure de liquidation judiciaire décidée par jugement du tribunal de commerce de Bordeaux le 23 août 2006 et la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (ci-après nommée Selarl) Philae avait été désignée en qualité de liquidateur.
3. C'est dans ces conditions que, s'appuyant sur les dispositions de l'article L. 641-9 du code de commerce édictant le dessaisissement du débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, la selarl Philae a fait assigner M. [J], Mme [I] et Me [R] devant le tribunal judiciaire de Bordeaux.
4. Ce dernier a déclaré inopposable à la liquidation judiciaire le paiement fait par Mme [I], tenue dès lors de lui verser la somme de 260 000 € correspondant à la valeur de la nue-propriété.
Il a condamné le notaire à la relever indemne de cette condamnation et rejeté le recours qu'il avait formé contre M. [J].
5. Me [R] a interjeté appel et la selarl Philae, qui avait demandé à titre principal le versement à son profit du montant total du prix de vente, soit la somme de 325 000 €, a formé appel incident.
6. Elle soutient qu'il est indispensable de déterminer de manière indiscutable l'identité des bénéficiaires de la somme versée par l'acquéreur et vérifier si celle-ci a bien été répartie entre l'usufruitière et le nu-propriétaire ou si au contraire, elle a été versée en totalité à ce dernier.
Que par conséquent, elle est fondée à exiger du notaire qu'il justifie des fonds versés à l'usufruitière.
7. Me [R] soutient que la demande de communication forcée des justificatifs de virements est infondée. En effet, elle se heurte au secret professionnel des notaires qui est absolu et garanti tant par l'article 23 de la loi du 25 ventôse an XI que par l'article 3.4 du règlement national des notaires. De plus, la Selarl Philae n'a aucune qualité pour réclamer des renseignements concernant le versement de fonds revenant à un tiers à la liquidation. Enfin, sa demande n'est sous tendue par aucun motif légitime.
8. La Selarl Philae affirme pour sa part, que bien que Me [R] soutienne n'avoir versé à M. [J] que la somme de 265 000 euros correspondant à la nue-propriété, la seule pièce versée au débat ne permet pas de le démontrer. Elle sollicite en ce sens la production des documents comptables aux fins de justifier de l'identité du ou des bénéficiaires. Elle réfute l'ensemble des moyens de Me [R]. D'une part, le secret professionnel n'est pas opposable aux parties à l'acte en exécution duquel les paiements ont été faits. D'autre part, Mme [S] étant décédée, M. [J], débiteur, est héritier. Elle ajoute que le dessaisissement résultant de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire concerne les biens dépendant de la succession de Mme [S] et devant revenir à M. [J], de sorte que sa demande est fondée.
Sur ce,
9. Il est certes exact que, comme le soutient la selarl Philae, le notaire ne peut opposer au liquidateur le secret professionnel pour refuser de lui communiquer la consistance des droits détenus par le débiteur en liquidation judiciaire dans une succession ou le justificatif des paiements reçus par ce débiteur à l'occasion d'une vente, mais en revanche, le secret professionnel auquel il est tenu lui interdit de communiquer des éléments concernant des tiers.
Tel était bien le cas de Mme [S].
10. Par ailleurs, s'il est également exact, comme indiqué supra, que le liquidateur peut se faire communiquer la consistance des droits détenus par M. [J] dans la succession de sa mère décédée entre-temps, seul le notaire chargé de la succession est en mesure de le faire, à supposer d'ailleurs que cette communication permette de déterminer si, lors de la vente, Mme [S] a perçu ou non le prix de l'usufruit.
11. Par conséquent, il ne peut être fait droit à la demande principale qui tend à voir ordonner la production des éléments justificatifs de la destination donnée à la part du prix de vente représentant la valeur de l'usufruit dont était titulaire Mme [S].
12. En revanche, dès lors que le liquidateur borne sa demande subsidiaire aux éléments concernant les seuls versements effectués au profit du débiteur dont il est le liquidateur, le notaire ne peut plus lui opposer le secret professionnel et la demande est alors fondée.
13. Il y sera fait droit et une astreinte sera fixée.
Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Déboute la selarl Philae, ès qualités, de sa demande principale;
Faisant droit à sa demande subsidiaire, ordonne à Me [Y] [R] de délivrer les justificatifs de l'ensemble des virements auxquels il a procédé sur les comptes dont M. [B] [J] était titulaire à la suite du paiement du prix de vente de l'immeuble vendu le 23 mai 2019 à Mme [I], en précisant les références de ces comptes, sous astreinte de 20 euros par jour de retard, passé un délai de deux mois à compter de la notification de la présente ordonnance, pendant une durée de deux mois;
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile;
Condamne Me [Y] [R] aux dépens de l'incident.
Le Greffier, Le Président,
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Maître [Y] [R]
C/
Monsieur [B] [K] [J]
S.E.L.A.R.L. PHILAE
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N° RG 24/01289 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NV3Z
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DU 06 NOVEMBRE 2025
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ORDONNANCE
---------------
Nous, Jacques BOUDY, Président chargé de la mise en état de la 2ème CHAMBRE CIVILE de la Cour d'Appel de Bordeaux, assisté de Marie-Laure MIQUEL, Greffier.
Avons ce jour, dans l'affaire opposant :
Maître [Y] [R]
né le 06 Mars 1962 à [Localité 10]
de nationalité Française
Profession : Notaire
demeurant [Adresse 3]
Représenté par Me Xavier LAYDEKER de la SELARL LAYDEKER - SAMMARCELLI - MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX
Défendeur à l'incident,
Appelant d'un jugement (R.G. 22/05396) rendu le 05 mars 2024 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 11] suivant déclaration d'appel en date du 19 mars 2024,
à :
Monsieur [B] [K] [J]
né le 08 Novembre 1966 à [Localité 12]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 8]
[Localité 9]
Représenté par Me Laurence TASTE-DENISE de la SCP RMC ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX
Défendeur à l'incident,
S.E.L.A.R.L. PHILAE
dont le siège est situé [Adresse 7], immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BORDEAUX sous le numéro 444 809 792, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
ès qualités de liquidateur à la procédure de liquidation judiciaire de Monsieur [B] [J], nommée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de Bordeaux en date du 23 août 2006
demeurant [Adresse 7]
Représentée par Me Victoire DEFOS DU RAU de la SELAS CABINET LEXIA, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée à l'audience par Me Pierre LANÇON, avocat au barreau de BORDEAUX
Demanderesse à l'incident,
Intimés,
rendu l'ordonnance contradictoire suivante après que l'incident ait été débattu devant Nous, à l'audience de mise en état en date du 24 septembre 2025.
Vu le jugement rendu le 5 mars 2024 par lequel le tribunal judiciaire de Bordeaux a :
- déclaré irrecevable les conclusions de M. [J],
- déclaré irrecevables les demandes formées par Mme [I] et Maître [R] à l'égard de M. [J],
- déclaré inopposable à la liquidation judiciaire de M. [J], le paiement du prix versé suite à la vente de l'immeuble sis [Adresse 4] à [Localité 13], cadastré section C n°[Cadastre 1] et [Cadastre 2], aux termes d'un acte authentique reçu par Maître [Y] [R], notaire associé de la société civile professionnelle '[Y] [R], [O] [N], [X] [L], [M] [A], [C] [A] et [F] [D] [U]' le 23 mai 2019, enregistré et publié le 3 juil 2019 au service de la publicité foncière de [Localité 11] sous le numéro de dépot 2019 D10624 volume 2019 P05826,
- condamné Mme [I] à payer à la Selarl Philae, es qualité de liquidateur de M. [J] la somme de 260 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2022,
- condamné Maître [R] à relever intégralement indemne Mme [I] de cette condamnation,
- débouté la Selarl Philae, es qualité de liquidateur de M. [J] de ses demandes à l'égard de Maître [R],
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné in solidum Mme [I] et Maître [E] à payer à la Selarl Philae, es qualité de liquidateur de M. [J], la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Maître [R] à payer à Mme [I] une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum Mme [I] et Maître [R] aux dépens,
- condamné Maître [R] à relever intégralement indemne Mme [I] de sa condamnation aux dépens et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit ;
Vu l'appel interjeté le 19 mars 2024 par M. [R] ;
Vu les conclusions d'incident notifiées le 22 septembre 2025 par lesquelles la Selarl Philae demande au conseiller de la mise en état, sur le fondement des articles 142,138 et 139 du code de procédure civile :
- d'ordonner à Maître [R] de délivrer le justificatif du paiement de la somme de 65 000 euros correspondant à la valeur de l'usufruit revenant à Mme [S] épouse [J] du chef de la répartition du prix de vente de l'immeuble sis [Adresse 6] (Gironde), ladite vente ayant été reçue par le notaire susnommé aux termes d'un acte en date du 29 mai 2019, ledit justificatif faisant apparaître l'identité du bénéficiaire de ce paiement, ainsi que les coordonnées du ou des comptes bancaires au crédit du ou desquels a été viré par sa comptabilité le prix de vente de 325 000 euros, outre l'identité de son ou de ses leurs titulaires,
- de dire que cette production devra intervenir dans un délai de 15 jours à compter de la signification à partie de ladite ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard pendant un délai d'un mois,
- de se réserver la liquidation d'astreinte,
- de condamner Maître [R] au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'incident ;
Vu les conclusions d'incident notifiées le 18 septembre 2025 aux termes desquelles Me [R] demande au conseiller de la mise en état, sur le fondement des articles 138, 139, 142, 698, 699 et 700 du code de procédure civile de :
- débouter la Selarl Philae de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la Selarl Philae à lui verser une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions d'incident notifiées le 24 septembre 2025 aux termes desquelles la selarl Philae sollicite :
- d'ordonner à Maître [R] de délivrer le justificatif du paiement de la somme de 65 000 euros correspondant à la valeur de l'usufruit revenant à Mme [S] épouse [J] du chef de la répartition du prix de vente de l'immeuble sis [Adresse 5] [Localité 14] (Gironde), ladite vente ayant été reçue par le notaire susnommé aux termes d'un acte en date du 29 mai 2019, ledit justificatif faisant apparaître l'identité du bénéficiaire de ce paiement, ainsi que les coordonnées du ou des comptes bancaires au crédit du ou desquels a été viré par sa comptabilité le prix de vente de 325 000 euros, outre l'identité de son ou de ses titulaires,
- de dire que cette production devra intervenir dans un délai de 15 jours à compter de la signification à partie de ladite ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard pendant un délai d'un mois,
- à titre subsidiaire, ordonner à Me [Y] [R] de délivrer les justificatifs de l'ensemble des virements auxquels il a procédé sur le ou les compte(s) dont M. [B] [J] est titulaire pour procéder au paiement du prix de vente dudit immeuble ainsi que les coordonnées du ou des compte(s) en question,
- de se réserver la liquidation d'astreinte,
- de condamner Maître [R] au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'incident ;
SUR CE :
1. Il convient au préalable de rappeler que le 23 mai 2019, Me [Y] [R], notaire, a reçu un acte de vente émanant de Madame [S], usufruitière, et de Monsieur [J], nu-propriétaire, d'un immeuble sis [Adresse 6] moyennant un prix total de 325 000 euros, au profit de Mme [G] [I].
En raison de l'usufruit de Mme [S], il devait lui revenir la somme de 65 000 € tandis que la valeur de la nue-propriété détenue par son fils, M. [B] [J], s'élevait à 260 000 €.
2. Or, à la date de la vente, ce dernier se trouvait sous le coup d'une procédure de liquidation judiciaire décidée par jugement du tribunal de commerce de Bordeaux le 23 août 2006 et la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (ci-après nommée Selarl) Philae avait été désignée en qualité de liquidateur.
3. C'est dans ces conditions que, s'appuyant sur les dispositions de l'article L. 641-9 du code de commerce édictant le dessaisissement du débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens, la selarl Philae a fait assigner M. [J], Mme [I] et Me [R] devant le tribunal judiciaire de Bordeaux.
4. Ce dernier a déclaré inopposable à la liquidation judiciaire le paiement fait par Mme [I], tenue dès lors de lui verser la somme de 260 000 € correspondant à la valeur de la nue-propriété.
Il a condamné le notaire à la relever indemne de cette condamnation et rejeté le recours qu'il avait formé contre M. [J].
5. Me [R] a interjeté appel et la selarl Philae, qui avait demandé à titre principal le versement à son profit du montant total du prix de vente, soit la somme de 325 000 €, a formé appel incident.
6. Elle soutient qu'il est indispensable de déterminer de manière indiscutable l'identité des bénéficiaires de la somme versée par l'acquéreur et vérifier si celle-ci a bien été répartie entre l'usufruitière et le nu-propriétaire ou si au contraire, elle a été versée en totalité à ce dernier.
Que par conséquent, elle est fondée à exiger du notaire qu'il justifie des fonds versés à l'usufruitière.
7. Me [R] soutient que la demande de communication forcée des justificatifs de virements est infondée. En effet, elle se heurte au secret professionnel des notaires qui est absolu et garanti tant par l'article 23 de la loi du 25 ventôse an XI que par l'article 3.4 du règlement national des notaires. De plus, la Selarl Philae n'a aucune qualité pour réclamer des renseignements concernant le versement de fonds revenant à un tiers à la liquidation. Enfin, sa demande n'est sous tendue par aucun motif légitime.
8. La Selarl Philae affirme pour sa part, que bien que Me [R] soutienne n'avoir versé à M. [J] que la somme de 265 000 euros correspondant à la nue-propriété, la seule pièce versée au débat ne permet pas de le démontrer. Elle sollicite en ce sens la production des documents comptables aux fins de justifier de l'identité du ou des bénéficiaires. Elle réfute l'ensemble des moyens de Me [R]. D'une part, le secret professionnel n'est pas opposable aux parties à l'acte en exécution duquel les paiements ont été faits. D'autre part, Mme [S] étant décédée, M. [J], débiteur, est héritier. Elle ajoute que le dessaisissement résultant de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire concerne les biens dépendant de la succession de Mme [S] et devant revenir à M. [J], de sorte que sa demande est fondée.
Sur ce,
9. Il est certes exact que, comme le soutient la selarl Philae, le notaire ne peut opposer au liquidateur le secret professionnel pour refuser de lui communiquer la consistance des droits détenus par le débiteur en liquidation judiciaire dans une succession ou le justificatif des paiements reçus par ce débiteur à l'occasion d'une vente, mais en revanche, le secret professionnel auquel il est tenu lui interdit de communiquer des éléments concernant des tiers.
Tel était bien le cas de Mme [S].
10. Par ailleurs, s'il est également exact, comme indiqué supra, que le liquidateur peut se faire communiquer la consistance des droits détenus par M. [J] dans la succession de sa mère décédée entre-temps, seul le notaire chargé de la succession est en mesure de le faire, à supposer d'ailleurs que cette communication permette de déterminer si, lors de la vente, Mme [S] a perçu ou non le prix de l'usufruit.
11. Par conséquent, il ne peut être fait droit à la demande principale qui tend à voir ordonner la production des éléments justificatifs de la destination donnée à la part du prix de vente représentant la valeur de l'usufruit dont était titulaire Mme [S].
12. En revanche, dès lors que le liquidateur borne sa demande subsidiaire aux éléments concernant les seuls versements effectués au profit du débiteur dont il est le liquidateur, le notaire ne peut plus lui opposer le secret professionnel et la demande est alors fondée.
13. Il y sera fait droit et une astreinte sera fixée.
Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Déboute la selarl Philae, ès qualités, de sa demande principale;
Faisant droit à sa demande subsidiaire, ordonne à Me [Y] [R] de délivrer les justificatifs de l'ensemble des virements auxquels il a procédé sur les comptes dont M. [B] [J] était titulaire à la suite du paiement du prix de vente de l'immeuble vendu le 23 mai 2019 à Mme [I], en précisant les références de ces comptes, sous astreinte de 20 euros par jour de retard, passé un délai de deux mois à compter de la notification de la présente ordonnance, pendant une durée de deux mois;
Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile;
Condamne Me [Y] [R] aux dépens de l'incident.
Le Greffier, Le Président,