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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 9, 6 novembre 2025, n° 24/12406

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Durand

Conseillers :

Mme Arbellot, Mme Coulibeuf

Avocats :

Me Zaza, Me Boulaire, Me Mendes Gil, Me Lhussier

Juge des contentieux de la protection Lo…

14 décembre 2023

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. [L] [F] et Mme [I] [W] [U] [R] épouse [F] ont conclu avec la société Solution Eco Energie le 5 octobre 2016 un contrat portant acquisition de 28 panneaux photovoltaïques, d'optimiseurs et d'un compteur régulateur, en vue d'une autoconsommation et de la revente du surplus, pour un montant de 30 500 euros et portant sur le raccordement ERDF de leur installation.

Suivant contrat accepté le même jour, la société BNP Paribas Personal Finance sous l'enseigne Cetelem a consenti à M. [F] un prêt d'un montant de 30 500 euros au taux d'intérêts contractuel de 3,83 % l'an remboursable sur une durée de 191 mois en 180 mensualités de 252,64 euros hors assurance, soit un TAEG de 3,90 % visant à financer cet achat.

Les travaux ont été exécutés et facturés et les fonds ont été débloqués par la banque entre les mains de la société Solution Eco Energie.

Par jugement du 19 mai 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la liquidation judiciaire de la société Solution Eco Energie, désignant Maitre [A] [B] en qualité de liquidateur.

Par actes de commissaire de justice en date des 21 et 22 juin 2023, M. et Mme [F] ont fait assigner la société Solution Eco Energie représentée par son liquidateur et la société BNP Paribas Personal Finance devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins notamment de voir prononcer l'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit affecté en raison d' irrégularité formelles et d'un dol, constater la faute de la banque dans le déblocage des fonds, la voir privée de sa créance de restitution et obtenir de sa part le remboursement de tout le capital emprunté ainsi que le paiement de dommages et intérêts.

Par jugement réputé contradictoire en date du 14 décembre 2023, le juge des contentieux de la protection a :

- déclaré recevables les demandes formées par M. et Mme [F],

- prononcé la nullité du contrat n° 3913 conclu le 5 octobre 2016 entre M. et Mme [M] [K] et la société Solution Eco Energie,

- prononcé la nullité du contrat de crédit conclu le 5 octobre 2016 entre la BNP Paribas Personal Finance et M. [F],

- dit que M. et Mme [F] disposaient d'une créance à l'encontre de la société Solution Eco Energie prise en la personne de son liquidateur Me [B] d'un montant de 30 500 euros,

- dit qu'il appartenait à la société Solution Eco Energie prise en la personne son liquidateur Me [B] de procéder à la dépose du matériel objet du contrat n° 3913 en date du 5 octobre 2016,

- dit qu'à compter de la clôture de la procédure collective de la société Solution Eco Energie si la dépose du matériel n'avait pas été effectuée, M. et Mme [F] pourront en disposer,

- condamné M. et Mme [F] à verser à la société BNP Paribas Personal Finance en quittance ou deniers une somme de 30 500 euros,

- condamné la BNP Paribas Personal Finance à verser à M. et Mme [F] une somme de 17 463,49 euros arrêtés au 7 juillet 2023,

- ordonné la compensation entre les créances réciproques,

- mis les dépens à la charge de la société solution Eco énergie prise en la personne de son liquidateur judiciaire Me [B],

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

- rejeté les demandes pour le surplus.

Le premier juge a d'abord estimé que l'action en nullité fondée sur le dol était prescrite au motif que le bon de commande fourni ne comportait aucun engagement contractuel concernant la rentabilité de l'installation vendue, que la question de la recevabilité ne constituait pas un élément essentiel du contrat et que, dès lors qu'aucun rendement n'avait été promis aux débiteurs lors de la conclusion du contrat, les consorts [F] ne pouvaient soutenir avoir découvert par la réception de la première facture de rachat de l'électricité produite que le rendement réel de l'installation n'était pas aussi élevé que celui espéré.

S'agissant des irrégularités formelles invoquées, il a rappelé que l'action se prescrivait en cinq ans et que le point de départ du délai de prescription était la date de signature du contrat, que le bon de commande reproduisait de façon parfaitement lisible les articles du code de la consommation, qu'ainsi le contrat était prescrit sur la majorité des points litigieux puisque le délai avait commencé à courir à compter de la date de conclusion du contrat, sauf en ce qui concerne les modalités d'exercice du droit de rétractation et le recours au médiateur à la consommation qui n'apparaissent pas sur le bon de commande et dont il n'était pas indiqué que leur défaut conduisait à la nullité du contrat.

Il a estimé que les consommateurs avaient été induits en erreur sur ces deux points par le contenu du bon de commande et que le délai avait donc commencé à courir pour ces deux points au jour de l'action.

Il a également considéré que l'action en nullité du contrat de crédit affecté qui reposait de façon consubstantielle sur l'action en nullité du contrat de vente, était donc recevable.

Il a ensuite indiqué sur le fond que le bon de commande signé par les consorts [F] prévoyait que le consommateur puisse faire valoir son droit de rétractation dans les 14 jours à compter de la commande ou de l'engagement d'achat et comportait la reproduction des articles L. 121-23 et suivants du code de la consommation, abrogés en réalité par ordonnance du 14 mars 2016.

Il a ajouté que selon les articles en vigueur au jour de la conclusion du contrat, le bon de commande devait en réalité mentionner un délai de 14 jours de rétractation courant à compter du jour de la conclusion du contrat pour les contrats de prestation de services et pour les contrats de vente du jour où l'acheteur prend possession du bien. Il a également considéré qu'aucune mention n'était faite sur la possibilité offerte aux consommateurs de saisir le médiateur pas plus que ne figuraient ses coordonnées. Il en a conclu à la nullité du bon de commande et donc à la nullité du contrat de crédit affecté.

Il a considéré que les articles du code de la consommation stipulés au contrat reprenaient les anciennes dispositions du code qui différaient du droit en vigueur au jour de la conclusion du contrat, que par ailleurs que ni les stipulations du bon de commande ni la reproduction des dispositions législatives antérieures à la réforme du 14 mars 2016 ne rappelaient la possibilité offerte au consommateur de saisir un médiateur de la consommation.

Il a estimé que le consommateur n'avait pas été mis en mesure de prendre conscience des causes de nullité et de leurs sanctions prévues par la loi et que celles-ci n'avaient pu être couvertes par l'absence de rétractation du consommateur dans le délai légal, la signature sans réserve du procès-verbal de livraison et le paiement des premières mensualités de crédit.

Il a ensuite relevé aucune faute ne saurait être reprochée à l'organisme prêteur en ce qui concerne les conditions de la libération des fonds après établissement de la fiche de réception des travaux dès lors qu'il n'est pas démontré que l'installation n'était pas complète et qu'aucun dysfonctionnement des panneaux photovoltaïques n'était démontré.

En revanche il a retenu que le prêteur avait manqué à son devoir de conseil en s'abstenant de signaler aux emprunteurs les causes de nullité formelle entachant le contrat principal qui leur auraient permis d'exercer leur droit de rétractation dans les délais impartis de sorte qu'aucun paiement ni aucune installation n'auraient été effectués.

Il a ajouté que l'annulation du contrat principal emportait pour la société venderesse l'obligation d'une part de reprendre les installations effectuées en vertu du contrat annulé et d'autre part de restituer les sommes perçues à titre de paiement, que la procédure de liquidation judiciaire n'étant pas clôturée l'une ou les autres de ces obligations seraient peut-être exécutés et qu'en tout état de cause le dysfonctionnement de l'installation n'étant pas démontré aucun préjudice ne subsisterait même en cas d'inexécution des obligations de restitution.

Il a donc noté qu'en l'absence d'un préjudice actuel et certain en lien avec la faute commise par le prêteur il y avait lieu d'ordonner la restitution par chacune des parties des prestations exécutées et la compensation entre les créances réciproques.

S'agissant de la demande en paiement de dommages et intérêts pour préjudice moral, il a retenu que les époux [F] ne démontraient ni l'existence du fait générateur de responsabilité ni le préjudice subi de sorte qu'il convenait donc de les débouter de leurs demandes.

Par déclaration du 5 juillet 2024, M. et Mme [F] ont formé appel de ce jugement.

Par ses dernières conclusions signifiées par RPVA le 20 mars 2025, ils demandent à la cour :

- de déclarer irrecevables les demandes formulées par la société BNP Paribas Personal Financent tendant à l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré recevables les demandes formées par eux, en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat conclu le 5 octobre 2016 entre la société Solution Eco Energie et eux, en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat conclu le 5 octobre 2016 entre la société BNP Paribas Personal finance et eux, en ce qu'il a dit qu'il appartenait à la société Solution Eco Energie prise en la personne de son liquidateur de procéder à la dépose du matériel objet du contrat en date du 5 octobre 2016, en ce qu'il a dit qu'à compter de la clôture de la procédure collective de la société Solution Eco Energie si la dépose du matériel n'avait pas effectué, ils pourraient en disposer,

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a condamnés à payer à la société BNP Paribas Personal Finance en quittance ou deniers la somme de 30 500 euros, en ce qu'il a condamné la société BNP Paribas Personal Finance à leur verser la seule somme de 17 463,49 euros, en ce qu'il a ordonné la compensation entre les créances réciproques, en ce qu'il a mis les dépens à la charge de la société Solution Eco Energie prise en la personne de son liquidateur judiciaire, en ce qu'il a dit qu'il n'y avait lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a rejeté les demandes pour le surplus,

statuant à nouveau et y ajoutant,

- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à procéder au remboursement de l'ensemble des sommes versées par eux au titre de l'exécution normale du contrat de prêt litigieux à savoir la somme de 30 500 euros correspondant à l'intégralité du prix de vente de l'installation et la somme de 17 463,49 euros arrêtée au 7 juillet 2023, correspondant au montant des intérêts conventionnels et frais payés par eux en exécution du prêt souscrit,

- en tout état de cause, de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à leur payer les sommes de 5 000 euros au titre du préjudice moral et de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- en tout état de cause, de débouter la société BNP Paribas Personal Finance de l'intégralité de ses prétentions, fins et conclusions contraires,

- de condamner la société BNP Paribas Personal Finance à supporter les dépens de l'instance.

Ils soulignent tout d'abord que les demandes formées par la société BNP Paribas Personal Finance tendant à l'irrecevabilité de leurs demandes au motif qu'elles seraient atteintes par la prescription, sont irrecevables puisque la société venderesse n'a pas été attraite dans la cause, qu'il appartenait à la banque de l'assigner en intervention forcée, ce qu'elle n'a pas fait.

Ils font valoir par ailleurs qu'il résulte clairement de l'article 2224 du code civil que le point de départ de la prescription quinquennale extinctive de droit commun n'est pas fixé au jour des faits susceptibles de fonder une action en justice mais que par principe ce point de départ doit être reporté à la date à laquelle le titulaire du droit d'agir les a connus ou aurait dû les connaître, la loi présumant que le justiciable a nécessairement et légitimement ignoré les faits qui lui permettent d'agir.

Ils en déduisent que le point de départ ne peut être que le moment où le titulaire du droit d'agir a eu effectivement connaissance non seulement du préjudice subi et ce dans toute son ampleur, ou de son aggravation, mais encore de surcroît du fait générateur de responsabilité. Ils se prévalent à cet égard d'une consultation des Professeurs [V] [J] et [Z] [O].

Ils soutiennent qu'en tant que consommateurs ils ne pouvaient identifier les irrégularités que le contrat litigieux pouvait enfermer, qu'ils ont légitimement ignoré les faits leur permettant d'agir et ce n'est que lorsqu'ils ont saisi un avocat que leur attention a été attirée à cet égard ; ils soulignent que les irrégularités affectant le contrat résultant d'une mention obligatoire absente on ne pouvait considérer que le consommateur serait en faute de ne pas les avoir détectées lors de la signature puisque cela ne peut résulter de la seule lecture de l'acte mais seulement d'une analyse approfondie de celui-ci à la seule portée d'un professionnel.

Ils soulignent que dès lors que la Cour de cassation reconnaît que la reproduction des articles relatifs à la nullité ne suffit pas à permettre au consommateur de connaître les causes de nullité affectant l'acte et de le confirmer, le même raisonnement doit être retenu en ce qui concerne le point de départ de la prescription ; ils considèrent donc comme le disent les professeurs [J] et [O] que le fait même que la banque ait l'obligation de vérifier la régularité du bon de commande et le cas échéant d'informer et d'alerter le consommateur avant le déblocage des fonds quant à la présence d'une irrégularité n'a de sens que dans un système où l'ignorance légitime du consommateur est présumée.

Ils ajoutent qu'en l'absence de démonstration par la banque, demanderesse à la fin de non-recevoir, d'une quelconque preuve de l'information portée à leur connaissance quant aux nullités du bon de commande et qui ne constituerait pas une simple reproduction des articles du code de la consommation sur le bon de commande, la banque échoue à démontrer qu'ils avaient nécessairement connaissance des vices au jour de la signature du bon de commande.

Ils soutiennent par ailleurs que la banque a commis une faute dans le déblocage des fonds dans le cadre d'un crédit affecté, engageant sa responsabilité envers eux alors qu'à la simple lecture du contrat la banque aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation sur le démarchage à domicile ou à la vente hors établissement.

Ils estiment que le bon de commande comportait des irrégularités formelles qui auraient dû conduire la banque à ne pas libérer les fonds entre les mains de la société venderesse avant de s'être assurée qu'ils étaient parfaitement informés concernant l'absence de validité du contrat principal.

Ils ajoutent que le banquier a l'obligation de vérifier la régularité du bon de commande et qu'il commet une faute en ne le faisant pas, qu'il aurait donc dû refuser de financer cette vente, que la banque, qui débloque les fonds entre les mains du fournisseur de manière inconsidérée et sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle et l'exécution complète du contrat principal, a commis des fautes qui doivent la priver du droit d'obtenir le remboursement du capital emprunté.

Ils considèrent que ces fautes doivent priver la banque de sa créance de restitution à titre de sanction soit la somme de 30 500 euros correspondant au prix de l'installation mais aussi qu'elles doivent conduire à les dédommager des frais bancaires engagés à hauteur de 14 936,20 euros.

Ils contestent ne subir aucun préjudice alors qu'en finançant le bon de commande, la banque les a empêchés de bénéficier d'une information complète et éclairée quant aux caractéristiques de leur installation qu'elles concernent le matériel ou les capacités de production de celle-ci et qu'ainsi ils se trouvent enfermés dans une opération contractuelle dont ils ne peuvent s'extraire et sans avoir pu bénéficier de la protection obligatoire de la banque qui aurait pu leur éviter les tracas du remboursement d'un emprunt ruineux.

Ils font également état de leur préjudice lié à la liquidation judiciaire de la société Solution Eco Energie empêchant la banque de solliciter auprès d'elle cette restitution, ce qui entraine l'obligation de remboursement pour eux en raison de l'annulation du contrat principal et du crédit affecté et de l'impossibilité de garantir ce remboursement par la société venderesse placée en liquidation judiciaire.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 janvier 2025, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour :

- d'infirmer le jugement du 14 décembre 2023 en ce qu'il a déclaré recevable les demandes formées par les époux [F], en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat n°3913 conclu le 5 octobre 2016 entre les époux [F] et la société Solution Eco Energie, en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de crédit conclu le 5 octobre 2016 entre les époux [F] et elle, en ce qu'il a dit que les époux [F] disposent d'une créance à l'encontre de la société Solution Eco Energie prise en la personne de son liquidateur Me [B] d'un montant de 30'500 euros, en ce qu'il a dit qu'il appartient à la société Solution Eco Energie prise en la personne de son liquidateur Me [B] de procéder à la dépose du matériel objet du contrat n° 3913 en date du 5 octobre 2016, en ce qu'il a dit qu'à compter de la clôture de la procédure collective de la société Solution Eco Energie si la dépose du matériel n'a pas été effectuée les époux [F] pourront en disposer, en ce qu'il a condamné les époux [F] à lui verser en deniers ou quittances une somme de 30 500 euros, en ce qu'il a condamné à verser à M. et Mme [F] la seule somme de 17 463,49 euros arrêtée au 7 juillet 2023, en ce qu'il a ordonné la compensation entre les créances réciproques, en ce qu'il a mis les dépens à la charge de la société Solution Eco Energie prise en la personne de son liquidateur Me [B] et en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

en conséquence,

à titre principal :

- de déclarer irrecevables l'action et l'ensemble des demandes formées par M. et Mme [F] au vu de la prescription quinquennale et de rejeter toutes autres demandes dont le bien-fondé dépend de celles prescrites,

- à défaut, de déclarer irrecevable leur demande en nullité du contrat conclu avec la société Solution Eco Energie, de déclarer, par voie de conséquence, irrecevable sa demande en nullité du contrat de crédit conclu avec elle et sa demande en restitution des sommes réglées ; à tout le moins de rejeter ces demandes comme infondées,

- en tout état de cause, de déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [F] visant à la privation de sa créance, à tout le moins de les débouter de leurs demandes, de déclarer irrecevable la demande du couple [F] visant à sa condamnation à des dommages-intérêts et à tout le moins de les en débouter,

- en tout état de cause, de constater que le couple [F] est défaillant dans le remboursement du crédit, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit du fait des impayés avec effet au 7 janvier 2024 et de condamner solidairement M. Mme [F] à lui régler la somme de 21 996,55 euros avec intérêts au contrat au taux contractuel de 3,83 % l'an à compter du 7 janvier 2024 sur la somme de 20 555,52 euros et au taux légal pour le surplus, subsidiairement de condamner M. et Mme [F] à lui régler les mensualités échues impayées au jour où la cour statue outre la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire et lui enjoindre de reprendre le remboursement des mensualités à peine de déchéance du terme,

- subsidiairement en cas de nullité des contrats,'de déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [F] visant à être déchargés de l'obligation de restituer le capital prêté, à tout le moins de les en débouter et de les condamner en conséquence solidairement à lui régler la somme de 30 500 euros en restitution du capital prêté,

- très subsidiairement, de limiter la réparation qui serait due par elle eut égard au préjudice effectivement subi par les emprunteurs eu égard au préjudice effectivement subi par eux et eu égard à leur faute ayant concouru à leur propre préjudice, de limiter, en conséquence, la décharge à concurrence du préjudice subi à charge pour M. et Mme [F] d'en justifier et de limiter, en cas de réparation par voie de dommages-intérêts, la réparation à hauteur du préjudice subi et de dire et juger qu'ils restent tenus de restituer l'entier capital à hauteur de 30 500 euros,

- à titre infiniment subsidiaire, si la cour devait prononcer la nullité des contrats et ordonner la restitution du capital prêté à charge de l'emprunteur, de condamner M. et Mme bien fondée à lui verser une somme de 30 500 euros de dommages-intérêts à raison de leur légèreté blâmable, d'enjoindre M. Mme qui tendait de restituer, à leurs frais, le matériel installé chez eux à Maître [A] [B], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Solution Economie Energie, dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt, ainsi que les revenus perçus au titre de la revente d'électricité, de dire et juger qu'à défaut de restitution, ils resteront tenus du remboursement du capital prêté,

- de débouter M. et Mme [F] de toutes autres demandes, fins et conclusions,

- d'ordonner le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence,

- de condamner M. et Mme [F] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes Gil.

Au soutien de ses prétentions, la banque oppose la prescription et se prévaut des dispositions des articles 2224 du code civil et L. 110-4 du code du commerce et fait valoir que les règles de prescription reposent sur le principe selon lequel « nul n'est censé ignorer la loi » et qu'ainsi tout justiciable est censé connaître la loi, et donc la règle applicable, de sorte que seule la découverte ultérieure de faits allégués à l'appui de la règle de droit peut décaler le point de départ du délai de prescription, et ce encore sous la réserve que l'on ne puisse considérer que le requérant aurait dû connaître lesdits faits.

Elle ajoute que la réforme de la prescription a entendu réduire et unifier le délai de prescription à 5 ans dans un but de sécurité juridique. Elle relève que l'action repose sur le non-respect de la réglementation sur la régularité formelle du contrat conclu hors établissement, réglementation qui est d'origine purement interne et ne résulte de la transposition d'aucune directive.

Elle considère que les irrégularités alléguées, et donc le fait à l'appui de l'action en nullité, étaient décelables dès la signature du bon de commande, peu important que le bon de commande comportait ou non la reproduction des dispositions du code de la consommation puisque le requérant est censé connaître la réglementation, que la jurisprudence relative à la confirmation d'un contrat nul n'est pas applicable puisqu'il s'agit de deux fondements juridiques bien distincts. Elle ajoute que dès la signature du contrat l'emprunteur était en mesure de vérifier la régularité du contrat et donc de faire valoir des irrégularités, que la jurisprudence sur le TAEG n'est pas transposable puisque l'omission de la mention n'est pas dissimulée et donc parfaitement décelable.

S'agissant de l'action en nullité pour dol, elle relève qu'en application de l'article 1304 du code civil dans sa version applicable au litige, le point de départ de la prescription peut être reporté au jour de la découverte des man'uvres ou de l'erreur mais souligne que l'emprunteur ne justifie nullement qu'il aurait découvert des éléments à même de caractériser une erreur postérieurement à la souscription des contrats. que la copie du bon de commande ne fait état d'aucune garantie de revenus ou d'autofinancement de même que toutes les autres pièces contractuelles produites par le couple, qu'il est nullement démontré les promesses alléguées et donc il ne peut être soutenu avoir découvert par la suite une différence de rentabilité avec la promesse faite, que l'installation est fonctionnelle, aucune expertise n'étant versée sur ce point et qu'au demeurant l'étude de rentabilité ne peut être opérée que sur la durée de vie complète de l'installation qui excède largement la durée de remboursement du crédit.

Elle précise que de surcroit les époux [F] ne justifient pas avoir jamais émis une contestation à réception des factures de revente d'électricité et que dès le raccordement ils avaient connaissance de la quantité d'électricité produite au vu du chiffre figurant sur le compteur.

Elle ajoute qu'en l'absence de nullité du contrat principal, le contrat de crédit est maintenu.

Elle rappelle que l'action en responsabilité initiée à l'encontre de la banque n'étant que la conséquence de l'action en nullité du bon de commande, l'irrecevabilité de la demande de nullité des contrats entraîne, par voie de conséquence, l'irrecevabilité de la demande formée par l'acquéreur-emprunteur visant à la privation de la créance de restitution de la banque.

Elle fait valoir que le préjudice qui résulterait d'un déblocage fautif des fonds prêtés alors que la prestation était inachevée se manifeste immédiatement à la date du déblocage de sorte qu'il n'y a pas matière à reporter le point de départ du délai de prescription, que le couple [F] ne justifie pas d'un préjudice résultant d'une irrégularité purement formelle du bon'et ce alors qu'il a poursuivi l'exécution des contrats pendant plusieurs années.

Elle indique que le déblocage étant intervenu le 25 octobre 2016 et l'assignation ayant été signifiée le 27 février 2023, l'action est prescrite ; elle ajoute que n'est en cause aucun texte issu d'une Directive Européenne et qu'il s'agit de l'application de règles de droit purement internes en matière de prescription de l'action en responsabilité contractuelle et rappelle que le législateur a en 2008 souhaité instaurer un délai unifié de prescription raccourci à 5 ans, afin d'éviter de remettre en cause la sécurité juridique des relations établies. Elle considère en outre qu'il n'y a pas d'inégalité en la défaveur du consommateur emprunteur, la banque devant agir dans un délai de 2 ans tandis que l'emprunteur dispose d'un délai de 5 ans.

Elle soulève l'irrecevabilité des demandes ou leur caractère non-fondé se fondant sur les dispositions de l'article 1103 du code civil qui prévoient une remise en cause exceptionnelle des contrats et sans mauvaise foi et soutient qu'est de mauvaise foi la partie qui tend à détourner une cause de nullité de son objet ou de sa finalité à seule fin de remettre en cause le contrat tout en sachant qu'en réalité elle conservera le bien acquis du fait de l'impossibilité matérielle pour l'autre de la récupérer.

Elle conteste également toute irrégularité formelle du contrat de vente et fait valoir que seule l'omission de la mention prévue par le texte pourrait, le cas échéant, conduire à la nullité, et non sa seule imprécision, qui ne peut conduire qu'à une action en responsabilité.

Elle ajoute que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal le point de départ du délai de rétractation court à compter de la signature du bon de commande et non à compter de la réception de la prestation s'agissant d'une opération dite complexe.

S'agissant de la mention relative à la possibilité de recourir à un médiateur à la consommation, soit disant absente selon le premier juge, il souligne qu'elle figure bien au contrat.

Elle ajoute que en tout état de cause les éventuelles nullités formelles n'ont généré aucun préjudice pour M. et Mme [F] et qu'elles ont de surcroît été couvertes par une exécution volontaire (installation/réception des panneaux, remboursement des échéances) et une volonté de conserver le matériel et de l'utiliser.

En l'absence d'annulation du contrat principal, elle indique que le contrat de crédit ne peut être annulé.

Subsidiairement elle indique que l'annulation du contrat obligerait les emprunteurs à lui restituer le capital prêté, la demande visant à la priver sa créance étant déclarée irrecevable en raison de la poursuite de l'exécution du contrat et donc du renoncement du couple à opposer tout moyen de contestation.

Elle conteste toute obligation de contrôler la validité du bon de commande, toute faute dans la vérification du bon de commande puisqu'elle n'a fait qu'exécuter un ordre de paiement donné par son mandant ou dans l'exécution de la prestation qui ne lui incombe pas ou dans le déblocage des fonds puisqu'elle l'a fait sur la base d'une attestation de fin de travaux.

Elle souligne que dès lors qu'il n'est pas contesté que l'installation est entièrement achevée, raccordée, et fonctionnelle, M. et Mme [F] revendant de l'électricité, elle devait nécessairement débloquer les fonds et n'a donc pas commis de faute. Elle ajoute que toutes les demandes des emprunteurs à son encontre sont vaines dès lors que les intéressés ne justifient pas du moindre préjudice ni d'un lien causal entre celui-ci et un fait imputable à la banque.

Elle indique que l'évaluation d'un éventuel préjudice doit prendre en compte la valeur du bien parfaitement fonctionnel que les acquéreurs conserveront du fait de la liquidation judiciaire du vendeur et souligne qu'en cas d'annulation ils bénéficient d'ores et déjà, en cas de nullité, de l'exonération du paiement des intérêts. Elle conteste tout lien de causalité entre la liquidation judiciaire du vendeur et les fautes qui lui sont imputables. Elle ajoute que le seul constat d'une procédure collective va conduire les acquéreurs à rester en possession du bien et qu'ils ont d'ores et déjà perçu des revenus.

Elle fait valoir qu'il conviendrait de prendre en compte la légèreté blâmable avec laquelle l'emprunteur a signé l'attestation de fin de travaux qui constitue une faute occasionnant un préjudice correspondant au capital prêté dont elle serait privée. Elle ajoute que l'acquéreur ne peut à la fois solliciter une décharge complète et l'octroi de dommages et intérêts ce qui aboutirait à l'indemniser plusieurs fois d'un même préjudice. Elle conteste toute perte de chance.

La déclaration d'appel, les premières conclusions des appelants et les premières conclusions de l'intimée ont été signifiées à Maitre [A] [B] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Solution Eco Energie par acte du 3 janvier 2025 délivré à domicile.

Elle n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 03 juin 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 9 septembre 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour constate :

- que le contrat de vente conclu le 5 octobre 2016 est soumis aux dispositions des articles L. 111-1 et suivants dans leur rédaction issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation dès lors qu'ils ont été conclus dans le cadre d'un démarchage à domicile,

- que le contrat de crédit affecté conclu le même jour est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu'il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,

- qu'il convient de faire application des dispositions du code civil en leur version postérieure à l'entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.

Selon l'article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s'il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Sur la recevabilité des demandes

Sur le fondement de l'absence du vendeur dans la cause

Contrairement à ce que soutiennent M. et Mme [F], Maitre [B] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Solution Eco Energie a été attraite devant la cour d'appel par la société BNP Paribas Personal Finance par acte de commissaire de justice du 3 janvier 2025.

La demande tendant à l'irrecevabilité des demandes de la banque doit donc être rejetée.

Sur le fondement de la prescription

Selon l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

En application de l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

En l'espèce, le contrat dont l'annulation est demandée a été conclu le 5 octobre 2016 comme d'ailleurs le contrat de crédit et M. et Mme [F] ont engagé l'instance par des assignations délivrées les 21 et 22 juin 2023. Il est constant qu'en matière de prescription, il résulte des articles 2228 et 2229 du code civil que la prescription est acquise lorsque le dernier jour du terme est accompli.

Toute l'argumentation de M. et Mme [F] qui se gardent d'ailleurs de donner une date concrète de point de départ de la prescription qui pourrait leur être opposée, vise en fait à voir repousser le point de départ du délai de prescription de leur action en nullité formelle du contrat à la date à laquelle ils ont pu avoir connaissance effective des conséquences juridiques des irrégularités de pure forme. Les suivre dans cette voie reviendrait en réalité à écarter tout délai de prescription hormis le délai butoir de l'article 2232 du code civil's'agissant de cette action en nullité purement formelle puisque seule la date à laquelle ils l' invoquent pourrait alors être retenue comme point de départ de la prescription.

En l'espèce le fait permettant d'agir en nullité est l'absence des mentions obligatoires sur le bon de commande et c'est donc la date de signature de ce bon de commande qui doit être retenue comme point de départ de prescription puisque cette absence y était parfaitement visible, et non la connaissance juridique des conséquences de cette absence.

La jurisprudence de la Cour de cassation relative aux erreurs commises en matière de taux effectif global, selon laquelle le point de départ de la prescription quinquennale doit être reporté lorsque l'erreur n'était pas décelable lors de la conclusion du contrat, ne peut s'appliquer puisque précisément, en l'espèce, M. et Mme [F] étaient en mesure de constater dès ce moment que ne figuraient pas les mentions dont ils déplorent l'omission, c'est à dire la mention sur le recours au médiateur de la consommation car contrairement à ce qui a été jugé en première instance c'est à la date où l'irrégularité, en l'espèce l'omission, est apparente que débute le délai de prescription.

Les appelants ne peuvent à la fois soutenir que la reproduction d'articles erronés quant aux possibles nullités du contrat les a induits en erreur tout en se prévalant de la jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle la reproduction de ces articles n'est pas de nature à les éclairer suffisamment sur la nature des nullités. En effet on ne peut prétendre tout et son contraire et dès lors qu'il est désormais admis que le consommateur, béotien en droit, n'a pas la capacité de comprendre la portée de ces articles, le fait qu'ils soient reproduits fut-ce de manière erronée ne peut avoir eu comme conséquence de les tromper.

La jurisprudence relative à la confirmation du contrat n'est pas non plus transposable à la prescription, le mécanisme de la prescription et celui de la confirmation étant différents et répondant également à des objectifs différents.

'En effet la prescription répond à une exigence de sécurité juridique et a pour but d'éviter la remise en cause d'un contrat dans un temps raisonnable, étant relevé que la réforme de la prescription de 2008 a précisément entendu réduire ce temps à cinq ans pour accroître la sécurité juridique. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, le régime de la prescription n'est aucunement fondé sur le fait qu'ils aient eux-mêmes commis une faute mais sur l'écoulement du temps. Permettre une action sur le fondement d'une nullité formelle alors même que le contrat est en cours depuis beaucoup plus longtemps, que le matériel a été utilisé pendant une très longue durée et pourrait avoir de fait pratiquement épuisé sa valeur, voire que certaines des dispositions érigées en causes de nullités formelles pourraient ne plus avoir la moindre utilité faute de pouvoir encore être invoquées (garanties) sans que ceci puisse être opposé puisque le propre des nullités formelles est de n'exiger aucun préjudice en lien et d'avoir un caractère purement automatique, revient à supprimer toute sécurité juridique.

De plus, considérer comme il est finalement soutenu que l'ignorance des textes permet de repousser indéfiniment le point de départ de la prescription d'une action en nullité, revient à supprimer la prescription quinquennale de ce type d'action en nullité purement formelle, et ce alors même que la prescription d'une nullité pour dol ou pour erreur serait bien plus courte et effective puisque c'est au jour de la découverte du dol ou de l'erreur (et non du fait que le dol ou l'erreur sont en droit des causes de nullité) que commence le délai de prescription. Or le dol et l'erreur impliquent une appréciation et ne permettent pas une nullité automatique et suivre ce raisonnement confèrerait donc à l'action en nullité purement formelle quelle que soit sa gravité, une automaticité et une longévité que n'aurait pas l'action en nullité pour vice du consentement.

Les seuls cas d'exclusion de prescription résultent soit de situations d'incapacité telles la tutelle ou la minorité qui empêchent la partie concernée d'exercer ses droits dans le délai imparti mais le fait de ne pas être juriste n'est pas une cause d'exclusion, soit de l'extrême gravité des faits poursuivis ce à quoi une nullité formelle, fût-elle prévue par le code de la consommation, ne peut en aucun cas être assimilée.

La cour relève en outre que s'il a pu être jugé dans le cadre du mécanisme de confirmation des contrats que les acheteurs pouvaient légitimement ignorer les vices du contrat c'est-à-dire concrètement le régime juridique des nullités, c'est que ce mécanisme répond à des exigences différentes puisqu'il consiste à tirer des conséquences du comportement du consommateur pour en déduire une volonté dont on peut donc légitimement exiger qu'elle soit particulièrement éclairée. La prescription ne résulte pas d'une volonté supposée des parties mais de l'écoulement du temps au-delà duquel les engagements ne peuvent pas être remis en cause.

Il ne résulte pas de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne que le principe d'effectivité doive être interprété en ce sens qu'il impose à une juridiction nationale d'écarter les règles de prescription internes ou d'interdire le principe même de la prescription. Le principe d'effectivité doit permettre au consommateur d'avoir un temps suffisant. Il doit donc aussi être apprécié à l'aune de la durée de prescription prévue par les textes.

Les dispositions de droit interne relatives à la prescription sont ainsi conformes aux principes européens d'effectivité des droits, notamment ceux du consommateur, dans la mesure où il est prévu que le délai ne commence à courir à l'encontre du titulaire d'un droit qu'à partir du moment où il se trouve en possession des éléments lui permettant d'évaluer sa situation au regard de ses droits, et qu'est aménagé un délai suffisamment long pour lui permettre de les mettre en 'uvre ce qui est clairement le cas d'un délai de cinq ans. En l'espèce, M. [E] disposait du bon de commande dès sa signature et l'absence de mentions qu'il dénonce n'était pas dissimulée.

A titre superfétatoire, il convient de relever que ce délai n'emporte aucune atteinte au principe d'égalité des armes vis-à-vis de la banque, dès lors que les obligations dont l'emprunteur est créancier à l'égard du banquier dispensateur de crédit s'éteignent par la mise à disposition des fonds prêtés, alors que celles de l'emprunteur s'échelonnent pendant toute la durée de leur amortissement et qu'elles ne font pas obstacle à la faculté offerte au consommateur d'opposer ces mêmes droits au prêteur, par voie d'exception, pendant toute la durée de la relation contractuelle, étant observé que les obligations des parties à un contrat de crédit ne sont pas identiques, le versement des fonds par l'établissement bancaire étant une obligation à exécution instantanée, alors que le remboursement des mensualités par l'emprunteur est une obligation à exécution successive de sorte que le régime de la prescription est nécessairement différencié. Cette absence d'atteinte au principe d'égalité des armes est patente dans la mesure où les dispositions des articles L. 311-52 du code de la consommation reprises à l'article R. 312-35 prévoient un délai de prescription abrégé de deux années pour les actions en paiement engagées par le prêteur à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur soit un délai plus de deux fois plus court que celui prévu à l'article 2224 du code civil.

Plus de cinq années s'étant écoulées entre la date de signature du contrat et celle de l'action en nullité formelle qui n'était donc recevable que jusqu'au 4 octobre 2021 inclus, cette action est prescrite et M. et Mme [F] sont irrecevables à solliciter l'annulation du contrat sur le fondement des articles L. 111-1 et suivants du code de la consommation.

Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a considéré que cette demande de nullité formelle était recevable ; elle sera déclarée prescrite.

S'agissant de la demande en nullité pour dol, commis par le vendeur ou la banque c'est à la date à laquelle le dol a été découvert et non là encore à la date à laquelle il a pu avoir connaissance de ses conséquences juridiques à savoir le fait que le dol est en droit une cause de nullité du contrat, que doit être fixée le point du délai du délai de prescription. Dès lors que M. et Mme [F] invoquent des man'uvres et tromperies destinées à leur faire croire que l'installation serait autofinancée et rentable financièrement, le point de départ de la prescription doit être fixée à la date de la première facture de revente, c'est à dire au 31 juillet 2018.

Leur action n'est donc pas prescrite, cette première facture datant de moins de cinq ans avant l'introduction de leur action en nullité en juin 2023. Le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a considéré que cette demande était prescrite.

Sur les demandes relatives à la faute de la banque dans le déblocage des fonds, le fait générateur est celui du déblocage des fonds soit le 4 novembre 2016 et il s'est écoulé plus de cinq ans avant la demande en justice et l'action pour faute dans le déblocage des fonds est en conséquence irrecevable comme prescrite.

Sur le fondement des articles 1103 et 1104 du code civil

La société BNP Paribas Personal Finance se fonde également sur ces articles pour invoquer le caractère irrecevable et à tout le moins infondé de la demande de nullité des contrats, faisant état du caractère exceptionnel de la remise en cause d'un contrat par une partie qui ne doit pas agir de mauvaise foi.

Ce faisant, elle n'explique pas en quoi le non-respect des dispositions de ces articles viendrait fonder une irrecevabilité des demandes formulées.

Si elle sollicite que des prétentions de M. et Mme [F] soient déclarées 'irrecevables' force est de constater qu'elle ne soulève en réalité aucune autre fin de non-recevoir ou exception de procédure à l'appui, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette prétention au-delà de l'examen de la contestation élevée par la banque sur le fond.

Il s'ensuit qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef.

Sur la demande de nullité pour dol

Selon l'article 1130 du code civil, dans sa rédaction applicable aux contrats, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.

Aux termes de l'article 1131 du même code, les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.

L'article 1137 du même code définit le dol par le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges ou encore par dissimulation intentionnelle par l'un des cocontractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre.

Le dol ne se présume pas et doit être prouvé.

En l'espèce, le contrat versé aux débats ne comporte aucun engagement d'autofinancement ou de revenus.

M. et Mme [F] produisent une expertise réalisée par « le Pôle Expert Nord Est, expertise mathématique et financière, conseil en économie des coûts de financement ». Outre que ce rapport n'a aucun caractère contradictoire, qu'il est établi par une personne non identifiée dont les qualifications ne sont ni mentionnées ni justifiées et procède à des calculs de rentabilité financière à partir de données de production solaire dont l'exactitude ne peut avoir été débattue et la source est inconnue, le rédacteur du rapport prend pour acquis qu'il y aurait eu une promesse d'autofinancement, ce qui est faux.

Les prétentions des appelants relatives à un dol ayant été déterminant de leur engagement doivent donc être rejetées.

Le contrat de crédit n'étant pas annulé, le contrat de crédit ne saurait l'être de plein droit sur le fondement de l'article L. 312-55 du code de la consommation.

Sur la responsabilité de la banque

Si M. [F] invoque une faute de la société BNP Paribas Personal Finance pour avoir consenti un crédit accessoire à un contrat nul, les motifs qui précèdent rendent sans objet ce grief dès lors que la demande d'annulation formelle est prescrite. Il en est de même de la participation alléguée de la banque au dol non prouvé commis par la société venderesse.

Il soutient également que la banque a commis une faute dans la libération des fonds mais cette demande prescrite ne sera donc pas examinée.

Sur la résiliation du contrat

A l'appui de cette demande, la banque ne produit aucune pièce corroborant ses dires ; ainsi le défaut de paiement invoqué par la société BNP Paribas Personal Finance ne ressort pas du seul décompte produit (pièce n° 6) datant du 16 juillet 2023.

Si la banque affirme qu'existent des impayés à compter du 7 janvier 2024, elle échoue à l'établir, ne produisant qu'un décompte selon lequel à la date du 7 juillet 2023, les époux [F] étaient à jour du paiement de leurs échéances.

La demande de résiliation du contrat comme celle subséquente en paiement sera donc rejetée.

Sur les autres demandes

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, mais infirmé en ce qu'il a laissé les dépens à la charge de la société Solution Eco Energie.

M. et Mme [F] succombants seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes Gil en application de l'article 699 du code de procédure civile et il apparaît équitable de leur faire supporter les frais irrépétibles d'appel engagés par la société BNP Paribas Personal Finance à hauteur de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut, en dernier ressort,

Rejette la fin de non-recevoir soulevée par M. [L] [F] et par Mme [I] [W] [U] [R] épouse [F] ;

Infirme le jugement'sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit la demande d'annulation formelle du contrat de vente irrecevable comme prescrite ;

Dit la demande relative à la faute de la banque dans le déblocage des fonds prescrite ;

Déclare recevable la demande en nullité du contrat de vente pour vice du consentement mais la rejette ;

Rejette la demande de nullité subséquente du contrat de crédit ;

Rejette la demande en résiliation du contrat de crédit affecté formulée par la société BNP Paribas Personal Finance ;

Condamne in solidum M. [L] [F] et Mme [I] [W] [U] [R] épouse [F] aux dépens de première instance et d'appel, avec distraction au profit de la Selas Cloix & Mendes Gil et au paiement à la société BNP Paribas Personal Finance de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande.

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