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Décisions

CA Rennes, 7e ch prud'homale, 6 novembre 2025, n° 22/07328

RENNES

Arrêt

Autre

CA Rennes n° 22/07328

6 novembre 2025

7ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°360/2025

N° RG 22/07328 - N° Portalis DBVL-V-B7G-TLP2

Association ASSOCIATION APF FRANCE HANDICAP

C/

M. [S] [H]

RG CPH : 20/00075

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-BRIEUC

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 06 NOVEMBRE 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Bruno GUINET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Septembre 2025 devant Madame Isabelle CHARPENTIER, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

En présence de Monsieur [B], médiateur judiciaire,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 06 Novembre 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Association APF FRANCE, Association constituée en application de la loi du 01 juillet 1901, prise en la personne de Monsieur [E] [X], en sa qualité de Directeur Général, dont le siège social est situé

[Adresse 1]

[Localité 4] / FRANCE

Comparante en la personne de son Directeur Général Monsieur [E] [X], assisté de Me NOEL Cécile, substituant Me Stéphane PICARD de la SELEURL PICARD AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :

Monsieur [S] [H]

né le 14 Septembre 1976 à [Localité 5]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Comparant en personne, assisté de Me Charlotte FAIVRE-LOUVEL de la SELARL FL AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

EXPOSÉ DU LITIGE

L'Association des Paralysés de France, nouvellement dénommée Association APF France handicap, est une association nationale reconnue d'utilité publique luttant pour l'inclusion des personnes handicapées dans la société. Elle comporte des services et des établissements médico-sociaux, des entreprises adaptées et un réseau de 97 délégations départementales.

Selon un contrat de travail à durée indéterminée du 1er septembre 2009, M. [S] [H] a été embauché en qualité de Directeur de la direction départementale des Côtes d'Armor par l'association APF France handicap.

Au début de l'année 2016, l'Association APF France confrontée à des difficultés économiques de certaines délégations, a entrepris un projet de regroupement des délégations en territoires, impliquant la suppression de certains postes, dont celui de Directeur de Délégation, occupé par M. [H].

Dans ce contexte, M. [H] qui s'est vu proposer une liste des postes disponibles, dont celui de Directeur Territorial des Actions Associatives ( DT2A) des Côtes d'Armor et Finistère, que le salarié a refusé.

Par avenant date du 24 juin 2016, M. [H] a été nommé dans ses nouvelles fonctions de Chef de projet niveau 3 Expert des départements 22 et 29, statut cadre, entraînant la perte de ses fonctions de direction à compter du 1er juillet 2016.

Il était placé sous la hiérarchie de Mme [MO], recrutée au poste de DT2A des Côtes d'Armor et du Finistère.

A partir du mois de décembre 2016 et jusqu'en octobre 2017, le salarié a bénéficié d'un congé paternité pour des jumelles, suivi d'un congé parental d'éducation.

Au terme d'échanges portant sur des réclamations salariales, des modifications opérées lors de son absence et sur la nouvelle organisation, M. [H] a été convoqué à un entretien préalable à sanction le 26 décembre 2017.

Le 29 janvier 2018, il s'est vu notifier un avertissement motivé par la tenue de propos violents et inadaptés, d'un comportement inadapté dans l'exécution du travail, d'un refus récurrent de se conformer aux instructions de l'employeur et d'un manque de loyauté envers l'association.

Contestant cette sanction, M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc par requête du 6 mars 2018 aux fins d'obtenir l'annulation de l'avertissement ainsi que le paiement de diverses sommes et indemnités.

Par jugement du 17 octobre 2019, ayant acquis force de chose jugée, la juridiction a annulé l'avertissement du 29 janvier 2018 et condamné l'Association APF France Handicap à verser au salarié diverses sommes , dont une indemnité différentielle de salaire et des compléments de salaires.

Le 10 décembre 2018, le salarié a été placé en arrêt de travail pour maladie non professionnelle de façon continue jusqu'à la rupture de son contrat de travail.

Parallèlement, le 14 novembre 2018, M. [H] a été convoqué à un second entretien préalable à sanction fixé au 30 novembre.

Le 19 décembre 2018, il s'est vu notifier un second avertissement en raison d'une posture inadaptée lors d'une réunion, des propos et un comportement inappropriés à l'égard de salariées de l'association ainsi qu'un comportement irrespectueux envers la Directrice Territoriale.

À l'issue d'une visite médicale de reprise organisée le 17 juin 2019, M. [H] a été déclaré inapte à son poste de travail avec dispense de reclassement, le médecin du travail précisant que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ».

Le 3 juillet 2019, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé le 15 juillet. Le 18 juillet 2019, M. [H] s'est vu notifier son licenciement pour inaptitude médicalement constatée et impossibilité de reclassement.

***

M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc par requête du 16 juillet 2020 afin de voir :

- Annuler l'avertissement du 19 décembre 2018 ;

- Condamner l'association APF France handicap au paiement de la somme de 3000 euros à titre de dommages intérêts pour sanction disciplinaire nulle et injustifiée ;

- Condamner l'association APF France handicap au paiement de la somme de 10 000 euros pour harcèlement moral ;

- Condamner l'association APF France handicap au paiement de la somme de 7 500 euros pour manquement à l'obligation de sécurité et de prévention ;

- Prononcer la nullité du licenciement pour inaptitude en raison du harcèlement moral et en conséquence, condamner l'association APF France handicap au paiement de la somme de 40 800 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement nul ;

- Subsidiairement, déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l'obligation de sécurité et de prévention et en conséquence, condamner l'association APF France handicap au paiement de la somme de

30 600 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement injustifié ;

- En toute hypothèse, condamner l'association APF France handicap au paiement de la somme de 11 220 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis incluant celle de congés payés ;

- A titre de rappel de rémunération, la somme nette de 5 999,50 euros ;

- Condamner l'employeur au paiement de la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens éventuels y compris ceux d'exécution ;

- Dire que les sommes produiront intérêts avec anatocisme aux termes de l'article 1343-2 du code civil daté de la saisine du conseil de prud'hommes pour les sommes ayant la nature de salaires ;

- Condamner l'association APF France handicap à produire les documents conformes à la décision à intervenir ;

- Condamner l'association APF France handicap au paiement de la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonner en tant que de besoin l'exécution provisoire pour le tout.

L'association APF France handicap a demandé au conseil de prud'hommes de :

1. Sur l'avertissement du 18 décembre 2018

- Juger que l'avertissement notifié à M. [H] est justifié

- Débouter M. [H] de sa demande d'annulation de l'avertissement

- Débouter M. [H] de sa demande de condamnation de l'association APF France handicap à lui verser la somme de 3 000 euros à titre d'indemnisation pour sanction injustifiée

2. Sur le harcèlement moral

- Juger que l'Association n'a commis aucun harcèlement moral à l'égard de M. [H]

- Débouter M. [H] de sa demande de condamnation de l'Association à lui verser la somme de 10 000 euros pour harcèlement moral

- Débouter M. [H] de sa demande de requalification du licenciement pour inaptitude en licenciement nul

- Débouter M. [H] de sa demande de condamnation de 1'Association à lui verser la somme de 40 800 euros à titre d'indemnité du licenciement nul

3. Sur l'obligation de sécurité

- Juger que l'association APF France handicap n'a commis aucun manquement à son obligation de sécurité

- Débouter M. [H] de sa demande de condamnation de l'association APF France handicap à lui verser la somme de 7 500 euros pour manquement à l'obligation de sécurité

- Débouter M. [H] de sa demande de requalification du licenciement pour inaptitude en licenciement sans cause réelle et sérieuse

- Débouter M. [H] de sa demande de condamnation de l'association APF France handicap à lui verser la somme de 30 600 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

A titre subsidiaire,

- Limiter la condamnation de l'association APF France handicap au versement de 10 200 euros (3 mois de salaire) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

4. Sur le préavis

- Débouter M. [H] de sa demande de condamnation de l'association APF France handicap à lui verser la somme de 11 220 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et des congés afférents

A titre subsidiaire,

- Condamner l'association APF France handicap à verser à M. [H] la somme de 6 800 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 680 euros à titre de congés payés afférents.

5. Sur les rappels de salaire

- Constater 1'engagement de l'Association à verser à M. [H] la somme de 362,40 euros à titre de rappel d'indemnité différentielle

- Débouter M. [H] de sa demande de rappel de salaire pour le surplus

6. Sur les autres demandes

- Débouter M. [H] de sa demande au titre de la remise des bulletins de salaire et de l'attestation Pôle Emploi rectifiés

- Débouter M. [H] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Débouter M. [H] de sa demande de condamnation de l'association APF France handicap aux dépens

7. A titre reconventionnel

- Article 700 du code de procédure civile 2 000 euros

- Entiers dépens.

Par jugement du 31 octobre 2022, le conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc a :

- Déclaré nul et sans effet l'avertissement notifié le 19 décembre 2018;

- Condamné l'association APF France handicap à verser à M. [H] la somme 1 000 euros (mille euros) à titre de dommages et intérêts pour sanction disciplinaire nulle et injustifiée ;

- Dit que le licenciement de M. [H] est nul ;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] de la somme de 7 500 euros pour harcèlement moral commis à l'encontre de M. [H] ;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] de la somme de 7 500 euros pour manquement à l'obligation de sécurité et de prévention ;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] de la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] de la somme de 7 480 euros à titre d'indemnité compensatrice incluant celle des congés payés ;

- Débouté M. [H] de sa demande au titre de rappel de rémunération de la somme nette de 5 999,50 euros ;

- Constaté l'engagement de l'association APF France handicap à verser 362,40 euros à titre de rappel d'indemnité différentielle ;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Dit que lesdites condamnations sont assorties des intérêts au taux légal à compter saisine du conseil soit le 16/07/2020 pour les sommes à caractère salarial et de la notification du présent jugement pour celles à caractère indemnitaire. Lesdits intérêts produisant eux-mêmes des intérêts conformément à l'article 1343-2 du code civil ;

- Ordonné à l'association APF France handicap à produire à M. [H] les documents conformément au présent jugement ;

- Ordonné l'exécution provisoire pour l'intégralité du jugement ;

- Condamné en outre d'office l'association APF France handicap à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à M. [H] dans la limite de 6 mois d'indemnités ;

- Condamné l'association APF France handicap aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les éventuels frais d'exécution forcée du présent jugement ;

- Débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

***

L'association APF France handicap a interjeté appel de la décision par déclaration au greffe du 16 décembre 2022.

En l'état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 21 juillet 2023, l'Association APF France handicap demande à la cour d'appel de :

1. Sur l'avertissement du 18 décembre 2018 :

- Infirmer le jugement en ce qu'il a :

- Déclaré nul et sans effet l'avertissement notifié à M. [H] ;

- Condamné l'Association à verser à M. [H] la somme 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour sanction disciplinaire nulle et injustifiée ;

Statuant à nouveau :

- Débouter M. [H] de sa demande de condamnation de l'Association à lui verser la somme de 3 000 euros à titre d'indemnisation pour sanction injustifiée;

2. Sur le harcèlement moral :

- Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'Association à verser à Monsieur [H] la somme de 7 500 euros à titre de dommages intérêts pour harcèlement moral ;

Statuant à nouveau,

- Débouter M. [H] de sa demande indemnitaire au titre du harcèlement moral ;

3. Sur l'obligation de sécurité :

- Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'association APF France handicap à verser à M. [H] la somme de 7 500 euros à titre de dommages intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité ;

- Statuant à nouveau, débouter M. [H] de sa demande indemnitaire au titre du manquement à l'obligation de sécurité ;

4. Sur le licenciement :

- Infirmer le jugement en ce qu'il a :

- Dit que le licenciement de M. [H] est nul ;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement de la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement de la somme de 7 480 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis incluant celle des congés payés ;

Statuant à nouveau :

À titre principal :

- Débouter M. [H] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires au titre de la rupture du contrat de travail ;

À titre subsidiaire :

- Condamner l'association APF France handicap à verser à M. [H] la somme de 10 200 euros (3 mois de salaire) à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- Débouter M. [H] de sa demande au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents ;

À titre infiniment subsidiaire :

- Condamner l'Association à verser à M. [H] la somme de 20 400 euros (6 mois de salaire) à titre de dommages intérêts pour licenciement nul ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'Association à verser à M. [H] la somme de 6 800 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 680 euros à titre de congés payés afférents et débouter M. [H] de sa demande incidente à ce titre ;

5. Sur les autres demandes :

- Infirmer le jugement en ce qu'il a :

- Condamné l'Association à verser à M. [H] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné l'Association aux dépens ;

- Ordonné à l'Association de remettre à M. [H] les documents sociaux rectifiés conformément au jugement ;

- Condamné d'office l'Association à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à M. [H] dans la limite de 6 mois;

Statuant à nouveau :

- Débouter M. [H] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

- Débouter M. [H] de sa demande au titre des dépens de première instance et d'appel ;

- Condamner M. [H] à verser à l'Association la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés en première instance ;

- Condamner M. [H] à verser à l'Association la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés en cause d'appel ;

- Condamner M. [H] aux entiers dépens de première instance et d'appel;

- Ordonner la restitution par M. [H] des sommes perçues au titre de l'exécution provisoire ainsi que des documents sociaux rectifiés.

En l'état de ses dernières conclusions transmises par RPVA le 23 mai 2023, M. [H] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a :

- Déclaré nul et sans effet l'avertissement notifié à M. [H] le 19 décembre 2018 par l'association APF France handicap ;

- Condamné l'association APF France handicap à verser à M. [H] la somme 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour sanction disciplinaire nulle et injustifiée ;

- Dit que le licenciement de M. [H] est nul ;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] de la somme de 7 500 euros pour harcèlement moral ;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] de la somme de 7 500 euros pour manquement à l'obligation de sécurité et de prévention ;

- Condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] de la somme de 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

- Condamné sur le principe l'association APF France handicap au paiement à M. [H] d'une somme à titre d'indemnité compensatrice de préavis incluant celle des congés payés (l'appel incident portant sur le quantum de la somme attribuée)

- Condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] la somme de

3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile;

- Condamné l'association APF France handicap aux entiers dépens, en ce compris les éventuels frais d'exécution forcée.

- Recevoir M. [H] en son appel incident du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc du 31 octobre 2022 et le dire bien fondé ;

- Infirmer ledit jugement en ce qu'il a condamné l'association APF France handicap au paiement à M. [H] de la somme de 7 480 euros à titre d'indemnité compensatrice incluant celle des congés payés ;

Statuant de nouveau sur le chef de jugement critiqué

- Condamner l'association APF France handicap au paiement de la somme de 11 220 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis incluant celle de congés payés ;

A titre subsidiaire sur le licenciement :

- juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse pour manquement à l'obligation de sécurité et de prévention et condamner l'association APF France handicap au paiement de la somme de 30 600 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- condamner l'APF au paiement de la somme de 11 220 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis incluant celle de congés payés.

En tout état de cause :

- juger l'association APF France handicap mal fondée en son appel du jugement rendu le 31 octobre 2022 par le conseil de prud'hommes de Saint-Brieuc et, en conséquence, débouté ladite association de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

- condamner l'association APF France handicap au paiement à M. [H] la somme de 3 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles

d'appel ;

- condamner l'appelante aux entiers dépens d'appel y compris ceux d'exécution.

***

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 24 juin 2025 avec fixation de

l' affaire à l'audience du 15 septembre 2025.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs dernières conclusions régulièrement signifiées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- Sur la nullité de l'avertissement notifié le 19 décembre 2018

Pour infirmation du jugement, l'association soutient que dans le cadre de son pouvoir de direction, elle était fondée à notifier un avertissement à M. [H] pour avoir :

- monopolisé la parole au sujet des legs et adopté une posture inappropriée lors de la réunion du 28 septembre 2018 ;

- tenu des propos inadaptés envers Mmes [Z] et [Y] le 12 octobre 2018 ;

- adopté un comportement et des propos inadaptés en public envers sa supérieure hiérarchique lors d'une réunion d'équipe du 23 octobre 2018.

L'employeur ajoute que M. [H] ne justifie pas de son préjudice.

Pour confirmation du jugement, M. [H] expose que la lettre d'avertissement n'indique pas en quoi son attitude caractérise une faute, que les griefs sont imprécis et qu'aucun des témoins ne confirme les griefs qui lui sont imputés.

1-1 Sur les griefs

En vertu des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail, le juge apprécie la régularité de la procédure disciplinaire suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction, au regard des éléments produits par l'employeur au soutien de sa sanction et de ceux fournis par le salarié.Il peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise et si un doute subsiste, il profite au salarié.

Lorsque le juge annule une sanction disciplinaire, il peut, si cela lui est demandé, accorder des dommages et intérêts au salarié. Pour cela, le salarié doit établir l'existence d'un préjudice distinct qui n'est pas entièrement réparé par l'annulation.

En l'espèce, le courrier d' avertissement du 19 décembre 2018 est rédigé comme suit : ' (..) Nous vous avons fait part des agissements fautifs que nous vous reprochons, à savoir : propos et comportement inadaptés vis-à-vis de collaborateurs et de votre direction.

En effet, le 28/09/2018, lors d'une réunion avec un partenaire extérieur, La Poste, en présence de Mme [V] [N], Directrice Territoriale des Actions Associatives Ille-et-Vilaine/Morbihan (Territoire 35/56), vous avez eu une posture inappropriée, monopolisant la parole et laissant penser à tort aux partenaires que vous étiez en position de direction du Territoire 22/29. De par votre positionnement, l'ordre du jour de la réunion n'a pas pu être tenu. Le partenaire a souhaité renouveler l'échange, uniquement avec les interlocuteurs du Territoire 35/56, n'ayant pas pu lors cette rencontre aborder les sujets prévus initialement. A ce jour, Mme [V] [N] a réussi à préserver la relation par des échanges apaisés et en rassurant le partenaire sur la tenue des prochaines rencontres.

Votre comportement contre-productif a nécessité de devoir reprogrammer une réunion portant le même ordre du jour afin d'avancer sur le projet prévu.

De plus, le 12/10/2018, alors que vous déjeuniez dans la salle de pause, ouverte sur la salle de réunion, vous avez eu un comportement et tenu des propos inadaptés. Vous vous êtes en effet moqué de la difficulté de Mme [Z], Responsable Comptable et RH du Pôle Domicile 22 et Mme [Y], secrétaire médico-social de ce Pôle, à installer un vidéo projecteur.

À ce titre, vous avez tenu des propos ironiques, en faisant des commentaires parce que vos collègues ne parvenaient pas à mettre en route la machine. Par la suite, vous avez tenu des propos moqueurs et déplacés concernant la coupe de cheveux de Mme [Y], qui en a été blessée, avec notamment le commentaire suivant " C'est quoi ces mèches ' ". Les 2 professionnelles ciblées par vos remarques moqueuses ont été choquées des propos tenus et de ce comportement moqueur.

Enfin le 23/10/2018, au début de la réunion d'équipe, j'ai souhaité vous présenter un diaporama relatif à la sensibilisation d'évacuation des locaux. Dès le départ, vous avez indiqué manquer de temps et que ce n'était pas prévu. Je vous ai répondu que l'on respecterait le temps imparti. Suite à la présentation du powerpoint, vous m'avez interrompu, critiquant de façon sèche et directive la méthode de travail employée par le groupe de travail, concernant la mise en place cette procédure de sécurité. Vous ne m'avez pas laissé finir la déclinaison de la mise en place de cette procédure à l'ensemble des acteurs, indiquant ne pas comprendre pourquoi vous ne faisiez pas partie de ce groupe de travail, alors que vous connaissiez ces locaux, ayant participé à la mise en 'uvre des travaux suite à l'achat de l'immeuble. Que ce n'était pas une manière de présenter les choses, que pour ce type de démarche, il fallait aussi les présenter aux élus, bénévoles etc. À aucun moment vous ne m'avez laissé la place pour vous expliquer la méthode fixée.

Très rapidement Mme [P], assistante territoriale exprime le fait qu'elle ne supportait pas ces tensions. Elle a alors quitté la réunion.

J'ai dû au regard du niveau de tension provoqué par votre comportement, interrompre la réunion car nous ne pouvions pas échanger sereinement. A ce moment-là, vous avez poursuivi vos attaques sur le fait que vous n'aviez pas les éléments de compte-rendu avec le Conseil APF Départemental, que vous n'aviez pas de retour des élus, abordant des sujets qui n'avaient pas de lien avec le point en cours. J'ai essayé de vous répondre mais vous avez continué vos attaques sans chercher à entendre mes explications. J'ai donc à nouveau interrompu nos échanges. Votre comportement a été clairement inadapté, le ton employé sec et directif également, générant des tensions menant au départ d'une collègue et à l'interruption pure et simple de la réunion.

Ces faits ne sont pas acceptables et dérogent notamment aux dispositions des articles 17 et 21 du règlement intérieur applicable au personnel d'APF France handicap qui prévoient que :

Article 17.

" Le personnel doit mettre en oeuvre les missions qui lui sont confiées notamment dans le cadre de son contrat de travail. Il doit les exécuter avec rigueur et professionnalisme.

Il ne doit tenir aucun propos ni adopter de comportement de nature à troubler le bon ordre et la sérénité au sein de l'établissement. Il est tenu au respect et à la correction vis à vis de toute personne rencontrée à l'occasion de l'exécution de son travail. (...)".

Article 21. Violence et discrimination au travail

" Le respect de la dignité des personnes est une valeur fondamentale défendue par

T'APF, elle ne peut être transgressée à quelques niveaux que ce soit et en particulier dans le cadre de la collectivité de travail. C'est pourquoi toute violence qu'elle que soit la nature (morale, verbale, comportementale, physique...) ou par la forme (action ou omission) ne saurait être tolérée. Le non-respect de ces règles constitue une faute pouvant aller jusqu'au licenciement (...) ".

De tels agissements sont inacceptables d'autant plus que certains se sont déroulés en présence de partenaires extérieurs avec lesquels nous devons travailler en pleine confiance, sur des projets à valeur ajoutée importante pour l'association, et envers vos collègues, qui doivent être respectés sur leur lieu de travail, dans leurs postes, leurs valeurs et apparence physique, et envers votre direction, qui doit pouvoir accompagner les équipes au quotidien dans un climat serein. Un tel comportement perturbe l'action de fédération des équipes impulsée par la direction. Ils jettent le discrédit sur le sérieux de notre association auprès des partenaires, génèrent des tensions et de l'usure auprès de vos collègues et de votre direction. Il révèle un défaut de savoir-être récurrent. Il est incompatible avec les valeurs de respect portées par l'association. De par votre parcours au sein d'APF France handicap, vous n'êtes pas sans savoir l'importance du cadre institutionnel. Vous n'adoptez aucunement la posture de cadre inhérent à votre poste actuel.

Lors de notre entretien, vous vous êtes étonné des faits reprochés concernant la rencontre du 28/09/2018 précisant que pour vous vos interventions avaient été pertinentes, que vous n'étiez pas obligé d'être présent à cette rencontre, relevant du Territoire 35/56, qu'en aucun cas il ne pouvait y avoir de confusion sur votre posture car un tour de table préalable avait eu lieu.

Sur les faits du 12/10/2018, vous avez nié les propos reprochés indiquant " je n'ai tenu aucun propos désobligeants ", après avoir lu au préalable le témoignage écrit de Mme [C] [BV], Agent Associatif du Territoire, qui déjeunait ce jour-là avec vous, et qui dépeint une situation sereine et apaisée au cours de laquelle, vous auriez été aidant envers les 2 collègues du Pôle Domicile 22, et qui précise qu'à aucun moment, vous n'aviez prononcé des propos inadaptés.

Sur les faits du 23/10/2018, vous avez également nié avoir eu un ton sec et directif cause de tensions ayant fait quitter la réunion par Mme [P]. Et vous citez les propos suivants " je ne peux pas travailler dans cette ambiance, j'ai besoin de me protéger, je quitte cette réunion' comme étant de Mme [P]. Vous indiquez que selon vous son départ de la réunion relève de la responsabilité de votre hiérarchique.

Vous avez à nouveau produit un témoignage de Mme [C], seule salariée présente en fin d'entretien, et qui dépeint un échange cordial, ce qui dans ce cas n'explique en rien le départ de votre collègue.

Les explications recueillies auprès de vous lors de notre entretien ne nous ont pas permis de modifier l'appréciation des faits qui vous sont reprochés. Elles ne sont pas de nature à vous exonérer de vos responsabilités...' (pièce n°36 association).

1- S'agissant du premier grief lié à la posture inappropriée lors de la réunion du 28 septembre 2018, l'employeur verse aux débats :

- Un mail du 29 mai 2018 de Mme [V] [N], Directrice territoriale de Bretagne Sud Est invitant à une réunion avec une salariée de la Poste le 28 septembre 2018"[S], je vous ai convié en tant que chef de projet ressources régional mais aussi parce que je crois que vous maîtrisez tout à fait la question et que vous parvenez à bien collecter sur le 22 via les legs depuis de nombreuses années ; votre concours serait alors un beau soutien pour notre territoire qui n'a pas (pas encore !) cette expérience...' (pièce n°31 association) ;

- L'attestation de Mme [V] [N] : 'M. [H] a été invité à participer à une réunion dans le cadre d'une éventuelle collaboration avec un partenaire pour une collecte de fonds afin de contribuer au financement de notre mouvement associatif. Étant à l'époque chef de projets ressources pour toute la région Bretagne, sa participation était naturellement sollicitée.

Lors de cette réunion, sa manière de se présenter n'a pas été claire auprès des interlocuteurs, si bien qu'à l'issue de l'échange il avait été identifié par nos interlocuteurs comme le Directeur territorial des actions associatives des délégations 22 et 29.

L'échange avec le partenaire a été par ailleurs difficile puisque je n'ai pas pu vraiment m'exprimer, ni, me semble-t-il les autres membres APF autour de la table, M. [H] ayant 'pris beaucoup de place', ce qui a donc conduit notre partenaire à me demander par la suite par téléphone une nouvelle rencontre uniquement avec moi pour avoir plus la possibilité d'échanger autour des projets possibles.

J'ai été informée par la suite par les autres membres de la réunion, des adhérents d'Ille-et-Vilaine en situation de handicap de notre association, qu'ils avaient été très mal à l'aise d'avoir été contactés par M. [H], qu'ils n'avaient rencontré qu'à cette occasion et qui leur demandait des témoignages pour le soutenir.' (pièce n°32 association).

Le grief tiré d'une 'posture inappropriée' de M.[H] se manifestant par la monopolisation de la parole lors d'une réunion avec un partenaire extérieur est inconsistant voire abstrus, étant précisé que le salarié y était invité en raison de sa connaissance des secteurs en cause (départements 35 et 56) mais également de son expérience et de sa maîtrise du sujet relatif aux legs.

Alors que l'employeur, qui supporte la charge de la preuve, se fonde uniquement sur l'attestation de Mme [V] [N] ne caractérisant aucun comportement fautif à M. [H], ce dernier verse aux débats des échanges de mails et les attestations de quatre participants à la réunion indiquant de façon concordante que : '[S] [H] a participé aux échanges avec La Poste, comme nous, bénévoles, dans l'intérêt de L'APF France Handicap. Il n'avait pas une posture de Directeur mais s'est juste comporté comme un salarié impliqué pour faire avancer les choses au mieux.' (pièces n°91, 92, 35 à 38 salarié).

Si l'association prétend que l'ordre du jour n'a pu être abordé et que La Poste a contacté Mme [V] [N] aux fins d'organiser une nouvelle réunion, hors la présence de M. [H], elle ne produit ni le programme, ni l'ordre du jour de la réunion et ne justifie pas de l'organisation d'une nouvelle réunion sur ce thème à la demande de son partenaire financier.

La seule participation active du salarié à une réunion à laquelle sa présence était sollicitée afin d'y partager son expérience et son expertise en la matière, ne saurait établir une monopolisation de la parole et un positionnement inapproprié lors d'une réunion. Ce premier grief n'est donc pas établi.

2- S'agissant du second grief tiré de la tenue de propos inadaptés le 12 octobre 2018, l'association se prévaut des éléments suivants :

- L'attestation de Mme [Y], secrétaire de direction: 'Le 12 octobre 2018, j'étais chargée de préparer la salle de la délégation 22 pour une réunion accompagnée de Mme [Z], Responsable RH et compta du Pôle domicile. Cette salle avait été réservée au préalable, ce dont M.[H] était informé.

Mme [Z] et moi-même sommes arrivées dans la salle quelques minutes avant le début de notre réunion pour installer notre matériel et principalement le vidéo projecteur. M. [H] était en train de déjeuner avec Mme [C]. N'arrivant pas à brancher le vidéo projecteur nous avons sollicité l'aide de M. [H] qui n'avait pas bougé malgré notre présence. Celui-ci nous a répondu qu'il était en train de déjeuner et ne nous a pas aidées.M. [H], que je connaissais que de vue n'ayant pas de relations professionnelles avec lui, s'est permis des remarques moqueuses et désobligeantes au sujet de ma coiffure et notamment de mes cheveux blancs : 'qu'est-ce que c'est que ces mèches '' Je me suis sentie blessée et très surprise qu'il puisse se permettre ce genre de remarques.' (pièce n°33 association) ;

- Un mail du 23 octobre 2018de Mme [Z], Responsable comptable et RH décrivant le problème rencontré le 12/10/2018 dans la salle de réunion ' Une réunion d'information interne, en commun avec [G] [MO] de la délégation, avait été programmée dans la salle de la délégation le 12/10/18 à 14h. Afin de mettre en place la salle et les outils pour cette intervention, je me suis rendue dans la salle à 13h40.Constatant que des personnes de la délégation, [BV] [C] et [S] [H] étaient en train de déjeuner, je suis revenue plus tard, vers 13h50.

J'ai demandé de l'aide à [UT] [Y] pour faire fonctionner le vidéo projecteur et installer les tables et chaises.Nous avons demandé à [S] [H] et [BV] s'ils savaient comment fonctionnait le vidéo projecteur et nous n'avons eu qu'un retour ironique de [S] [H] doutant que la réservation de la salle avait été mise au planning, refusant ou alors nous donnant volontairement au compte-gouttes les informations sur le fonctionnement du vidéo projecteur (il faut une télécommande... Mais je ne sais pas où elle est, il faut une clé USB...), faisant des commentaires parce qu'on ne parvenait pas à mettre en route la machine.

Il a également fait des commentaires déplacés sur la coiffure de [UT] ('c'est quoi ces mèches ''), nous interpellant également sur des propos incompréhensibles alors que nous installions les tables ('il est trop fort [F]', nous parlant du footballeur).

Tout cela s'est interrompu lorsqu'[G] [MO] est venue nous indiquer une autre salle où pouvait être réalisée cette réunion d'information.' (pièce n°61 association).

M. [H] verse aux débats l'attestation de Mme [C], agent d'accueil: '[...] J'assure dans ce cadre, n'avoir été témoin d'aucun propos malveillant et / ou désobligeant à l'encontre de Mme [Y] ou de qui que ce soit d'autre de la part de M. [S] [H].[...]Mme [Y], nous a tout d'abord informés qu'elle avait réservé la salle depuis longtemps auprès de Mme [G] [MO], Directrice territoriale des actions associatives 22/29.Mme [Y] et Mme [Z], se sont ensuite toutes deux dirigées vers les chaises qui étaient installées sur les tables afin de les descendre.

Les voyant faire, M. [H], leur a proposé son aide (aide que Mme [Y] et Mme [Z] ont acceptée) tout en les informant que les chaises étaient mouillées, ce que, Mme [Y] et Mme [Z] ont constaté et confirmé quelques secondes plus tard.

De ce fait, M. [H] leur a expliqué la raison avant d'ajouter que compte tenu de ces conditions, la tenue de la réunion dans la salle semblait difficile.[...]

Les échanges se sont ensuite poursuivis sur le vidéo projecteur du pôle domicile et le tableau blanc interactif (TBI) de la délégation.

Mme [Y] et Mme [Z] échangeaient sur le vidéo projecteur du service lorsque M. [H] les a informées que celui-ci n'était pas utile lorsqu'une réunion se tenait dans la salle de la délégation, celle-ci étant équipée d'un outil prévu à cet effet 'le TBI'...

Mme [Y] et Mme [Z] se sont demandées ce qu'était un TBI, M [H] les a alors renseignées.

Mme [Y] a ensuite cherché seule comment l'utiliser. La voyant hésitante, M. [H] lui a alors indiqué qu'il fallait avoir la clé USB pour pouvoir l'utiliser en Wifi.

Mme [Y] et Mme [Z], nous ont alors demandé où se trouvait ladite clé. M. [H] leur a précisé qu'elle devait certainement se trouver soit dans mon bureau soit dans le bureau de la Direction et qu'il fallait demander à Mme [G] [MO].

M.[H] a proposé à Mme [Y] et à Mme [Z] de leur montrer à l'occasion, si elles le souhaitaient le fonctionnement au tableau blanc interactif...' (pièce n°39 salarié).

Le salarié verse également aux débats un écrit dactylographié daté du 16 octobre 2018, signé de Mme [Y], qu'il aurait fortuitement trouvé sur son lieu de travail, ainsi rédigé: 'Le 12 octobre 2018, préparant une réunion dans une salle de la délégation réservée avec Mme [Z] M.[H] est en train de déjeuner. Nous lui demandons comment fonctionne le matériel destiné à projeter un power point. Celui-ci nous répond qu'il est en train de déjeuner puis me fait une remarque désobligeante sur mon physique.' (pièce n°40).

La lettre portant notification d'un avertissement à M. [H] fait état de propos inadaptés, moqueurs et ironiques.

Si Mmes [Y] et [Z] décrivent de manière concordante la remarque déplacée de M.[H] sur la coiffure de Mme [Y], il apparaît que contrairement aux termes de la lettre d'avertissement, les salariées concernées ne lui reprochent aucun propos moqueur et / ou ironique concernant l'installation du vidéo projecteur, ce qui est conforté par Mme [C] présente lors de la scène.

Eu égard aux témoignages discordants notamment entre l'attestation manuscrite de Mme [Y] dont se prévaut l'employeur et l'attestation dactylographiée de la même salariée, produite par M. [H], les éléments soumis à l'appréciation de la cour ne permettent pas d'établir de façon objective le caractère inadapté du comportement de M.[H] de nature à choquer les salariées concernées.

Dans ces conditions, le doute devant profiter au salarié, la preuve du second grief n'est pas rapportée.

3- S'agissant du troisième grief tiré du comportement inadapté générant des tensions lors d'une réunion d'équipe le 23 octobre 2018, l'employeur verse aux débats l'attestation de Mme [P], assistante territoriale:

'Les propos et attitudes récurrents de M. [S] [H] à l'encontre de la directrice et du fonctionnement de la délégation pendant les réunions d'équipe m'ont obligée par deux fois, à réagir de façon violente pour moi-même :

- Première fois : il était entrain de me reprendre sur un point de l'ordre du jour comme si je lui étais redevable. J'ai senti le besoin de lui préciser : 'tu sais, ce n'est pas parce que tu m'as embauchée que je ne peux pas te dire certaines choses.'

- Seconde fois : lors d'une présentation des procédures d'évacuation en cas d'incendie. À force de reprendre chaque slide du diaporama de manière négative, pour couper court à ce que je ressentais, j'ai dû pour la première fois, quitter la réunion en disant que je n'avais plus la force d'être témoin et de supporter des propos qui visaient tout le temps à humilier devant l'équipe, la directrice ou à démonter la nouvelle organisation validée depuis un certain temps...' (pièce n°34 association).

De son côté, M. [H] produit l'attestation de Mme [C], présente lors de la réunion '[...] À mon retour dans la salle, la direction s'apprêtait à présenter à l'équipe un diaporama appelé 'sensibilisation à la sécurité et sensibilisation des locaux'.[...]

M. [H] a ensuite fait part à l'équipe ainsi qu'à la direction de son étonnement de voir ce sujet traité en réunion ce matin là, compte tenu de l'importance de celui-ci et des conditions qui étaient les nôtres (peu de temps, absence d'une collègue) d'autant plus, que ce point sur les locaux était absence de l'ordre du jour qui avait été communiqué par mail à l'équipe, la veille en fin de journée (vers 18 h) par la direction.

M. [H] a indiqué qu'il connaissait parfaitement le plan des locaux car lorsqu'il exerçait lui-même la fonction de directeur, il était en charge du dossier des locaux et avait déjà été amené à travailler sur ce thème hautement important en collaboration avec la direction du Sesvad de l'époque (nouvellement nommé pôle domicile).

M. [H] a également précisé que de son point de vue, ce sujet méritait, de faire à lui seul, l'objet d'une prochaine réunion ou rencontre en présence de différents acteurs de l'association (bénévoles, l'ensemble de l'équipe salariale de la délégation, élus et même pourquoi pas des salariés du pôle domicile), afin que l'on puisse en échanger plus longuement et s'en imprégner ainsi plus facilement, avant de proposer à la direction, d'être soutien dans les échanges, si Mme [MO], le souhaitait et le sollicitait.

Mme [MO] a alors spécifié à son tour, qu'une formation allait être prochainement proposée au ou à la salarié(e) de la délégation qui aura été désigné(e) comme étant référent(e) (il faut un référent dans chaque aile). Celle-ci sera proposée conjointement à des salariés du pôle domicile. Mme [MO] a ensuite, évoqué à l'équipe avoir pensé à profiter du 'repas bénévoles' qui allait prochainement avoir lieu pour en échanger également avec eux.

Quelques minutes après, Mme [P] s'est levée et a fait part à l'équipe et à la direction de sa décision de quitter la réunion avant de quitter la salle.

Suite au départ de Mme [P], un petit [temps] de latence a été observé avant qu'une discussion cordiale ne s'engage entre M.[H] et Mme [MO]. Discussion au cours de laquelle, chacun d'eux a pu exprimer son point de vue respectif sur la relation professionnelle qu'ils entretiennent depuis le retour de congé parental de M. [H].' (pièce n°39 salarié).

La lettre d'avertissement fait état d'un manque de respect de la part de M. [H], de l'emploi d'un ton sec et directif ainsi que des critiques générant des tensions.

Outre les contradictions entre les témoignages de deux salariées présentes, il est constaté que ni la lettre d'avertissement, ni les attestations ne rapportent avec précision les propos reprochés à M. [H] lors de la réunion du 23 octobre 2018.

Si les parties au litige s'accordent sur les tensions existant entre Mme [MO] et M. [H], il n'en demeure pas moins que :

- Mme [P] évoque dans son attestation de difficultés relationnelles avec M. [H], décrivant ses ressentis et justifiant son départ de la réunion par son besoin de 'couper court à ce [qu'elle ressentait]' sans illustrer de manière précise les prétendus 'propos ( de M.[H]) qui visaient tout le temps à humilier, devant l'équipe, la directrice' ;

- les attestations précitées ne permettent pas de caractériser de manière objective un comportement irrespectueux ou vexatoire de M.[H] envers sa supérieure hiérarchique ou des critiques formulées de manière excessive sur les méthodes de travail et l'organisation mises en place par Mme [MO].

Dans un contexte difficile de réorganisation interne, le fait pour un cadre de manifester ses réserves voire son désaccord par des propos mesurés, sans caractériser un abus de liberté d'expression, lors d'une réunion interne se limitant à quatre participants, ne suffit pas à caractériser une faute de M. [H].

Dans ces conditions, aucun des griefs n'est objectivement établi ni suffisamment sérieux pour justifier un avertissement. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont annulé la sanction disciplinaire notifiée à M. [H] le 19 décembre 2018. Le jugement sera confirmé sur ce point.

1-2 Sur l'indemnisation du préjudice

Contrairement aux éléments avancés par l'association, M. [H] justifie de son préjudice résultant :

- du contexte conflictuel et difficile dans lequel il s'est vu notifier un second avertissement injustifié le 19 décembre 2018, soit moins de 12 mois le précédent avertissement, annulé ultérieurement par jugement du 17 octobre 2019 devenu définitif (pièces n°51 et 52 salarié) ;

- d'une dégradation de son état de santé depuis le 10 décembre 2018 en raison d'un 'état dépressif réactionnel' (pièce n°65 salarié).

Partant, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné l'Association APF France Handicap à verser à M. [H] la somme de 1 000 euros de dommages et intérêts pour sanction injustifiée.

2- Sur la nullité du licenciement pour harcèlement moral

Pour infirmation du jugement sur ce point, l'Association APF France Handicap conteste tout agissement de harcèlement moral commis à l'égard de M.[H].

Le salarié expose avoir fait l'objet d'agissements harcelants de la part de son employeur le visant personnellement et ayant pour but ou pour effet de dégrader ses conditions de travail, de porter atteinte à ses droits, de l'ostraciser et de lui imputer des griefs non établis ou non fautifs.

Selon les dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Dès lors que sont caractérisés ces agissements répétés, même sur une brève période, le harcèlement moral est constitué indépendamment de l'intention de son auteur.

Peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en 'uvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu'elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, dans sa rédaction postérieure à la loi n° 2018-1088 du 08 août 2016, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer ou laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient aux juges du fond:

1- d'examiner la matérialité de tous les éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits,

2 - d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer ou laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral,

3 - dans l'affirmative, d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

M. [H] invoque les éléments de faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral :

- des imprécisions dans la définition de ses nouvelles missions suite à la réorganisation;

- des difficultés dans l'organisation de ses entretiens professionnels ;

- des problèmes récurrents de salaires et un refus de bénéficier de congés légaux;

- le refus de bénéficier d'une formation ;

- l'absence de réponse à ses réclamations ;

- sa mise à l'écart de projets et décisions structurelles ;

- le refus de sa supérieure hiérarchique de signer le compte rendu de l'entretien professionnel ;

- des convocations à des rendez-vous et entretiens professionnels et l'attribution de dossiers dans des délais restreints ;

- deux avertissements injustifiés en moins d'un an ;

- une dégradation de son état de santé ayant conduit à son inaptitude médicalement constatée avec impossibilité de reclassement.

1- S'agissant des imprécisions autour de la définition de ses nouvelles missions de Chef de projet Expert, M. [H] soutient avoir été maintenu de nombreux mois dans l'attente de son sort en tant qu'ancien Directeur de délégation départementale et dénonce la réalisation de missions non référencées dans sa nouvelle fiche de poste de Chef de Projet, laquelle a finalement été précisée sur la demande du médecin du travail en 2019 .

Il verse aux débats :

- Une communication du syndicat CFDT relatif au projet de réorganisation des Délégations départementales dénonçant en substance :

* Un manque de précision quant aux modalités de mise en place et aux moyens ;

* Le regroupement d'anciennes dénominations professionnelles en des fonctions plus génériques rendant plus difficile le positionnement des salariés car les missions regroupées devront être partagées à travers des fiches de poste inexistantes ; plusieurs fiches de fonction apparaissant comme 'fourre-tout' ;

* L'absence de référentiel auquel sont rattachées les fonctions qui définit une classification et des grilles de salaire afin de permettre aux salariés de se positionner (pièce n°85) ;

- Un tract du syndicat CGT sur le projet d'évolution des délégations APF dénonçant une 'transformation des métiers' et les conséquences sur les délégations (pièce n°86) ;

- L'édito de l'APF de janvier / février 2019 s'inquiétant en ces termes: 'la nouvelle année 2016 arrive avec son flot de changements pour la Délégation. Nous sommes encore dans le flou en ce qui concerne l'évolution de notre mouvement avec une approche territoriale et le regroupement annoncé des Côtes d'Armor avec le Finistère. Le Conseil APF de Département (CAPFD) a alerté le Conseil d'administration sur les inquiétudes que suscitaient ses intentions 'de décapiter' le mouvement de l'APF, au nom d'un regroupement dont nous ne saisissons pas d'autres enjeux qu'une économie qui se ferait au détriment de l'efficacité.

À ce courrier, les élus départementaux n'ont eu aucune réponse à ce jour !(..)' (pièce n°87)

- Le procès-verbal de la réunion du CHSCT le 25 janvier 2016 sur l'évolution des délégations départementales : 'Au jour d'aujourd'hui : obligation de se positionner sur les postes proposés. Concernant le poste de Directeur de territoire, personne ne semble intéressé au niveau territorial (département 22 et 29). [S] [H] n'a pas souhaité se positionner sur le poste de directeur de territoire. Mme [FJ] [présidente du CHSCT] fait remonter à la direction régionale notre inquiétude face au mal être de M.[H]. Le CHSCT va faire de même et va également signifier l'inquiétude persistante des salariés quant à leur devenir au sein de l'association. Il devient urgent que la direction régionale prenne une décision concernant le poste de M. [H].' (pièce n°89)

- son mail transmis le 14 janvier 2016 à M. [I], Président départemental de l'association : 'Je suis de plus en plus convaincu que la nouvelle organisation nous mène au chaos, et que l'on se dirige vers une amputation des missions des délégations. J'attends donc, pour ma part, que la DG/DR me fasse savoir quel va être mon rôle et les missions futures de la délégation pour me positionner et en débattre avec tous...' (pièce n°88) ;

- son mail daté du 3 juin 2016 à Mme [T], RRH, et M. [I], directeur de la délégation finistérienne : '[...] Je me permets de revenir sur l'avenant que vous m'avez transmis, j'attendais d'avoir une réponse sur la fiche de poste me concernant et sur les nouvelles fonctions que vous me réservez. C'est aujourd'hui encore très flou pour moi...

Ma situation est difficile, je l'exprime d'autant plus régulièrement que je ressens beaucoup de difficultés de part la confluence d'événements (évolution, absence de salariés, démotivation de l'équipe, des élus, de certains bénévoles, période de forte activité associative - travail dense en continue avec les week-end) et d'un manque de soutien '!

Que faut-il faire pour avoir un échange sur la mise en oeuvre de l'évolution des postes '! La solidarité associative nous rassemble-t-elle encore '! À quand de réelles réponses à nos questionnements ' Faut-il revoir le médecin du travail pour être écouter '!

En vous remerciant pour votre retour...' (pièce n°90 salarié) ;

- L'avenant à son contrat de travail du 24 juin 2016 sur le poste de Chef de projets expert (niveau 3) pour le territoire Côtes d'Armor / Finistère (22/29) à effet au 1er juillet 2016 (pièce n°2 salarié) ;

- Un mail daté du 18 décembre 2017 à M. [X], directeur régional Bretagne de l'Association APF: ' [...] Je n'ai toujours pas de fiche de poste précise ni de missions '!

=> J'ai signé mon avenant le 24 juin 2016 - des propositions de dates ont été reçues mais il serait bien de finaliser ce point - surtout qu'en l'absence de 2 salariés et avec 2 autres salariés en formation, je ne pourrai pas continuer à boucher les trous et faire le travail au pied levé de chacun... (pièce n°16) ;

- Un mail daté du 2 août 2018 à Mme [MO] : ' Bonjour [G], je reviens sur la fiche de poste. Merci de la transmission que tu as faite. Pour faire suite à l'échange que nous avons eu lors de l'entretien de juillet, je te redis mon incompréhension sur la fiche de poste, même si tu as réalisé des changements suite à mes premières remontées (lien avec les élus...).

Comme déjà évoqué, les pôles communication et ressources ont été décidés unilatéralement, je n'ai pas pu exprimer mes désirs '! [...]

Sur le volet ressource, je n'ai plus aucune information sur les finances (budget prévisionnel 2018 demandé plusieurs fois, budget réalisé 2017), ce qui serait un préalable pour définir une stratégie. Également, comme je l'avais déjà demandé, j'aimerai connaître les dynamiques pour l'avenir concernant les activités à venir (actions, représentations, revendications suite du projet de [Localité 6], local braderie, etc.). Je n'ai pas, non plus (tout comme les collègues) les comptes rendus des réunions du CAPFD, depuis ton arrivée en 2016, je ne sais pas ce que les élus décident ou expriment pour le département des Côtes d'Armor, ce serait intéressant d'avoir les informations.[...]

Sur le sujet de la défense des droits, c'est sûrement le poste qui me prend le plus de temps et qui me semble le plus essentiel. Je trouve dommage qu'il se trouve en fin de liste sur le thème maintien de l'action locale '! Même les collègues du service demandent un soutien clair de la Délégation pour les aider sur la défense des droits et il reste encore un bon équilibre à trouver avec le pôle ressource.[...]

Dernier point, il s'agit de savoir quand cette fiche de poste sera effective, car je mène d'autres missions actuellement (à ta demande) qui ne sont pas de mon ressort et qui prennent du temps !...' (pièce n°25) ;

- Une 'fiche de fonction chef de projets' décrivant son nouveau poste : 'Finalité : garantit la réalisation de projets depuis leur élaboration jusqu'à leur accomplissement en pilotant chacune des étapes et en mobilisant les acteurs concernés sur les territoires' et prévoyant les missions principales suivantes : pilotage de projets, gestion de projets, valorisation et capitalisation de projets, partenariats et soutien aux acteurs locaux, travail en équipe et participation à la vie associative ainsi que son mail du 2 août 2018 transmis à sa hiérarchie à propos de ses commentaires sur sa fiche de poste (pièces n°26 et 27) ;

- la fiche du poste de M.[H] établie le 4 juin 2019 par l'employeur, sur la demande du médecin du travail:

'1) Dossiers vacances : - constitution des dossiers,- organisation des séjours

2) Défense des droits : recours, contentieux ex décisions de la MDPH....

3) Accompagnement et relations donateurs-testateurs

4) Liens avec bénévoles et adhérents

5) Participation accompagnement des groupes initiatives sur différentes thématiques :

- communication,

- ressources (braderies, foires aux livres),

- accessibilité,

- sensibilisation dans les écoles...

- revendications (après décès : finances pour les ayants droit)

Relations extérieures : adhérents,bénévoles,familles,collectivités institutionnelles,vtransports' (pièce n°100).

L'incertitude et les ambiguïtés persistantes autour de la définition des nouvelles attributions et responsabilités confiées du salarié à effet au 1er juillet 2016, qui sont établies par les pièces susvisées, sont de nature à susciter une dégradation des conditions de travail de M.[H] susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

2- S'agissant des difficultés dans l'organisation de ses entretiens professionnels, le salarié se plaignant de convocations pendant ses congés et des délais trop courts, se fonde sur les éléments suivants :

- Un mail du 19 décembre 2017 de sa supérieure hiérarchique Mme [MO] lui proposant d'organiser son entretien professionnel le jeudi suivant à 11h30 ou 14 heures ; ce à quoi M. [H] lui a répondu être absent ce jour-là (récupération de lundi 11 décembre pour lequel j'avais posé un RTT où je suis venu travailler)...' (pièce n°16) :

- Des échanges de courriels du 22 mars 2018 dans lesquels Mme [MO] sollicitait le report d'un jour de congé sollicité par M. [H] afin d'organiser son entretien professionnel le 30 mars suivant (pièce n°32) ;

- Un mail du 17 juillet 2018 de Mme [MO] proposant 'un point d'échange demain à 10h', ce à quoi M. [H] lui répondait : 'je demande que les convocations se fassent dans des délais raisonnables pour mon organisation (plus de 24 heures), je ne peux pas être disponible du jour au lendemain à chaque fois, c'est devenu systématique, je me demande pourquoi '!Nous pouvons nous voir à un autre moment de la semaine - mercredi après midi vers 15h ou jeudi matin.' (pièce n°67).

La matérialité du grief est établie.

3- S'agissant des incidents récurrents relatifs à ses éléments de rémunération ainsi que le refus de congés légaux, M. [H] dénonce des problématiques récurrentes sur les fiches de paie, l'absence de revalorisation des salaires malgré ses réclamations et le refus de l'employeur de lui accorder des jours de congés. Il produit à ce titre :

- des mails des 3 novembre et 4 décembre 2017 s'inquiétant auprès de Mme [MO] de l'absence de prise en compte de sa demande de versement sur son compte CET pour l'année 2016: '[...] Je reviens sur ma demande de CET en date du 11 octobre 2016, il s'avère que je n'ai toujours pas d'abondement sur mon compte suite à nos échanges '!...' (pièce n°74) ;

- Un courrier adressé à Mme [MO] le 4 décembre 2017: 'je me permets de te retourner les fiches de paie des 3 derniers mois - septembre, octobre et novembre 2017. Elles sont erronées dans le traitement de salaire et de congés. Je te remercie de bien vouloir les faire corriger dans les meilleurs délais.D'autre part, je t'avais interpellée pour te demander la révision du calcul de l'indemnité différentielle pour cette année, comme cela est prévu par accord d'entreprise. Je te remercie de faire le nécessaire au plus tôt.' (pièce n°70) ;

- Un mail daté du 18 décembre 2017 à M. [X], directeur régional Bretagne: 'au risque de me paraître un peu lourd :

Je suis sans nouvelles de l'abondement de mon CET pour l'année 2016,=>Malakoff Medéric n'a pas reçu le bordereau d'abondement que tu as validé ni en 2016, ni en 2017 '!

- mes 3 derniers bulletins de salaires sont erronés,

=>[O] [M] est en capacité de refaire les fiches de paie avec les bons éléments (il s'agit de renseigner correctement les données du mois et nullement du logiciel)

- Je n'ai pas de nouvelles de ma demande de révision de calcul pour mon indemnité différentielle,

=> Le principe est acté par accord d'entreprise signé par Mme [K] pour L'APF et les 2 syndicats en date du 8 mars 2016 - il ne reste que le calcul à réaliser et appliquer la différence. Tu m'as déjà refusé cette révision. Aujourd'hui il est nécessaire d'appliquer nos décisions dans le cadre des accords d'entreprise.

- Je n'ai pas le solde de mes congés

=> [G] ( [MO]) m'a confirmé qu'elle seule était en capacité de me transmettre mes congés - je ne peux pas poser mes vacances pour 2018 !!! C'est quand même compliqué avec ma situation familiale qui nécessite de m'organiser...' (pièce n°16) ;

- son courrier du 12 février 2018 sollicitant de la Direction régionale la mise en conformité de ses bulletins de salaire pour l'année 2017 et janvier 2018:

' je fais suite à la réception de mes bulletins de salaire correspondant de l'année 2017 et janvier 2018, après examen de ceux-ci, j'ai constaté des non-conformités de ces fiches de paie. J'ai fait part à de multiples reprises de ces difficultés afin que soit respectés mes droits de salarié. L'obligation légale de l'entreprise est de se mettre en conformité en rééditant les bulletins de salaire concernant la période de janvier 2017 à janvier 2018. La réponse fournie à ce jour et lors de mes demandes précédentes n'a pas permis de corriger lesdites erreurs déjà énoncées.

En effet, plusieurs erreurs sont présentes dans les différents :

- Erreur sur le statut du salarié,

- Erreurs dans les cotisations,

- Retenue sur salaire abusive,

- Non-régularisation des avances et reprises concernant la complémentaire santé durant le congé parental,

- Refus de recalculer l'indemnité différentielle - malgré le rappel de l'accord d'entreprise sur la rémunération dans le cadre de la nouvelle réorganisation du 01/02/2016,

- Non-réorganisation et présentation du bulletin de paie simplifié - rendu obligatoire pour toutes les entreprises à partir du 1er janvier 2018 et pour info en vigueur un an auparavant pour les entreprises d'au moins 300 salariés,- Etc.

En conséquence, je vous informe par ce courrier que si au 5 mars 2018, mes bulletins de salaire ne sont pas réédités rectifiés, je ferai valoir mes droits auprès de la juridiction compétente qui statuera sur les dommages et intérêts à compter de la date précitée...' (pièce n°71) ;

- des mails et courriers de réponse de l'association transmis en avril 2018 et en octobre 2018 portant sur les éléments de paie du salarié (pièces n°75 , 76 et 78);

- Un courrier recommandé de Mme [MO] du 30 octobre 2018 intitulé 'Réponse demandes clarification traitement des salaires' concernant les congés payés, la régularisation retraite et vieillesse opérée en février 2017, la régularisation suite à la saisie du congé parental sur la période du 1er mars au 31 mars 2018, la revalorisation du point FEHAP et la retenue de la somme de 51,96 euros sur le bulletin de décembre 2017 (pièces n°47 et 76) ;

- Un courrier du 2 septembre 2019 du conseil de l'association informant le conseil de prud'hommes que : '[...] Après vérification par ses services, l'APF constate que la demande de M.[H] concernant l'évolution de son indemnité différentielle est justifiée...' (pièce n°80) ;

- Le jugement du conseil de prud'hommes du 17 octobre 2019 condamnant l'association au paiement d'une indemnité différentielle de salaire et d'un complément de salaire, outre l'octroi de 9 jours de congés supplémentaires par an ; étant observé que le retrait de la mention 'cadre dirigeant' sur les bulletins de salaire à compter du mois de juillet 2016 était dénoncé par M. [H] et régularisé en cours d'instance par l'employeur (pièce n°52).

La multiplicité des problématiques liées à la rémunération et aux jours de congés de M. [H] ainsi que les refus persistants de l'employeur de régulariser cette situation dès la fin de l'année 2017, sont matériellement établis.

4- S'agissant du refus de formation, M. [H] dénonce la réponse tardive de son employeur à ses demandes de formation en 2017 et le refus opposé à sa demande de formation au Certificat d'aptitude aux fonctions de directeur d'établissement ou de service d'intervention sociale (CAFDES) l'année suivante. Il produit à ce titre :

- Le procès-verbal de la réunion inter-CE du 1er avril 2016 au cours de laquelle M. [H] ' regrettait que sa demande renouvelée pour 2016 de CAFDES, bien qu'accordée l'année dernière, ne figure pas cette année dans la liste des formations demandées et validées par la direction générale. Il demandait que ce point soit notifié dans l'avis du CE pour le siège...' (pièce n°94) ;

- Un courrier du 30 janvier 2018 de la Direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale ayant pour objet une demande de remboursement d'une subvention non-consommée avec en pièce jointe les 6 formations sollicitées par l'APF à l'exception du CAFDES sollicité par M. [H] (pièce n°96) ;

- Le compte rendu d'entretien professionnel du 30 mars 2018 de M. [H] précisant avoir sollicité en vain la formation CAFDES( 'Refus d'une prise en charge de cette formation par l'APF') ;à la question 'D'autres actions ont-elles été menées (bilan de compétences, conseil en évolution professionnelle....) ou des compétences acquises '', le salarié a coché non et précisé 'il ne m'a pas été proposé le Conseil en évolution professionnelle' (pièce n°31).

Le refus de l'employeur de validier la formation sollicitée par le salarié est établi.

5- S'agissant de l'absence de réponse à ses réclamations, M. [H] dénonce un refus de réponse au droit d'expression et courriers des salariés ainsi que l'absence de réponse à ses mails. Il verse aux débats :

- Un document 'droit d'expression des salariés' daté du 20 juin 2017 au terme duquel plusieurs salariés de la Délégation des Côtes d'Armor ( M. [KE], Mme [W], Mme [P], Mme [C] et Mme [A]) dénonçaient des dysfonctionnements dans le versement des salaires, les fiches de paie ainsi qu'un 'manque de communication de la part de la région' (pièce n°3) ;

- Un courrier daté du 20 novembre 2017 au terme duquel cinq salariés de la Délégation des Côtes d'Armor, dont M. [H], sollicitaient 'un positionnement de la direction territoriale' sur les points énumérés comme suit:

'Contexte actuel :

* Présence de la direction territoriale depuis 1 an

* Retour de [S] [H] - chef de projets après un congé parental - Départ de [L] - assistante territoriale pour la retraite

* Pas ou peu de temps de concertation et d'échanges en équipe

* Pas suffisamment de communication ou de positionnement de la Direction territoriale

* Pas de réponse au droit d'expression transmis en juillet 2017

* Difficulté dans le cadre de la réorganisation pour les salariés (signataire ou non-signataire de leur avenant)...' ;

Ce courrier étant conclu ainsi : 'Les salariés ont évoqué une souffrance au travail dans le droit d'expression mais n'ont pas eu de retour malgré plusieurs alertes orales et écrites déjà transmises auprès de la direction.' (pièce n°4) ;

- le courrier de réponse de M. [X], directeur régional Bretagne, transmis le 14 décembre 2017'[...] Pour la réponse au droit d'expression, j'ai demandé à ce qu'elle voit soit faite par écrit le plus rapidement possible, un retour oral n'étant pas de fait suffisant...' (pièce n°5) ;

- Des mails demeurés sans réponse de l'employeur malgré les relances de M.[H]:

* Un mail du 20 novembre 2017, relatifs au départ de Mme [A],

* Un mail du 3 novembre 2017 s'agissant de ses attributions,

* Un mail du 14 mars 2018 sollicitant des précisions sur ses attributions, notamment le pilotage de projets (Stivell, Maison de [Localité 6] etc.) (pièce n°67).

Il n'est fait état d'aucune réponse apportée aux salariés par Mme [MO] Directrice du Territoire en dépit de l'engagement du Directeur régional. Le grief est établi.

6- M. [H] dénonce sa mise à l'écart par sa supérieure hiérarchique des projets et décisions importants relevant de ses attributions de Chef de Projet expert ainsi que l'annonce tardive du départ de son ancienne collaboratrice sans organiser son remplacement. Il produit à ce titre :

- Un mail du 3 novembre 2017 transmis au Directeur Régional : 'Bonjour [E], j'espère que tu vas bien, je me permets de venir te questionner au sujet de défi voile Bretagne ! Je n'ai pas eu de retour sur la place de l'APF dans l'organisation de la nouvelle association créée. Je découvre une invitation pour une assemblée générale en novembre. L'association est-elle présente dans le CA de DVB, est-il envisagé de participer à la préparation du DVB, ai-je encore ma place pour participer aux prochaines manifestations et à leur préparation '! Merci d'avance de ton retour...'

La réponse de M. [X] : 'Bonjour [S], désormais Défi voile Bretagne est une association indépendante. Il a été travaillé au préalable sur les statuts afin que de fait l'APF soit membre de droit du CA. Elle y est en tant que personne morale. C'est donc sur le 56 que nous avons centré désormais notre participation à DVB, plus celle d'[D] [ZM] pour l'aspect régional. Il n'y a donc plus besoin que tu te charges de ce dossier. Je te remercie de l'action menée sur les dernières manifestations...' (pièce n°67) ;

- Un mail daté du 15 novembre 2017 de Mme [MO], informant les salariés ', afin que tout le monde ait le même niveau d'information' concernant la maison de [Localité 6]. Depuis l'assemblée départementale, il y a eu plusieurs courriers avec le Président APF...'

Suivi de la réponse de M. [H] : 'Bonsoir [G], merci pour les informations sur la maison de [Localité 6]. En ma qualité de cadre de l'association, (d'ancien DD) et de par ma connaissance de ce dossier, je suis très surpris de ne pas être plus associé aux démarches en lien avec ce 'pseudo projet' '! J'étais présent à l'AD (et des échanges sur la maison) et j'ai eu vent de démarches en cours auprès Du Conseil d'Administration. [...] Je rappelle que dans le courrier du 8 juin 2016 de [E] [X], que tu as eu la gentillesse de me transmettre, il est fait part de ce projet dans mes missions à venir, (ainsi que Défi Voile). Il me semble que l'on m'a fait miroiter des projets qui ne pourront, a priori, jamais m'être attribués.

J'avoue ne pas avoir saisi le fil de ces histoires et démarches mais je peux déjà te dire que de nombreux acteurs de l'association (adhérents, bénévoles et salariés) sont dans une incompréhension face à ce qui a été réalisé jusqu'à ce jour. Je ne sais que leur dire :-(...' (pièce n°93) ;

- Un mail du 8 décembre 2017 de Mme [MO] informant M.[H] et certains salariés que 'le sujet de la vente de la maison de [Localité 6] issue de la succession d'[U] [US] est prévu à l'ordre du jour du Conseil d'administration du 16 décembre' ;

suivi de la réponse datée du 13 décembre 2017 de M. [H] : 'Bonjour, j'aimerais connaître ta position au final au sujet de la Maison de [Localité 6] vis-à-vis de l'équipe des salariés, des élus, des acteurs du secteur de [Localité 6] et des élus du Conseil d'administration. Qu'envisages-tu de faire de cette maison, as-tu envoyé une note / argumentaire pour la décision du Conseil d'administration prévu le 16 décembre '!

Quelle stratégie prévois-tu en fonction des décisions prises par le CA '! Conservation de la maison - qui d'un projet ' Ou vente de la maison entraînant un autre projet sur le même secteur - quid d'un projet ' Merci d'avance de ton éclairage.' (pièce n°69) ;

- Un mail du 8 novembre 2017 de Mme [MO] annulant une réunion prévue le 6 novembre 2017, et 'décalée à la semaine prochaine. Dans l'idéal le jeudi 16 novembre...' ;

la réponse du 10 novembre 2017 de M. [H]: 'Bonjour [G], il me semble que plusieurs personnes sont indisponibles pour cette date, j'aimerais avoir les éléments de travail de l'année sur les rencontres territoriales, stp. Également connaître l'objectif de cette rencontre et l'horaire de cette (éventuelle) 'réunion'.' (pièce n°95) ;

- Un mail daté du 21 novembre 2018 à M. [ZM], Responsable interrégional des actions associatives : '[...] Pour le moment, je t'avoue que je suis un peu isolé, je n'ai pas beaucoup d'échanges avec [G] malgré mes demandes régulières de travail concerté, je suis dans une démarche active en allant régulièrement au devant de la direction mais je ne suis pas associé au travail sur les dossiers au sein de la DD22 sauf exception (lien Gebetex) et je découvre a posteriori, ce n'est pas toujours facile de travailler dans ce cadre et de trouver une place dans mes nouvelles fonctions. Je suis également sollicité par mes collègues pour du soutien sur le 22 et également sur la défense des droits qui me prend du temps (notamment sur les recours contentieux)...' (pièce n°67);

- Un mail daté du 20 novembre 2017 à Mme [MO] : 'Bonjour [G], je suis surpris d'apprendre ce midi le départ de [L] ([A]) prévu demain !!! Il aurait été sympa de prévenir l'ensemble des salariés...

Qui prend ses fonctions '! Est-elle remplacée '! Dans l'attente, qui fait le boulot '!Il y a un manque énorme de communication au sein de la DD22 - cela crée un malaise profond au sein des salariés '! Il est urgent de se bouger et de remettre un minimum 'd'humain' dans les échanges entre collègues et un rapport de confiance... Merci de ton retour. Bien cordialement' (pièce n°67);

- Un mail de relance du 23 novembre 2017 à Mme [MO] : 'Bonjour [G], j'ai eu [L] au téléphone, j'ai pris rendez-vous avec elle pour la transmission de ses dossiers, tu n'as rien prévu à cet effet, je ne comprends pas que l'on puisse la laisser partir sans prévoir de passage de relais '!

J'aimerai que ce soit plus clair dans l'organisation et le lien entre les salariés.

Je ne sais pas quand tu seras à [Localité 7] '! J'aimerais avoir des réponses à mes demandes et remarques (cf : mails précédents)...'

Ce mail étant suivi de la réponse du 23 novembre 2017 de Mme [MO]: 'Bonjour, j'ai également eu [L] au téléphone nous ferons la transmission des dossiers avec elle mardi après midi. La réunion d'équipe sera aussi l'occasion d'aborder la transmission des dossiers...' (pièce n°95) ;

- L'édito de novembre-décembre 2017 de l'association APF 22 annonçant le départ de Mme [A], attachée de délégation ayant collaboré avec M. [H] pendant 8 ans (pièce n°61) ;

- Un mail du 5 décembre 2017 dans lequel M. [H] sollicitait la transmission d'une copie du budget prévisionnel de la Délégation 22 auprès de M. [X]'Au final, je remplis des trous des salariés absents et je récupère des dossiers qui n'ont pas été traités par manque d'intérêts '! Je ne sais pas où nous allons en 2018, il n'y a aucun cap !

Je ne sais pas quelle est la décision du CA pour la Maison de [Localité 6], je reste très amer d'avoir été écarté de tout échange à ce sujet... volontaire ou par grande négligence...' (pièce n°16) ;

- Un mail du même jour : 'Bonjour, je m'indigne que des personnes qui ne connaissent pas l'activité des délégations 22 et 29 puissent produire un budget prévisionnel. Pourquoi ne pas nous associer au travail préparatoire '! Est-ce cela le 'faire autrement' '! Quel est le rôle du Chef de projet ressources dans tout cela '! Et du directeur de délégation '!Il est nécessaire (urgent) de remettre du lien entre les acteurs et de la cohérence dans les actions et le fonctionnement de nos délégations 22 et 29.' (pièce n°16) ;

- Des mails échangés avec Mme [MO]: 'Bonjour [G], (..).Je t'ai déjà communiqué des demandes de soutien sur des projets de famille pour des appartements groupés / inclusifs sur le département des Côtes d'Armor. Je t'avais fait part de leur démarche.[...][J] et [R] n'ont pas compris le lien entre la demande et la proposition que tu as fait. Je me suis retrouvé très bête et ne sachant pas quoi leur répondre pour les apaiser, ils étaient entre la colère et le désespoir... Ils m'ont dit qu'ils pensaient perdre leur temps à l'APF et qu'ils ne comprenaient pas le manque de soutien.(..). Voilà pour mon retour, je pense qu'il serait bien de les contacter...' (pièce n°99).

Ces éléments établissent la mise à l'écart de M.[H] par sa supérieure hiérarchique ainsi qu'un important manque de communication et de transmission des informations nécessaires à l'exercice de ses tâches.

7- S'agissant de la notification de deux sanctions disciplinaires injustifiées en moins d'un an après son retour de congé parental, le salarié produit :

- Ses bulletins de salaire mentionnant son congé parental d'éducation jusqu'au 31 octobre 2017 (pièce n°66) ;

- l'avertissement du 29 janvier 2018 motivé par la tenue de propos violents et inadapté, un comportement inadapté dans l'exécution du travail (critiques et dénigrements des missions et envoi de mails intempestifs pouvant générer de la suspicion sur le travail effectué) et un refus récurrent de se conformer aux instructions de l'employeur et un manque de loyauté (pièce n°9) ;

- sa requête du 8 mars 2018 dénonçant le caractère injustifié et disproportionné de l'avertissement du 29 janvier 2018 '( ..)dévoué à l'association depuis des années, je suis apprécié dans mon engagement professionnel par la grande majorité des acteurs et partenaires qui m'interpellent et me sollicitent toujours pour des demandes concernant l'activité de l'association. (..) revenu en novembre 2017 au travail avec une joie immense, après avoir profité pleinement d'un long congé avec mes enfants. Je suis désemparé de constater que la situation de la Délégation s'est dégradée, durant mon congé et qu'une majorité des acteurs de l'association sont inquiets et m'en fassent part. Je reconnais avoir un franc-parler et me faire souvent le porte-parole des collègues et acteurs de la Délégation 22, lorsque cela me semble nécessaire, ce qui semble pouvoir me nuire...' (pièce n°51) ;

- Le jugement définitif du 17 octobre 2019 ayant annulé l'avertissement du 29 janvier 2018 (pièce n°52).

- le second avertissement notifié le 19 décembre 2018 (pièce n°29).

Au regard de ces éléments et des précédents développements concernant l'annulation de l'avertissement notifié le 19 décembre 2018, le caractère injustifié des sanctions disciplinaires notifiées est établi.

8- S'agissant de la dégradation de son état de santé, le salarié se prévaut des éléments suivants :

- De ses arrêts de travails pour maladie ordinaire pour 'état dépressif réactionnel' sur la période continue du 10 décembre 2018 au 3 juin 2019 (pièce n°65) ;

- Un mail daté du 9 janvier 2019 de Mme [HU] au salarié : 'j'ai appris que tu es en arrêt jusqu'au 31. [BV] m'a fait part du nouvel avertissement que tu as reçu le 24 décembre !!!!!!Je suis vraiment désolée, peinée pour toi mais aussi, effarée par tant de méchanceté à ton égard.

(..)Même s'ils ne peuvent pas te le dire, nous sommes plusieurs à être indignés ! [...] Avec tellement de capacités et de connaissances, il est vraiment dommage que l'APF veuille se passer de quelqu'un comme toi. Je suis certaine que tu trouveras un nouvel emploi où on saura reconnaître tes valeurs. En tout cas je te le souhaite vraiment...' (pièce n°46) ;

- Un certificat médical d'une psychologue clinicienne assurant un suivi depuis le 4 janvier 2019, de M.[H], en raison de difficultés personnelles, d'un 'mal-être' ressenti, dont il attribuait l'origine à un environnement professionnel dans lequel il ne trouvait plus ses repères.' (pièce n°64)

- Une fiche d'inaptitude médicale avec dispense de reclassement, du 17 juin 2019 ; précisant : 'tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé' (pièce n°53) ;

La dégradation de l'état de santé du salarié est également établie.

9- S'agissant des injonctions de régler certains dossiers hors délais et du refus de signer le compte rendu de l'entretien professionnel du 30 mars 2018, force est de constater que le salarié ne produit aucun élément à l'appui . Ces griefs ne sont pas établis.

En revanche, les autres éléments matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral envers M.[H]. Il convient par conséquent de rechercher si l'employeur démontre que ses agissements et ses décisions sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

S'agissant des imprécisions autour de la fiche de poste du salarié, l'Association APF France Handicap verse aux débats la fiche de poste initiale remise à M. [H] en juin 2016 (pièce n°26), la fiche de poste définitive adressée en juillet 2018 suite aux modifications formulées par le salarié (pièce n°27) et la fiche de poste adressée à la médecine du travail le 11 juin 2019 (pièce n°70).

Contrairement aux allégations de l'Association qui prétend que 'les missions indiquées dans la fiche de poste de M.[H] étaient parfaitement en lien avec ses fonctions de chef de projet expert qu'il occupait depuis la signature de son avenant au contrat de travail le 24 juin 2016", il ressort des mails et des alertes émanant tant des syndicats CFDT et CGT que du CHSCT que les nouvelles missions de M. [H] n'étaient pas définies de manière précise à l'issue de la réorganisation intervenue en 2016, impliquant la suppression du poste de Directeur Départemental et la création du poste de Directeur de Territoire, devenu le supérieur héiérarchique du salarié . Par ailleurs, M.[H] démontre qu'il était régulièrement tenu à l'écart, voire placardisé, par sa supérieure hiérarchique, qu'il n'était pas tenu informé de l'évolution des projets qui lui étaient confiés, du montant des ressources qui lui étaient allouées.

Si l'employeur justifie de la transmission tardive en juillet 2018 d'une fiche de poste définissant les activités principales du poste de chef de projet (pilotage et gestion de projets, cadre de proximité à la délégation des Côtes d'Armor, participation à la vie associative etc.), il est établi que M. [H] ne disposait pas des informations et des ressources nécessaires à la mise en oeuvre des projets qu'il était pourtant chargé d'élaborer.

Les ambiguïtés dans la délimitation de ses nouvelles attributions à compter du 1er juillet 2016 étaient source d'incompréhension et de tensions réelles avec ses supérieures hiérarchiques (Mme [MO] et Mme [V] [N]) lesquelles se plaignaient du comportement de M.[H] qualifié d'inapproprié dans le courrier d'avertissement.

Alors que les instances représentatives et les salariés de l'association exprimaient ouvertement leurs inquiétudes quant aux contours des postes nouvellement créés, l'absence de réaction et de réponse concrète de l'employeur est particulièrement fautive à l'égard de M. [H] en proie à une souffrance manifestant ses difficultés réelles d'adaptation dans ses nouvelles fonctions en l'absence de définition précise des dites fonctions et d'un accompagnement de la Direction territoriale.

S'agissant des difficultés dans l'organisation des entretiens professionnels et réunions, l'Association soutient que la problématique est limitée à un seul entretien proposé le 21 décembre 2017 coïncidant avec un jour d'absence du salarié qui a au surplus refusé ledit entretien.

L'association ne fournit toutefois aucune explication cohérente sur le fait que M.[H] était parfois convoqué la veille de réunions, qu'il devait solliciter de Mme [MO] l'ordre du jour, les comptes rendus de précédentes réunions auxquelles il n'avait pu assister, les budgets et autres éléments nécessaires à la compréhension des sujets qui devaient être abordés.

Enfin, l'argument selon lequel il était difficile d'organiser des réunions avec M. [H] au motif qu'il était 'difficilement disponible' n'est corroboré par aucun élément objectif..

S'agissant des incidents récurrents relatifs aux éléments de rémunération et congés du salarié, l'association soutient avoir régularisé les problématiques dénoncées par M. [H] et verse aux débats le jugement du 17 octobre 2019 n'ayant pas fait l'objet d'un appel (pièce n°30), un document d'information communiqué en annexe au bulletin de paie de janvier 2017 (pièce n°55), ainsi qu'un courriel de la Direction Générale expliquant les difficultés rencontrées lors du déploiement du système d'information des ressources humaines, dit SIRH (pièce n°56).

Si l'association soutient que ces problématiques résultaient d'un changement de système d'information des ressources humaines sans viser personnellement M.[H], il n'en demeure pas moins que l'employeur a fait preuve d'une négligence fautive envers le salarié dont les demandes remontant pour certaines à novembre 2017 ont été reconnues justifiées en cours de procédure en septembre 2019 'après vérification par ses services'.

S'agissant du refus de formation, l'Association justifie par son refus de formation par le fait que M. [H] n'avait pas accepté le poste de Directeur de territoires à la mi 2016.

Toutefois, l'employeur a une obligation d'adaptation des salariés à leur emploi et veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi et peut leur proposer des formations qui participent au développement des compétences, en application des articles L. 6321-1 et suivants du code du travail.

Dans ces conditions, l'Association ne saurait justifier le refus opposé au salarié de suivre la formation en vue de l'obtention du CAFDES au seul motif que l'intéressé n'avait pas accepté lors de la réorganisation le poste de Directeur de Territoires, étant précisé que sa candidature à la formation en cause avait été précédemment validée en 2016.

S'agissant de l'absence de réponse aux mails et réclamations du salarié, l'association conteste le défaut de réponse au droit d'expression des salariés en produisant des réponses de la Direction (pièce n°43) ainsi que la seconde réponse apportée par M. [X] le 22 novembre 2017 (pièce n°44).

Outre l'absence de précision sur la date à laquelle une première réponse a été apportée par la Direction suite au courrier de juin 2017 intitulé 'Droit d'expression des salariés', force est de constater que le Directeur Bretagne de l'association s'est borné à renvoyer M.[H] auprès de sa supérieure hiérarchique Mme [MO] dont il n'est pas établi qu'elle ait déféré à cette demande : 'Pour la réponse au droit d'expression, j'ai demandé à ce qu'elle vous soit faite par écrit le plus rapidement possible, un retour oral n'étant pas de fait suffisant...' (pièce n°5 salarié).

Par ailleurs, si l'association soutient que le courriel du 14 mars 2018 de M. [H] n'appelait pas de réponse de Mme [MO] au motif que les parties avaient convenu d'un entretien organisé le lendemain, elle ne s'explique pas sur les autres courriels demeurés sans réponse aux termes desquels le salarié déplorait un manque de communication flagrant, pas plus qu'elle ne s'explique sur les réponses tardives et imprécises des supérieurs hiérarchiques après relance et insistance de M.[H].

S'agissant de la mise à l'écart de M. [H] se traduisant par le retrait de projets et la non-transmission d'informations, l'Association explique que le projet Défi voile Bretagne (DVB) a été confiée à une association indépendante et produit à ce titre les mails échangés entre M. [H] et M. [X] (pièce n°30).

Toutefois, l'employeur procède uniquement par voie d'affirmations en indiquant que le projet litigieux 'ne relevait plus du champ professionnel et géographique de ses nouvelles fonctions', alors que :

- le mail du 15 novembre 2017 du salarié à son employeur selon lequel le projet Défi Voile Bretagne faisait partie de ses missions à venir n'a pas été remis en cause par l'association (pièce n°93 salarié)

- il ne produit aucun élément émanant de la nouvelle association Défi Voile Bretagne permettant de justifier la désignation d'un membre de la délégation du Morbihan, en lieu et place de M. [H], ayant précédemment participé à l'organisation de cet événement.

En ce qui concerne le devenir de la maison de [Localité 6] léguée, l'Association explique que le salarié n'a pas été tenu informé de l'évolution du projet en raison de l'absence de M.[H], placé en congé parental

( décembre 2016 -novembre 2017). Toutefois, il résulte de ses courriels que le salarié a sollicité dès son retour des informations 'Je ne sais pas quelle est la décision du CA pour la maison de [Localité 6], je reste très amer d'avoir été écarté de tout échange à ce sujet...' , sollicitant le 8 décembre 2017 des réponses de Mme [MO] sur la position du Conseil d'administration sur l'avenir de la maison de [Localité 6] ainsi que les éventuels projets y afférents (pièces n°16 et 69 salarié).

Il est ainsi établi qu'à son retour de congé parental, les projets confiés à M. [H] et toujours en cours , lui ont été retirés, sans explication objective ni qu'il soit informé de l'évolution des projets dont il était chargé du développement en sa qualité de Chef de Projet Expert.

L'association APF France Handicap ne peut pas, sous couvert que M. [H] n'était plus Directeur Départemental légitimer le refus de lui transmettre les informations relatives au budget prévisionnel et à la situation bancaire de la délégation des Côtes d'Armor (22) alors que :

- sa fiche de poste de Chef de Projet Expert faisait référence à la fois au 'Développement des opérations ressources de la délégation 22" et à l'animation des projets 'sur les plans techniques, budgétaires et calendaires', supposant que le salarié dispose des éléments financiers nécessaires à la définition et le suivi des projets (pièce n°70 association) ;

- le salarié a interpellé Mme [MO] sur le volet ressources mentionné à sa fiche de poste, indiquant ne plus avoir aucune information sur les finances, 'informations pourtant nécessaires pour définir une stratégie et connaître les dynamiques et attentes du Conseil d'administration de l'association' (mail du 2 août 2018, demeuré sans réponse: pièce n°25 salarié).

Enfin, l'association soutient que le départ de Mme [A] , occupant le poste d'attachée de délégation auprès du salarié durant de nombreuses années, n'a eu aucune incidence sur le travail de M. [H].Cette explication est contredite par les trois mails adressés les 5 décembre 2017, 18 décembre 2017 et 2 août 2018 de M. [H] évoquant ses difficultés à exercer ses missions de Chef de projet et le traitement de dossiers et autres tâches qui lui sont confiées en l'absence de salariés: 'je ne peux pas continuer à boucher les trous et faire le travail au pied levé de chacun' (pièce n°16 et 25 salarié).

L'association échoue à démontrer que les faits matériellement établis sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le harcèlement moral invoqué par M.[H] est donc caractérisé.

Dans ces conditions où les agissements répétés de l'employeur ont eu pour effet de dégrader les conditions de travail et d'altérer l'état de santé du salarié, caractérisant une situation de harcèlement moral étant à l'origine de l'inaptitude physique de M. [H], il y a lieu de prononcer la nullité du licenciement intervenu le18 juillet 2019, par voie de confirmation du jugement entrepris.

3- Sur le manquement de l'employeur à son obligation de prévention du harcèlement moral

Pour infirmation du jugement entrepris, l'employeur conteste tout manquement à son obligation de sécurité et soutient avoir mis en oeuvre les mesures de prévention nécessaires en matière de harcèlement moral et qu'en tout état de cause, M. [H] n'a jamais alerté sa hiérarchie sur le harcèlement qu'il prétend avoir subi.

Le salarié sollicite la confirmation du jugement.

Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail :

" L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

'Ces mesures comprennent :

1 Des actions de prévention des risques professionnels ;

2 Des actions d'information et de formation ;

3 La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

' L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.'

Aux termes de l'article L. 4121-2 du même code :

" L'employeur met en 'uvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1. Eviter les risques ;

2. Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3. Combattre les risques à la source ;

4. Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé;

5. Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;

6. Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7. Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L.1152-1 et L. 1153-1 ;

8. Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9. Donner les instructions appropriées aux travailleurs. "

L'obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlements moral et sexuel et ne se confond pas avec elle (Soc., 7 avril 2016, pourvoi n°14-23.705 ; Soc., 27 novembre 2019, pourvoi n°18-10.551).

Il appartient à l'employeur de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements constitutifs de harcèlement moral (article L. 1152-4 du code du travail) et de harcèlement sexuel (article L. 1153-1 du code du travail).

La prévention du harcèlement moral ou sexuel s'inscrit dans le cadre de l'obligation générale de prévention de la santé et de la sécurité au travail pesant sur l'employeur.

Conformément au deuxième alinéa de l'article L. 1321-2 du code du travail, l'employeur doit veiller à rappeler, dans le règlement intérieur, les dispositions du code du travail relatives aux harcèlements moral et sexuel ainsi qu'aux agissements sexistes.

Enfin, l'employeur qui justifie pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, mais qui, également informé de l'existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser, ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (pour des faits de harcèlement moral : Soc., 1er juin 2016, pourvoi n°14-19.702 - pour des faits de harcèlement sexuel : Soc., 13 décembre 2017, pourvoi n°16-14.999).

Au cas d'espèce, l'Association APF France Handicap se prévaut des procédures d'alerte internes prévues par les accords d'entreprise et verse aux débats le règlement intérieur prévoyant: 'Tout acte constitutif de harcèlement sexuel ou de harcèlement moral est strictement prohibé au sein de L'APF. Tout auteur de ce type d'acte s'expose à une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement. Il en est de même à l'encontre de tout auteur de fausse accusation délibérée' (pièce n°5).

Si l'employeur justifie de l'existence d'actions d'informations et d'organismes nécessaires à la prise en charge des risques psychosociaux (RPS) au sein de la structure, elle ne justifie pas de la mise en oeuvre d'une quelconque mesure ayant permis d'éviter ou de mettre un terme à la situation de mal-être exprimé par M. [H] dès novembre 2017.

Contrairement aux moyens développés par l'Association qui prétend que le salarié n'a jamais alerté sa hiérarchie, le fait que M. [H] n'ait pas expressément mentionné une situation de harcèlement moral pour qualifier les agissements ayant dégradé ses conditions de travail et altéré son état de santé est inopérant dès lors que ses supérieurs hiérarchiques et la Direction régionale de l'Association ont été alertés tant par le salarié dans ses mails que par le CHSCT.

Dans ces conditions, l'Association APF France handicap dont il est acquis qu'elle n'a donné aucune suite à l'alerte de janvier 2016 du CHSCT sur le mal-être de M. [H], n'a mis en place aucune mesure d'accompagnement des salariés affectés par la réorganisation interne impliquant la suppression de plusieurs postes dont celui occupé par M.[H] et n'a apporté aucune réponse appropriée aux réclamations du salarié qui déplorait sa mise à l'écart, le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité est établi.

L'inaction de l'Association APF France handicap s'agissant de la situation de M. [H] est d'autant plus blâmable qu'il ressort de ses écritures et des pièces produites qu'elle a en revanche pris des mesures suite à l'alerte du 22 mars 2018 des directeurs de régions dénonçant la situation de souffrance de Mme [MO], de sorte que cette dernière a bénéficié d'un accompagnement par un cabinet spécialisé extérieur afin de 'retrouver de la sérénité dans son travail' (pièces n°66 et 67).

C'est donc par une juste appréciation des faits de l'espèce que le conseil de prud'hommes a jugé que l'Association APF France Handicap a manqué à son obligation de sécurité.

4- Sur les conséquences financières

Eu égard aux précédents développements, M. [H] est fondé à solliciter des dommages et intérêts au titre du préjudice distinct résultant des agissements de harcèlement moral, du manquement à l'obligation de prévention du harcèlement moral mais également au titre du licenciement nul, outre l'indemnité compensatrice de préavis dont le quantum est discuté.

4-1 Sur les dommages et intérêts au titre du harcèlement moral

Les agissements de harcèlement moral subis au cours de l'exécution de son contrat de travail ont été la source d'un préjudice pour le salarié qui sera justement réparé par la condamnation de l'Association, par voie de confirmation du jugement entrepris, à payer à M. [H] la somme de 7 500 euros à titre de dommages et intérêts.

4-2 Sur les dommages et intérêts au titre du manquement à l'obligation de prévention du harcèlement moral

Indépendamment du préjudice subi au titre du harcèlement moral, le non-respect par l'employeur de son obligation de prévention de tels agissements est la source d'un préjudice distinct, caractérisé par la survenance d'un événement dommageable dont le risque pouvait précisément être contenu par la mise en place de mesures de prévention adaptées et répondant aux conditions posées par l'article L4121-2 précité de code du travail.

Le jugement entrepris sera infirmé uniquement sur le quantum alloué à ce titre et l'Association APF France handicap sera condamnée à verser à M. [H] la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts au titre du manquement à l'obligation de sécurité.

4-3 Sur les dommages et intérêts au titre du licenciement nul

En application de l'article L. 1235-3-1 du code du travail et dès lors que M. [H] dont le licenciement est nul ne demande pas sa réintégration, il a droit à une indemnité réparant le préjudice subi résultant du caractère illicite de son licenciement et au moins égale à six mois de salaire, quels que soient son ancienneté et l'effectif de l'entreprise.

En l'espèce, M. [H], âgé de 43 ans au moment du licenciement, bénéficiait d'une ancienneté de 9 ans et 10 mois au sein de l'entreprise et percevait un salaire de 3 475,58 euros bruts par mois au vu des bulletins de salaire produits aux débats au cours de la période précédant son arrêt de travail pour maladie du 10 décembre 2018.

Le salarié sollicite la confirmation du jugement entrepris ayant condamné l'Association à lui verser la somme de 35 000 euros de dommages et intérêts sans développer de moyens à l'appui ni justifier sa situation professionnelle depuis la rupture.

Au vu des éléments d'appréciation dont dispose la cour, le préjudice du fait de la nullité du licenciement de M. [H] sera indemnisé par l'octroi de la somme de 28 000 euros, par voie d'infirmation du jugement sur le quantum.

4-4 Sur l'indemnité compensatrice de préavis

Il est constant que lorsque le licenciement est nul, le salarié a droit à l'indemnité compensatrice de préavis, peu important qu'il soit ou non en mesure d'exécuter le préavis (Soc., 6 octobre 2010, pourvoi n° 09-42.283).

M. [H] sollicite l'infirmation du jugement au motif qu'en sa qualité de cadre il aurait dû percevoir une indemnité représentant 3 mois de salaire, soit 11 220 euros incluant les congés payés afférents.

Il justifie du bénéfice des dispositions conventionnelles plus favorables, en l'espèce l'article 9 de l'annexe 6 spécifique aux cadres de la convention collective nationale, prévoyant une indemnité compensatrice de quatre mois de salaire.

Le salaire mensuel brut moyen à retenir étant de 3 475,58 euros, il sera alloué à M. [H] une indemnité compensatrice de préavis , dans la limite de sa demande, de 11 469.41 euros incluant les congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé sur le quantum.

5- Sur le remboursement des indemnités de chômage

Par application combinée des articles L. 1235-3 et L. 1235-4 du code du travail, lorsque le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Sur ce fondement, il y a lieu de condamner l'Association APF France Handicap à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage payées, le cas échéant, à M. [H] à compter du jour de la rupture du contrat de travail, dans la limite de trois mois d'indemnités, par voie d'infirmation du jugement sur le quantum.

6- Sur les intérêts au taux légal

Conformément aux dispositions des articles 1231-7 et 1344-1 du code civil, les intérêts au taux légal sur les condamnations prononcées seront dus à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes pour les sommes à caractère de salaire et à compter du présent arrêt pour le surplus. Le jugement sera infirmé s'agissant du point de départ des créances salariales.

7- Sur les dépens et frais irrépétibles

En application de l'article 696 du code de procédure civile, l'Association APF France handicap, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.

Condamnée aux dépens, elle sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande en revanche de condamner l'Association, sur ce même fondement juridique, à payer à M. [H] une indemnité d'un montant de

2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne :

- le montant des dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité

- le montant des dommages et intérêts pour licenciement nul,

- le montant de l'indemnité compensatrice de préavis,

- les indemnités versées à France Travail,

- le point de départ des intérêts légaux sur les créances salariales,

Statuant à nouveau des seuls chefs infirmés et y additant,

Condamne l'Association APF France Handicap à verser à M. [H] les sommes suivantes :

- 11 469.41 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis incluant les congés payés y afférents,

- 5 000 euros de dommages et intérêts au titre du manquement à l'obligation de sécurité,

- 28 000 euros de dommages et intérêts au titre du licenciement nul ;

Dit que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et que les autres sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de la décision qui les prononce ;

Condamne l'Association APF France Handicap à rembourser à l'organisme gestionnaire de l'assurance chômage, dénommé Pôle emploi à la date de l'ordonnance de clôture et France Travail depuis le 1er janvier 2024, les allocations de perte d'emploi versées à M. [H] dans la proportion de trois mois ;

Condamne l'Association APF France Handicap à verser à M. [H] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute l'Association APF France Handicap de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne l'Association APF France Handicap aux entiers dépens d'appel.

Le Greffier Le Président

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