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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-7, 6 novembre 2025, n° 21/16264

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/16264

6 novembre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-7

ARRÊT MIXTE

DU 06 NOVEMBRE 2025

N° 2025/ 398

Rôle N° RG 21/16264 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BINEJ

Syndic. de copro. SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DE L'ENSEMBLE IMMOBIL IER [Adresse 4]

C/

SCI LA PALETTE ORANGE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Nicolas SIROUNIAN

Me Sandra JUSTON

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Président du TJ de [Localité 6] en date du 29 Septembre 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 21/05296.

APPELANT

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 4] (VAR), agissant poursuites et diligences de son administrateur provisoire, Maître [H] [L], associé de la SELARL [L] & ASSOCIES, immatriculée au RCS DE MARSEILLE sous le N°509 306 127, dontle siège social est situé [Adresse 2], à ces fonctions nommé selon ordonnance rendue le 17 décembre 2015 par Monsieur le Président du Tribunal de Grande Instance de Draguignan en remplacement de Maître [W] [L], dernièrement prorogée jusqu'au 9 mars 2024 par ordonnance du 1er juillet 2022.

représenté par Me Nicolas SIROUNIAN de la SELARL PROVANSAL D'JOURNO GUILLET & ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMÉE

SCI LA PALETTE ORANGE Prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Philippe AMSELLEM, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Septembre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Carole MENDOZA, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre

Madame Carole MENDOZA, Conseillère

Madame Florence PERRAUT, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Novembre 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Novembre 2025

Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

La SCI LA PALETTE ORANGE est propriétaire au sein d'un ensemble immobilier organisé en copropriété.

Par acte d'huissier du 04 août 2021, le syndicat des copropriétaires, représenté par son administrateur provisoire, a fait assigner la SCI LA PALETTE ORANGE devant le tribunal judiciaire de Draguignan statuant selon la procédure accélérée au fond, en règlement de charges de copropriété et de dommages et intérêts.

Par jugement réputé contradictoire du 29 septembre 2021 et selon la procédure accélérée au fond, le président du tribunal judiciaire de Draguignan a :

- condamné la SCI LA PALETTE ORANGE à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 4], pris en la personne de son administrateur provisoire Maître [H] [L]:

* la somme 13.957,58 euros, outre intérêts au taux légal à compter du16 février 2021,

* la somme 2.000 euros à titre de dommages et intérêts,

* la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI LA PALETTE ORANGE aux entiers dépens.

Le premier juge, qui avait soulevé d'office le moyen tiré de la nullité de l'acte introductif d'instance en raison du défaut de mention relative à l'obligation de la constitution d'un avocat, a estimé que l'assignation n'était pas nulle, en l'absence de grief subi par le défendeur.

Il a relevé que la mise en demeure de la SCI LA PALETTE ORANGE du 16 février 2021 était restée infructueuse pendant un délai de 30 jours. Il a estimé que le syndicat des copropriétaires, qui avait justifié de sa créance au titre des charges des exercices 2012 à 2015, 2018 et 2019, n'avait en revanche pas justifié de sa créance pour les exercices 2016, 2017 et 2020 ni des appels de fonds provisionnels pour l'année 2021.

Le 19 novembre 2021, le syndicat des copropriétaires a relevé appel de cette décision en ce qu'elle a condamné la SCI LA PALETTE ORANGE à lui verser la somme 13.957,58 euros.

La SCI LA PALETTE ORANGE a constitué avocat et formé un appel incident.

Par arrêt avant-dire droit du 16 juin 2022, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a ordonné la réouverture des débats afin d'inviter le syndicat des copropriétaires à justifier de sa représentation, notant qu'il ressortait de ses conclusions que Maître [H] [L] n'était habilité à le représenter que jusqu'au 08 mars 2022.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 septembre 2022 auxquelles il convient de se référer, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 4], représenté par MaîtreVincent [L], demande à la cour :

- de déclarer réguliers les actes de procédure du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 3] à [Localité 8] ([Localité 5], au regard de sa représentation par Maître [H] [L] et sa capacité d'agir en justice,

- de débouter la SCI LA PALETTE ORANGE de son exception de nullité de l'assignation qui lui a été délivrée le 4 août 2021 devant Mme le Président du Tribunal Judiciaire de Draguignan,

- d'infirmer le jugement déféré rendu le 29 septembre 2021 uniquement en ce que le premier juge a limité à la somme de 13.957,58 euros le montant de la dette de charge de la SCI LA PALETTE ORANGE,

Et statuant à nouveau de ce seul chef,

- de condamner la SCI LA PALETTE ORANGE à lui verser la somme de 20.066,74 euros, comptes arrêtés au 11 février 2021, outre les intérêts capitalisés au taux légal à compter du 11

février 2021,

- de confirmer la décision déférée pour le surplus.

Y ajoutant,

- de condamner la SCI LA PALETTE ORANGE à lui verser la somme de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- de condamner la SCI LA PALETTE ORANGE aux entiers dépens d'appel, dont distraction au

profit de Maître Nicolas SIROUNIAN, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, sur son affirmation de droit.

Il indique produire une ordonnance du premier juillet 2022 qui proroge pour une durée de deux années la mission de Maître [L], en qualité d'administrateur provisoire.

Il expose que la cour n'est pas régulièrement saisie de l'exception de nullité de l'acte introductif d'instance puisque la SCI LA PALETTE ORANGE sollicite uniquement l'infirmation du jugement déféré concernant sa condamnation pécuniaire. En tout état de cause, il conclut au rejet l'exception de nullité en relevant que l'absence de mention relative à la représentation par avocat n'a créé aucun grief à la SCI LA PALETTE ORANGE.

Il déclare justifier de sa créance. Il note que cette copropriétaire ne conteste ni le principe ni le montant de la créance.

Il précise que les troubles de jouissance dénoncés par la SCI LA PALETTE ORANGE ne lui permettent pas de s'exonérer du paiement de ses charges de copropriété.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 septembre 2023 auxquelles il convient de se référer, la SCI LA PALETTE ORANGE demande à la cour :

- de déclarer irrecevable en sa demande le syndicat des copropriétaires de l'immeub1e [Adresse 3] à [Localité 7] pour défaut de droit d'agir,

' de débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 3] à [Localité 7], représenté par son administrateur provisoire, de ses demandes au titre des charges de copropriété, s'agissant des exercices 2016, 2017, 2020 et des appels de fonds provisionnels transmis pour l'année 2021,

Vu les dispositions de l'article 56 du Code de Procédure Civile,

Vu l'absence de mention de la nécessité de constituer avocat sur l'exp1oit introductif d'instance d'origine,

Vu le grief ainsi cause à la SCI LA PALETTE ORANGE qui n'a donc pu assurer sa défense,

- de juger nulle et de nul effet la procédure menée à l'encontre de LA SCI LA PALETTE ORANGE,

A titre subsidiaire et sur le fond :

- d'infirmer à titre principal le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SCI LA PALETTE ORANGE à payer la somme de 13 957,58 euros au syndicat des copropriétaires,

- de condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 3] a SAINT [Adresse 9] à payer à la SCI LA PALETTE ORANGE la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle estime irrecevable la demande formée par le syndicat des copropriétaires qui n'était pas valablement représenté.

Elle soulève la nullité de l'acte introductif d'instance, au motif de l'absence de la mention du caractère obligatoire de la constitution d'avocat. Elle indique avoir subi un grief puisqu'elle n'a pu assurer sa défense.

Elle conteste la créance sollicitée en indiquant que les charges de copropriété sont appelées selon des tantièmes qui ne correspondent pas à l'état descriptif de division. Elle soutient que le syndicat des copropriétaires ne justifie pas de la réalité de sa créance.

Elle ajoute n'avoir pas été régulièrement destinataire des appels de fonds.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 04 septembre 2025.

MOTIVATION

Sur la nullité de l'acte introductif d'instance et sur la nullité du jugement de première instance

La cour est régulièrement saisie de la demande de nullité de l'acte introductif d'instance soulevée par la SCI LA PALETTE ORANGE ; en effet, le premier juge n'a pas évoqué, dans le dispositif de sa décision, la question de la nullité de l'acte introductif d'instance, si bien que l'intimée n'avait pas à solliciter l'infirmation du jugement déféré dont le dispositif n'a pas tranché cette question.

Selon l'article 56 du code de procédure civile et sous peine de nullité, l'assignation contient, à peine de nullité, l'indication des modalités de comparution devant la juridiction.

Aux termes de l'article 114 du code précité, la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

L'absence de mention de la constitution d'un avocat dans l'acte introductif d'instance n'a pas créé un grief au détriment de la SCI LA PALETTE ORANGE puisque cette dernière n'a pas comparu à l'audience de première instance, que ce soit en personne ou représentée par une personne ne pouvant la représenter.

Il convient en conséquence de rejeter la demande d'annulation de l'acte introductif d'instance et par voie de conséquence la demande de nullité du jugement déféré.

Sur l'irrecevabilité de la demande du syndicat des copropriétaires pour défait du droit d'agir

L'article 122 du code de procédure civile énonce que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Il ressort des mentions d'un arrêt du 06 juillet 2023 rendu par la cour d'appel d'Aix-en-Provence que le syndicat des copropriétaire était représenté par Maître [H] [L], selon ordonnance du 17 décembre 2015, en remplacement de Maître [W] [L], mission prorogée jusqu'au 08 mars 2022 par ordonnance du 30 novembre 2020. Cette dernière ordonnance est également produite au débat (pièce 2 du syndicat des copropriétaires).

Par ordonnance du premier juillet 2022, le président du tribunal judiciaire de Draguignan a prorogé la mission de la SELARL [L] & ASSOCIES, prise en la personne de Maître [H] [L], es qualité d'administrateur provisoire, pour une durée de deux ans à compter du 09 mars 2022.

Dès lors, le syndicat des copropriétaires est valablement représenté par Maître [H] [L] et ses demandes ne sont donc pas irrecevables.

Sur la demande du syndicat des copropriétaires au titre de l'arriéré de charges

Selon l'article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965, à défaut du versement à sa date d'exigibilité d'une provision due au titre de l'article 14-1 ou du I de l'article 14-2, et après mise en demeure restée infructueuse passé un délai de trente jours, les autres provisions non encore échues en application des mêmes articles 14-1 ou 14-2 ainsi que les sommes restant dues appelées au titre des exercices précédents après approbation des comptes deviennent immédiatement exigibles.

Le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, après avoir constaté, selon le cas, l'approbation par l'assemblée générale des copropriétaires du budget prévisionnel, des travaux ou des comptes annuels, ainsi que la défaillance du copropriétaire, condamne ce dernier au paiement des provisions ou sommes exigibles (...)

Dans le cadre de cette procédure accélérée au fond, deviennent exigible par anticipation :

- les provisions dues au titre de l'article 14-1, c'est-à-dire les provisions sur charges votées au titre du budget prévisionnel de l'exercice entier ;

- les autres provisions non encore échues en application du même article 14-1 ;

- les cotisations du fonds de travaux mentionnées à l'article 14-2-1 ;

De plus, le copropriétaire peut être condamné dans cette même procédure aux sommes appelées au titre de l'arriéré correspondant aux sommes restant dues lors des exercices précédents après approbation des comptes.

Cette procédure particulière permet donc d'obtenir l'exigibilité immédiate des provisions pour charges et travaux non échues du budget provisionnel de l'année en cours à la date de délivrance de la mise en demeure, à défaut de règlement d'une provision à sa date d'exigibilité après une mise en demeure infructueuse ainsi que de solliciter la condamnation au paiement des charges antérieures, à l'exclusion des provisions qui pourraient être dues au titre du budget prévisionnel des années suivant celle en cours au jour de la délivrance de la mise en demeure.

Il résulte de ce texte que le syndicat des copropriétaires ne peut saisir le président statuant selon la procédure accélérée au fond que lorsque le copropriétaire a été vainement mis en demeure de payer une ou plusieurs provisions dues au titre du budget prévisionnel de l'exercice en cours ou des dépenses pour travaux non comprises dans ce budget.

La mise en demeure visée à l'article 19-2 précité, qui constitue le préalable nécessaire à l'introduction de l'instance sur le fondement de ce texte, doit donc indiquer avec précision la nature et le montant des provisions réclamées, à peine d'irrecevabilité de la demande.

Il ressort des deux mises en demeure produites au débat (celle du 09 août 2019 et celle du 16 février 2021) qu'aucune précision n'est apportée sur le montant et la nature des provisions réclamées, les mises en demeure se contentant d'évoquer uniquement un solde débiteur. Il n'est pas démontré que le décompte était annexé aux mises en demeure. Enfin, les mises en demeure n'avertissent pas le copropriétaire qu'à défaut de règlement sous 30 jours à compter de la première présentation de la mise en demeure, il s'expose à une déchéance du terme pour toutes les provisions exigibles au cours de l'exercice. Les mises en demeure se contentent de noter que le copropriétaire est mis en demeure de régulariser sa situation et de régler dans les tous meilleurs délais son arriéré de charges de copropriété dont le montant 'figure ci-dessus'. Les mises en demeure ajoutent que 'la présente constitue donc une diligence entreprise en vue de parvenir à une résolution amiable du litige (...). A défaut de règlement ou de toute démarche de votre part en vue d'aboutir à une solution en ce sens, je serais contraint d'engager à votre encontre une procédure de recouvrement'.

Il convient en conséquence, pour respecter le principe du contradictoire, d'ordonner la réouverture des débats et d'inviter les parties à s'expliquer sur la recevabilité de la demande du syndicat des copropriétaires en arriéré de charges sur le fondement de l'article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965.

Il convient de surseoir à statuer sur les autres demandes et sur les dépens.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt mixte contradictoire, par mise à disposition au greffe ;

REJETTE l'exception de nullité de l'acte introductif d'instance soulevée par la SCI LA PALETTE ORANGE ;

REJETTE la fin de non-recevoir soulevée par la SCI LA PALETTE ORANGE au titre du défaut de droit d'agir ;

ORDONNE la réouverture des débats,

INVITE les parties à s'expliquer sur la recevabilité de la demande du syndicat des copropriétaires en arriéré de charges sur le fondement de l'article 19-2 de la loi du 10 juillet 1965,

SURSOIT à statuer sur les autres demandes et sur les dépens,

RENVOIE l'examen de l'affaire à l'audience du 5 mars 2026 à 9 heures salle 5 Palais Monclar.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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