CA Dijon, 2 e ch. civ., 6 novembre 2025, n° 25/00533
DIJON
Arrêt
Autre
[H] [R]
C/
S.A.S. SAS [P] [K] MANDATAIRE JUDICIAIRE
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE DIJON
2 e chambre civile
ARRÊT DU 06 NOVEMBRE 2025
N° RG 25/00533 - N° Portalis DBVF-V-B7J-GVEM
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 13 mars 2025,
rendue par le tribunal judiciaire de Mâcon - RG : 24/00024
APPELANT :
Monsieur [H] [R], entrepreneur individuel
né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 6] (71)
domicilié :
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me Florian LOUARD, avocat au barreau de MACON/CHAROLLES
INTIMÉE :
SAS [P] [K] MANDATAIRE JUDICIAIRE, représentée par Me [P] [K], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de Monsieur [H] [R]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 04 septembre 2025 en audience publique devant la cour composée de :
Marie-Pascale BLANCHARD, Présidente de chambre,
Bénédicte KUENTZ, Conseiller,
Cédric SAUNIER, Conseiller,
Après rapport fait à l'audience par l'un des magistrats de la composition, la cour, comme ci-dessus composée a délibéré.
l'affaire a été communiquée au Ministère Public, représenté lors des débats par Monsieur Olivier BRAY, avocat général.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Safia BENSOT, Greffier
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 06 Novembre 2025,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Marie-Pascale BLANCHARD, Présidente de chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits, procédure et prétentions des parties
Par jugement rendu le 18 octobre 2018, le tribunal de grande instance de Mâcon a, dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire ouverte le 19 octobre 2017, homologué le plan de redressement de M. [H] [R], exerçant l'activité d'éleveur de bovins à [Localité 7] (71), prévoyant le remboursement de l'intégralité du passif arrêté à la somme de 39 027,16 euros en cinq annuités égales.
La 'SCP' [P] [K] a été désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Par requête reçue au greffe le 12 juillet 2024 et assignation délivrée le 18 novembre suivant au débiteur, le commissaire à l'exécution du plan a sollicité la résolution du plan et l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire en indiquant que seul le premier dividende a été réglé.
Le juge commissaire a communiqué son avis écrit le 09 décembre 2024, puis son rapport le 11 février 2025. Il s'est déclaré très défavorable à la résolution du plan en raison 'des carences des organes de la procédure'.
Le tribunal judiciaire de Mâcon a, par jugement rendu le 13 mars 2025, ordonné la résolution du plan mais a rejeté la demande d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.
Pour parvenir à cette décision, le juge de première instance a considéré, au visa des articles L. 626-27 et R. 626-48 du code de commerce :
- que le non-respect du plan de redressement est établi et non contesté, tandis que le débiteur ne propose aucune solution de poursuite du plan y compris après une modification de celui-ci ;
- que cependant, l'état de cessation des paiements n'est démontré ni par le montant des annuités échues non réglées, ni par le défaut de communication de la comptabilité, ni enfin par le seul fait que le chiffre d'affaires annuel 'est insuffisant pour faire face au passif exigible'.
Par déclaration du 17 avril 2025, M. [R], intimant la société [P] [K], a interjeté appel de ce jugement en sollicitant son infirmation en toutes ses dispositions.
Selon ses dernières conclusions transmises le 06 août 2025, il demande à la cour de 'juger' que son état de cessation des paiements n'étant pas établi, il n'y a pas matière à résolution de son plan de continuation et de condamner l'intimée à lui payer une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.
Il fait valoir :
- que l'instance en résolution du plan a été engagée par le commissaire à l'exécution du plan alors même qu'il a indiqué par courrier du 14 février 2024 être en mesure de verser la somme de 34 000 euros, pour un solde du plan s'élevant à 31 221,72 euros au principal, de sorte qu'il n'est pas en état de cessation des paiements et ne peut donc faire l'objet d'une résolution de son plan ;
- que le juge commissaire s'est opposé à ladite résolution ;
- qu'il convient de prendre en compte la particularité de son activité dont il résulte que la majeure partie de son chiffre d'affaires est constitué d'aides européennes ;
- qu'il propose désormais de régler un dividende 'fin août' et un dividende 'fin octobre' après la perception desdites subventions ;
- qu'au surplus, il n'a pas l'obligation de tenir de comptabilité, dont l'absence ne caractérise pas un état de cessation des paiements.
La société [P] [K] a répliqué en premier et dernier lieu par conclusions transmises le 17 juillet 2025 pour demander à la cour de réformer le chef du jugement ayant rejeté la demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire et, statuant à nouveau, de l'ordonner, de débouter l'appelant de ses demandes et de statuer ce que de droit sur les dépens.
Elle expose :
- que malgré de multiples relances, quatre des cinq dividendes annuels du plan d'un montant nominal de 7 805,43 euros n'ont pas été réglés, bien qu'échus ;
- qu'il en résulte un solde à devoir chiffré à la somme de 33 920 euros au titre du plan et de ses frais et honoraires, y compris ceux afférents à la requête en résolution de celui-ci ;
- que l'avis du juge-commissaire, particulièrement critique vis-à-vis de l'accomplissement de sa mission, n'a pas été soumis au contradictoire en première instance, alors que les reproches d'inertie et de tardiveté lui étant adressés sont sans incidence et en tout état de cause infondés ;
- que c'est précisément par égard à la situation et la nature spécifique de l'activité du débiteur qu'elle a choisi de différer sa requête tendant à la résolution du plan de redressement ;
- que M. [R] ne produit aucun élément de nature à établir qu'il disposes des sommes nécessaires à la régularisation du plan ;
- qu'elle n'est pas en mesure de produire d'éléments concernant l'état de cessation des paiements compte tenu de l'absence de comptabilité qui constitue une faute de gestion, étant rappelé qu'il appartenait au tribunal, s'il s'estimait mal informé, de désigner un juge enquêteur ;
- que cette absence de comptabilité établit la cessation des paiements mais également l'impossibilité de redressement eu égard à la violation des règles comptables et fiscales ;
- qu'en tout état de cause, le chiffre d'affaires annuel annoncé à hauteur de 10 000 euros, sans être établi, est insuffisant pour lui permettre de faire face à son passif ;
- qu'elle ne peut être condamnée en nom personnel aux dépens et au titre des frais irrépétibles.
Par avis communiqué le 1er août 2025, les parties ayant ainsi disposé d'un délai suffisant pour y répondre, le procureur général a indiqué être favorable à la confirmation du jugement dont appel en ce qu'il a ordonné la résolution du plan de redressement ainsi qu'à l'ouverture, après infirmation sur ce point, de la liquidation judiciaire de M. [R].
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 02 septembre 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 04 septembre suivant et mise en délibéré au 06 novembre 2025.
En application de l'article 467 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.
Motifs de la décision
- Sur la demande tendant à la résolution du plan de redressement,
Aux termes de l'article L. 626-27 du code de commerce dans sa version en vigueur au 1er juillet 2014, applicable au cas d'espèce eu égard à la date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, le commissaire à l'exécution du plan est seul habilité à procéder au recouvrement des dividendes impayés par le débiteur.
En application des mêmes dispositions, le tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du ministère public, en décider la résolution si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan.
Lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce dernier décide, après avis du ministère public, sa résolution et ouvre une procédure de redressement judiciaire ou, si le redressement est manifestement impossible, une procédure de liquidation judiciaire.
Le jugement qui prononce la résolution du plan met fin aux opérations et à la procédure lorsque celle-ci est toujours en cours. Sous réserve des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 626-19, il fait recouvrer aux créanciers l'intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues, et emporte déchéance de tout délai de paiement accordé.
En l'espèce, il est constant entre les parties que quatre des cinq dividendes annuels du plan de redressement arrêté le 18 octobre 2018, d'un montant nominal de 7 805,43 euros, n'ont pas été réglés malgré leur échéance respective les 18 octobre 2020, 18 octobre 2021, 18 octobre 2022 et 18 octobre 2023.
Le commissaire à l'exécution du plan atteste de l'envoi de courriels de rappel à M. [R] les 14 décembre 2021, 17 janvier 2022 et 07 février 2024, dont la réception est établie par les réponses d'attente adressées en retour par le débiteur.
Ainsi, si le commissaire à l'exécution du plan ne justifie pas des très nombreuses correspondances qu'il évoque dans sa note au tribunal datée du 12 février 2025, il est constant que M. [R] a été destinataire de plusieurs rappels, auxquels il a opposé diverses difficultés.
Depuis son assignation en liquidation judiciaire après résolution du plan de redressement lui ayant été signifiée le 18 novembre 2024, soit il y a près d'un an, M. [R] n'a effectué aucun règlement au titre dudit plan.
A l'image de ses annonces de règlement auparavant adressées au commissaire à l'exécution du plan, il n'a pas non plus effectué de règlement correspondant à un dividende annoncé 'fin août' dans le cadre de la présente instance.
Ainsi, si la spécificité de l'activité d'élevage exploitée par M. [R] implique la perception de revenus constitués pour une part importante de subventions, le défaut de tout règlement depuis le 23 août 2020, date du versement du premier dividende, démontre l'impossibilité du débiteur d'assumer le plan de redressement mis à sa charge, ce malgré cinq années écoulées depuis.
Dans ce contexte, ce dernier ne formule aucune proposition de réglement fondée sur des éléments démontrant sa capacité de faire face aux échéances impayées, y compris après modification éventuelle du plan de redressement.
Il ne produit aucune pièce relative à sa trésorerie, au montant de son chiffre d'affaires ou à son résultat, ni même encore aux subventions européennes dont il fait état dans ses écritures.
Aucun élément ne permet d'exclure la constitution de nouvelles dettes.
Dès lors, le juge de première instance a, par de justes motifs, prononcé la résolution du plan de redressement de sorte que le jugement critiqué sera confirmé sur ce point.
- Sur la demande tendant à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire,
En application des dispositions ci-avant rappelées, l'ouverture d'une liquidation judiciaire concomitamment à la résolution d'un plan de redressement par voie de continuation est conditionnée par le constat de l'état de cessation des paiements au cours de son exécution.
L'article L. 631-1 du code de commerce définit l'état de cessation des paiements comme étant l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, étant précisé que le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
La cessation des paiements, distincte du simple refus de paiement, doit être établie par celui qui s'en prévaut au soutien de sa demande d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires.
S'il est constant qu'une subvention effectivement délivrée, comme le montant d'une créance à recouvrer avec certitude à court terme, constituent des éléments d'actif disponible, M. [R] ne produit aucun élément établissant le principe même et le montant des subventions qu'il invoque, ni même de relevé de compte bancaire actualisé.
Il résulte de l'état produit par le commissaire à l'exécution du plan que le passif exigible au titre du plan de redressement s'élève à la somme de 33 920 euros frais et honoraires inclus.
Dès lors et à supposer qu'aucun nouveau passif n'a été constitué par le débiteur, M. [R] ne justifie d'aucun actif disponible de nature à lui permettre de faire face à ce passif du plan, étant précisé qu'il résulte de ses annonces - jamais suivies d'effet - d'envoi de chèques au commissaire à l'exécution du plan qu'il n'est pas en mesure de l'assumer.
Son état de cessation des paiements est donc caractérisé, de sorte qu'après infirmation du jugement dont appel sur ce point la liquidation judiciaire sera ordonnée.
- Sur les frais irrépétibles et dépens,
M. [R], qui succombe dans le cadre de la présente instance, sera déboutée de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dépens de l'instance d'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
Par ces motifs,
La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :
Confirme, dans les limites de l'appel, le jugement rendu entre les parties le 13 mars 2025 par le tribunal judiciaire de Mâcon sauf en qu'il a rejeté la demande d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire ;
Statuant à nouveau sur ce chef infirmé et y ajoutant :
Constate l'état de cessation des paiements de M. [H] [R] ;
Ordonne l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de M. [H] [R] ;
Désigne en qualité de liquidateur judiciaire la SAS [P] [K], [Adresse 2] ;
Désigne en qualité de juge-commissaire le magistrat assurant ces fonctions au tribunal judiciaire de Mâcon ;
Rappelle que le délai de la procédure est de vingt-quatre mois sauf prorogation exceptionnelle par le tribunal ;
Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire ;
Rejette la demande formée par M. [H] [R] en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président,
C/
S.A.S. SAS [P] [K] MANDATAIRE JUDICIAIRE
Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le
COUR D'APPEL DE DIJON
2 e chambre civile
ARRÊT DU 06 NOVEMBRE 2025
N° RG 25/00533 - N° Portalis DBVF-V-B7J-GVEM
MINUTE N°
Décision déférée à la Cour : au fond du 13 mars 2025,
rendue par le tribunal judiciaire de Mâcon - RG : 24/00024
APPELANT :
Monsieur [H] [R], entrepreneur individuel
né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 6] (71)
domicilié :
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me Florian LOUARD, avocat au barreau de MACON/CHAROLLES
INTIMÉE :
SAS [P] [K] MANDATAIRE JUDICIAIRE, représentée par Me [P] [K], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de Monsieur [H] [R]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 04 septembre 2025 en audience publique devant la cour composée de :
Marie-Pascale BLANCHARD, Présidente de chambre,
Bénédicte KUENTZ, Conseiller,
Cédric SAUNIER, Conseiller,
Après rapport fait à l'audience par l'un des magistrats de la composition, la cour, comme ci-dessus composée a délibéré.
l'affaire a été communiquée au Ministère Public, représenté lors des débats par Monsieur Olivier BRAY, avocat général.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Safia BENSOT, Greffier
DÉBATS : l'affaire a été mise en délibéré au 06 Novembre 2025,
ARRÊT : rendu contradictoirement,
PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
SIGNÉ : par Marie-Pascale BLANCHARD, Présidente de chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Faits, procédure et prétentions des parties
Par jugement rendu le 18 octobre 2018, le tribunal de grande instance de Mâcon a, dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire ouverte le 19 octobre 2017, homologué le plan de redressement de M. [H] [R], exerçant l'activité d'éleveur de bovins à [Localité 7] (71), prévoyant le remboursement de l'intégralité du passif arrêté à la somme de 39 027,16 euros en cinq annuités égales.
La 'SCP' [P] [K] a été désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Par requête reçue au greffe le 12 juillet 2024 et assignation délivrée le 18 novembre suivant au débiteur, le commissaire à l'exécution du plan a sollicité la résolution du plan et l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire en indiquant que seul le premier dividende a été réglé.
Le juge commissaire a communiqué son avis écrit le 09 décembre 2024, puis son rapport le 11 février 2025. Il s'est déclaré très défavorable à la résolution du plan en raison 'des carences des organes de la procédure'.
Le tribunal judiciaire de Mâcon a, par jugement rendu le 13 mars 2025, ordonné la résolution du plan mais a rejeté la demande d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.
Pour parvenir à cette décision, le juge de première instance a considéré, au visa des articles L. 626-27 et R. 626-48 du code de commerce :
- que le non-respect du plan de redressement est établi et non contesté, tandis que le débiteur ne propose aucune solution de poursuite du plan y compris après une modification de celui-ci ;
- que cependant, l'état de cessation des paiements n'est démontré ni par le montant des annuités échues non réglées, ni par le défaut de communication de la comptabilité, ni enfin par le seul fait que le chiffre d'affaires annuel 'est insuffisant pour faire face au passif exigible'.
Par déclaration du 17 avril 2025, M. [R], intimant la société [P] [K], a interjeté appel de ce jugement en sollicitant son infirmation en toutes ses dispositions.
Selon ses dernières conclusions transmises le 06 août 2025, il demande à la cour de 'juger' que son état de cessation des paiements n'étant pas établi, il n'y a pas matière à résolution de son plan de continuation et de condamner l'intimée à lui payer une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.
Il fait valoir :
- que l'instance en résolution du plan a été engagée par le commissaire à l'exécution du plan alors même qu'il a indiqué par courrier du 14 février 2024 être en mesure de verser la somme de 34 000 euros, pour un solde du plan s'élevant à 31 221,72 euros au principal, de sorte qu'il n'est pas en état de cessation des paiements et ne peut donc faire l'objet d'une résolution de son plan ;
- que le juge commissaire s'est opposé à ladite résolution ;
- qu'il convient de prendre en compte la particularité de son activité dont il résulte que la majeure partie de son chiffre d'affaires est constitué d'aides européennes ;
- qu'il propose désormais de régler un dividende 'fin août' et un dividende 'fin octobre' après la perception desdites subventions ;
- qu'au surplus, il n'a pas l'obligation de tenir de comptabilité, dont l'absence ne caractérise pas un état de cessation des paiements.
La société [P] [K] a répliqué en premier et dernier lieu par conclusions transmises le 17 juillet 2025 pour demander à la cour de réformer le chef du jugement ayant rejeté la demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire et, statuant à nouveau, de l'ordonner, de débouter l'appelant de ses demandes et de statuer ce que de droit sur les dépens.
Elle expose :
- que malgré de multiples relances, quatre des cinq dividendes annuels du plan d'un montant nominal de 7 805,43 euros n'ont pas été réglés, bien qu'échus ;
- qu'il en résulte un solde à devoir chiffré à la somme de 33 920 euros au titre du plan et de ses frais et honoraires, y compris ceux afférents à la requête en résolution de celui-ci ;
- que l'avis du juge-commissaire, particulièrement critique vis-à-vis de l'accomplissement de sa mission, n'a pas été soumis au contradictoire en première instance, alors que les reproches d'inertie et de tardiveté lui étant adressés sont sans incidence et en tout état de cause infondés ;
- que c'est précisément par égard à la situation et la nature spécifique de l'activité du débiteur qu'elle a choisi de différer sa requête tendant à la résolution du plan de redressement ;
- que M. [R] ne produit aucun élément de nature à établir qu'il disposes des sommes nécessaires à la régularisation du plan ;
- qu'elle n'est pas en mesure de produire d'éléments concernant l'état de cessation des paiements compte tenu de l'absence de comptabilité qui constitue une faute de gestion, étant rappelé qu'il appartenait au tribunal, s'il s'estimait mal informé, de désigner un juge enquêteur ;
- que cette absence de comptabilité établit la cessation des paiements mais également l'impossibilité de redressement eu égard à la violation des règles comptables et fiscales ;
- qu'en tout état de cause, le chiffre d'affaires annuel annoncé à hauteur de 10 000 euros, sans être établi, est insuffisant pour lui permettre de faire face à son passif ;
- qu'elle ne peut être condamnée en nom personnel aux dépens et au titre des frais irrépétibles.
Par avis communiqué le 1er août 2025, les parties ayant ainsi disposé d'un délai suffisant pour y répondre, le procureur général a indiqué être favorable à la confirmation du jugement dont appel en ce qu'il a ordonné la résolution du plan de redressement ainsi qu'à l'ouverture, après infirmation sur ce point, de la liquidation judiciaire de M. [R].
Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 02 septembre 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 04 septembre suivant et mise en délibéré au 06 novembre 2025.
En application de l'article 467 du code de procédure civile, le présent arrêt est contradictoire.
Motifs de la décision
- Sur la demande tendant à la résolution du plan de redressement,
Aux termes de l'article L. 626-27 du code de commerce dans sa version en vigueur au 1er juillet 2014, applicable au cas d'espèce eu égard à la date du jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, le commissaire à l'exécution du plan est seul habilité à procéder au recouvrement des dividendes impayés par le débiteur.
En application des mêmes dispositions, le tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du ministère public, en décider la résolution si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan.
Lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce dernier décide, après avis du ministère public, sa résolution et ouvre une procédure de redressement judiciaire ou, si le redressement est manifestement impossible, une procédure de liquidation judiciaire.
Le jugement qui prononce la résolution du plan met fin aux opérations et à la procédure lorsque celle-ci est toujours en cours. Sous réserve des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 626-19, il fait recouvrer aux créanciers l'intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues, et emporte déchéance de tout délai de paiement accordé.
En l'espèce, il est constant entre les parties que quatre des cinq dividendes annuels du plan de redressement arrêté le 18 octobre 2018, d'un montant nominal de 7 805,43 euros, n'ont pas été réglés malgré leur échéance respective les 18 octobre 2020, 18 octobre 2021, 18 octobre 2022 et 18 octobre 2023.
Le commissaire à l'exécution du plan atteste de l'envoi de courriels de rappel à M. [R] les 14 décembre 2021, 17 janvier 2022 et 07 février 2024, dont la réception est établie par les réponses d'attente adressées en retour par le débiteur.
Ainsi, si le commissaire à l'exécution du plan ne justifie pas des très nombreuses correspondances qu'il évoque dans sa note au tribunal datée du 12 février 2025, il est constant que M. [R] a été destinataire de plusieurs rappels, auxquels il a opposé diverses difficultés.
Depuis son assignation en liquidation judiciaire après résolution du plan de redressement lui ayant été signifiée le 18 novembre 2024, soit il y a près d'un an, M. [R] n'a effectué aucun règlement au titre dudit plan.
A l'image de ses annonces de règlement auparavant adressées au commissaire à l'exécution du plan, il n'a pas non plus effectué de règlement correspondant à un dividende annoncé 'fin août' dans le cadre de la présente instance.
Ainsi, si la spécificité de l'activité d'élevage exploitée par M. [R] implique la perception de revenus constitués pour une part importante de subventions, le défaut de tout règlement depuis le 23 août 2020, date du versement du premier dividende, démontre l'impossibilité du débiteur d'assumer le plan de redressement mis à sa charge, ce malgré cinq années écoulées depuis.
Dans ce contexte, ce dernier ne formule aucune proposition de réglement fondée sur des éléments démontrant sa capacité de faire face aux échéances impayées, y compris après modification éventuelle du plan de redressement.
Il ne produit aucune pièce relative à sa trésorerie, au montant de son chiffre d'affaires ou à son résultat, ni même encore aux subventions européennes dont il fait état dans ses écritures.
Aucun élément ne permet d'exclure la constitution de nouvelles dettes.
Dès lors, le juge de première instance a, par de justes motifs, prononcé la résolution du plan de redressement de sorte que le jugement critiqué sera confirmé sur ce point.
- Sur la demande tendant à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire,
En application des dispositions ci-avant rappelées, l'ouverture d'une liquidation judiciaire concomitamment à la résolution d'un plan de redressement par voie de continuation est conditionnée par le constat de l'état de cessation des paiements au cours de son exécution.
L'article L. 631-1 du code de commerce définit l'état de cessation des paiements comme étant l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, étant précisé que le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
La cessation des paiements, distincte du simple refus de paiement, doit être établie par celui qui s'en prévaut au soutien de sa demande d'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires.
S'il est constant qu'une subvention effectivement délivrée, comme le montant d'une créance à recouvrer avec certitude à court terme, constituent des éléments d'actif disponible, M. [R] ne produit aucun élément établissant le principe même et le montant des subventions qu'il invoque, ni même de relevé de compte bancaire actualisé.
Il résulte de l'état produit par le commissaire à l'exécution du plan que le passif exigible au titre du plan de redressement s'élève à la somme de 33 920 euros frais et honoraires inclus.
Dès lors et à supposer qu'aucun nouveau passif n'a été constitué par le débiteur, M. [R] ne justifie d'aucun actif disponible de nature à lui permettre de faire face à ce passif du plan, étant précisé qu'il résulte de ses annonces - jamais suivies d'effet - d'envoi de chèques au commissaire à l'exécution du plan qu'il n'est pas en mesure de l'assumer.
Son état de cessation des paiements est donc caractérisé, de sorte qu'après infirmation du jugement dont appel sur ce point la liquidation judiciaire sera ordonnée.
- Sur les frais irrépétibles et dépens,
M. [R], qui succombe dans le cadre de la présente instance, sera déboutée de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les dépens de l'instance d'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.
Par ces motifs,
La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi :
Confirme, dans les limites de l'appel, le jugement rendu entre les parties le 13 mars 2025 par le tribunal judiciaire de Mâcon sauf en qu'il a rejeté la demande d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire ;
Statuant à nouveau sur ce chef infirmé et y ajoutant :
Constate l'état de cessation des paiements de M. [H] [R] ;
Ordonne l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de M. [H] [R] ;
Désigne en qualité de liquidateur judiciaire la SAS [P] [K], [Adresse 2] ;
Désigne en qualité de juge-commissaire le magistrat assurant ces fonctions au tribunal judiciaire de Mâcon ;
Rappelle que le délai de la procédure est de vingt-quatre mois sauf prorogation exceptionnelle par le tribunal ;
Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire ;
Rejette la demande formée par M. [H] [R] en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier, Le président,