CA Bordeaux, 2e ch. civ., 6 novembre 2025, n° 22/02968
BORDEAUX
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL DE BORDEAUX
2ème CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 06 NOVEMBRE 2025
N° RG 22/02968 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MYHW
[J] [I]
[H] [M] épouse [I]
c/
S.A.S.U. DUBUISSON ET FILS
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 07 juin 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 4] (RG : 19/01707) suivant déclaration d'appel du 20 juin 2022
APPELANTS :
[J] [I]
né le 16 Janvier 1946 à [Localité 4] (24)
de nationalité Française
Retraité
demeurant [Adresse 6]
[H] [M] épouse [I]
née le 23 Août 1949 à [Localité 2] (24)
de nationalité Française
Retraitée,
demeurant [Adresse 6]
Représentés par Me Lisiane FENIE-BARADAT, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistés de Me Myriam BAKLEH-DUPOUY, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
S.A.S.U. DUBUISSON ET FILS
[Adresse 3]
Représentée par Me Claire PELTIER, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée de la SELARL RENAUDIE LESCURE BADEFORT, avocat au barreau de BRIVE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 septembre 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Jacques BOUDY, Président
Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller
Madame Bénédicte DE VIVIE, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Audrey COLLIN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * *
FAITS ET PROCÉDURE :
1. Au cours de l'année 2012, Monsieur [J] [I] et Madame [H] [M], épouse [I] (ci-après les époux [I]), ont confié à la société à responsabilité limitée Dubuisson et Fils des travaux de conception, de réalisation et de pose d'un escalier à limon central cintré sans contremarche pour accéder au premier étage de leur maison d'habitation sise [Adresse 7] à [Localité 8] en Dordogne.
La Sarl Dubuisson et Fils a émis une première facture d'acompte le 12 décembre 2012 d'un montant de 9 864,61 euros TTC, puis une facture révisée d'un montant de 8 292,50 euros TTC, en date du 31 janvier 2013, qui a été entièrement réglée par chèque par les époux [I], le 13 février 2013.
Les époux [I] se sont plaints de malfaçons, affectant notamment la sécurité et la stabilité de l'escalier.
Par constat d'huissier en date du 14 janvier 2019, réalisé par Maître [V], huissier de justice, les époux [I] ont fait constater les prétendus désordres de l'escalier.
2. Par acte du 24 décembre 2019, les époux [I] ont assigné la société Dubuisson et Fils devant le tribunal judiciaire de Périgueux afin de voir engager sa responsabilité contractuelle.
3. Par jugement du 7 juin 2022, le tribunal judiciaire de Périgueux a :
- constaté que la société Dubuisson et Fils, exerçant anciennement sous la forme d'une Sarl avait pris la forme d'une Sasu,
- dit que l'escalier litigieux ne pouvait être défini comme un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil,
- dit n'y avoir lieu à prononcer la réception tacite ou judiciaire de l'escalier,
- débouté en conséquence les époux [I] de leur demande indemnitaire formée à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs,
- débouté les époux [I] de leur demande d'indemnisation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs,
- déclaré la demande indemnitaire de les époux [I] à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils sur le fondement de la responsabilité contractuelle irrecevable pour cause de prescription,
- dit n'y avoir lieu à ordonner une expertise judiciaire,
- condamné solidairement les époux [I] à payer à la Sasu Dubuisson et Fils la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné solidairement les époux [I] aux dépens de la procédure, dont distraction au profit de Maître Dorothée Bondat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- débouté l'ensemble des parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
4. Les époux [I] ont relevé appel de ce jugement , le 20 juin 2022.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 1er août 2025, les époux [I] demandent à la cour, sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté le changement de forme sociale et de dénomination sociale de la Sarl Dubuisson et Fils, devenue la Sasu Dubuisson et Fils à compter du 1er juillet 2020,
- réformer pour le surplus, en conséquence,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
- a dit que l'escalier litigieux ne peut être défini comme un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil,
- a dit n'y avoir lieu à prononcer la réception tacite ou judiciaire de l'escalier,
- les a déboutés en conséquence de leur demande indemnitaire formée à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs,
- les a déboutés de leur demande d'indemnisation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs,
- a déclaré leur demande indemnitaire à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils sur le fondement de la responsabilité contractuelle irrecevable pour cause de prescription,
- a dit n'y avoir lieu à ordonner une expertise judiciaire,
- les a condamnés solidairement à payer à la Sasu Dubuisson et Fils la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- les a condamnés solidairement aux dépens de la procédure, dont distraction au profit de Maître Dorothée Bondat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
statuant à nouveau,
- juger que la Sasu Dubuisson et Fils est réputée constructeur au sens de l'article 1792-1 1° du Code civil, en présence d'un contrat de louage d'ouvrage,
- juger que l'escalier litigieux constitue bien un ouvrage au sens des articles 1792 et suivants du code civil, et à défaut correspond nécessairement à la notion d'élément d'équipement au sens des articles 1792 et 1792-2 du Code civil,
à titre principal,
- les juger recevables et fondés en leur action dirigée à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils,
- juger que les conditions de la réception tacite sont en l'espèce réunies, étant fondés à invoquer le bénéfice de la réception tacite de l'ouvrage par application des dispositions de l'article 1792-6 du code civil, laquelle se présume en présence d'un paiement intégral du prix et de la prise de possession de l'ouvrage,
- fixer la date de la réception tacite au 13 février 2013, et l'assortir des réserves correspondant aux désordres décrits dans le procès-verbal de constat du 14 janvier 2019,
à titre subsidiaire,
- prononcer la réception judiciaire de l'ouvrage,
- fixer la date de la réception au 13 février 2013, date à laquelle l'ouvrage était en état d'être reçu et correspondant également à la date de leur prise de possession de l'ouvrage,
en toute hypothèse,
- assortir la réception tacite ou judiciaire de réserves correspondant aux désordres décrits dans le procès-verbal de constat du 14 janvier 2019,
- juger que les dommages réservés caractérisent, outre un manquement de l'entreprise aux règles de l'art, une impropriété à destination de l'ouvrage ;
- juger en conséquence que l'ensemble des désordres affectant l'ouvrage relèvent de la garantie décennale des constructeurs de l'article 1792 du code civil,
en conséquence,
- condamner la Sasu Dubuisson et Fils à leur payer une somme de 28 241,66 euros TTC selon devis Sarl Map-Bois au titre des travaux de réparation, et sous réserve d'une actualisation éventuelle,
- condamner la Sasu Dubuisson et Fils à leur payer une somme de 6 403,30 euros TTC selon devis ASJB au titre des travaux de réfection du carrelage de la pièce, et sous réserve d'une actualisation éventuelle,
- juger que ces sommes seront actualisées sur la base de l'indice du coût de la construction entre le 14 novembre 2018, date des devis, et la date du jugement à intervenir, puis augmentée des intérêts légaux postérieurement,
- condamner la Sasu Dubuisson et Fils au paiement des sommes complémentaires suivantes en indemnisation des préjudices ressentis par les maîtres d'ouvrage, avec intérêts de droit à compter du prononcé du jugement à intervenir :
- 2 000,00 euros par an à compter de 2013 compris au titre du trouble de jouissance, soit 26 000,00 euros au jour des présentes, jusqu'au parfait paiement des travaux de réparation ci-dessus définis,
- 1 500,00 euros au titre de leur préjudice moral,
- condamner la Sasu Dubuisson et Fils au paiement d'une indemnité de 5 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens de l'instance en ce compris le coût du procès-verbal de constat du 14 janvier 2019, outre les frais d'exécution éventuels en ce compris une somme équivalente au droit proportionnel appelé par l'huissier en charge de l'exécution forcée,
à titre infiniment subsidiaire,
- juger que la conformité aux règles de l'art constitue une obligation de résultat pour tout constructeur au sens des articles 1792 et suivants du code civil,
- juger que les désordres affectant l'escalier mis en 'uvre par la Sasu Dubuisson et Fils caractérisent le manquement de cette dernière aux règles de l'art,
- juger en conséquence que la réalisation fautive de ses prestations par la Sasu Dubuisson et Fils engage sa responsabilité contractuelle vis-à-vis d'eux, dans la mesure où se trouve établie la triple démonstration d'une faute (le simple manquement à l'obligation de résultat la caractérise), de préjudices et d'un lien de causalité,
- prononcer l'ensemble des condamnations qui précèdent au visa de l'article 1792-4-3 du code civil régissant la responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs, laquelle se prescrit dans un délai de dix ans suivant la réception de l'ouvrage,
- ordonner en tant que de besoin, avant dire droit, une expertise judiciaire au contradictoire de la Sasu Dubuisson et Fils pour faire toute la clarté, de sorte que la constatation des causes et des conséquences des non conformités et désordres qui affectent l'ouvrage au contradictoire des parties permette de définir les responsabilités encourues, dresser les comptes entre les parties et parfaire le quantum des préjudices qu'ils ont subis,
- désigner en conséquence tel expert en construction qu'il plaira afin de lui confier la mission suivante :
- convoquer et entendre les parties,
- se rendre sur les lieux sis [Adresse 5] à [Localité 1],
- les visiter et les décrire,
- se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission, et examiner les pièces qui lui seront communiquées dans le respect du contradictoire,
- constater et décrire l'ensemble des dommages, malfaçons, non façons et non conformités affectant l'escalier, à la suite de l'exécution par la Sasu Dubuisson et Fils de ses prestations définies selon facture N°20121213 du 12 décembre 2012,
- déterminer leur cause et la date de leur apparition,
- dire si les dommages, malfaçons, non façons et non conformités constatées compromettent la solidité de l'ouvrages ou le rendent impropre à destination,
- décrire les travaux de remise en état et les différentes prestations qui s'imposent pour assurer la réparation définitive et pérenne de l'ouvrage, les chiffrer à l'aide de devis émanant d'entreprises, au besoin spécialisées, et en indiquer la durée,
- s'adjoindre en cas de besoin les services d'un sapiteur dans les domaines ressortant d'une autre spécialité que la sienne,
- dresser les comptes entre les parties,
- fournir tous les éléments techniques et de fait de nature à permettre le cas échéant à la juridiction compétente de déterminer les responsabilités encourues, et d'évaluer tous les préjudices subis,
- déposer un pré-rapport en laissant aux parties un temps suffisant pour lui adresser des dires avant le dépôt de son rapport définitif,
- dire que l'expert devra déposer son rapport au greffe du tribunal judiciaire dans les six mois du prononcé de l'ordonnance à intervenir.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 25 août 2025, la Sasu Dubuisson et Fils demande à la cour de :
- débouter les époux [I] de l'ensemble de leurs demandes,
- confirmer purement et simplement le jugement entrepris y compris la condamnation à l'article 700 du code de procédure civile, au besoin par la substitution de motifs,
- à titre subsidiaire, constater que les demandes indemnitaires ne sont pas justifiées et débouter les époux [I] de leurs demandes,
y ajoutant,
- condamner les époux [I] à régler 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,
- les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Peltier sur ses offres de droit.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 septembre 2025.
MOTIFS
5. Le tribunal a jugé que l'escalier qui devait être mis en oeuvre par la société Dubuisson et fils n'était pas un ouvrage au sens des dispositions de l'article 1792 du code civil alors que celui-ci n'était pas incorporé dans l'existant et qu'il pouvait être démonté sans porter atteinte à l'immeuble. Le premier juge a ajouté qu'en outre les vices allégués par les époux [I] n'avaient pas rendu l'immeuble impropre à sa destination. Le tribunal a en outre considéré que les désordres allégués ne pouvaient pas être qualifiés de dommages intermédiaires alors qu'ils n'affecteraient pas un ouvrage et qu'en outre les vices allégués étaient apparents. Enfin le premier juge a déclaré les époux [I] irrecevables en leurs demandes sur le fondement de la responsabilité contractuelle pour cause de prescription quinquennale.
Les époux [I] considèrent au contraire que l'escalier litigieux est un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil ou à défaut un élément d'équipement ou encore que les désordres constituent des dommages intermédiaires. Ils considèrent en outre que l'escalier a fait l'objet d'une réception tacite assortie de réserves, le 13 février 2013, date à laquelle le prix a été payé et qu'ils ont pris possession de l'ouvrage. A titre subsidiaire, ils demandent à la cour d'appel de prononcer une réception judiciaire de l'ouvrage. A titre infiniment subsidiaire, ils demamdent que la responsabilité contractuelle des constructeur qui se prescrit par dix ans soit retenue par la cour d'appel. A titre un peu plus subsidiaire, ils sollicitent l'organisation d'une expertise judiciaire.
La société Dubuisson soutient pour sa part que l'escalier litigieux est un élément d'équipement dissociable, puisqu'il peut être démonté sans porter atteinte au bâtiment. En outre, cet escalier est utilisé depuis de nombreuses années, ce qui démontre qu'il est fonctionnel. Dès lors qu'il ne rend pas l'immeuble non conforme à sa destination, il n'est pas soumis au régime juridique de l'article 1792 du code civil et la garantie décennale ne trouve pas à s'appliquer. Elle considère qu'aucune réception judiciaire ne peut être prononcée alors qu'au jour de la réception revendiquée, le maître de l'ouvrage n'avait émis aucune réserve. Elle ajoute que la demande fondée par les époux [I] sur la responsabilité contractuelle est prescrite.
Sur ce
6. Il résulte de la demande d'acompte du 12 décembre 2012 établi par la société Dubuisson et fils que celle-ci proposait aux époux [I] de réaliser un ' Escalier sur limon central cintré sans contre marche, Marches fixées en parement, Crémaillère sur l'extérieur, Main courante métallique avec fixation en tête de marche'
7. Il résulte par ailleurs de la facture éditée par la société Dubuisson et fils, le 31 janvier 2013 que cet escalier aurait été réalisé conformément à sa description initiale mais sans la main courante.
Cette facture a été intégralement réglée par les époux [I] le 13 février 2013.
Ce n'est que six ans plus tard que les appelants se sont plaints de non finitions et de malfaçons qu'ils ont fait constater par un huissier de justice, le 14 janvier 2019. Ils exposent qu'ils auraient été dans l'incapacité financière d'agir en raison d'un contentieux qui les auraient opposés à un huissier, contentieux qui n'aurait abouti qu'en 2018.
Toutefois, une telle procédure ne suspendait pas les délais d'action dont ils pouvaient disposer à l'encontre de la société Dubuisson et fils alors qu'ils ne démontrent même pas avoir adressé à cette dernière une simple mise en demeure.
8. En toute hypothèse, ainsi que le font valoir les appelants l'escalier litigieux est bien un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil alors qu'outre le fait qu'il a été installé à l'intérieur de leur domicile et non à l'extérieur de celui-ci, il n'a pas été posé mais fixé par différents ancrages dans le mur de la maison mais aussi sur son sol. Aussi, cet escalier a été incorporé de façon pérenne à l'immeuble.
9. Cependant, il n'est pas contestable qu'il a existé le 13 févier 2013 une réception tacite de cet ouvrage puisque les époux [I] ont réglé l'intégralité de la facture émise un mois plus tôt sans émettre la moindre réserve et qu'ils ont utilisé cet escalier, pour accéder au premier étage de leur immeuble, pendant six ans, sans se plaindre du moindre désordre .
10. Or, les désordres qu'ils ont invoqués six ans plus tard étaient nécessairement apparents lors de cette réception puisque les appelants considèrent que l'escalier ne serait pas terminé comme en témoignerait l'absence de garde corps. ( cf: constat d'huissier du 14 janvier 2019 page 3, 4 et 5)
11. Toutefois, ces absences de finitions ont été purgées par l'acceptation tacite de l'ouvrage, six ans plus tôt.
12. Or, une telle réception tacite leur interdit de rechercher la responsabilité légale du constructeur mais également sa responsabilité contractuelle qui ne peut plus être fondée sur ces mêmes désordres apparents.
13. A titre surabondant, il convient d'ajouter que les époux [I] ne pourraient rechercher la responsabilité contractuelle de la société Dubuisson et fils, laquelle serait prescrite dès lors que si le délai de prescription pour la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur est de dix ans à compter de la réception des travaux, comme pour la garantie décennale (article 1792-4-3 du Code civil), en application de l'article 2224 du code civil ce délai n'est que de cinq ans s'agissant de désordres apparus avant toute réception des travaux ( Cf: Cour de Cassation, troisième chambre 25 mars 2014- n° 13-11.184). Or les désordres existaient déjà le 13 février 2013 et ils n'ont assigné la société Dubuisson et fils que le 24 décembre 2019.
14. En conséquence, le jugement sera confirmé, par substitution de motifs.
***
15. Les époux [I] qui succombent seront condamnés aux dépens.
16. En revanche, il ne parait pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.
PAR CES MOTIFS
la cour,
Confirme le jugement entrepris; y ajoutant:
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne M. [J] [I] et Mme [H] [M] épouse [I], ensemble, aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,
2ème CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 06 NOVEMBRE 2025
N° RG 22/02968 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MYHW
[J] [I]
[H] [M] épouse [I]
c/
S.A.S.U. DUBUISSON ET FILS
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 07 juin 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 4] (RG : 19/01707) suivant déclaration d'appel du 20 juin 2022
APPELANTS :
[J] [I]
né le 16 Janvier 1946 à [Localité 4] (24)
de nationalité Française
Retraité
demeurant [Adresse 6]
[H] [M] épouse [I]
née le 23 Août 1949 à [Localité 2] (24)
de nationalité Française
Retraitée,
demeurant [Adresse 6]
Représentés par Me Lisiane FENIE-BARADAT, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistés de Me Myriam BAKLEH-DUPOUY, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
S.A.S.U. DUBUISSON ET FILS
[Adresse 3]
Représentée par Me Claire PELTIER, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée de la SELARL RENAUDIE LESCURE BADEFORT, avocat au barreau de BRIVE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 septembre 2025 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Jacques BOUDY, Président
Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller
Madame Bénédicte DE VIVIE, Conseillère
Greffier lors des débats : Madame Audrey COLLIN
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * *
FAITS ET PROCÉDURE :
1. Au cours de l'année 2012, Monsieur [J] [I] et Madame [H] [M], épouse [I] (ci-après les époux [I]), ont confié à la société à responsabilité limitée Dubuisson et Fils des travaux de conception, de réalisation et de pose d'un escalier à limon central cintré sans contremarche pour accéder au premier étage de leur maison d'habitation sise [Adresse 7] à [Localité 8] en Dordogne.
La Sarl Dubuisson et Fils a émis une première facture d'acompte le 12 décembre 2012 d'un montant de 9 864,61 euros TTC, puis une facture révisée d'un montant de 8 292,50 euros TTC, en date du 31 janvier 2013, qui a été entièrement réglée par chèque par les époux [I], le 13 février 2013.
Les époux [I] se sont plaints de malfaçons, affectant notamment la sécurité et la stabilité de l'escalier.
Par constat d'huissier en date du 14 janvier 2019, réalisé par Maître [V], huissier de justice, les époux [I] ont fait constater les prétendus désordres de l'escalier.
2. Par acte du 24 décembre 2019, les époux [I] ont assigné la société Dubuisson et Fils devant le tribunal judiciaire de Périgueux afin de voir engager sa responsabilité contractuelle.
3. Par jugement du 7 juin 2022, le tribunal judiciaire de Périgueux a :
- constaté que la société Dubuisson et Fils, exerçant anciennement sous la forme d'une Sarl avait pris la forme d'une Sasu,
- dit que l'escalier litigieux ne pouvait être défini comme un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil,
- dit n'y avoir lieu à prononcer la réception tacite ou judiciaire de l'escalier,
- débouté en conséquence les époux [I] de leur demande indemnitaire formée à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs,
- débouté les époux [I] de leur demande d'indemnisation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs,
- déclaré la demande indemnitaire de les époux [I] à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils sur le fondement de la responsabilité contractuelle irrecevable pour cause de prescription,
- dit n'y avoir lieu à ordonner une expertise judiciaire,
- condamné solidairement les époux [I] à payer à la Sasu Dubuisson et Fils la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné solidairement les époux [I] aux dépens de la procédure, dont distraction au profit de Maître Dorothée Bondat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- débouté l'ensemble des parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
4. Les époux [I] ont relevé appel de ce jugement , le 20 juin 2022.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 1er août 2025, les époux [I] demandent à la cour, sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté le changement de forme sociale et de dénomination sociale de la Sarl Dubuisson et Fils, devenue la Sasu Dubuisson et Fils à compter du 1er juillet 2020,
- réformer pour le surplus, en conséquence,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
- a dit que l'escalier litigieux ne peut être défini comme un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil,
- a dit n'y avoir lieu à prononcer la réception tacite ou judiciaire de l'escalier,
- les a déboutés en conséquence de leur demande indemnitaire formée à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs,
- les a déboutés de leur demande d'indemnisation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs,
- a déclaré leur demande indemnitaire à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils sur le fondement de la responsabilité contractuelle irrecevable pour cause de prescription,
- a dit n'y avoir lieu à ordonner une expertise judiciaire,
- les a condamnés solidairement à payer à la Sasu Dubuisson et Fils la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- les a condamnés solidairement aux dépens de la procédure, dont distraction au profit de Maître Dorothée Bondat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
statuant à nouveau,
- juger que la Sasu Dubuisson et Fils est réputée constructeur au sens de l'article 1792-1 1° du Code civil, en présence d'un contrat de louage d'ouvrage,
- juger que l'escalier litigieux constitue bien un ouvrage au sens des articles 1792 et suivants du code civil, et à défaut correspond nécessairement à la notion d'élément d'équipement au sens des articles 1792 et 1792-2 du Code civil,
à titre principal,
- les juger recevables et fondés en leur action dirigée à l'encontre de la Sasu Dubuisson et Fils,
- juger que les conditions de la réception tacite sont en l'espèce réunies, étant fondés à invoquer le bénéfice de la réception tacite de l'ouvrage par application des dispositions de l'article 1792-6 du code civil, laquelle se présume en présence d'un paiement intégral du prix et de la prise de possession de l'ouvrage,
- fixer la date de la réception tacite au 13 février 2013, et l'assortir des réserves correspondant aux désordres décrits dans le procès-verbal de constat du 14 janvier 2019,
à titre subsidiaire,
- prononcer la réception judiciaire de l'ouvrage,
- fixer la date de la réception au 13 février 2013, date à laquelle l'ouvrage était en état d'être reçu et correspondant également à la date de leur prise de possession de l'ouvrage,
en toute hypothèse,
- assortir la réception tacite ou judiciaire de réserves correspondant aux désordres décrits dans le procès-verbal de constat du 14 janvier 2019,
- juger que les dommages réservés caractérisent, outre un manquement de l'entreprise aux règles de l'art, une impropriété à destination de l'ouvrage ;
- juger en conséquence que l'ensemble des désordres affectant l'ouvrage relèvent de la garantie décennale des constructeurs de l'article 1792 du code civil,
en conséquence,
- condamner la Sasu Dubuisson et Fils à leur payer une somme de 28 241,66 euros TTC selon devis Sarl Map-Bois au titre des travaux de réparation, et sous réserve d'une actualisation éventuelle,
- condamner la Sasu Dubuisson et Fils à leur payer une somme de 6 403,30 euros TTC selon devis ASJB au titre des travaux de réfection du carrelage de la pièce, et sous réserve d'une actualisation éventuelle,
- juger que ces sommes seront actualisées sur la base de l'indice du coût de la construction entre le 14 novembre 2018, date des devis, et la date du jugement à intervenir, puis augmentée des intérêts légaux postérieurement,
- condamner la Sasu Dubuisson et Fils au paiement des sommes complémentaires suivantes en indemnisation des préjudices ressentis par les maîtres d'ouvrage, avec intérêts de droit à compter du prononcé du jugement à intervenir :
- 2 000,00 euros par an à compter de 2013 compris au titre du trouble de jouissance, soit 26 000,00 euros au jour des présentes, jusqu'au parfait paiement des travaux de réparation ci-dessus définis,
- 1 500,00 euros au titre de leur préjudice moral,
- condamner la Sasu Dubuisson et Fils au paiement d'une indemnité de 5 500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens de l'instance en ce compris le coût du procès-verbal de constat du 14 janvier 2019, outre les frais d'exécution éventuels en ce compris une somme équivalente au droit proportionnel appelé par l'huissier en charge de l'exécution forcée,
à titre infiniment subsidiaire,
- juger que la conformité aux règles de l'art constitue une obligation de résultat pour tout constructeur au sens des articles 1792 et suivants du code civil,
- juger que les désordres affectant l'escalier mis en 'uvre par la Sasu Dubuisson et Fils caractérisent le manquement de cette dernière aux règles de l'art,
- juger en conséquence que la réalisation fautive de ses prestations par la Sasu Dubuisson et Fils engage sa responsabilité contractuelle vis-à-vis d'eux, dans la mesure où se trouve établie la triple démonstration d'une faute (le simple manquement à l'obligation de résultat la caractérise), de préjudices et d'un lien de causalité,
- prononcer l'ensemble des condamnations qui précèdent au visa de l'article 1792-4-3 du code civil régissant la responsabilité contractuelle de droit commun des constructeurs, laquelle se prescrit dans un délai de dix ans suivant la réception de l'ouvrage,
- ordonner en tant que de besoin, avant dire droit, une expertise judiciaire au contradictoire de la Sasu Dubuisson et Fils pour faire toute la clarté, de sorte que la constatation des causes et des conséquences des non conformités et désordres qui affectent l'ouvrage au contradictoire des parties permette de définir les responsabilités encourues, dresser les comptes entre les parties et parfaire le quantum des préjudices qu'ils ont subis,
- désigner en conséquence tel expert en construction qu'il plaira afin de lui confier la mission suivante :
- convoquer et entendre les parties,
- se rendre sur les lieux sis [Adresse 5] à [Localité 1],
- les visiter et les décrire,
- se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission, et examiner les pièces qui lui seront communiquées dans le respect du contradictoire,
- constater et décrire l'ensemble des dommages, malfaçons, non façons et non conformités affectant l'escalier, à la suite de l'exécution par la Sasu Dubuisson et Fils de ses prestations définies selon facture N°20121213 du 12 décembre 2012,
- déterminer leur cause et la date de leur apparition,
- dire si les dommages, malfaçons, non façons et non conformités constatées compromettent la solidité de l'ouvrages ou le rendent impropre à destination,
- décrire les travaux de remise en état et les différentes prestations qui s'imposent pour assurer la réparation définitive et pérenne de l'ouvrage, les chiffrer à l'aide de devis émanant d'entreprises, au besoin spécialisées, et en indiquer la durée,
- s'adjoindre en cas de besoin les services d'un sapiteur dans les domaines ressortant d'une autre spécialité que la sienne,
- dresser les comptes entre les parties,
- fournir tous les éléments techniques et de fait de nature à permettre le cas échéant à la juridiction compétente de déterminer les responsabilités encourues, et d'évaluer tous les préjudices subis,
- déposer un pré-rapport en laissant aux parties un temps suffisant pour lui adresser des dires avant le dépôt de son rapport définitif,
- dire que l'expert devra déposer son rapport au greffe du tribunal judiciaire dans les six mois du prononcé de l'ordonnance à intervenir.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 25 août 2025, la Sasu Dubuisson et Fils demande à la cour de :
- débouter les époux [I] de l'ensemble de leurs demandes,
- confirmer purement et simplement le jugement entrepris y compris la condamnation à l'article 700 du code de procédure civile, au besoin par la substitution de motifs,
- à titre subsidiaire, constater que les demandes indemnitaires ne sont pas justifiées et débouter les époux [I] de leurs demandes,
y ajoutant,
- condamner les époux [I] à régler 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,
- les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Peltier sur ses offres de droit.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 septembre 2025.
MOTIFS
5. Le tribunal a jugé que l'escalier qui devait être mis en oeuvre par la société Dubuisson et fils n'était pas un ouvrage au sens des dispositions de l'article 1792 du code civil alors que celui-ci n'était pas incorporé dans l'existant et qu'il pouvait être démonté sans porter atteinte à l'immeuble. Le premier juge a ajouté qu'en outre les vices allégués par les époux [I] n'avaient pas rendu l'immeuble impropre à sa destination. Le tribunal a en outre considéré que les désordres allégués ne pouvaient pas être qualifiés de dommages intermédiaires alors qu'ils n'affecteraient pas un ouvrage et qu'en outre les vices allégués étaient apparents. Enfin le premier juge a déclaré les époux [I] irrecevables en leurs demandes sur le fondement de la responsabilité contractuelle pour cause de prescription quinquennale.
Les époux [I] considèrent au contraire que l'escalier litigieux est un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil ou à défaut un élément d'équipement ou encore que les désordres constituent des dommages intermédiaires. Ils considèrent en outre que l'escalier a fait l'objet d'une réception tacite assortie de réserves, le 13 février 2013, date à laquelle le prix a été payé et qu'ils ont pris possession de l'ouvrage. A titre subsidiaire, ils demandent à la cour d'appel de prononcer une réception judiciaire de l'ouvrage. A titre infiniment subsidiaire, ils demamdent que la responsabilité contractuelle des constructeur qui se prescrit par dix ans soit retenue par la cour d'appel. A titre un peu plus subsidiaire, ils sollicitent l'organisation d'une expertise judiciaire.
La société Dubuisson soutient pour sa part que l'escalier litigieux est un élément d'équipement dissociable, puisqu'il peut être démonté sans porter atteinte au bâtiment. En outre, cet escalier est utilisé depuis de nombreuses années, ce qui démontre qu'il est fonctionnel. Dès lors qu'il ne rend pas l'immeuble non conforme à sa destination, il n'est pas soumis au régime juridique de l'article 1792 du code civil et la garantie décennale ne trouve pas à s'appliquer. Elle considère qu'aucune réception judiciaire ne peut être prononcée alors qu'au jour de la réception revendiquée, le maître de l'ouvrage n'avait émis aucune réserve. Elle ajoute que la demande fondée par les époux [I] sur la responsabilité contractuelle est prescrite.
Sur ce
6. Il résulte de la demande d'acompte du 12 décembre 2012 établi par la société Dubuisson et fils que celle-ci proposait aux époux [I] de réaliser un ' Escalier sur limon central cintré sans contre marche, Marches fixées en parement, Crémaillère sur l'extérieur, Main courante métallique avec fixation en tête de marche'
7. Il résulte par ailleurs de la facture éditée par la société Dubuisson et fils, le 31 janvier 2013 que cet escalier aurait été réalisé conformément à sa description initiale mais sans la main courante.
Cette facture a été intégralement réglée par les époux [I] le 13 février 2013.
Ce n'est que six ans plus tard que les appelants se sont plaints de non finitions et de malfaçons qu'ils ont fait constater par un huissier de justice, le 14 janvier 2019. Ils exposent qu'ils auraient été dans l'incapacité financière d'agir en raison d'un contentieux qui les auraient opposés à un huissier, contentieux qui n'aurait abouti qu'en 2018.
Toutefois, une telle procédure ne suspendait pas les délais d'action dont ils pouvaient disposer à l'encontre de la société Dubuisson et fils alors qu'ils ne démontrent même pas avoir adressé à cette dernière une simple mise en demeure.
8. En toute hypothèse, ainsi que le font valoir les appelants l'escalier litigieux est bien un ouvrage au sens de l'article 1792 du code civil alors qu'outre le fait qu'il a été installé à l'intérieur de leur domicile et non à l'extérieur de celui-ci, il n'a pas été posé mais fixé par différents ancrages dans le mur de la maison mais aussi sur son sol. Aussi, cet escalier a été incorporé de façon pérenne à l'immeuble.
9. Cependant, il n'est pas contestable qu'il a existé le 13 févier 2013 une réception tacite de cet ouvrage puisque les époux [I] ont réglé l'intégralité de la facture émise un mois plus tôt sans émettre la moindre réserve et qu'ils ont utilisé cet escalier, pour accéder au premier étage de leur immeuble, pendant six ans, sans se plaindre du moindre désordre .
10. Or, les désordres qu'ils ont invoqués six ans plus tard étaient nécessairement apparents lors de cette réception puisque les appelants considèrent que l'escalier ne serait pas terminé comme en témoignerait l'absence de garde corps. ( cf: constat d'huissier du 14 janvier 2019 page 3, 4 et 5)
11. Toutefois, ces absences de finitions ont été purgées par l'acceptation tacite de l'ouvrage, six ans plus tôt.
12. Or, une telle réception tacite leur interdit de rechercher la responsabilité légale du constructeur mais également sa responsabilité contractuelle qui ne peut plus être fondée sur ces mêmes désordres apparents.
13. A titre surabondant, il convient d'ajouter que les époux [I] ne pourraient rechercher la responsabilité contractuelle de la société Dubuisson et fils, laquelle serait prescrite dès lors que si le délai de prescription pour la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur est de dix ans à compter de la réception des travaux, comme pour la garantie décennale (article 1792-4-3 du Code civil), en application de l'article 2224 du code civil ce délai n'est que de cinq ans s'agissant de désordres apparus avant toute réception des travaux ( Cf: Cour de Cassation, troisième chambre 25 mars 2014- n° 13-11.184). Or les désordres existaient déjà le 13 février 2013 et ils n'ont assigné la société Dubuisson et fils que le 24 décembre 2019.
14. En conséquence, le jugement sera confirmé, par substitution de motifs.
***
15. Les époux [I] qui succombent seront condamnés aux dépens.
16. En revanche, il ne parait pas inéquitable de laisser à la charge de chaque partie les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.
PAR CES MOTIFS
la cour,
Confirme le jugement entrepris; y ajoutant:
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne M. [J] [I] et Mme [H] [M] épouse [I], ensemble, aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,