CA Versailles, ch. civ. 1-5, 6 novembre 2025, n° 24/07778
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 54G
Chambre civile 1-5
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 06 NOVEMBRE 2025
N° RG 24/07778 - N° Portalis DBV3-V-B7I-W5O2
AFFAIRE :
S.A. LLOYD'S INSURANCE COMPANY
C/
[V] [N] ÉPOUSE [S] épouse [S]
...
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 20 Août 2024 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 10]
N° RG : 20/00684
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 06.11.2025
à :
Me Pascal FOURNIER, avocat au barreau de VERSAILLES (125)
Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES (627)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SIX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A. LLOYD'S INSURANCE COMPANY
Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 682 58 4 8 39 RL
[Adresse 8]
[Localité 1] BELGIQUE
Représentant : Me Pascal FOURNIER de la SELARL DES DEUX PALAIS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 125 - N° du dossier 241364
APPELANTE
****************
Madame [V] [N] épouse [S]
née le 04 Mai 1981 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 6]
Monsieur [M] [S]
né le 29 Juillet 1980 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 25024
Plaidant : Me Amel BEN MANSOUR du barreau de Paris
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Septembre 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Ulysse PARODI, Vice président placé chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère faisant fonction de présidente,
M. Bertrand MAUMONT, Conseiller,
Monsieur Ulysse PARODI, Vice président placé,
Greffière lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,
EXPOSE DU LITIGE
M. [M] [S] et Mme [V] [N] épouse [S] ont fait construire, en qualité de maîtres de l'ouvrage, une maison individuelle située [Adresse 4].
Le 27 juin 2019, ils ont souscrit une police d'assurance dommages-ouvrage et risques annexes auprès de la SA Lloyd's Insurance Company.
La réception de l'ouvrage est intervenue le 9 janvier 2021.
Déplorant des désordres en lien avec la conception et la réalisation de la gestion de l'eau de l'ouvrage, Mme [V] [N] et M. [M] [S] ont sollicité une mesure d'expertise judiciaire.
Par ordonnance de référé rendue le 2 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a nommé M. [Z] [R] en qualité d'expert judiciaire.
Suivant déclaration de sinistre du 23 avril 2022, M. et Mme [S] ont sollicité la prise en charge du préfinancement par leur assureur, la société Lloyd's Insurance Company, en vain.
Par acte de commissaire de justice délivré le 14 mai 2024, M. et Mme [S] ont fait assigner en référé la société Lloyd's Insurance Company aux fins d'obtenir principalement la condamnation par provision de la société Lloyd's Insurance Company à leur payer la somme de 140 227,76 euros TTC au titre du préfinancement des travaux réparatoires de l'ouvrage avec intérêt légal au double du taux de l'intérêt légal à compter du 22 janvier 2024.
Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 20 août 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Versailles a :
- condamné la société Lloyd's Insurance Company à payer à M. et Mme [S] la somme provisionnelle de 124 934,33 euros TTC,
- condamné la société Lloyd's Insurance Company à payer à M. et Mme [K] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Lloyd's Insurance Company aux dépens.
Par déclaration reçue au greffe le 13 décembre 2024, la société Lloyd's Insurance Company a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.
Dans ses dernières conclusions déposées le 15 septembre 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Lloyd's Insurance Company demande à la cour, au visa de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, de :
'- infirmer, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue par le juge des référés près le tribunal judiciaire de Versailles en date du 20 août 2024 ;
ce faisant, statuant de nouveau :
- débouter les époux [S] de l'intégralité de leurs demandes ;
en tout état de cause :
- condamner in solidum les époux [S] à payer à la société Lloyd's Company Insurance la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner in solidum les époux [S] aux frais de timbre et de commissaire de justice relatifs à la présente instance.'
Dans leurs dernières conclusions déposées le 1er septembre 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. et Mme [S] demandent à la cour, au visa des articles 835 alinéa 2 du code de procédure civile, 1343-2 du code code civil, L. 242-1 et annexe II de l'article A243-1 du code des assurances, de :
'- déclarer l'appel principal de la société Lloyd's Insurance Company SA mal fondé et l'en débouter ;
- faire droit à l'appel incident de Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] ;
- confirmer la condamnation prononcée par provision par ordonnance de référé du 20 août 2024 en ce qu'elle a condamné la société Lloyd's Insurance Company SA à payer à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] la somme de 124 934,33 euros TTC au titre du préfinancement des travaux réparatoires de l'ouvrage sis [Adresse 5] ;
faisant droit à l'appel incident :
- infirmer l'ordonnance de référé du 20 août 2024 en ce qu'elle a rejeté la demande de condamnation au titre de la somme complémentaire de 15 293,43 euros TTC correspondant au total des honoraires de maîtrise d''uvre dont la supervision a été demandée par l'expert judiciaire [R] (= 2 000 euros TTC (factures du maître d''uvre du 20 mars 2023) + 800 euros TTC (facture maître d''uvre du 23 octobre 2023 ) + prévisions d'honoraires de 10% selon contrat sur le montant des travaux à intervenir soit 12.493,43 euros TTC) ;
- infirmer l'ordonnance de référé du 20 août 2024 en ce qu'elle a omis de statuer sur la demande d'application de l'article L.242-1 du code des assurances relativement aux intérêts, lequel prévoit un intérêt légal au double du taux de l'intérêt légal, ce à compter du 22 janvier 2024, sur la somme totale de 140 227,76 euros TTC (= 124 934,33 euros TTC due au titre du préfinancement des travaux réparatoires de l'ouvrage sis [Adresse 5] + 15 293,43 euros TTC au titre des honoraires de maîtrise d'oeuvre) ;
en conséquence :
- condamner la société Lloyd's Insurance Company SA à payer par provision à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] la somme de 15 293,43 euros TTC au titre des factures de maîtrise d''uvre et de coût d'honoraires de maîtrise d''uvre sur travaux (= 2 000 euros TTC (factures du maître d''uvre du 20 mars 2023) + 800 euros TTC (facture 23 octobre 2023) + prévisions d'honoraires de 10% selon contrat sur le montant des travaux à intervenir soit 12 493,43 euros TTC) ;
- condamner la société Lloyd's Insurance Company SA à verser à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] les intérêts majorés de retard dus en application de l'article L. 242-1 du code des assurances à compter du 22 janvier 2024 sur ladite somme de 15 293,43 euros TTC ;
- condamner la société Lloyd's Insurance Company SA à verser à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] les intérêts majorés de retard en application de l'article L. 242-1 du code des assurances à compter du 22 janvier 2024 sur ladite somme de 124 934,33 euros TTC ;
- ordonner la capitalisation des intérêts sur les sommes de 124 934,33 euros TTC et 15 293,43 euros TTC dues depuis le 22 janvier 2024, soit plus d'un an ;
- débouter la société Lloyd's Insurance Company SA de l'intégralité de ses demandes et demandes en réplique ;
- condamner la société Lloyd's Insurance Company SA à verser à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés par Maître Debray.'
L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 septembre 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de condamnation de la société Lloyd's Insurance Compagny à payer une provision à Mme [V] [N] et M. [M] [S]
Selon l'alinéa 2 de l'article 835 du code de procédure civile : 'Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il (le président) peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire'.
Ce texte impose donc au juge une condition essentielle avant de pouvoir accorder une provision : celle de rechercher si l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Doivent être précisés les éléments de la contestation qui rendent celle-ci sérieuse.
Il sera retenu qu'une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
À l'inverse, sera écartée une contestation qui serait à l'évidence superficielle ou artificielle. Le montant de la provision allouée n'a alors d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.
Aux termes de l'article 1353 du code civil, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
A. Sur la déchéance du droit de contester la mise en jeu de la garantie de la société Lloyd's Insurance Compagny et sur la demande accessoire de doublement du taux d'intérêt légal
Sur ce moyen, Mme [V] [N] et M. [M] [S] font valoir que le 23 avril 2022, ils ont procédé à une déclaration de sinistre comportant 6 points distincts mais que ces points n'ont pas été instruits dans le délai de 60 jours requis par l'article L.242.1 du Code des assurances dans la mesure où le rapport Saretec du 23 mai 2022 n'en n'a pas examiné l'intégralité, notamment le point majeur du vide sanitaire non ventilé ; et que le refus de prise en charge résultant de la lettre du 17 juin 2022 ne saurait valablement intervenir sans examen de bonne foi de l'intégralité des désordres déclarés.
Ils ajoutent que l'article L. 242.1 du code des assurances sanctionne automatiquement l'assureur dommages-ouvrage qui doit préfinancement à son assuré de l'intégralité du coût de réparation des désordres déclarés ; et que l'assureur qui n'a pas pris position sur le principe de la mise en jeu de la garantie dans le délai légal est déchu du droit de contester celle-ci, notamment en contestant la nature des désordres déclarés.
Pour sa part, la société Lloyd's Insurance Compagny fait valoir que les désordres identifiés par Mme [V] [N] et M. [M] [S] étant pour partie redondants, le cabinet Saretec a pris le parti de les regrouper techniquement en trois catégories ; que seules les fuites constituent un désordre au sens de l'article 1792 du code civil, l'absence d'étanchéité étant la cause et les risques de suintement la conséquence de ce désordre ; et que quant au point du vide sanitaire, il n'a pas été omis par l'expert qui traite ce grief en son point n°2, le désordre étant en réalité constitué par les inondations en sous-sol dont se plaignent Mme [V] [N] et M. [M] [S].
Sur ce
Aux termes de l'article L. 242-1 alinéa 3 du code des assurances, en matière d'assurance de dommages, l'assureur a un délai maximal de soixante jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, pour notifier à l'assuré sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat.
En application de cet article, il est constant que l'assureur qui ne notifie pas à l'assuré, dans un délai maximal de soixante jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat, ne peut plus contester le principe de sa garantie et doit indemniser l'assuré des dépenses nécessaires à la réparation des dommages résultant du sinistre déclaré.
Il ne peut pas davantage faire valoir que sa garantie se heurte à une contestation sérieuse dans une instance en référé-provision.
En l'espèce, le 23 avril 2022, Mme [V] [N] et M. [M] [S] ont déclaré les sinistres suivants :
- Fuites récurrentes en provenance d'un mur en sous-sol, situé au niveau du tableau électrique au niveau de la façade sud
- Absence d'étanchéité dudit mur en sous-sol
- Réseaux de tuyaux d'évacuation des eaux pluviales à l'extérieur défaillants
- Risque de suintement sur le tableau électrique en sous-sol
- Le système de drainage des eaux de la maison est défaillant et non conforme
- Le vide sanitaire n'est pas aéré, ne remplit pas son rôle défini dans l'étude de sol et déborde régulièrement dans le sous-sol
Il s'en évince que Mme [V] [N] et M. [M] [S] ne font état en réalité que de deux désordres à savoir l'entrée anormale d'eau dans leur sous-sol et leur vide sanitaire et sa persistance.
Le reste des éléments listés relève soit de différentes non-conformités susceptibles d'en être la cause, soit des conséquences des désordres.
Or, le rapport d'expertise Saretec du 23 mai 2022 étudie précisément ces désordres qu'il intitule « Dommage n° 1 Infiltration d'eau en sous-sol » ; et « Dommage n° 2 Drainage non conforme ».
Au demeurant, l'expert judiciaire ne s'y trompe pas davantage et relève au titre des « problèmes identifiés » (p. 40 du rapport) :
- Inondations : Accumulation d'eau sur le site, entraînant des inondations pendant et après la construction.
- Infiltrations : Présence d'humidité dans le sous-sol, indiquant des problèmes d'étanchéité.
Il s'ensuit qu'il y a tout lieu de considérer que le refus de la société Lloyd's Insurance Compagny de prendre en charge les coûts de reprise des désordres, qui résulte de la lettre du 17 juin 2022, a intégralement répondu aux sinistres déclarés, de sorte que le moyen tiré du défaut de motivation complète de la réponse n'est pas fondé.
Il ne peut donc être considéré que l'assureur a gardé le silence et celui-ci ne peut se voir opposer la sanction prévue à l'article L. 242-1 susvisé.
De même, Mme [V] [N] et M. [M] [S] devront être déboutés de leur demande accessoire d'application du doublement du taux d'intérêt légal.
B. Sur l'existence d'une créance non-sérieusement contestable
Sur l'opposabilité du rapport d'expertise
Sur ce moyen, la société Lloyd's Insurance Compagny fait valoir que le premier juge fait reposer l'entièreté de sa condamnation sur une seule note aux parties émise dans le cadre d'une expertise judiciaire à laquelle elle n'a jamais été attraite ; que la note aux parties n°2 n'est pas opposable à la concluante pour une question de respect du contradictoire ; et que le pré-rapport d'expertise nouvellement produit pose les mêmes difficultés.
Pour leur part, Mme [V] [N] et M. [M] [S] font valoir que le fait qu'un assureur ne participe pas aux opérations d'expertise, dans le cadre d'une procédure de référé, ne fait pas obstacle au caractère contradictoire du rapport d'expertise à son égard lors de la procédure au fond, dès lors que l'assureur a pu discuter ce rapport dans le cadre de la procédure.
Sur ce
Aux termes de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
En application de cet article, il est constant que l'assureur, non partie à une action en référé mais qui, en connaissance des résultats de l'expertise, a eu la possibilité d'en discuter les conclusions, ne peut, sauf s'il y a eu fraude à son encontre, soutenir qu'elle lui est inopposable (Civ. 3e, 29 sept. 2016, n° 15-16.342).
En l'espèce, il n'est pas contesté que la note aux parties n°2 de l'expert ainsi que son pré-rapport ont été communiqués à la société Lloyd's Insurance Compagny et qu'elle a eu la possibilité d'en commenter le contenu dans le cadre de la présente procédure.
Dans ces conditions, quoiqu'elle ne soit pas partie aux opérations d'expertise, ces éléments lui sont opposables.
Sur le moyen tiré de l'application de la garantie de parfait achèvement
Sur ce moyen, la société Lloyd's Insurance Compagny fait valoir que Mme [V] [N] et M. [M] [S] ont assigné, dans l'année de la réception, leur maître d''uvre et son assureur décennal pour des désordres manifestement identiques au cas d'espèce ; et que les désordres sont donc apparus dans l'année de la réception et n'ont donc pas vocation à être pris en charge par la société Lloyd's Insurance Compagny ès qualités d'assureur dommages ouvrage en application de l'article L. 242-1 alinéa 8 du code des assurances.
Elle ajoute que Mme [V] [N] et M. [M] [S] ne sont pas fondés à se prévaloir d'un désordre de nature décennale ; qu'elle a fait procéder à deux expertises amiables qui n'ont pas permis de conclure au constat d'un quelconque désordre ; et qu'aux dires mêmes de l'expert, les dommages n'ont pas un caractère décennal à défaut de « danger grave et immédiat et de symptôme à court terme ['] concernant la partie constructive ».
Pour leur part, Mme [V] [N] et M. [M] [S] font valoir que les désordres objets de la déclaration de sinistre du 23 avril 2022 relèvent du défaut de conception de la gestion de l'eau sur l'ensemble de la parcelle ; et que l'expert a qualifié les désordres subis comme présentant un danger pour la solidité, durabilité, salubrité et pérennité de l'ouvrage, lesquels relèvent de la garantie décennale.
Ils ajoutent que même pour des désordres apparents, un désordre ne saurait être considéré comme apparent au moment de la réception dès lors que son ampleur, sa gravité ou ses conséquences demeurent cachées à cette date et ne se révèlent qu'ultérieurement ; et que ce n'est que le 22 mars 2022, à la lumière des constatations globales de l'expert judiciaire que les désordres se sont révélés dans leur ampleur et leurs conséquences, notamment la nécessité de revoir l'intégralité de la gestion de l'eau qui converge vers l'intérieur de l'ouvrage, au c'ur du vide sanitaire, au lieu d'être rejetée en périphérie.
Sur ce
Aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
Aux termes de l'article L. 242-1 alinéa 1 du code des assurances, toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de construction, doit souscrire avant l'ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil.
Aux termes de l'article L. 242-1 alinéas 8, 9 et 10 du code des assurances, l'assurance de dommage obligatoire « prend effet après l'expiration du délai de garantie de parfait achèvement visé à l'article 1792-6 du code civil. Toutefois, elle garantit le paiement des réparations nécessaires lorsque :
Avant la réception, après mise en demeure restée infructueuse, le contrat de louage d'ouvrage conclu avec l'entrepreneur est résilié pour inexécution, par celui-ci, de ses obligations ;
Après la réception, après mise en demeure restée infructueuse, l'entrepreneur n'a pas exécuté ses obligations. »
En application de cet article, il est constant qu'indépendamment de la date de manifestation d'un désordre relevant de la garantie décennale, l'assureur de dommages obligatoire est tenu de garantir le paiement des travaux de réparation de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1 du code civil.
En d'autres termes, nonobstant les aliénas 8 à 10 précités, l'assureur est tenu de garantir les désordres de nature décennale survenus dans l'année de parfait achèvement sans que les conditions prévues aux aliénas 8 à 10 précités ne soient applicables.
En l'espèce, dans son pré-rapport, l'expert relève que :
- Dans le sous-sol, à plusieurs endroits des traces d'humidité ont été constatées (p. 34)
- Il a été relevé un taux anormal d'humidité (100% d'humidité) (p. 35)
- En extérieur, côté porte d'entrée au niveau de la canalisation EP, une simulation de pluie par arrosage a été réalisée. Après quelques minutes, il a été constaté des infiltrations à proximité du tableau électrique dans le sous-sol (p. 35)
Ce constat est suffisant à établir avec l'évidence requise en référé l'existence de désordres.
A cet égard, à supposer que les deux rapports d'expertise extra-judiciaire n'aient constaté pour leur part aucun désordre comme le soutient la société Lloyd's Insurance Compagny, cette circonstance est sans incidence compte tenu du fait qu'un désordre est susceptible de se manifester de façon épisodique et que le constat fait par l'expert judicaire n'est aucunement remis en cause par la société Lloyd's Insurance Compagny de façon précise et argumentée.
Au surplus, il résulte du rapport Saretec du 23 mai 2022 que « nous observons la présence d'oxydation sur le châssis de la chaudière » ce qui suffit à corroborer la présence anormale d'eau dans le sous-sol de l'ouvrage litigieux de sorte que la société Lloyd's Insurance Compagny n'est pas fondée à se prévaloir de la preuve d'une absence de désordre.
S'agissant du caractère décennal des désordres constatés, l'expert judiciaire déduit de ses constatations que les infiltrations et l'humidité affecteront à plus ou moins long terme, la solidité, la durabilité, la salubrité, l'esthétique et la pérennité du bien (p. 45), étant précisé que sa mission ne prévoit pas qu'il se prononce explicitement sur les conséquences des désordres constatés quant à la conformité de l'ouvrage à sa destination.
Il s'en évince qu'indépendamment de la matérialisation d'un danger grave et immédiat qui n'est aucunement nécessaire à la caractérisation d'un désordre rendant l'ouvrage impropre à sa destination, et compte tenu des propriétés essentielles de l'ouvrage qui sont affectées, notamment la solidité et la salubrité, il y a tout lieu de considérer que les désordres constatés le rendent impropre à sa destination et qu'ils relèvent en conséquence de la garantie décennale.
Par conséquent, l'ordonnance déférée sera confirmée sur le principe de cette demande.
Sur le montant de la provision
Sur ce point, la société Lloyd's Insurance Compagny fait valoir que l'expert judiciaire ne fait pas mention d'un quelconque désordre affectant le vide sanitaire ; qu'il ne s'agit pas d'un désordre mais d'un défaut de conformité de sorte qu'il est inéligible à la garantie décennale.
Pour leur part, Mme [V] [N] et M. [M] [S] font valoir que le premier juge a rejeté la demande de condamnation au paiement par provision de 15 293,43 euros au titre des factures de maîtrise d''uvre du 20 mars 2023 et de coût d'honoraires sur travaux alors que l'expert judiciaire a validé ces montants expressément demandés pour s'assurer du bon suivi dans les règles de l'art des travaux à réaliser. Ils formulent une demande complémentaire à ce titre, tout en sollicitant la confirmation de l'ordonnance querellée s'agissant des travaux relatifs au vide sanitaire.
Sur ce
En l'espèce, sur la contestation de la société Lloyd's Insurance Compagny, il convient de relever à titre liminaire que le devis n° DEV-2023-0045 du 13 novembre 2023 d'un montant de 124 934,33 euros est très détaillé et comporte de nombreux postes explicites, ce malgré quoi la contestation de la société Lloyd's Insurance Compagny est très imprécise.
L'expert judiciaire indique dans son rapport que le devis litigieux du 13 novembre 2023 et son descriptif sont en cohérence avec les travaux à réaliser (p. 43).
En effet, il s'évince du devis que les travaux de reprise du vide sanitaire se résument à la reprise de sa ventilation et à la pose d'une pompe d'évacuation d'eau ce qui apparait conforme aux désordres et à leurs causes tels que constatés par l'expert (p. 31 notamment).
Dès lors, la contestation de la société Lloyd's Insurance Compagny n'apparait pas sérieuse et sera écartée.
Sur le complément réclamé par Mme [V] [N] et M. [M] [S], l'expert note dans son rapport (p. 42) que les « travaux devront être réalisés par une entreprise qualifiée, dans les règles de l'art et il est conseillé sous la direction d'un Maître d''uvre ».
Outre cette appréciation de l'expert sur l'opportunité de frais de maîtrise d''uvre, il y a lieu de considérer que l'ampleur des travaux de reprise à entreprendre requiert l'intervention d'un maître d''uvre dont le coût suppose d'être indemnisé en vertu du principe de réparation intégrale du préjudice.
Sur son chiffrage, Mme [V] [N] et M. [M] [S] produisent un contrat de maîtrise d''uvre conclu le 21 novembre 2022 qui fait état d'un coût de 4 000 euros pour la phase étude et 10% du montant du coût des travaux pour la phase travaux.
Sur la phase étude, ils produisent toutefois deux factures d'un montant total de 2 800 euros, montant à hauteur duquel ils limitent leur demande pour cette phase qu'il convient donc de retenir.
Il est donc établi avec l'évidence requise en référé que les frais de maîtrise d''uvre s'élèvent à la somme de 15 293,43 euros et que cette somme doit être versée par la société Lloyd's Insurance Compagny à titre provisionnel.
Par conséquent, l'ordonnance déferrée sera infirmée quant au montant de la provision accordée.
En application de l'article 1231-7 du code civil, cette indemnité produira intérêts au taux légal à compter de la décision du premier juge.
En outre, par application de l'article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts échus produits par cette somme sera prononcée.
II. Sur les demandes accessoires
L'ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.
Succombant, la société Lloyd's Insurance Compagny ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et sera condamnée aux dépens d'appel qui seront recouvrés avec distraction au bénéfice de l'avocat qui en a fait la demande.
Par ailleurs, il serait inéquitable de laisser à Mme [V] [N] et M. [M] [S] la charge des frais irrépétibles exposés en cause d'appel de sorte que la société Lloyd's Insurance Compagny sera condamnée à payer à Mme [V] [N] et M. [M] [S] une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,
Confirme l'ordonnance querellée sauf en ce que le premier juge a rejeté la demande de provision au titre des frais de maîtrise d''uvre ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne provisionnellement la société Lloyd's Insurance Compagny à payer Mme [V] [N] et M. [M] [S] la somme de 15 293,43 euros au titre des frais de maîtrise d''uvre ;
Déboute Mme [V] [N] et M. [M] [S] de leur demande d'application du doublement du taux d'intérêt légal ;
Dit que la provision produira intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance querellée ;
Ordonne la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produits par cette somme ;
Condamne la société Lloyd's Insurance Compagny aux dépens d'appel, dont distraction au bénéfice de l'avocat qui en a fait la demande ;
Condamne la société Lloyd's Insurance Compagny à payer à Mme [V] [N] et M. [M] [S] la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère faisant fonction de Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente
DE
VERSAILLES
Code nac : 54G
Chambre civile 1-5
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 06 NOVEMBRE 2025
N° RG 24/07778 - N° Portalis DBV3-V-B7I-W5O2
AFFAIRE :
S.A. LLOYD'S INSURANCE COMPANY
C/
[V] [N] ÉPOUSE [S] épouse [S]
...
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 20 Août 2024 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 10]
N° RG : 20/00684
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 06.11.2025
à :
Me Pascal FOURNIER, avocat au barreau de VERSAILLES (125)
Me Christophe DEBRAY, avocat au barreau de VERSAILLES (627)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE SIX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A. LLOYD'S INSURANCE COMPANY
Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 682 58 4 8 39 RL
[Adresse 8]
[Localité 1] BELGIQUE
Représentant : Me Pascal FOURNIER de la SELARL DES DEUX PALAIS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 125 - N° du dossier 241364
APPELANTE
****************
Madame [V] [N] épouse [S]
née le 04 Mai 1981 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 6]
Monsieur [M] [S]
né le 29 Juillet 1980 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 - N° du dossier 25024
Plaidant : Me Amel BEN MANSOUR du barreau de Paris
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Septembre 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Ulysse PARODI, Vice président placé chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère faisant fonction de présidente,
M. Bertrand MAUMONT, Conseiller,
Monsieur Ulysse PARODI, Vice président placé,
Greffière lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,
EXPOSE DU LITIGE
M. [M] [S] et Mme [V] [N] épouse [S] ont fait construire, en qualité de maîtres de l'ouvrage, une maison individuelle située [Adresse 4].
Le 27 juin 2019, ils ont souscrit une police d'assurance dommages-ouvrage et risques annexes auprès de la SA Lloyd's Insurance Company.
La réception de l'ouvrage est intervenue le 9 janvier 2021.
Déplorant des désordres en lien avec la conception et la réalisation de la gestion de l'eau de l'ouvrage, Mme [V] [N] et M. [M] [S] ont sollicité une mesure d'expertise judiciaire.
Par ordonnance de référé rendue le 2 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a nommé M. [Z] [R] en qualité d'expert judiciaire.
Suivant déclaration de sinistre du 23 avril 2022, M. et Mme [S] ont sollicité la prise en charge du préfinancement par leur assureur, la société Lloyd's Insurance Company, en vain.
Par acte de commissaire de justice délivré le 14 mai 2024, M. et Mme [S] ont fait assigner en référé la société Lloyd's Insurance Company aux fins d'obtenir principalement la condamnation par provision de la société Lloyd's Insurance Company à leur payer la somme de 140 227,76 euros TTC au titre du préfinancement des travaux réparatoires de l'ouvrage avec intérêt légal au double du taux de l'intérêt légal à compter du 22 janvier 2024.
Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 20 août 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Versailles a :
- condamné la société Lloyd's Insurance Company à payer à M. et Mme [S] la somme provisionnelle de 124 934,33 euros TTC,
- condamné la société Lloyd's Insurance Company à payer à M. et Mme [K] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Lloyd's Insurance Company aux dépens.
Par déclaration reçue au greffe le 13 décembre 2024, la société Lloyd's Insurance Company a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.
Dans ses dernières conclusions déposées le 15 septembre 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Lloyd's Insurance Company demande à la cour, au visa de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, de :
'- infirmer, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue par le juge des référés près le tribunal judiciaire de Versailles en date du 20 août 2024 ;
ce faisant, statuant de nouveau :
- débouter les époux [S] de l'intégralité de leurs demandes ;
en tout état de cause :
- condamner in solidum les époux [S] à payer à la société Lloyd's Company Insurance la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner in solidum les époux [S] aux frais de timbre et de commissaire de justice relatifs à la présente instance.'
Dans leurs dernières conclusions déposées le 1er septembre 2025 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. et Mme [S] demandent à la cour, au visa des articles 835 alinéa 2 du code de procédure civile, 1343-2 du code code civil, L. 242-1 et annexe II de l'article A243-1 du code des assurances, de :
'- déclarer l'appel principal de la société Lloyd's Insurance Company SA mal fondé et l'en débouter ;
- faire droit à l'appel incident de Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] ;
- confirmer la condamnation prononcée par provision par ordonnance de référé du 20 août 2024 en ce qu'elle a condamné la société Lloyd's Insurance Company SA à payer à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] la somme de 124 934,33 euros TTC au titre du préfinancement des travaux réparatoires de l'ouvrage sis [Adresse 5] ;
faisant droit à l'appel incident :
- infirmer l'ordonnance de référé du 20 août 2024 en ce qu'elle a rejeté la demande de condamnation au titre de la somme complémentaire de 15 293,43 euros TTC correspondant au total des honoraires de maîtrise d''uvre dont la supervision a été demandée par l'expert judiciaire [R] (= 2 000 euros TTC (factures du maître d''uvre du 20 mars 2023) + 800 euros TTC (facture maître d''uvre du 23 octobre 2023 ) + prévisions d'honoraires de 10% selon contrat sur le montant des travaux à intervenir soit 12.493,43 euros TTC) ;
- infirmer l'ordonnance de référé du 20 août 2024 en ce qu'elle a omis de statuer sur la demande d'application de l'article L.242-1 du code des assurances relativement aux intérêts, lequel prévoit un intérêt légal au double du taux de l'intérêt légal, ce à compter du 22 janvier 2024, sur la somme totale de 140 227,76 euros TTC (= 124 934,33 euros TTC due au titre du préfinancement des travaux réparatoires de l'ouvrage sis [Adresse 5] + 15 293,43 euros TTC au titre des honoraires de maîtrise d'oeuvre) ;
en conséquence :
- condamner la société Lloyd's Insurance Company SA à payer par provision à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] la somme de 15 293,43 euros TTC au titre des factures de maîtrise d''uvre et de coût d'honoraires de maîtrise d''uvre sur travaux (= 2 000 euros TTC (factures du maître d''uvre du 20 mars 2023) + 800 euros TTC (facture 23 octobre 2023) + prévisions d'honoraires de 10% selon contrat sur le montant des travaux à intervenir soit 12 493,43 euros TTC) ;
- condamner la société Lloyd's Insurance Company SA à verser à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] les intérêts majorés de retard dus en application de l'article L. 242-1 du code des assurances à compter du 22 janvier 2024 sur ladite somme de 15 293,43 euros TTC ;
- condamner la société Lloyd's Insurance Company SA à verser à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] les intérêts majorés de retard en application de l'article L. 242-1 du code des assurances à compter du 22 janvier 2024 sur ladite somme de 124 934,33 euros TTC ;
- ordonner la capitalisation des intérêts sur les sommes de 124 934,33 euros TTC et 15 293,43 euros TTC dues depuis le 22 janvier 2024, soit plus d'un an ;
- débouter la société Lloyd's Insurance Company SA de l'intégralité de ses demandes et demandes en réplique ;
- condamner la société Lloyd's Insurance Company SA à verser à Madame [V] [N] épouse [S] et à Monsieur [M] [S] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés par Maître Debray.'
L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 septembre 2025.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande de condamnation de la société Lloyd's Insurance Compagny à payer une provision à Mme [V] [N] et M. [M] [S]
Selon l'alinéa 2 de l'article 835 du code de procédure civile : 'Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il (le président) peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire'.
Ce texte impose donc au juge une condition essentielle avant de pouvoir accorder une provision : celle de rechercher si l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Doivent être précisés les éléments de la contestation qui rendent celle-ci sérieuse.
Il sera retenu qu'une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
À l'inverse, sera écartée une contestation qui serait à l'évidence superficielle ou artificielle. Le montant de la provision allouée n'a alors d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.
Aux termes de l'article 1353 du code civil, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
A. Sur la déchéance du droit de contester la mise en jeu de la garantie de la société Lloyd's Insurance Compagny et sur la demande accessoire de doublement du taux d'intérêt légal
Sur ce moyen, Mme [V] [N] et M. [M] [S] font valoir que le 23 avril 2022, ils ont procédé à une déclaration de sinistre comportant 6 points distincts mais que ces points n'ont pas été instruits dans le délai de 60 jours requis par l'article L.242.1 du Code des assurances dans la mesure où le rapport Saretec du 23 mai 2022 n'en n'a pas examiné l'intégralité, notamment le point majeur du vide sanitaire non ventilé ; et que le refus de prise en charge résultant de la lettre du 17 juin 2022 ne saurait valablement intervenir sans examen de bonne foi de l'intégralité des désordres déclarés.
Ils ajoutent que l'article L. 242.1 du code des assurances sanctionne automatiquement l'assureur dommages-ouvrage qui doit préfinancement à son assuré de l'intégralité du coût de réparation des désordres déclarés ; et que l'assureur qui n'a pas pris position sur le principe de la mise en jeu de la garantie dans le délai légal est déchu du droit de contester celle-ci, notamment en contestant la nature des désordres déclarés.
Pour sa part, la société Lloyd's Insurance Compagny fait valoir que les désordres identifiés par Mme [V] [N] et M. [M] [S] étant pour partie redondants, le cabinet Saretec a pris le parti de les regrouper techniquement en trois catégories ; que seules les fuites constituent un désordre au sens de l'article 1792 du code civil, l'absence d'étanchéité étant la cause et les risques de suintement la conséquence de ce désordre ; et que quant au point du vide sanitaire, il n'a pas été omis par l'expert qui traite ce grief en son point n°2, le désordre étant en réalité constitué par les inondations en sous-sol dont se plaignent Mme [V] [N] et M. [M] [S].
Sur ce
Aux termes de l'article L. 242-1 alinéa 3 du code des assurances, en matière d'assurance de dommages, l'assureur a un délai maximal de soixante jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, pour notifier à l'assuré sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat.
En application de cet article, il est constant que l'assureur qui ne notifie pas à l'assuré, dans un délai maximal de soixante jours, courant à compter de la réception de la déclaration du sinistre, sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat, ne peut plus contester le principe de sa garantie et doit indemniser l'assuré des dépenses nécessaires à la réparation des dommages résultant du sinistre déclaré.
Il ne peut pas davantage faire valoir que sa garantie se heurte à une contestation sérieuse dans une instance en référé-provision.
En l'espèce, le 23 avril 2022, Mme [V] [N] et M. [M] [S] ont déclaré les sinistres suivants :
- Fuites récurrentes en provenance d'un mur en sous-sol, situé au niveau du tableau électrique au niveau de la façade sud
- Absence d'étanchéité dudit mur en sous-sol
- Réseaux de tuyaux d'évacuation des eaux pluviales à l'extérieur défaillants
- Risque de suintement sur le tableau électrique en sous-sol
- Le système de drainage des eaux de la maison est défaillant et non conforme
- Le vide sanitaire n'est pas aéré, ne remplit pas son rôle défini dans l'étude de sol et déborde régulièrement dans le sous-sol
Il s'en évince que Mme [V] [N] et M. [M] [S] ne font état en réalité que de deux désordres à savoir l'entrée anormale d'eau dans leur sous-sol et leur vide sanitaire et sa persistance.
Le reste des éléments listés relève soit de différentes non-conformités susceptibles d'en être la cause, soit des conséquences des désordres.
Or, le rapport d'expertise Saretec du 23 mai 2022 étudie précisément ces désordres qu'il intitule « Dommage n° 1 Infiltration d'eau en sous-sol » ; et « Dommage n° 2 Drainage non conforme ».
Au demeurant, l'expert judiciaire ne s'y trompe pas davantage et relève au titre des « problèmes identifiés » (p. 40 du rapport) :
- Inondations : Accumulation d'eau sur le site, entraînant des inondations pendant et après la construction.
- Infiltrations : Présence d'humidité dans le sous-sol, indiquant des problèmes d'étanchéité.
Il s'ensuit qu'il y a tout lieu de considérer que le refus de la société Lloyd's Insurance Compagny de prendre en charge les coûts de reprise des désordres, qui résulte de la lettre du 17 juin 2022, a intégralement répondu aux sinistres déclarés, de sorte que le moyen tiré du défaut de motivation complète de la réponse n'est pas fondé.
Il ne peut donc être considéré que l'assureur a gardé le silence et celui-ci ne peut se voir opposer la sanction prévue à l'article L. 242-1 susvisé.
De même, Mme [V] [N] et M. [M] [S] devront être déboutés de leur demande accessoire d'application du doublement du taux d'intérêt légal.
B. Sur l'existence d'une créance non-sérieusement contestable
Sur l'opposabilité du rapport d'expertise
Sur ce moyen, la société Lloyd's Insurance Compagny fait valoir que le premier juge fait reposer l'entièreté de sa condamnation sur une seule note aux parties émise dans le cadre d'une expertise judiciaire à laquelle elle n'a jamais été attraite ; que la note aux parties n°2 n'est pas opposable à la concluante pour une question de respect du contradictoire ; et que le pré-rapport d'expertise nouvellement produit pose les mêmes difficultés.
Pour leur part, Mme [V] [N] et M. [M] [S] font valoir que le fait qu'un assureur ne participe pas aux opérations d'expertise, dans le cadre d'une procédure de référé, ne fait pas obstacle au caractère contradictoire du rapport d'expertise à son égard lors de la procédure au fond, dès lors que l'assureur a pu discuter ce rapport dans le cadre de la procédure.
Sur ce
Aux termes de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
En application de cet article, il est constant que l'assureur, non partie à une action en référé mais qui, en connaissance des résultats de l'expertise, a eu la possibilité d'en discuter les conclusions, ne peut, sauf s'il y a eu fraude à son encontre, soutenir qu'elle lui est inopposable (Civ. 3e, 29 sept. 2016, n° 15-16.342).
En l'espèce, il n'est pas contesté que la note aux parties n°2 de l'expert ainsi que son pré-rapport ont été communiqués à la société Lloyd's Insurance Compagny et qu'elle a eu la possibilité d'en commenter le contenu dans le cadre de la présente procédure.
Dans ces conditions, quoiqu'elle ne soit pas partie aux opérations d'expertise, ces éléments lui sont opposables.
Sur le moyen tiré de l'application de la garantie de parfait achèvement
Sur ce moyen, la société Lloyd's Insurance Compagny fait valoir que Mme [V] [N] et M. [M] [S] ont assigné, dans l'année de la réception, leur maître d''uvre et son assureur décennal pour des désordres manifestement identiques au cas d'espèce ; et que les désordres sont donc apparus dans l'année de la réception et n'ont donc pas vocation à être pris en charge par la société Lloyd's Insurance Compagny ès qualités d'assureur dommages ouvrage en application de l'article L. 242-1 alinéa 8 du code des assurances.
Elle ajoute que Mme [V] [N] et M. [M] [S] ne sont pas fondés à se prévaloir d'un désordre de nature décennale ; qu'elle a fait procéder à deux expertises amiables qui n'ont pas permis de conclure au constat d'un quelconque désordre ; et qu'aux dires mêmes de l'expert, les dommages n'ont pas un caractère décennal à défaut de « danger grave et immédiat et de symptôme à court terme ['] concernant la partie constructive ».
Pour leur part, Mme [V] [N] et M. [M] [S] font valoir que les désordres objets de la déclaration de sinistre du 23 avril 2022 relèvent du défaut de conception de la gestion de l'eau sur l'ensemble de la parcelle ; et que l'expert a qualifié les désordres subis comme présentant un danger pour la solidité, durabilité, salubrité et pérennité de l'ouvrage, lesquels relèvent de la garantie décennale.
Ils ajoutent que même pour des désordres apparents, un désordre ne saurait être considéré comme apparent au moment de la réception dès lors que son ampleur, sa gravité ou ses conséquences demeurent cachées à cette date et ne se révèlent qu'ultérieurement ; et que ce n'est que le 22 mars 2022, à la lumière des constatations globales de l'expert judiciaire que les désordres se sont révélés dans leur ampleur et leurs conséquences, notamment la nécessité de revoir l'intégralité de la gestion de l'eau qui converge vers l'intérieur de l'ouvrage, au c'ur du vide sanitaire, au lieu d'être rejetée en périphérie.
Sur ce
Aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
Aux termes de l'article L. 242-1 alinéa 1 du code des assurances, toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de construction, doit souscrire avant l'ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil.
Aux termes de l'article L. 242-1 alinéas 8, 9 et 10 du code des assurances, l'assurance de dommage obligatoire « prend effet après l'expiration du délai de garantie de parfait achèvement visé à l'article 1792-6 du code civil. Toutefois, elle garantit le paiement des réparations nécessaires lorsque :
Avant la réception, après mise en demeure restée infructueuse, le contrat de louage d'ouvrage conclu avec l'entrepreneur est résilié pour inexécution, par celui-ci, de ses obligations ;
Après la réception, après mise en demeure restée infructueuse, l'entrepreneur n'a pas exécuté ses obligations. »
En application de cet article, il est constant qu'indépendamment de la date de manifestation d'un désordre relevant de la garantie décennale, l'assureur de dommages obligatoire est tenu de garantir le paiement des travaux de réparation de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1 du code civil.
En d'autres termes, nonobstant les aliénas 8 à 10 précités, l'assureur est tenu de garantir les désordres de nature décennale survenus dans l'année de parfait achèvement sans que les conditions prévues aux aliénas 8 à 10 précités ne soient applicables.
En l'espèce, dans son pré-rapport, l'expert relève que :
- Dans le sous-sol, à plusieurs endroits des traces d'humidité ont été constatées (p. 34)
- Il a été relevé un taux anormal d'humidité (100% d'humidité) (p. 35)
- En extérieur, côté porte d'entrée au niveau de la canalisation EP, une simulation de pluie par arrosage a été réalisée. Après quelques minutes, il a été constaté des infiltrations à proximité du tableau électrique dans le sous-sol (p. 35)
Ce constat est suffisant à établir avec l'évidence requise en référé l'existence de désordres.
A cet égard, à supposer que les deux rapports d'expertise extra-judiciaire n'aient constaté pour leur part aucun désordre comme le soutient la société Lloyd's Insurance Compagny, cette circonstance est sans incidence compte tenu du fait qu'un désordre est susceptible de se manifester de façon épisodique et que le constat fait par l'expert judicaire n'est aucunement remis en cause par la société Lloyd's Insurance Compagny de façon précise et argumentée.
Au surplus, il résulte du rapport Saretec du 23 mai 2022 que « nous observons la présence d'oxydation sur le châssis de la chaudière » ce qui suffit à corroborer la présence anormale d'eau dans le sous-sol de l'ouvrage litigieux de sorte que la société Lloyd's Insurance Compagny n'est pas fondée à se prévaloir de la preuve d'une absence de désordre.
S'agissant du caractère décennal des désordres constatés, l'expert judiciaire déduit de ses constatations que les infiltrations et l'humidité affecteront à plus ou moins long terme, la solidité, la durabilité, la salubrité, l'esthétique et la pérennité du bien (p. 45), étant précisé que sa mission ne prévoit pas qu'il se prononce explicitement sur les conséquences des désordres constatés quant à la conformité de l'ouvrage à sa destination.
Il s'en évince qu'indépendamment de la matérialisation d'un danger grave et immédiat qui n'est aucunement nécessaire à la caractérisation d'un désordre rendant l'ouvrage impropre à sa destination, et compte tenu des propriétés essentielles de l'ouvrage qui sont affectées, notamment la solidité et la salubrité, il y a tout lieu de considérer que les désordres constatés le rendent impropre à sa destination et qu'ils relèvent en conséquence de la garantie décennale.
Par conséquent, l'ordonnance déférée sera confirmée sur le principe de cette demande.
Sur le montant de la provision
Sur ce point, la société Lloyd's Insurance Compagny fait valoir que l'expert judiciaire ne fait pas mention d'un quelconque désordre affectant le vide sanitaire ; qu'il ne s'agit pas d'un désordre mais d'un défaut de conformité de sorte qu'il est inéligible à la garantie décennale.
Pour leur part, Mme [V] [N] et M. [M] [S] font valoir que le premier juge a rejeté la demande de condamnation au paiement par provision de 15 293,43 euros au titre des factures de maîtrise d''uvre du 20 mars 2023 et de coût d'honoraires sur travaux alors que l'expert judiciaire a validé ces montants expressément demandés pour s'assurer du bon suivi dans les règles de l'art des travaux à réaliser. Ils formulent une demande complémentaire à ce titre, tout en sollicitant la confirmation de l'ordonnance querellée s'agissant des travaux relatifs au vide sanitaire.
Sur ce
En l'espèce, sur la contestation de la société Lloyd's Insurance Compagny, il convient de relever à titre liminaire que le devis n° DEV-2023-0045 du 13 novembre 2023 d'un montant de 124 934,33 euros est très détaillé et comporte de nombreux postes explicites, ce malgré quoi la contestation de la société Lloyd's Insurance Compagny est très imprécise.
L'expert judiciaire indique dans son rapport que le devis litigieux du 13 novembre 2023 et son descriptif sont en cohérence avec les travaux à réaliser (p. 43).
En effet, il s'évince du devis que les travaux de reprise du vide sanitaire se résument à la reprise de sa ventilation et à la pose d'une pompe d'évacuation d'eau ce qui apparait conforme aux désordres et à leurs causes tels que constatés par l'expert (p. 31 notamment).
Dès lors, la contestation de la société Lloyd's Insurance Compagny n'apparait pas sérieuse et sera écartée.
Sur le complément réclamé par Mme [V] [N] et M. [M] [S], l'expert note dans son rapport (p. 42) que les « travaux devront être réalisés par une entreprise qualifiée, dans les règles de l'art et il est conseillé sous la direction d'un Maître d''uvre ».
Outre cette appréciation de l'expert sur l'opportunité de frais de maîtrise d''uvre, il y a lieu de considérer que l'ampleur des travaux de reprise à entreprendre requiert l'intervention d'un maître d''uvre dont le coût suppose d'être indemnisé en vertu du principe de réparation intégrale du préjudice.
Sur son chiffrage, Mme [V] [N] et M. [M] [S] produisent un contrat de maîtrise d''uvre conclu le 21 novembre 2022 qui fait état d'un coût de 4 000 euros pour la phase étude et 10% du montant du coût des travaux pour la phase travaux.
Sur la phase étude, ils produisent toutefois deux factures d'un montant total de 2 800 euros, montant à hauteur duquel ils limitent leur demande pour cette phase qu'il convient donc de retenir.
Il est donc établi avec l'évidence requise en référé que les frais de maîtrise d''uvre s'élèvent à la somme de 15 293,43 euros et que cette somme doit être versée par la société Lloyd's Insurance Compagny à titre provisionnel.
Par conséquent, l'ordonnance déferrée sera infirmée quant au montant de la provision accordée.
En application de l'article 1231-7 du code civil, cette indemnité produira intérêts au taux légal à compter de la décision du premier juge.
En outre, par application de l'article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts échus produits par cette somme sera prononcée.
II. Sur les demandes accessoires
L'ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.
Succombant, la société Lloyd's Insurance Compagny ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et sera condamnée aux dépens d'appel qui seront recouvrés avec distraction au bénéfice de l'avocat qui en a fait la demande.
Par ailleurs, il serait inéquitable de laisser à Mme [V] [N] et M. [M] [S] la charge des frais irrépétibles exposés en cause d'appel de sorte que la société Lloyd's Insurance Compagny sera condamnée à payer à Mme [V] [N] et M. [M] [S] une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,
Confirme l'ordonnance querellée sauf en ce que le premier juge a rejeté la demande de provision au titre des frais de maîtrise d''uvre ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne provisionnellement la société Lloyd's Insurance Compagny à payer Mme [V] [N] et M. [M] [S] la somme de 15 293,43 euros au titre des frais de maîtrise d''uvre ;
Déboute Mme [V] [N] et M. [M] [S] de leur demande d'application du doublement du taux d'intérêt légal ;
Dit que la provision produira intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance querellée ;
Ordonne la capitalisation des intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produits par cette somme ;
Condamne la société Lloyd's Insurance Compagny aux dépens d'appel, dont distraction au bénéfice de l'avocat qui en a fait la demande ;
Condamne la société Lloyd's Insurance Compagny à payer à Mme [V] [N] et M. [M] [S] la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.
Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère faisant fonction de Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente