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Décisions

Cass. com., 12 décembre 2018, n° 17-25.850

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mouillard

Cass. com. n° 17-25.850

11 décembre 2018

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société GB coiffure (la société GB), exploitant un salon de coiffure dont M. X... était le gérant, avait pour expert-comptable la société France expertise comptable (la société FEC) ; que, M. et Mme X... ayant conçu le projet d'ouvrir un institut de soins esthétiques, un fonds de commerce a été acquis afin de développer au sein de la société GB cette activité, pour laquelle la société FEC a établi un plan de financement et des comptes prévisionnels ; que la société GB a souscrit un emprunt, dont M. et Mme X... se sont rendus cautions solidaires ; que M. et Mme X... ont dû effectuer différents versements pour soutenir l'exploitation du fonds, qui s'est finalement révélée déficitaire ; que la société GB a revendu le fonds de commerce à un prix inférieur à celui de son acquisition, sans que M. et Mme X... puissent récupérer les sommes qu'ils avaient investies ; qu'estimant que les préjudices qu'ils avaient subis résultaient d'un défaut de diligences et de conseil de la société FEC, M. et Mme X... et la société GB l'ont assignée en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter les demandes de la société GB, l'arrêt, après avoir retenu que la société FEC avait manqué à ses obligations contractuelles en ne vérifiant ni les prévisions de chiffres d'affaires proposées par son client, lequel n'était pas particulièrement informé du nouveau type de commerce qu'il envisageait d'exploiter, ni l'état du marché relatif à cette nouvelle activité, ce qui lui aurait permis d'alerter son client, écarte tout lien de causalité entre cette faute et le préjudice invoqué au motif qu'il n'était pas établi que la société FEC était tenue de valider les chiffres d'affaires proposés par M. X... pour la préparation du plan de financement nécessaire à l'obtention du prêt ;

Qu'en statuant ainsi la cour d'appel, qui s'est contredite, a méconnu les exigences du texte susvisé ;

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1147 du code civil, en sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que pour rejeter la demande de la société GB, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi que la société GB ait subi une perte de chance dans les choix d'investissement qu'elle a faits, notamment celui d'acquérir le nouveau fonds de commerce, qui soit directement liée à la faute de l'expert-comptable, puisque M. et Mme X... avaient acquis le fonds avec leurs deniers personnels un an avant l'établissement du plan de financement soumis à la banque ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si l'emprunt souscrit, dans la mesure où le fonds avait été acquis antérieurement, n'était pas destiné au développement de la nouvelle activité, de sorte que la faute retenue contre la société FEC avait pu entraîner pour la société GB une perte de chance de ne pas souscrire l'emprunt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Et, sur le moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. et Mme X..., l'arrêt retient que le fait que ceux-ci aient dû vendre leur appartement pour faire face à leur engagement de cautions solidaires contracté lors de l'octroi du prêt à la société GB, lequel avait été souscrit un an après l'acquisition du fonds par M. et Mme X... sur leurs deniers personnels, ne permet pas de démontrer l'existence d'un lien direct avec la faute commise par la société FEC ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si M. et Mme X... se seraient engagés comme cautions si la société FEC n'avait pas établi un plan de financement erroné, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juillet 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société France expertise comptable aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. et Mme X... et à la société GB coiffure la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

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