Cass. com., 20 avril 2017, n° 15-15.096
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mouillard
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 26 novembre 2002, la société Banque populaire Val de France (la banque) a consenti à la société JMP créations (la société) un prêt garanti, dans le même acte, par le cautionnement solidaire de M. [U] ; que celui-ci s'est encore rendu caution solidaire, par acte séparé, de l'ensemble des sommes pouvant être dues par la société à la banque ; que la société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la société MCS et associés (MCS), à qui la banque avait cédé sa créance, a assigné en paiement la caution, qui a recherché la responsabilité de la banque pour manquement à son devoir de mise en garde ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu que pour condamner M. [U] à payer à la société MCS une certaine somme, l'arrêt retient qu'à supposer que la responsabilité du prêteur puisse être encourue à raison du défaut de mise en garde de la caution quant à la situation irrémédiablement compromise de la débitrice principale à la date de la souscription des cautionnements, elle est subordonnée à la qualité de caution profane étrangère à la vie des affaires, mais que M. [U], qui était le gérant, associé majoritaire de la société débitrice, totalement impliqué dans la vie de l'entreprise, ne pouvait méconnaître l'activité de celle-ci et était à même de mesurer les risques pris, sauf à démontrer que la banque avait des informations que lui-même ignorait, ce qu'il ne fait pas ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que la caution était avertie, ce qu'elle ne pouvait déduire de sa seule qualité de dirigeant et associé de la société débitrice principale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article 1153, alinéa 3, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu que pour condamner M. [U] au paiement des intérêts au taux légal postérieurement à la date du 11 mai 2014, l'arrêt retient que la société MCS fait valoir, à juste titre, que, dans une lettre du 10 mai 2004, M. [U] reconnaissait sa dette en qualité de caution et s'engageait à l'honorer, de sorte qu'il était parfaitement au courant de son obligation à paiement à la place de la débitrice en liquidation judiciaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les intérêts au taux légal ne sont dus que du jour de la sommation de payer, ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, ce qui ne résulte pas d'une reconnaissance de dette ou d'un engagement de payer, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 décembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la société MCS et associés aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. [U] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille dix-sept.