Cass. com., 22 mars 2016, n° 14-24.755
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mouillard
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 juin 2014), que, par des actes des 25 septembre et 19 novembre 2008, M. X... s'est rendu caution solidaire envers la société Banque populaire du Sud (la banque) des engagements souscrits par la société Actis ingéniérie, notamment au titre de créances professionnelles qu'elle lui avait cédées ; que la société débitrice ayant été mise en redressement judiciaire le 1er mars 2010, la banque a assigné M. X... en paiement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande reconventionnelle tendant à engager la responsabilité de la banque alors, selon le moyen, que le banquier bénéficiant d'un cautionnement garantissant le paiement des créances qui lui ont été cédées par bordereau Dailly commet une faute et engage sa responsabilité à l'égard de la caution du cédant en s'abstenant de poursuivre le recouvrement amiable des créances dont il a obtenu la cession ; que dans ses conclusions d'appel, M. X... faisait expressément valoir que l'ampleur du passif en paiement duquel il était poursuivi était en partie imputable à l'incurie de la banque qui, ayant acquis par voie de bordereau Dailly la propriété des créances de la société Actis Ingénierie à l'égard des société DCNS, DFG et CSP, n'aurait entrepris aucune démarche pour procéder à leur recouvrement ; qu'en se bornant à énoncer que M. X..., caution solidaire, privée du bénéfice de discussion, ne pouvait prétendre être « déchargé de son engagement motif pris de l'insuffisance des tentatives de recouvrement effectuées par la société Actis ingénierie », sans rechercher, ainsi qu'elle y aurait été invitée, si la banque justifiait d'une demande amiable pour obtenir, auprès des débiteurs cédés, le recouvrement des créances qui lui avaient été transmises, ou de l'impossibilité dans laquelle elle était de la formuler, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs inopérants, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1147 du code civil et L. 313-28 du code monétaire et financier ;
Mais attendu que le cessionnaire d'une créance professionnelle, dispensé d'engager une poursuite judiciaire contre le débiteur cédé, ou même de le mettre en demeure, avant d'exercer un recours en garantie contre le cédant, garant solidaire, et, le cas échéant, sa caution, n'est pas non plus tenu de justifier d'une demande amiable adressée à ce débiteur ou de la survenance d'un événement rendant impossible le paiement s'il ne lui a pas notifié la cession ; que M. X... n'ayant pas soutenu dans ses conclusions d'appel que la banque avait notifié les cessions aux débiteurs cédés, la cour d'appel n'avait pas à effectuer la recherche inopérante invoquée par le moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 313-22 du code monétaire et financier ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de M. X... tendant à la déchéance du droit aux intérêts et à l'allocation de dommages-intérêts dirigées contre la banque, l'arrêt retient que celle-ci établit s'être acquittée de son obligation d'information annuelle les 20 février 2009, 13 mars 2009, 16 février 2010, jusqu'au placement en redressement judiciaire de la société
débitrice ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, dès lors que l'obligation d'information annuelle de la caution doit être exécutée jusqu'à l'extinction de la dette garantie, si la banque avait, au plus tard le 31 mars 2011, satisfait à cette obligation pour les sommes dues par la société débitrice au 31 décembre précédent et dont M. X..., bien qu'ayant résilié son engagement de caution à effet du 22 mai 2010, garantissait encore le paiement en exécution de son obligation de règlement, la cour d'appel, à défaut d'avoir précisé si la somme en principal au paiement de laquelle elle condamnait M. X... avec intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2011, date de l'assignation, comprenait des intérêts calculés au taux conventionnel depuis le 1er janvier 2010, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il rejette la demande de M. X... tendant à la déchéance du droit aux intérêts courus depuis le 1er janvier 2010 et condamne, par voie de conséquence, M. X..., en sa qualité de caution solidaire, à payer à la société Banque populaire du Sud la somme de 181 144,24 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2011 et en ce qu'il statue sur l'article 700 du code de procédure civile ainsi que sur les dépens, l'arrêt rendu le 26 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société Banque populaire du Sud aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille seize.