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Décisions

Cass. com., 5 avril 2016, n° 14-20.908

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mouillard

Cass. com. n° 14-20.908

4 avril 2016

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 4 août 2004, M. et Mme X... (les cautions) se sont rendus caution solidaire d'un prêt de 850 000 euros consenti par la Caisse de crédit mutuel d'Aumetz Landres (la banque) à la société Roxymaje dont ils étaient respectivement président et directeur général ; que le 17 août suivant, ils se sont rendus caution solidaire de deux prêts d'un montant de 225 000 euros et 75 000 euros consentis par la banque à la société Gardy, également dirigée par eux ; que les deux sociétés ayant été mises en liquidation judiciaire le 1er juillet 2010, la banque a assigné les cautions en paiement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les cautions font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à faire dire leurs engagements manifestement disproportionnés alors, selon le moyen :

1°/ que le caractère proportionné ou disproportionné d'un engagement de caution au moment où celui-ci a été souscrit doit être apprécié par rapport aux seuls biens et revenus de la caution ; qu'ainsi le juge ne doit se fonder ni sur les perspectives de réussite de l'affaire cautionnée ni sur les revenus escomptés de l'opération garantie ; qu'en se fondant, pour considérer que les engagements de caution donnés par M. et Mme X... à hauteur de 1 380 000 euros n'étaient pas disproportionnés, sur la circonstance que M. et Mme X... étaient respectivement propriétaires de 5 103 et 2 499 actions de la SAS Roxymaje, la cour d'appel, qui a intégré dans leur patrimoine la valeur théorique de l'une des sociétés cautionnées, aujourd'hui liquidée, a violé l'article L. 341-4 du code de la consommation ;

2°/ que le caractère proportionné ou disproportionné d'un engagement de caution au moment où celui-ci a été souscrit doit être apprécié par rapport aux seuls biens et revenus de la caution ; qu'en se bornant à affirmer qu'il ressortait de l'avis d'imposition des époux X... que le revenu fiscal de référence pour l'année 2004 s'était élevé à la somme de 321 567 euros, sans vérifier, comme elle y avait été invitée, si ce revenu fiscal conséquent provenait effectivement de biens et revenus des cautions et non du paiement de plus-values exceptionnelles ou de la cession de parts sociales de la société exploitant leur précédent point de vente, dont le produit a été réinvesti pour acquérir la société Gardy, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 341-4 du code de la consommation ;

Mais attendu que l'arrêt retient que les cautions justifient pour l'année 2004 d'un revenu fiscal important, qu'elles sont propriétaires de parts dans plusieurs sociétés, ainsi que d'un immeuble par le biais de l'une de celles-ci, de sorte que la disproportion alléguée n'est pas établie ; qu'ayant ainsi tenu compte à bon droit des parts sociales détenues par les cautions pour l'appréciation de la disproportion, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche inopérante invoquée par la seconde branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que les cautions font grief à l'arrêt de les condamner à payer diverses sommes à la banque alors, selon le moyen, que les dispositions d'un contrat de prêt comportant, en cas de retard de paiement, à la fois une pénalité contractuelle calculée en pourcentage du capital restant dû et une majoration du taux d'intérêt contractuel, constituent l'une et l'autre des clauses pénales que le juge peut modérer lorsqu'elles sont manifestement excessives ; qu'en cas de cumul de pénalités de retard, leur caractère excessif doit être apprécié en fonction de l'ensemble de ses pénalités ; qu'en se bornant à affirmer que la pénalité de 3 % du taux d'intérêt contractuel en cas de retard de paiement était prévue contractuellement et que les époux X... ne justifient pas en quoi l'indemnité de 5 % des montants échus prévue également en cas de retard de paiement fixée à un taux habituel en la matière présenterait un caractère manifestement excessif, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si le caractère excessif ne se déduisait pas du cumul des clauses pénales et de l'ensemble de ces pénalités, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152 du code civil ;

Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire que la cour d'appel, faisant application pure et simple de la convention, a refusé de modérer les pénalités qui y étaient prévues ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 313-22 du code monétaire et financier ;

Attendu que pour rejeter la demande des cautions tendant à la déchéance de la banque de son droit aux intérêts conventionnels, l'arrêt retient que la production par la banque des copies des courriers d'information suffit à faire présumer de leur envoi ;

Qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à justifier de l'accomplissement des formalités prévues par le texte susvisé, dès lors que la seule production de la copie d'une lettre ne suffit pas à justifier de son envoi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande tendant à la déchéance de la banque de son droit aux intérêts au taux conventionnel, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 18 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne la Caisse de crédit mutuel d'Aumetz Landres aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille seize.

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