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Décisions

Cass. com., 4 novembre 2021, n° 20-12.839

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Guérin

Rapporteur :

Guerlot

Cass. com. n° 20-12.839

3 novembre 2021

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 12 décembre 2019), par des actes des 5 août 2010 et 8 juillet 2011, la société Banque populaire Val de France (la banque) a consenti à la société Backstage Music deux prêts, respectivement de 88 000 euros et de 50 000 euros. M. [C], gérant de la société Backstage Music, s'est rendu caution dans la limite de 22 000 euros pour le premier prêt et de 65 000 euros pour le second. La société Backstage ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a assigné en paiement M. [C], qui a opposé à la banque la disproportion manifeste de ses engagements et la non-exécution par celle-ci de son obligation de mise en garde et le manquement à son obligation d'information annuelle, prévue par l'article L. 313-22 du code monétaire et financier.

Examen des moyens

Sur les moyens du pourvoi principal, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La banque fait grief à l'arrêt de dire que les sommes de 22 000 euros et 36 292,52 euros dues au titre de ses engagements de caution par M. [C] portent intérêts au taux légal à compter de sa signification, alors « que, l'article L. 313-22 du code monétaire et financier n'impose aux établissements financiers aucune forme particulière pour porter à la connaissance de la caution l'information exigée par ce texte et il n'incombe pas à l'établissement de crédit de prouver que la caution a effectivement reçu l'information qui lui a été envoyée ; qu'au cas présent, la cour d'appel qui énonce que les constats d'huissier produits par la BPVF et attestant l'envoi des lettres d'information annuelle à M. [C] comme caution ne pouvait considérer que la banque n'avait pas satisfait à son obligation d'information au motif que ces constats "n'établissent pas si ces personnes ont effectivement reçu lesdites lettres, qu'en l'espèce lesdits constats ne peuvent se substituer à une lettre recommandée avec accusé de réception" sans violer les articles 1315 (ancien) et L. 313-22 du code monétaire et financier. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 313-22 du code monétaire et financier :

4. Selon ce texte, lorsqu'un établissement de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, ne fait pas connaître à la caution au plus tard avant le 31 mars de chaque année le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement, ce dernier est déchu, dans ses rapports avec la caution, des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information et que les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.

5. Pour confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la déchéance de la banque de son droit au paiement des intérêts et en ce qu'il a condamné M. [C] à lui payer la somme de 22 000 euros au titre de son engagement de caution garantissant le prêt n° 08058297 et la somme de 36 392,52 euros au titre de son engagement de caution sur le prêt n° 08064584, l'arrêt retient que les six constats d'huissier des 26 mars 2013, 25 mars 2014, 24 mars 2015, 17 mars 2016, 27 mars 2018 et 19 mars 2019 versés aux débats par la banque n'attestent que de l'envoi de lettres à des personnes dénommées, dont M. [C], sans toutefois établir que ces personnes ont effectivement reçu lesdites lettres. Il retient également qu'en l'espèce, ces constats ne peuvent se substituer à une lettre recommandée avec accusé de réception et que la banque ne rapporte pas la preuve qu'elle a satisfait à son obligation d'information prévue par le texte susvisé.

6. En statuant ainsi, alors que la preuve de la délivrance de l'information prévue par l'article L. 313-22 précité peut être rapportée par tous moyens, notamment par une lettre simple, et qu'il incombe seulement à l'établissement de crédit d'établir qu'il a adressé à la caution l'information requise et non de démontrer, au surplus, que la caution l'a reçue, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement du 9 juin 2016, il condamne M. [C] à payer à la société banque populaire Val de France les sommes de 22 000 euros au titre de son engagement de caution sur le prêt n° 08058297 et de 36 292,52 euros au titre de son engagement de caution sur le prêt n° 08064584, et dit que lesdites sommes produiront intérêts au taux légal à compter de sa signification, l'arrêt rendu le 12 décembre 2019, par la cour d'appel de Bourges ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne M. [C] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [C] et le condamne à payer à la société banque populaire Val de France la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt et un. 

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