Livv
Décisions

CA Nîmes, 4e ch. com., 7 novembre 2025, n° 23/03534

NÎMES

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Rocci

Conseiller :

Mme Vareilles

Avocats :

Me Mansat Jaffre, Me Harnist, Me Calaudi

T. com. Nîmes, du 10 oct. 2023, n° 2022J…

10 octobre 2023

La SARL Super [Localité 4] a été constituée à l'initiative d'une quarantaine d'habitants de la commune de [Localité 4] dans le Gard. Elle a pour objet la distribution de carburant. L'extrait K Bis de la société mentionne un commencement d'activité le 1er janvier 2016.

Suivant un bon de commande et une facture du 1er juin 2022, la société Cévennes Carburants a fait livrer à la société Super [Localité 4] 5000 litres de gazole et 3000 litres de super 95 pour un montant total de 16 130, 40 euros TTC.

Par un courrier du 9 juin 2022 adressé à la société Cévennes Carburants, la société Super [Localité 4] a contesté les prix pratiqués pour la livraison du 1er juin, indiquant que cette livraison les conduisait « à proposer du GO à 2,08 euros et du SP95 à 2,18 euros, alors que toutes les stations alentour étaient 12 centimes moins cher, même celles livrées dans les mêmes temps (') »

La société Super [Localité 4] a indiqué dans ce courrier qu'elle suspendait à titre conservatoire, et pour ménager sa trésorerie, ses paiements dans l'attente d'une nouvelle solution de livraison « qui préservera l'équilibre de la station ».

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 juillet 2022, la société Cévennes carburants a adressé à la société Super [Localité 4] une relance n°3 valant mise en demeure de payer un solde restant dû de 10 000 euros sur cette facture.

***

Par exploit du 22 août 2022, la société Cévennes Carburants a fait assigner la société Super [Localité 4] en paiement devant le tribunal de commerce de Nîmes.

Par conclusions déposées le 5 mai 2023, la société [O] & Cie, est intervenue à l'instance aux lieu et place de la société Cévennes Carburants, par suite d'une transmission universelle de patrimoine et la dissolution sans liquidation de celle-ci, à effet du 30 septembre 2022.

***

Par jugement du 10 octobre 2023, le tribunal de commerce de Nîmes , au visa de l'article 9 du code de procédure civile, des articles 1103, 1104, 1219, 1231-1 et 1231-3 du code civil, et de l'article L442-1, II du code de commerce :

« Constate que la SASU [O] et cie vient de plein droit aux droits et obligations de la SAS Cévennes Carburants ;

Condamne la SARL Super [Localité 4] à payer à la SASU [O] et cie la somme de 10 000 euros en principal, majorée des intérêts à un taux égal à 3 fois le taux d'intérêt légal en vigueur au 7 juillet 2022, courant à compter de cette date et jusqu'au complet paiement

Condamne la SARL Super [Localité 4] à payer à la SASU [O] et cie la somme de 40, 00 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement en vertu des dispositions des articles L441-10 et D441-5 du code de commerce

Dit que les intérêts échus et dus pour une année entière à compter du 22 août 2022 se capitalisent en application de l'article 1343-2 du code civil

Ordonne, en tant que de besoins, l'application des dispositions de l'article 1343-1 du code civil

Déboute la SARL Super [Localité 4] de sa demande de dommages et intérêts formée à titre subsidiaire quant à l'application de prix abusivement élevés, soit à hauteur de 8331,00 euros ;

Déclare irrecevable la demande de dommages et intérêts formée à titre subsidiaire par la SARL Super [Localité 4] au titre de la rupture abusive des relations commerciales établies fondée sur l'article L442-1, II du code de commerce

Déboute la SARL Super [Localité 4] de sa demande de dommages et intérêts formée à titre infiniment subsidiaire,

Condamne la SARL Super [Localité 4] à payer à la SASU [O] et cie la somme de 2000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande formée sur ce fondement

Rejette toute autre demande, plus ample ou contraire des parties,

Condamne la SARL Super [Localité 4] aux dépens de l'instance que le tribunal liquide et taxe à la somme de 70.55 euros en ce non compris le coût de la citation introductive d'instance, le coût de la signification de la présente décision, ainsi que tous autres frais et accessoires. ».

***

La société Super [Localité 4] a relevé appel le 13 novembre 2023 de ce jugement pour le voir infirmer, annuler, ou réformer en ce qu'il a :

- condamné la société Super [Localité 4] à payer à la société [O] & Cie la somme de 10 000 euros en principal, majorée des intérêts à un taux égal à 3 fois le taux d'intérêt légal en vigueur au 7 juillet 2022, courant à compter de cette date et jusqu'au complet paiement

- condamné la société Super [Localité 4] à payer à la société [O] & Cie la somme de

40, 00 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement en vertu des dispositions des articles L441-10 et D441-5 du code de commerce

- dit que les intérêts échus et dus pour une année entière à compter du 22 août 2022 se capitalisent en application de l'article 1343-2 du code civil

- ordonné, en tant que de besoins, l'application des dispositions de l'article 1343-1 du code civil

- débouté la société Super [Localité 4] de sa demande de dommages et intérêts formée à titre subsidiaire quant à l'application de prix abusivement élevés, soit à hauteur de 8331,00 euros ;

- déclaré irrecevable la demande de dommages et intérêts formée à titre subsidiaire par la société Super [Localité 4] au titre de la rupture abusive des relations commerciales établies fondée sur l'article L442-1, II du code de commerce

- débouté la société Super [Localité 4] de sa demande de dommages et intérêts formée à titre infiniment subsidiaire,

- condamné la société Super [Localité 4] à payer à la société [O] & Cie la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande formée sur ce fondement

- rejeté toute autre demande, plus ample ou contraire des parties,

- condamné la société Super [Localité 4] aux dépens de l'instance que le tribunal liquide et taxe à la somme de 70.55 euros en ce non compris le coût de la citation introductive d'instance, le coût de la signification de la présente décision, ainsi que tous autres frais et accessoires.

***

Dans ses dernières conclusions, la société Super [Localité 4], demande à la cour, au visa des articles L442-1 II et L 442-6 I 5° du code de commerce, de :

« Recevoir la SARL Super [Localité 4] en son appel

Réformer le jugement rendu le 10 octobre 2023 par le tribunal de commerce de Nîmes en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

A titre principal :

Débouter la société SAS Cévennes Carburants de ses entières demandes, fins et conclusions,

Condamner la SAS Cévennes Carburants à payer à la SARL Super [Localité 4] une somme de 1500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens,

A titre subsidiaire, si la cour venait à condamner la SARL Super [Localité 4] au paiement d'une somme de 10 000 euros à la SAS Cévennes :

Condamner la SAS Cévennes Carburants à payer à la SARL Super [Localité 4] une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de rupture abusive des relations contractuelles entre les parties,

Ordonner la compensation de la dette et de la créance de la SARL Super [Localité 4] envers la SAS Cévennes,

Condamner la SAS Cévennes Carburants à payer à la SARL Super [Localité 4] une somme de 2500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens, de première instance et d'appel,

A titre infiniment subsidiaire, si la cour venait à condamner la SARL Super [Localité 4] au paiement d'une somme de 10 000 euros à la SAS Cévennes Carburants et à ne pas condamner la SAS Cévennes Carburants à payer à la SARL Super [Localité 4] une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts :

Fixer le préjudice subi par la SARL Super [Localité 4]

Condamner la SAS Cévennes Carburants à payer le montant

Ordonner la compensation de la dette et de la créance

Condamner la SARL Super [Localité 4] à payer le solde de la compensation

Condamner la SAS Cévennes Carburants à payer à la SARL Super [Localité 4] une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens, de première instance et d'appel. ».

Au soutien de ses prétentions, la société Super [Localité 4], expose que :

le 3 juin 2022, à 19h30, par téléphone, le représentant de la SAS Cévennes Carburants, devenue SASU [O] & Cie lui a annoncé la fin brutale et sans préavis des livraisons ;

cette rupture brutale est constitutive d'une faute contractuelle et elle subit un préjudice de deux ordres résultant:

d'une part, de la dérive à la hausse des prix d'achat des carburants sur la seule période du 11 mars 2022 au 1er juin 2022, évalué à 8 331 euros représentant la différence entre les prix d'achat auprès de Cévennes Carburant et les prix d'achat du marché à partir des prix de vente relevés par le gouvernement ;

d'autre part, une perte de chance caractérisée par les ventes de carburants non réalisées, faute de produits en cuve, mais également par les difficultés occasionnées par la recherche d'une autre fournisseur au débotté après une rupture d'approvisionnement ;

la somme de 10 000 euros retenue à titre compensatoire, dans l'attente de la reprise des discussions, compensait une perte équivalente ou du même ordre, directe conséquence de l'attitude déloyale de la société Cévennes Carburants, difficilement supportable pour l'équilibre précaire d'une station-service rurale que seule la mobilisation d'une quarantaine d'habitants de [Localité 4] a sauvé;

***

Dans ses dernières conclusions, la société [O] & Cie, demande à la cour, au visa des articles 1101 et suivants du code civil, et de l'article L442-1-II du code de commerce, de :

« Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,

Confirmer dans son ensemble le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nîmes du 10 octobre 2023 en ce qu'il :

« constate que la SASU [O] et cie vient de plein droit aux droits et obligations de la SAS Cévennes Carburants ;

Condamne la SARL Super [Localité 4] à payer à la SASU [O] et cie la somme de 10 000 euros en principal, majorée des intérêts à un taux égal à 3 fois le taux d'intérêt légal en vigueur au 7 juillet 2022, courant à compter de cette date et jusqu'au complet paiement

Condamne la SARL Super [Localité 4] à payer à la SASU [O] et cie la somme de 40, 00 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement en vertu des dispositions des articles L441-10 et D441-5 du code de commerce

Dit que les intérêts échus et dus pour une année entière à compter du 22 août 2022 ce capitalise en application de l'article 1343-2 du code civil

Ordonne, en tant que de besoins, l'application des dispositions de l'article 1343-1 du code civil

Déboute la SARL Super [Localité 4] de sa demande de dommages et intérêts formée à titre subsidiaire quant à l'application de prix abusivement élevés, soit à hauteur de 8331,00 euros ;

Déclare irrecevable la demande de dommages et intérêts formée à titre subsidiaire par la SARL Super [Localité 4] au titre de la rupture abusive des relations commerciales établies fondée sur l'article L442-1, II du code de commerce

Déboute la SARL Super [Localité 4] de sa demande de dommages et intérêts formée à titre infiniment subsidiaire,

Condamne la SARL Super [Localité 4] à payer à la SASU [O] et cie la somme de 2000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande formée sur ce fondement

Rejette toute autre demande, plus ample ou contraire des parties,

Condamne la SARL Super [Localité 4] aux dépens de l'instance que le tribunal liquide et taxe à la somme de 70.55 euros en ce non compris le coût de la citation introductive d'instance, le coût de la signification de la présente décision, ainsi que tous autres frais et accessoires. ».

Ce faisant,

Débouter la SARL Super [Localité 4] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions

Y ajoutant,

Condamner la SARL Super [Localité 4] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens d'appel ».

Au soutien de ses prétentions, la société [O] & Cie, expose que :

Le bon de livraison valant préfacture, mentionne qu'i1 est facturé 5 000 litres de gazole au prix unitaire du mètre cube de 1 645,00 euros hors taxes, ainsi que

3 000 litres de SP 95 au prix unitaire du mètre cube de 1739,00 euros hors taxes, représentant un total de 13 442,00 euros hors taxes, suit 16 130,40 euros toutes taxes comprises ;

Après imputation du versement de 5 130,40 euros intervenu le 30 juin 2022, qui doit être qualifié d'acompte, la société Super [Localité 4] reste incontestablement lui devoir la somme de 10 000 euros toutes taxes comprises ;

La différence entre la quantité de sans-plomb 95 commandée 1e 25 mai 2022 par la société Super [Localité 4], soit 5 000 litres, et celle qui lui a été livrée par la Sas Cévennes Carburants le 1er juin suivant, soit 3 000 litres, ne donne lieu à aucune discussion devant le tribunal et n'est donc pas en litige ;

Les relations entre les parties n'étaient pas organisées en contrat écrit et aucun engagement d'exclusivité unilatéral ou réciproque n'existait ;

L'antériorité des relations ne suffit ni à caractériser une contractualisation de la détermination du prix des produits vendus par la SAS Cévennes Carburants, ni la garantie du maintien d'une marge minimum lui permettant d'aligner ses prix de revente sur ceux de la concurrence environnante ;

Par ailleurs la société Super [Localité 4] ne verse aux débats aucun justificatif de la similarité de ses prix avec ceux que pratiquaient les stations-services indépendantes de son voisinage au cours des années antérieures à la crise pétrolière de 2022 ;

il n'apparaît pas que l'éventualité de l'atteinte d'un seuil de rentabilité de la société Super [Localité 4] ait gouverné les conditions financières qui lui étaient consenties dans le cadre de ses approvisionnements auprès de la SAS Cévennes Carburant ;

en tout état de cause, le principe de libre concurrence permet à chaque distributeur de fixer librement ses prix de revente, sous réserve des interdictions édictées par le droit de la concurrence, ses prix ne pouvant lui être imposés par quelque tirs que ce soit, sauf le cas échéant par les autorités gouvernementales dans le cadre de réglementations particulières non évoquées au cas d'espèce.

S'agissant de la rupture abusive du contrat, la société [O] & Cie expose que :

il ne saurait lui être reproché d'avoir rompu un quelconque contrat alors qu'il s'agit de commandes ponctuelles auprès d'un fournisseur de carburant indépendant ;

la Sarl Super [Localité 4] ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une quelconque relation commerciale au sens où elle l'entend, ni la preuve de l'inexécution contractuelle qu'elle invoque ;

en tout état de cause, elle pouvait procéder à la résiliation sans préavis de la relation commerciale dés lors que la société Super [Localité 4] n'a pas exécuté ses obligations en tant qu'acheteur du produit livré, à savoir payer le prix, conformément au bon de commande et à la facture édités;

la société Super [Localité 4] fonde un prétendu préjudice sur la hausse des prix du carburant alors qu'elle a accepté les prix indiqués par la SAS Cévennes Carburant au moment de la commande et de la livraison ;

la société Super [Localité 4] a simplement subi l'impact de la hausse des prix du pétrole comme l'ensemble des maillons de la chaîne de distribution ;

l'arrêt des livraisons est intervenu à la suite de multiples impayés de la part de la Sarl Super [Localité 4].

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

Par une note en délibéré du 15 octobre 2025, la cour a interrogé les parties sur la question de savoir si le tribunal de commerce de Nîmes n'avait pas commis un excès de pouvoirs au visa des articles L. 442-6, III, 442-4 du code de commerce et R. 311-3 du code de l'organisation judiciaire.

Maître Calaudi, conseil de la SASU [O] et Cie venant aux droits de la SAS Cévennes Carburants, fait valoir en réponse dans sa note du 16 octobre 2015 que si le moyen par lequel une partie conteste, en application des articles L. 442-6, III, devenu L. 442-4, III et D 442-3 la compétence d'une juridiction à connaitre d'une demande reconventionnelle fondée sur l'article L. 442-6, I, devenu L. 442-1 du code de commerce, constitue non pas une fin de non-recevoir, mais une exception d'incompétence qui ne rend pas la demande irrecevable ( C.cass 18/10/2023 n°21-15.378), tel n'est pas le cas en l'espèce puisque les conclusions de la Sarl Super [Localité 4] tant en première instance qu'en cause d'appel ne contestent pas in limine litis la compétence du tribunal de commerce et de la cour de Nîmes pour connaître de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts au titre des textes précités et que c'est dans ces conditions que le tribunal de commerce en a exactement déduit l'irrecevabilité des demandes, fins et prétentions de la Sarl Super [Localité 4] sur les textes précités, n'entrant pas dans son champ de compétence juridictionnel.

Il est ainsi demandé à la cour de constater que :

il n'est pas soulevé in limine litis par la Sarl Super [Localité 4] une quelconque exception d'incompétence au bénéfice d'un tribunal spécialisé sur le fondement des textes précités ;

il n'existe pas d'appel nullité formé par la Sarl Super [Localité 4] ;

il n'existe aucune prétention tendant à la nullité du jugement rendu par le tribunal de commerce de Nîmes, qui ne peut encore moins être formulée dans le cadre d'une note en délibéré.

DISCUSSION

Sur la compétence :

La règle découlant de l'application combinée des articles L.442-4, III ( ancien article L. 442-6), et D 442-2 ( ancien D.442-3) du code de commerce, désignant les seules juridictions indiquées par ce dernier texte pour connaître de l'application des dispositions du I et du II de l'article L. 442-1, institue une règle de compétence d'attribution exclusive et non une fin de non-recevoir, en sorte que lorsqu'un défendeur à une action fondée sur le droit commun présente une demande reconventionnelle en invoquant les dispositions de l'article L 442-1, la juridiction saisie, si elle n'est pas une juridiction désignée par l'article D. 442-3, doit, si son incompétence est soulevée, selon les circonstances et l'interdépendance des demandes, soit se déclarer incompétente au profit de la juridiction désignée par ce texte et sursoir à statuer dans l'attente que cette juridiction spécialisée ait statué sur la demande, soit renvoyer l'affaire pour le tout devant cette juridiction spécialisée. ( Cass.Com.18 octobre 2023 n° 21-15.378)

Le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nîmes vise expressément les conclusions n°2 en demande déposées le 5 mai 2023 par la société [O] et Cie, venue aux droits de la Sas Cévennes Carburants, dont il ressort que la société demanderesse a agi au visa des articles 1101 et suivants du code civil et de l'article L. 442-1-II du code de commerce, et le tribunal de commerce s'est prononcé sur sa compétence au titre de la demande reconventionnelle qu'il a déclaré irrecevable au motif qu'il n'était pas compétent pour en connaître.

Il en résulte que l'action n'est pas fondée sur le seul droit commun, mais également sur le fondement des dispositions relatives aux pratiques déloyales entre entreprises, que la demande reconventionnelle déclarée irrecevable est une demande de dommages et intérêts formée à titre subsidiaire par la SARL Super [Localité 4] au titre de la rupture abusive des relations commerciales établies fondée sur l'article L442-1, II du code de commerce, qu'il s'agit d'une demande indissociable de la demande principale qui est une demande aux fins d'exécution de la relation contractuelle et en paiement et que l'interdépendance des demandes ne permet pas de les juger séparément.

En outre, le droit des pratiques anti-concurrentielles est invoqué comme moyen de défense par la société Lassalle, en sorte que la compétence spéciale s'applique pour l'ensemble du litige et pas seulement pour la demande reconventionnelle formée par la société Super [Localité 4].

Il en résulte qu'en déclarant irrecevable la demande de dommages et intérêts formée à titre subsidiaire par la SARL Super [Localité 4] au titre de la rupture abusive des relations commerciales établies fondée sur l'article L442-1, II du code de commerce, le tribunal de commerce a fait une mauvaise application des dispositions de l'article D. 442-3 du code de commerce

La cour infirme le jugement du tribunal de commerce de Nîmes en ce qu'il a statué sur la demande principale en application du droit commun et en ce qu'il a déclaré la demande reconventionnelle de la société Super [Localité 4] irrecevable alors qu'il a motivé sa décision sur sa compétence au visa des textes régissant le droit des pratiques anti-concurrentielles.

La cour renvoie en conséquence l'affaire pour le tout devant le tribunal de commerce de Marseille conformément au tableau de l'annexe 4-2-2 du livre IV du code de commerce, visé par l'article D 442-3 du même code.

Sur les frais de l'instance :

Chacune des parties conservera la charge des dépens de la présente instance.

L'équité et la situation des parties ne commandent pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions

Statuant à nouveau et y ajoutant

Renvoie l'affaire pour le tout devant le tribunal de commerce de Marseille en application des dispositions de l'article D 442-3 du code de commerce

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens de première instance et d'appel

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site