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Décisions

CA Paris, Pôle 1 - ch. 8, 7 novembre 2025, n° 25/02783

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 25/02783

7 novembre 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 8

ARRÊT DU 07 NOVEMBRE 2025

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/02783 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CKZYI

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 08 Janvier 2025 -Président du TJ de [Localité 13] - RG n° 24/55705

APPELANTE

SELAFA MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES, représentée par Maître [D] [F], agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société [Z] [R] & ASSOCIES, dont le siège social est sis [Adresse 1], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 11]

Représentée par Me Philippe THOMAS COURCEL de la SELARL THOMAS-COURCEL BLONDE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0165

INTIMÉE

S.A.S. HOMELAND agissant es qualité de Syndic en exercice du Syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 12]

Représentée par Me Eric ALLERIT de la SELEURL TBA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

Ayant pour avocat plaidant, Me Benjamin JAMI, de la SELARL BJA, avocat au Barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 25 septembre 2025 en audience publique, Marie-Catherine GAFFINEL, Conseillère , ayant été entendue en son rapport dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile, devant la cour composée de :

Florence LAGEMI, Présidente de chambre

Marie-Catherine GAFFINEL, Conseillère

Patrick BIROLLEAU, Magistrat honoraire,

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Catherine CHARLES

ARRÊT :

- Contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence LAGEMI, Présidente de chambre et par Catherine CHARLES, présent lors de la mise à disposition.

***

Par délibération de l'assemblée générale du 20 septembre 2023, la société Cabinet Homeland a été nommée en qualité de nouveau syndic pour gérer le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 7]), succédant à la société [Z] [R] & Associés.

Par jugement du 11 octobre 2023, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société [Z] [R] & Associés et a désigné la SELAFA Mandataires judiciaires Associés - MJA (ci-après désignée la SELAFA MJA) en qualité de liquidateur judiciaire.

Par ordonnance du 18 octobre 2023, le juge-commissaire à la liquidation judiciaire de la société [Z] [R] & Associés a :

- ordonné que l'enlèvement, l'archivage et l'inventaire des livres et documents comptables des copropriétés gérées soient confiés à la société SPGA,

- dit que les frais afférents à cet archivage seront prélevés sur les fonds disponibles au titre de l'article L.641-13 du code de commerce,

- dit que l'archivage sera effectué jusqu'à l'expiration du délai de 5 ans après clôture de la liquidation et reddition des comptes, conformément aux dispositions de l'article L.643-10 du code de commerce.

Par acte des 16 et 17 juillet 2024, la société Cabinet Homeland, en sa qualité de syndic du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 6] a assigné la SELAFA MJA en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société [Z] [R] & Associés et la société SPGA (Société Partenaire de Gestion d'Archives) devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins notamment d'obtenir la condamnation de la SELAFA MJA à produire, sous astreinte de 250 euros par jour de retard à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir, l'ensemble des éléments concernant la copropriété.

Par ordonnance contradictoire du 8 janvier 2025, le premier juge a :

- déclaré la société Cabinet Homeland irrecevable en ses demandes à l'encontre de la SPGA;

- déclaré la société Cabinet Homeland recevable en ses demandes à l'encontre de la SELAFA MJA ;

- condamné la SELAFA MJA à remettre à la société Cabinet Homeland les pièces suivantes:

- le carnet d'entretien,

- la liste de transmission des archives par l'ancien syndic,

- le dossier AG en cours,

- le dossier AG N-3 avec convocation (compris annexes comptables),

- les contrats de gestion courante,

- les dossiers des travaux en cours dont factures, appels de fonds, devis et honoraires pris par l'ancien syndic,

- les dossiers des sinistres en cours,

- les dossiers des litiges en cours,

- numéros ICS,

- RIB (compte séparé et CECOP) + nom du correspondant à la banque,

- les souches des chéquiers et chèques non encaissés,

- la répartition des charges de l'exercice comptable 2023,

- les grands livres pour les exercices 2019, 2020, 2021, 2022, 2023 et 2024 (daté du jour de la remise),

- les balances pour les exercices 2019, 2020, 2021, 2022, 2023 et 2024 (daté du jour de la remise),

- le détail des avances trésorerie et fonds travaux Alur,

- les factures 2022, 2023 et 2024,

- les factures comptabilisées non réglées et factures non comptabilisées à régler,

- la liste des lots par copropriétaire,

- la liste des clés de répartition par lots,

- les compteurs : numéros, affectation par mots et relevés sur 3 ans,

- la liste des mutations,

- les clés, badges, émetteurs et cartes de propriété,

- débouté la société Cabinet Homeland de sa demande d'astreinte ;

- débouté la société Cabinet Homeland de sa demande de dommages et intérêts ;

- condamné la SELAFA MJA au paiement des dépens ;

- débouté la société Cabinet Homeland de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 30 janvier 2025, la SELAFA MJA a relevé appel de cette décision en ce qu'elle a déclaré la société Cabinet Homeland recevable en ses demandes à son encontre, l'a condamnée à remettre à la société Cabinet Homeland diverses pièces et l'a condamnée aux dépens.

Dans ses conclusions remises et notifiées le 25 mars 2025, la SELAFA MJA demande à la cour de :

- annuler la décision dont appel ;

Subsidiairement,

- infirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle l'a condamnée à remettre à la société Cabinet Homeland un certain nombre de pièces et l'a condamnée au paiement des dépens;

Statuant à nouveau,

- débouter la société Cabinet Homeland de toutes ses demandes ;

- condamner la société Cabinet Homeland à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Cabinet Homeland aux entiers dépens de l'instance, tant de première instance que d'appel.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 26 mai 2025, la société Cabinet Homeland, agissant en qualité de syndic du syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 7]), demande à la cour de :

- déclarer la SELAFA MJA tant irrecevable que mal fondée en son appel ;

- l'en débouter ;

- la recevoir, en qualité de syndic du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 7]) en son appel ;

Y faisant droit,

- la déclarer, agissant en qualité de syndic en exercice du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 6], recevable et bien-fondée en ses demandes,

- confirmer l'ordonnance de référé rendue le 8 janvier 2025 en ce qu'elle a condamné la SELAFA MJA à lui remettre les pièces visées dans l'ordonnance,

- infirmer l'ordonnance de référé rendue le 8 janvier 2025 en ce qu'elle a rejeté la demande de condamnation sous astreinte ;

Statuant à nouveau :

- assortir cette condamnation d'une astreinte de 250 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir ;

En tout état de cause :

- débouter la SELAFA MJA, en qualité de liquidateur judiciaire de la société [Z] [R] & Associés, de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la SELAFA MJA à lui payer, en qualité de syndic, la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SELAFA MJA aux entiers dépens avec faculté de recouvrement direct au profit de maître Allerit, membre de la SELARL TBA, selon les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée le 10 septembre 2025.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR,

Sur les vices de formes relevés par l'intimée

La société Cabinet Homeland soutient que plusieurs irrégularités formelles « semblent de nature à vicier » la procédure, qu'en particulier, la déclaration d'appel ne désigne pas le nom du syndic mais mentionne seulement « syndic de copro. SDC Immeuble du [Adresse 9] », en contradiction avec les dispositions de l'article 58 du code de procédure civile, que l'avis de la déclaration d'appel ne mentionne pas sa qualité de syndic, que l'avis de fixation ne mentionne pas sa dénomination sociale et que la dénonciation de la procédure qui lui a été faite le 26 mars 2025 vise « le cabinet Homeland » sans mention de sa qualité de représentant légal du syndicat des copropriétaires.

Mais, en application des articles 112 et 114 du code de procédure civile, la nullité pour vice de forme ne peut être prononcée qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité.

Or, en l'espèce, la société Cabinet Homeland ne démontre, ni même n'allègue, aucun grief. Aucune irrégularité n'affecte la déclaration d'appel.

Sur la nullité de l'ordonnance

Aux termes des articles 455 et 458 du code de procédure civile, le jugement est motivé à peine de nullité.

L'appelante soutient que l'ordonnance est nulle au motif que le premier juge, en méconnaissant les article 4 et 5 du code de procédure civile, n'a pas répondu aux moyens qu'elle avait développés notamment en ce qu'elle ne pouvait pas être condamnée à une astreinte en application de l'article L622-21 du code de commerce, qu'elle ne pouvait être condamnée à remettre des pièces qu'elle ne détenait pas, et que les pièces réclamées excédaient celles visées par l'article 18-2 de la loi du 10 juillet 1965.

Mais, en rejetant la demande d'astreinte, le premier juge a fait droit à la prétention de l'appelante et a donc répondu à son moyen.

En outre, en se fondant sur l'article 33 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, il a retenu que la SELAFA MJA ne démontrait pas avoir transmis les pièces sollicitées, répondant implicitement aux deux autres moyens qu'elle avait soulevés.

Dès lors que la décision n'est pas dépourvue de toute motivation, la nullité n'est pas encourue.

Sur la demande de transmission des pièces

Aux termes de l'article 18-2 de loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, en cas de changement de syndic, l'ancien syndic est tenu de remettre au nouveau syndic, dans le délai de quinze jours à compter de la cessation de ses fonctions, la situation de trésorerie, les références des comptes bancaires du syndicat et les coordonnées de la banque. Il remet, dans le délai d'un mois à compter de la même date, l'ensemble des documents et archives du syndicat ainsi que, le cas échéant, l'ensemble des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l'immeuble ou aux lots gérés mentionnés à l'avant-dernier alinéa du I de l'article 18, dans un format téléchargeable et imprimable. Dans l'hypothèse où le syndicat des copropriétaires a fait le choix de confier tout ou partie de ses archives à un prestataire spécialisé, il est tenu, dans ce même délai, d'informer le prestataire de ce changement en communiquant les coordonnées du nouveau syndic.

Dans le délai de deux mois suivant l'expiration du délai mentionné ci-dessus, l'ancien syndic est tenu de fournir au nouveau syndic l'état des comptes des copropriétaires ainsi que celui des comptes du syndicat, après apurement et clôture.

Après mise en demeure restée infructueuse, le syndic nouvellement désigné ou le président du conseil syndical pourra demander au président du tribunal judiciaire statuant en référé, d'ordonner sous astreinte la remise des pièces, informations et documents dématérialisés mentionnés aux deux premiers alinéas ainsi que le versement des intérêts provisionnels dus à compter de la mise en demeure, sans préjudice de toute provision à valoir sur dommages et intérêts.

Toutefois, comme le soutient la SELAFA MJA, désignée comme liquidateur de la société [Z] [R] & Associés, le juge-commissaire a, par décision du 18 octobre 2023, ordonné l'enlèvement, l'archivage et l'inventaire des livres et documents comptables des copropriétés gérés par la société [Z] [R] & Associés en confiant ces opérations à la société SPGA.

Il ressort du courrier adressé par la société SPGA à la SELAFA MJA en date du 2 septembre 2024, que l'ordonnance a été exécutée. Il n'est d'ailleurs pas contesté que la société SPGA a pris possession des documents relatifs à la copropriété du [Adresse 4] et le bon de livraison du 23 janvier 2024, émanant de la société SPGA (Everial) mentionnant une livraison à la société Homeland concernant la copropriété du [Adresse 4] le confirme.

Dès lors, la SELAFA MJA qui, en vertu d'une ordonnance du juge-commissaire ne détient plus les pièces, ne peut être condamnée à les transmettre à la société Cabinet Homeland. Il ne peut pas plus lui être reproché de ne pas avoir demandé à la société SPGA de transmettre les documents prévus par l'article 18-2 précité, n'ayant aucune relation, de quelque nature que cela soit avec elle. La circonstance que la société Cabinet Homeland conteste la bonne réception de la livraison intervenue le 23 janvier 2024 est également inopérante à l'égard de la SELAFA MJA.

L'ordonnance est ainsi infirmée en ce qu'elle a condamné la SELAFA MJA à remettre à la société Cabinet Homeland un certain nombre de pièces concernant la copropriété du [Adresse 6] ([Adresse 3]).

Sur les autres demandes

Compte tenu de l'issue du litige, la société Cabinet Homeland, en sa qualité de syndic du syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 7]), est condamnée aux dépens de première instance et d'appel et à verser à la SELAFA MJA la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Dit que l'appel est recevable,

Rejette la demande d'annulation de l'ordonnance entreprise,

Infirme l'ordonnance en ce qu'elle a condamné la SELAFA MJA à remettre à la société Cabinet Homeland un certain nombre de pièces et l'a condamnée aux dépens,

Statuant à nouveau,

Rejette la demande de la société Cabinet Homeland tendant à voir la SELAFA MJA condamnée à lui remettre un certain nombre de pièces,

Confirme l'ordonnance pour le surplus des chefs critiqués,

Condamne la société Cabinet Homeland en sa qualité de syndic du syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 8], aux dépens de première instance et d'appel et à verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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