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Décisions

CA Nîmes, 4e ch. com., 7 novembre 2025, n° 24/03683

NÎMES

Arrêt

Autre

CA Nîmes n° 24/03683

7 novembre 2025

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°281

N° RG 24/03683 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JMUC

AV

JUGE DE L'EXECUTION DE [Localité 12]

08 novembre 2024 RG :23/03885

[W]

Société [Adresse 13]

C/

[T]

S.A. SOCIÉTÉ BOURSORAMA

Copie exécutoire délivrée

le 07/11/2025

à :

Me Aurore VEZIAN

Me Caroline FAVRE DE THIERRENS

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 07 NOVEMBRE 2025

Décision déférée à la cour : Jugement du Juge de l'exécution de [Localité 12] en date du 08 Novembre 2024, N°23/03885

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Christine CODOL, Présidente de Chambre

Agnès VAREILLES, Conseillère

Nathalie ROCCI, Présidente

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière à la Chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 Octobre 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 24 Octobre 2025 prorogé au 07 novembre 2025.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTS :

M. [G] [W]

né le [Date naissance 4] 1939 à [Localité 14] (Tunisie)

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représenté par Me Aurore VEZIAN de la SELARL LEONARD VEZIAN CURAT AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représenté par Me Cecile BIGUENET-MAUREL de la SCP MB JUSTITIA, Plaidant, avocat au barreau de GRASSE

Société [Adresse 13] Société civile immatriculée au RCS de [Localité 10] sous le n° 444074074 dont le siège social est [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Aurore VEZIAN de la SELARL LEONARD VEZIAN CURAT AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Cecile BIGUENET-MAUREL de la SCP MB JUSTITIA, Plaidant, avocat au barreau de GRASSE

INTIMÉS :

Me [Z] [T]assigné à sa personne

SCP [R] - [T] [Adresse 8]

[Localité 1]

S.A. SOCIÉTÉ BOURSORAMA, inscrite sous le n° 351058151 au registre de Nanterre dont le siège social est à (92100) BOULOGNE-BILLANCOURT, France, venant aux droits de la CAIXABANK France aux termes d'un traité de fusion-absorption signé le 27 juin 2006 et approuvé par les Assemblées Générales Extraordinaires de la CAIXABANK France et de BOURSORAMA intervenues le 1 er août 2006, sis [Adresse 6], agissant par son Président Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 7]

[Localité 9]

Représentée par Me Caroline FAVRE DE THIERRENS de la SELARL FAVRE DE THIERRENS BARNOUIN VRIGNAUD MAZARS DRIMARACCI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Affaire fixée en application des dispositions de l'article 906 du code de procédure civile avec ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 02 Octobre 2025

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie ROCCI, Présidente de Chambre,en l'absence de la Présidente légitimement empêchée,le 07 Novembre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour,conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile,

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Vu l'appel interjeté le 22 novembre 2024 par Monsieur [G] [W] et la société [Adresse 13] à l'encontre du jugement rendu le 8 novembre 2024 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nîmes dans l'instance n° RG 23/03885 ;

Vu l'avis de fixation de l'affaire à bref délai du 3 décembre 2024 ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 28 mai 2025 par Monsieur [G] [W] et la société Square Mérimée, appelants, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 22 septembre 2025 par la SA Boursorama, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu la signification de la déclaration d'appel et de l'avis de fixation à bref délai délivrée le 6 décembre 2024 à Maître [Z] [T], intimé, par acte laissé à la personne de son destinataire ;

Vu la signification des conclusions de Monsieur [G] [W] et de la société [Adresse 13], appelants, délivrée le 5 février 2025 à Maître [Z] [T], intimé, par acte laissé à une personne qui s'est déclarée habilitée à le recevoir pour son destinataire ;

Vu la signification des conclusions de Monsieur [G] [W] et de la société Square Mérimée, appelants, délivrée le 4 juin 2025 à Maître [Z] [T], intimé, par acte laissé à une personne qui s'est déclarée habilitée à le recevoir pour son destinataire ;

Vu l'ordonnance du 3 décembre 2024 de clôture de la procédure à effet différé au 2 octobre 2025.

Sur les faits

Par acte notarié du 27 mai 2003, la société Caixa Bank a consenti à la société [Adresse 13] un prêt n°10001663824 d'un montant de 500 000 euros, garanti par l'affectation hypothécaire d'un ensemble immobilier situé à [Localité 10] et par les cautionnements personnels et solidaires de Monsieur [G] [W] et de Madame [N] [W].

Il était également mentionné dans l'acte de prêt, au paragraphe 'Autres garanties', l'avenant à cession de garantie d'un contrat d'assurance souscrit par Monsieur [G] [W] auprès de Fortis Caixavie, référence 1158952 E, et d'un contrat Caixavie n°10000621120, souscrit également par Monsieur [G] [W], d'une valeur d'environ 420 000 euros.

La société Boursorama est venue aux droits de la société Caixa Bank, aux termes d'un traité de fusion-absorption signé le 27 juin 2006.

Il a été procédé en janvier 2009 au rachat du contrat d'assurance souscrit par Monsieur [G] [W] auprès de Fortis Caixavie, référence 1158952 E, qui a permis le remboursement total d'un prêt contracté par une société civile immobilière Bellevue et la régularisation des impayés ainsi que le remboursement anticipé partiel du prêt contracté par la société [Adresse 13], par affectation de la somme de 77 305,78 euros.

Par courrier recommandé du 20 juin 2018, la société Boursorama a prononcé la déchéance du terme du contrat de prêt n°10001663824 et mis en demeure la société [Adresse 13] de lui payer la somme de 431 870,19 euros.

Par courriers recommandés du même jour, la société Boursorama a également mis en demeure les cautions de lui payer la somme de 431 870,19 euros.

La société Boursorama a engagé le 17 mai 2019 une procédure de saisie immobilière qu'elle a laissé devenir caduque.

Le 16 juin 2023, la société Boursorama a fait délivrer par la SCP de commissaires de justice Nicolas-[T] à la société [Adresse 13] un commandement aux fins de saisie vente en vue du recouvrement de la somme de 506 891,86 euros.

Sur la procédure

Par exploit du 13 juillet 2023, la société Square Mérimée et Monsieur [G] [W] ont fait assigner la société Boursorama et Maître [Z] [T], commissaire de justice, devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nîmes en nullité du commandement de payer aux fins de saisie-vente et en condamnation de la société Boursorama à restituer, sous astreinte, diverses sommes à Monsieur [G] [W].

Par jugement du 8 novembre 2024, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nîmes a statué et :

« Se déclare territorialement compétent en application de l'article 47 du code de procédure civile ;

Déboute Monsieur [G] [W] et la société [Adresse 13] de leur demande de nullité du commandement aux fins de saisie vente délivré le 16 juin 2023 ;

Rejette les moyens de prescription de la créance et d'extinction de la créance par subrogation ;

Dit que les demandes de condamnation en paiement ne relèvent pas de la compétence du juge de l'exécution

Condamne in solidum Monsieur [G] [W] et la société Square Mérimée à payer à la société Boursorama venant aux droits de la société Caixabank la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum Monsieur [G] [W] et la société [Adresse 13] aux dépens. ».

Monsieur [G] [W] et la société Square Mérimée ont relevé appel de ce jugement pour le voir infirmer et / ou annuler en ce qu'il a :

- rejeté la fin de non-recevoir portant sur la prescription encourue par la banque Boursorama ;

- s'est déclaré incompétent à prononcer les condamnations sous astreinte portant sur les demandes de restitutions formulées par Monsieur [G] [W] et la société [Adresse 13]

- rejeté le moyen portant sur l'extinction de la créance par subrogation ;

- rejeté le moyen de nullité du commandement de payer du 16 juin 2023 entaché d'absence d'acte de transmission de la créance et d'absence de détail précis de la créance réclamée et les intérêts afférents ;

- condamné in solidum Monsieur [G] [W] et la société Square Mérimée à payer à Boursorama la somme de 2 000 euros ;

- condamné in solidum Monsieur [G] [W] et la société [Adresse 13] aux dépens.

EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans leurs dernières conclusions, Monsieur [G] [W] et la société Square Mérimée, appelants, demandent à la cour de :

« Juger l'appel recevable et bien fondé

Infirmer le jugement du 8 novembre 2024 rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nîmes en ce qu'il a :

1) rejeté la fin de non-recevoir portant sur la prescription encourue par la banque Boursorama ;

2) s'est déclaré incompétent à prononcer les condamnations sous astreinte portant sur les demandes de restitutions formulées par Monsieur [G] [W] et la S.C.P. Mérimée :

- condamner sous astreinte la société Boursorama à restituer à Monsieur [W] la somme de 131.802,68 euros à parfaire selon intérêts à la date du jugement, au titre du remboursement des sommes résiduelles disponibles sur le contrat Fortis Assurances n°1158952E souscrit le 18 février 1999, appartenant à Monsieur [G] [W], détournées par la société Boursorama et assortir cette condamnation d'une astreinte de 1.000 euros par jour de retard qui commencera à courir un mois après la signification de la décision à intervenir ;

- condamner sous astreinte la société Boursorama à restituer à Monsieur [G] [W] la somme de 1 300 000 euros somme à parfaire selon intérêts à la date du jugement au titre du remboursement des sommes détournées par la société Boursorama sur le contrat Fortis Assurances n°10621120 souscrit le 18 février 1999 appartenant à Monsieur [G] [W] et assortir cette condamnation d'une astreinte de 1.000 euros par jour de retard qui commencera à courir un mois après signification de la décision à intervenir ;

- condamner la société Boursorama à lui verser la somme de 10.000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral et financier et assortir cette condamnation d'une astreinte de 100 euros par jour de retard qui commencera à courir un mois après signification de la décision à intervenir ;

- condamner la société Boursorama à verser à Monsieur [W] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

3) rejeté le moyen portant sur l'extinction de la créance par subrogation ;

4) rejeté le moyen de nullité du commandement de payer du 16 juin 2023 entaché :

- 1 d'absence d'acte de transmission de la créance

- 2 d'absence de détail précis de la créance réclamée et les intérêts afférents

5) Condamné in solidum Monsieur [G] [W] et la S.C.P. Mérimée à payer à Boursorama la somme de 2 000 euros ;

6) Condamné in solidum Monsieur [G] [W] et la S.C.P. Mérimée aux dépens.

Et statuant à nouveau :

I. Sur la compétence « ratione materiae » du juge de l'exécution

Vu l'article 47 du code de procédure civile

Vu l'inscription de Maître [G] [W] au barreau de Grassse

Vu l'article L. 213-6 du code des procédures civiles d'exécution.

Vu l'article 409 du code de procédure civile

Vu l'article 1383-2 du code civil

Vu l'avis du 11 juillet 2024 rendu par la Cour de cassation n°24-70.001

Vu la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union Européenne (arrêts 26 janvier 2017 C-421/14 / C 2017-60) aux termes de laquelle :

Le juge de l'exécution est compétent pour :

3) déclarer et confirmer en tant que de besoin non écrite une ou plusieurs clauses d'un acte de prêt notarié même s'il a déjà été statué sur la créance par une décision revêtue de l'autorité de la chose jugée ;

4) tirer les conséquences de ce caractère non écrit et ainsi juger la procédure de saisie disproportionnée et annuler le commandement de payer.

- Se déclarer compétent

II. Sur l'irrecevabilité de la société Boursorama en son action en paiement et en ses mesures d'exécution, la créance étant éteinte par prescription

Vu l'article 126 et suivants du code de procédure civile

Vu l'article 2224 du code civil

Vu le premier incident de paiement du 26 janvier 2018 jamais régularisée (pièce n° 20)

Vu l'article 2233 du code civil

Vu la jurisprudence selon laquelle la caducité frappant un commandement de payer valant saisie immobilière le prive rétroactivement de tous ses effets et entraîne l'extinction de l'instance

C. cass. civ. 2ème, 04 septembre 2014 n° 13-11.887

Vu l'arrêt de la Cour de cassation civ. 2ème du 19 février 2015 n° 13-28.445

Vu le jugement définitif prononcé le 16 mars 2023 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon statuant en matière immobilière ayant :

- constaté que la société Boursorama n'a pas requis la vente forcée de l'immeuble saisi

- ordonné en conséquence la caducité du commandement de payer valant saisie immobilière publié le 12 juillet 2019 au service de la publicité foncière de [Localité 11] volume 2019 n° 53

- ordonné la radiation du commandement de payer valant saisie immobilière publié le

12 juillet 2019 volume 2019 n° 53

- Vu l'acquiescement sans réserve de Boursorama (articles 408 et suivants du code de procédure civile d'exécution)

- juger la société Boursorama irrecevable en son action en paiement et en ses mesures d'exécution, la créance étant éteinte par prescription.

III. Sur les fusions-absorptions régies par des dispositions distinctes selon que les sociétés sont commerciales ou non commerciales

Vu l'article L.236-3 du code de commerce

Vu l'article 1844-4 du code civil

- juger le commandement de payer du 16 juin 2023 nul et de nul effet.

IV. Sur la portée du code des marchés financiers réglementant l'activité des établissements bancaires ou de crédit

Vu l'article L.313-27 du code monétaire et financier

Vu l'article L 312-1-1 du code monétaire et financier

Vu l'article (chose jugée) code de procédure civil et du code civil

Vu l'article 1355 du code civil

Vu l'article 480 du code de procédure civile

- juger le commandement de payer du 16 juin 2023 nul et de nul effet.

V. Sur la nullité du commandement de payer du 16 juin 2023

Vu l'article 1844-4 du code civil ;

Vu l'article L 313-27 du code monétaire et financier ;

Vu l'article 1105 du code civil selon lequel la loi spéciale déroge à la loi générale

Vu l'article L. 236-3 du code de commerce au terme duquel la fusion absorption entraine la transmission universelle de patrimoine de la société absorbée à la société absorbante dans l'état où il se trouve à la date de la réalisation définitive de l'opération

Vu l'article R 321-3 du code des procédures civiles d'exécution en son application jurisprudentielle

Vu l'article L. 214-169 V 1° du code monétaire et financier :

Vu l'article D. 214-227

Vu que le commandement de payer aux fins de saisie vente du 16 juin 2023 mentionne le traité de fusion absorption du 27 juin 2006 mais ne vise nullement l'acte de transmission de la créance concernée exigée par les articles L 214-169 V 1° et D 214-227 du code monétaire et financier

Vu l'article 1383-2 du code civil

Vu l'aveu judiciaire de la société Boursorama portant sur son impossibilité de communiquer à la S.C.P. Mérimée et Monsieur [G] [W] le bordereau de transmission de la créance cédée par l'effet du traité de fusion absorption du 27 juin 2006 consécutivement à la sommation qui lui a été notifiée par ces dernières le 01 février 2025.

Vu que si la fusion absorption entraine la transmission universelle de patrimoine de la société absorbée à la société absorbante, la jurisprudence exige que le bordereau comporte la désignation ou l'individualisation des créances cédées (Cass. com. 25 mai 2022, n°20-16.042) et considère que la seule publication de la fusion absorption au bodacc ne constitue pas l'information régulière et préalable des débiteurs (Cass. civ. 02 février 2022, n° 20-20.894 ; Cass. civ. 29 septembre 2022 n° 21-1646) ;

Vu la sommation d'avoir à communiquer le bordereau de transmission de la créance cédée par l'effet du traité de fusion absorption du 27 juin 2006 signifiée à l'avocat de la société Boursorama le 27 août 2024 qui n'a été suivie d'aucun effet ;

- Juger le commandement de payer du 16 juin 2023 nul et de nul effet

VI. Sur la clause réputée non écrite portant sur le contrat Caixavie n° 10 000 621 120, que Boursorma n'a jamais ouvert au nom de Monsieur [G] [W] faute pour la Caixa Bank d'avoir détourné la somme de 440 000 euros que Maître [U] lui a transféré en 2003.

Vu l'avis rendu le 11 septembre 2024 par la Cour de cassation visant la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union Européenne confirmant la compétence du juge de l'exécution statuant en matière immobilière

Vu le transfert par Maître [U] notaire à la Caixa Bank de la somme de 440 000 euros détenue par Monsieur [G] [W] affectée à l'ouverture d'un contrat Caixavie n° 10000621120

Vu l'offre de prêt adressé le 12 mai 2003 par la Caixa Bank à la S.C.P. Mérimée visant expressément l'existence du contrat Caixavie n° 10000621120 attestant du versement par Monsieur [G] [W] de la somme de 440 000 euros

Vu l'acte de prêt notarié du 27 mai 2003 dressé par Maître [U], visant expressément le contrat Caixavie n° 10000621120

Vu les articles L 114-1 et suivants du code des assurances

Vu les articles L 132-1 et suivants du même code

Vu les articles A 132-1 et suivants du même code

Vu la clause réputée non écrite portant sur le contrat Caixavie n° 10000621120 que Boursorama n'a jamais ouvert au nom de Monsieur [G] [W], faute par la Caixa Bank d'avoir :

1) adressé à Monsieur [G] [W] le contrat d'adhésion afin de le faire signer ;

2) communiqué à Monsieur [W], préalablement à la signature de ce contrat la documentation et toutes les annexes relatives à ce prétendu contrat ;

3) adressé à Monsieur [W] le contrat d'adhésion du contrat n° 10000621120 afin que Monsieur [W] le signe.

- condamner la banque Boursorama à restituer à Monsieur [G] [W] la somme de 1 500 000 euros à parfaire sauf erreur ou omission représentant la somme de 440 000 euros détournés par la Caixa Bank au détriment de Monsieur [W] augmentée depuis 2003, soit 22 ans, du taux de capitalisation sur les contrats d'assurance-vie.

VII. Sur les frais irrépétibles et les dépens

- condamner la société Boursorama à verser à Monsieur [G] [W] et la SCP [Adresse 13] la somme de 3 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. ».

Au soutien de leurs prétentions, Monsieur [G] [W] et la société Square Mérimée, appelants, exposent que le délai de prescription de l'action en paiement a commencé à courir le 26 janvier 2018, date du premier incident de paiement non régularisé, pour expirer le 26 janvier 2023. Or, le commandement de payer aux fins de saisie vente est daté du 16 juin 2023 si bien que l'action en paiement est prescrite et la société intimée irrecevable en ses mesures d'exécution. En tout état de cause, le délai de prescription de l'action en paiement a commencé à courir au plus tard le 27 mai 2018, date d'arrivée à échéance du prêt, pour expirer le 27 mai 2023. La société intimée a acquiescé et reconnu judiciairement la prescription qu'elle a encourue, faute d'avoir formulé la moindre observation de ce chef. Elle ne peut pas valablement invoquer l'effet interruptif attaché au commandement de payer du 17 mai 2019, frappé de caducité.

Les appelants soutiennent que les fusions absorptions sont régies par des dispositions distinctes selon que les sociétés sont commerciales ou non commerciales. En l'espèce, la formalité de production du bordereau de transmission était indispensable. L'arrêt de la Cour de cassation du 13 mars 2024 a été rendu au visa de l'article 236-3 du code de commerce alors que, dans la présente instance, les appelants se fondent sur les dispositions de l'article 313-27 du code monétaire et financier. Le commandement de payer aux fins de saisie vente du 16 juin 2023 ne vise nullement l'acte de transmission de la créance concernée. La protestation à sommation notifiée par la société Boursorama ne saurait l'exonérer de présenter le bordereau litigieux. Au contraire, cette protestation à sommation vaut aveu judiciaire de ce qu'elle n'est pas en mesure de présenter le bordereau comportant la désignation ou l'individualisation des créances cédées.

Les appelants indiquent le commandement de payer du 16 juin 2023 ne contient aucun détail précis de la créance réclamée et des intérêts y afférents. Il ne permet pas au débiteur d'être informé sur la nature et la teneur de la créance réclamée, ce qui lui cause grief.

Enfin, les appelants font valoir que le juge de l'exécution est compétent pour déclarer et confirmer en tant que de besoin non écrite une ou plusieurs clauses d'un acte de prêt notarié même s'il a déjà été statué sur la créance par une décision revêtue de l'autorité de la chose jugée. Il est également compétent pour tirer les conséquences de ce caractère non écrit et ainsi juger la procédure de saisie disproportionnée et annuler le commandement de payer. La clause de l'acte de prêt du 27 mai 2003 visant l'existence du contrat Caixavie n°10000621120 de 440.000 euros au nom de Monsieur [G] [W] doit être réputée non écrite, faute par la Caixa Bank de lui avoir adressé le contrat d'adhésion afin de le lui faire signer et de lui avoir communiqué, préalablement à la signature du contrat la documentation et toutes les annexes relatives à ce prétendu contrat. Le détournement par Caixa Bank de la somme de 440 000 euros au préjudice de Monsieur [G] [W] est ainsi caractérisé.

Dans ses dernières conclusions, la société Boursorama, intimée, demande à la cour de :

« Confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution de [Localité 12] le 8 novembre 2024 en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Vu l'article 1240 du code civil,

Condamner in solidum Monsieur [G] [W] et la SCP [Adresse 13] au paiement d'une somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Les condamner en tous les dépens d'appel.

Les condamner au paiement d'une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. ».

Au soutien de ses prétentions, la société Boursorama, intimée, expose que la cour d'appel de Nîmes, dans un arrêt du 6 mai 2021, qui a encore autorité de la chose jugée entre les parties, a déjà jugé que, par l'effet de la fusion-absorption, elle s'est trouvée titulaire de l'ensemble des actifs dont la créance litigieuse et ses accessoires, notamment le titre exécutoire, sans autre formalité que celle prévue par l'article L.236-1 du code de commerce, étant ajouté qu'il s'agit d'un établissement bancaire. La Cour de cassation, par un arrêt rendu le 13 mars 2024, sur les effets du traité du 27 juin 2006 par lequel la société Caixa Bank a fait l'objet d'une fusion-absorption par la société Boursorama, a énoncé que la fusion entraîne la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires,' et que, par l'effet de cette transmission, la société absorbante se substitue à l'absorbée dans tous ses droits, biens et obligations et devient titulaire des créances et des droits et actions qui leur sont attachés. La Cour de cassation a relevé que la saisie immobilière avait été diligentée sur le fondement d'une copie exécutoire à ordre et que, par l'effet de la transmission universelle du patrimoine, les formalités requises par la loi du 15 juin 1976 en matière de transmission de créance hypothécaire n'étaient pas applicables et que, la transmission de la créance intervenant sans respect des exigences de droit commun prévues à l'article 1690, la société Boursorama justifiait d'un titre exécutoire.

L'intimée réplique que le commandement litigieux comporte en lui-même le décompte des intérêts avec le taux. Il est suffisamment précis pour pouvoir être déclaré valable.

L'intimée souligne que l'acte notarié est exempt de toute autre condition, formalité ou engagement. Les cautions solidaires ont pris l'engagement, expressément et solidairement, de rembourser et payer les sommes dues au prêteur, sans invoquer une assurance-vie qui eut pu assurer le remboursement. Elles ont été informées de la déchéance du terme en même temps que la débitrice principale, le 28 juin 2018. Il n'est prévu aucune interférence du contrat d'assurance avec la garantie principale du bien immobilier et la réalisation de celle-ci pour obtenir le règlement du prix. Monsieur [W] ne saurait prétendre être subrogé dans les droits de la société Boursorama, ce qu'il n'a pas fait juger, ni reconnaître. Aucun titre de nature à provoquer une quelconque compensation ne saurait être opposé à Boursorama dans la mise en 'uvre de son recouvrement. Le juge de l'exécution ne saurait avoir compétence pour prétendre accéder à la demande de restitution au titre des contrats Fortis Assurances, sans saisir au préalable le juge du fond.

Enfin, l'intimée rétorque que le délai de prescription de cinq ans n'était pas expiré, lors de la délivrance du commandement en raison des diverses interruptions du délai intervenues dans le cadre du déroulement procédural ' commandement immobilier du 17 mai 2019 ' prescription suspendue jusqu'au 17 mai 2024.

Pour un plus ample exposé, il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

MOTIFS

1) Sur la recevabilité de la société Boursorama en ses mesures d'exécution

La caducité qui frappe un commandement de payer valant saisie immobilière et qui le prive rétroactivement de tous ses effets atteint tous les actes de la procédure de saisie qu'il engage (2e Civ., 19 février 2015, n° 13-28.445). Il s'en suit que la procédure de saisie immobilière ayant été déclarée caduque par le jugement rendu le 16 mars 2023 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire d'Avignon, la prescription de droit commun de cinq années n'a pas été interrompue par le commandement du 17 mai 2019.

A l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité.

En l'occurrence, s'agissant d'un prêt in fine arrivé à son terme le 27 mai 2018, la prescription de l'action en paiement était acquise au 27 mai 2023, soit avant la délivrance du 16 juin 2023 du commandement aux fins de saisie vente qui ne l'a ainsi pas valablement interrompue.

La société Boursoram était donc irrecevable en sa demande de paiement et il convient de déclarer nul et de nul effet le commandement litigieux.

2) Sur la clause abusive portant sur le contrat Caixavie

Aux termes de l'article L.213-6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.

Le juge de l'exécution, saisi de la contestation d'une mesure d'exécution, n'étant tenu de statuer au fond que sur la validité et les difficultés d'exécution des titres exécutoires qui sont directement en relation avec la mesure d'exécution contestée, il n'entre pas dans les attributions de ce juge de prononcer une condamnation à paiement hors les cas prévus par la loi (2e Civ., 19 novembre 2020, pourvoi n° 19-20.700).

Monsieur [G] [W], après avoir prétendu dans un premier temps, que les fonds de 445 584,66 euros qu'il avait fait virer en janvier 2003 par Me [U] sur le contrat Caixavie n°10000621120, ont été affectés au paiement du prêt, soutient désormais que la société Boursorama les aurait détournés ; il sollicite donc la condamnation de la société Boursorama à lui restituer la somme de 1 500 000 euros qui représenterait la valeur acquise du contrat Caixavie n°10000621120.

La demande de remboursement par Monsieur [G] [W] de la somme prétendument détournée par la société Boursorama ne constitue pas une difficulté d'exécution du titre exécutoire constitué par le prêt notarié, qui soit directement en relation avec la mesure d'exécution contestée. Il ne s'agit pas non plus d'une contestation formulée à l'occasion de l'exécution forcée d'un titre exécutoire puisqu'elle n'a pas d'incidence directe sur le montant des sommes à recouvrer au titre du prêt.

Lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à la créance dont le recouvrement est poursuivi sur le fondement d'un titre exécutoire relatif à un contrat, le juge de l'exécution est tenu, même en présence d'une précédente décision revêtue de l'autorité de la chose jugée sur le montant de la créance, sauf lorsqu'il ressort de l'ensemble de la décision revêtue de l'autorité de la chose jugée que le juge s'est livré à cet examen, et pour autant qu'il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet, d'examiner d'office si les clauses insérées dans le contrat conclu entre le professionnel et le non-professionnel ou consommateur ne revêtent pas un caractère abusif ( 2e Civ., 13 avril 2023, pourvoi n° 21-14.540).

Il résulte de l'avis rendu le 11 juillet 2024 par la 2ème chambre civile de la Cour de cassation que le titre exécutoire étant privé d'effet en tant qu'il applique la clause abusive réputée non écrite, le juge de l'exécution est tenu de calculer à nouveau le montant de la créance selon les dispositions propres aux mesures d'exécution forcée dont il est saisi. Il tire ensuite toutes les conséquences de l'évaluation de cette créance sur les contestations des mesures d'exécution dont il est saisi. Lorsqu'il constate que le débiteur ne doit plus aucune somme, il doit ordonner la mainlevée de la mesure.

En l'occurrence, la clause 'Autres garanties' de l'acte de prêt ne fait que mentionner l'existence d'un avenant à cession de garantie d'un contrat Caixavie n°10000621120 souscrit par Monsieur [G] [W] d'une valeur d'environ 420 000 euros. Même à supposer qu'il s'agisse d'une clause abusive et qu'elle soit réputée non écrite, cela n'affecterait pas pour autant la validité du titre exécutoire en vertu duquel sont exercées les poursuites. Les griefs allégués par Monsieur [G] [W], à savoir, l'absence de signature du contrat d'adhésion et de communication de la documentation relative à ce contrat et de ses annexes, ne sauraient avoir d'effets que sur la validité de la garantie dont était assorti le contrat de prêt. Le moyen tiré du caractère abusif de la clause n'est donc invoqué qu'au soutien de la demande de condamnation en restitution des sommes figurant sur ce contrat, qui échappe à la compétence du juge de l'exécution, de sorte que ce dernier ne saurait en connaître.

Le jugement entrepris sera, par conséquent, confirmé en ce qu'il a dit que les demandes de condamnation en paiement ne relèvent pas de la compétence du juge de l'exécution.

3) Sur la demande en dommages-intérêts pour résistance abusive

Le droit d'agir en justice dégénère en abus s'il est exercé de mauvaise foi, ou pour le moins avec une légèreté blâmable révélée par l'absence de tout fondement sérieux.

En l'occurrence, Monsieur [G] [W] et la société [Adresse 13], qui n'ont pas invoqué des moyens dénués de tout fondement sérieux, n'ont fait qu'user de leur droit de faire valoir leurs prétentions sans qu'il soit démontré que cet usage a dégénéré en abus fautif qui justifierait l'indemnisation du préjudice en résultant.

La société Boursorama sera, par conséquent, déboutée de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive.

4) Sur les frais du procès

Les appelants ayant obtenu en grande partie satisfaction, l'intimée sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a dit que les demandes de condamnation en paiement ne relèvent pas de la compétence du juge de l'exécution,

Stataunt à nouveau des chefs infirmés,

Déclare la société Boursorama irrecevable en son action en paiement,

Déclare, par conséquent, nul et de nul effet le commandement aux fins de saisie vente du 16 juin 2023,

Y ajoutant,

Déboute la société Boursorama de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamne la société Boursorama aux entiers dépens de première instance d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes d'indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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