Livv
Décisions

CA Douai, etrangers, 7 novembre 2025, n° 25/01931

DOUAI

Ordonnance

Autre

CA Douai n° 25/01931

7 novembre 2025

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 25/01931 - N° Portalis DBVT-V-B7J-WPDO

N° de Minute : 1933

Ordonnance du vendredi 07 novembre 2025

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. LE PREFET DU NORD

dûment avisé, représenté par Me Joyce JACQUARD avocat au barreau de Val de Marne

INTIMÉ

M. [Y] [B]

né le 20 Septembre 1997 à [Localité 6] (PAKISTAN)

de nationalité Pakistanaise

Chez [Adresse 3] [Adresse 1]

absent, non représenté, dûment avisé,ant eu devant le magistrat du siège du tribunal judicaire de Lille, Maître Clémence TROUFLÉAU ; convoqué à l'audience de la cour par demande de COPJ, à l'adresse ci-dessus reprise

PARTIE JOINTE

M. le procureur général : non comparant, dûment avisé

MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Agnès MARQUANT, présidente de chambre à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assisté(e) de Véronique THÉRY, greffière

DÉBATS : à l'audience publique du vendredi 07 novembre 2025 à 14 h 00

ORDONNANCE : prononcée publiquement à [Localité 2] le vendredi 07 novembre 2025 à

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialement les articles R 743-18 et R 743-19 ;

Vu l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de LILLE ayant mis fin à la rétention administrative de de M. [Y] [B] en date du 05 novembre 2025 notifiée à à M. LE PREFET DU NORD ;

Vu l'appel interjeté par Maître Xavier TERMEAU venant au soutien des intérêts de M. LE PREFET DU NORD par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 06 novembre 2025 à 15 h 17 ;

Vu la plaidoirie de Maître JACQUARD ;

EXPOSE DU LITIGE

M. [Y] [B] a fait l'objet d'un placement en rétention administrative ordonné par M. le préfet du Nord le 31 octobre 2025 notifié à cette date à 13h30 pour l'exécution d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français délivrée par la même autorité par la même décision.

Un recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative a été déposé au visa de l'article L 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu l'article 455 du code de procédure civile

Vu l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Lille en date du 5 novembre 2025 à 17h40 déclarant irrecevable la requête de la préfecture et disant n'y avoir lieu à la prolongation du maintien en rétention administrative de l'intimé pour une durée de 26 jours

Vu la déclaration d'appel du Conseil de M le préfet du Nord du 6 novembre 2025 à 15h17 demandant d'infirmer l' ordonance, de déclarer la requête recevable , sollicitant le rejet des moyens de nullité et la contestation de l' arrêté de placement en rétention et demandant la prolongation de la rétention pour une durée de 26 jours.

Au soutien de sa déclaration d'appel reprise oralement, l'appelant conteste la motivation du premier juge qui a constaté l'irrecevabilité de la requête en l'absence d'un registre actualisé avec la mention requise relative au recours engagé par M. [Y] [B] le 2 novembre 2025 contre la mesure d'éloignement.Il fait valoir que le registre actualisé contenant la mention de ce recours a bien été transmise au premier juge après le dépôt de sa requête le 3 novembre 2025 à 20h58 dès que l'administration en a eu connaissance le 3 novembre 2025 , la pièce étant transmise le 4 novembre 2025 à 16h23 au greffe de première instance.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la requête de la préfecture

L'article R.743-2 du Ceseda dispose que :"A peine d'irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.

Lorsque la requête est formée par l'autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2.

Lorsque la requête est formée par l'étranger ou son représentant, la décision attaquée est produite par l'administration. Il en est de même, sur la demande du magistrat du siège du tribunal judiciaire, de la copie du registre.".

Il en résulte qu'à l'inverse de la rédaction antérieurement codifiée à l'article R. 552-3 du même code, ce texte ne sanctionne plus l'absence de production des pièces par une irrecevabilité de la requête.

Dans ces conditions, le défaut de production d'un registre actualisé s'analyse exclusivement comme une cause d'irrégularité de la procédure.

En application des dispositions de l'article L. 743-12 du Ceseda, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le magistrat du siège du tribunal judiciaire saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l'étranger dont l'effectivité n'a pu être rétablie par une régularisation intervenue avant la clôture des débats.

Le juge, gardien de la liberté individuelle, doit s'assurer par tous moyens, et notamment d'après les mentions figurant au registre, émargé par l'étranger, que celui-ci a été, au moment de la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé des droits qui lui sont reconnus et placé en mesure de les faire valoir ainsi que de les exercer effectivement.

Sauf à imposer un formalisme excessif à l'administration, en exigeant que soit mentionnés tous les actes et pièces d'un dossier de procédure, il n'y a pas lieu d'interpréter les dispositions de l'article L. 744-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en imposant d'autres mentions que celles relatives à l'état civil des des personnes retenues ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention, ce qui implique notamment la mention des précédentes décisions de prolongation (1re Civ., 5 juin 2024, pourvoi n° 22.23-567) ainsi que des heures de sortie et de retour du centre de rétention, (1re Civ., 18 octobre 2023, pourvoi n° 22.18-742).

A cet égard, les indications des mentions que peut contenir le traitement automatisé LOGICRA, en application de l'arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention prévu à l'article L. 553-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative » , constituent des éléments que l'administration est autorisée à enregistrer, non des mentions qu'elle doit inscrire à peine d'irrégularité du registre.

En l'espèce, c'est à tort que le premier juge a fait droit à la fin de non-recevoir de la requête de la préfecture soulevée par l'intimé qui a fait valoir devant le premier juge que la copie du registre jointe à la requête en prolongation ne contenait pas la mention requise de son recours engagé le 2 novembre 2025 contre la mesure d'éloignement.

L'administration a produit en temps utile devant le premier juge une copie du registre qui est bien actualisé faisant mention du recours engagé le dimanche 2 novembre 2025 contre la mesure d'éloignement.

L'absence de cette mention sur le registre qui accompagnait la requête n'a pas eu pour effet de rendre irrecevable ni irrégulière la requête en prolongation de la rétention.

Il convient dès lors d'infirmer l'ordonnance et de déclarer la requête de la préfecture recevable

Sur le moyen de contestation de l'arrêté initial du placement en rétention

Au titre de son contrôle, le juge judiciaire doit s'assurer que l'arrêté administratif de placement en rétention est adopté par une personne habilitée à cet effet, est fondé sur une base légale et se trouve suffisamment motivé en fait et en droit par rapport aux critères posés par l'article L 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

L'erreur manifeste d'appréciation doit s'apprécier par rapport aux éléments de fait dont disposait l'autorité préfectorale au moment où l'arrêté de placement en rétention a été adopté et non au regard des éléments ultérieurement porté à la connaissance de la juridiction.

A ce titre il importe de rappeler qu'il appartient à l'étranger, soumis aux règles de procédure civile, de démontrer l'existence d'une adresse stable et personnelle à laquelle il pourrait le cas échéant être assigné à résidence plutôt que de faire l'objet d'un placement en rétention administrative.

En l'espèce , l'arrêté préfectoral de placement en rétention a considéré, au visa de l'article L741-1 renvoyant aux cas prévus aux articles L 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'étranger appelant ne présentait pas suffisamment de garanties de représentation pour attendre l'exécution de son éloignement en étant assigné à résidence, étant notamment motivé par le fait que l'intéressé , de nationalité pakistanaise , ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire national , qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale, ayant déclaré vouloir rester en France.

Le préfet n'était pas tenu, dans ces conditions, de faire état dans sa décision des autres éléments de la situation personnelle de l'intéressé alors, par ailleurs, que les motifs positifs qu'il retenait suffisaient en l'espèce à justifier le placement en rétention de M. [Y] [B] et à écarter tout reproche sérieux d'une erreur manifeste d'appréciation sur ses garanties de représentation .

Il convient de constater en outre que dans son audition à la police du 30 septembre 2025 , l'étranger ne communique pas l'adresse précise de son ami devenu lors de l'instance devant le premier juge son cousin à [Localité 7] chez qui il déclare résider ni l'identité de ce dernier.Parmi les documents produits en première instance qui attestent de l'identité précise et de l'adresse précise de ce tiers à [Localité 7] , il convient de constater que fait défaut une pièce justifiant de l' hébergement de M. [Y] [B] dans ce logement

Aucune solution moins coercitive ne pouvait être envisagée aux fins d'assurer l'exécution de la mesure d'éloignement. Le moyen de contestation de l' arrêté de placement en rétention relatif à l'erreur manifeste d'appréciation sur ses garanties de représentation sera rejeté.

Sur la requête en prolongation de la rétention.

L'article L 141-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que lorsqu'un étranger fait l'objet d'une décision de refus d'entrée en France, de placement en rétention ou en zone d'attente, de retenue pour vérification du droit de circulation ou de séjour ou de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et qu'il ne parle pas le français, il indique au début de la procédure une langue qu'il comprend. Il indique également s'il sait lire. Ces informations sont mentionnées sur la décision de refus d'entrée, de placement ou de transfert ou dans le procès-verbal prévu au premier alinéa de l'article L.813-13. Ces mentions font foi sauf preuve contraire. La langue que l'étranger a déclaré comprendre est utilisée jusqu'à la fin de la procédure. Si l'étranger refuse d'indiquer une langue qu'il comprend, la langue utilisée est le français.

L'article L 141-3 du même code précise qu'en cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication.

Il ressort de l'examen des pièces jointes à la requête et des mentions figurant au registre que la personne retenue a été, dans les meilleurs délais suivant la notification de son placement en rétention administrative, pleinement informée de ses droits et placée en état de les faire valoir à compter de son arrivée au lieu de rétention. L'intimé a bien bénéficié d'un interprète en ourdou M A. [E] , physiquement présent pour la notification de l' arrêté de placement en rétention.

Seule la réitération des droits qui a été effectuée à son arrivée au centre de rétention de [Localité 4] s'est effectuée avec l'assistance téléphonique de l'interprète sans mention de sa nécessité.

Aucune irrégularité ayant portée une atteinte substantielle aux droits de l'étranger au sens des dispositions précitées ne se trouve ni alléguée ni caractérisée.

L' administration justifie de ses diligences , ayant demandé un routing vers le Pakistan alors qu'elle dispose du passeport de l'étranger et un laissez-passer consulaire auprès des autorités consulaires par courriel du 1er novembre 2025 à 9h10.

Conformément au droit communautaire, aucun moyen soulevé par les parties ou susceptible d'être relevé d'office ne paraît contraire à la prolongation de la rétention administrative.

Il convient dès lors de faire droit à la requête préfectorale qui est fondée.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARONS l'appel recevable ;

INFIRMONS l'ordonnance entreprise;

Statuant à nouveau,

DECLARONS recevable la requête de la préfecture du Nord,

REJETONS le moyen de contestation de l' arrêté de placement en rétention ,

ORDONNONS la prolongation de la rétention de Monsieur [Y] [B] dans les locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de 26 jours,

DISONS que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DISONS que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [Y] [B], à son conseil le cas échéant et à l'autorité administrative.

Véronique THÉRY, greffière

Agnès MARQUANT, présidente de chambre

N° RG 25/01931 - N° Portalis DBVT-V-B7J-WPDO

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 1933 DU 07 Novembre 2025 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l'intéressé au greffe de la cour d'appel de Douai par courriel - [Courriel 5]) :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Pour information :

L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

- décisision transmise par courriel pour notification à l'intimé, à l'autorité administrative, Maître Clémence TROUFLÉAU, Maître Xavier TERMEAU le

- décision communiquée au tribunal administratif de Lille

- décision communiquée à M. le procureur général

l'avocat du préfet (si présent au prononcé de la décision)

signature

- copie au tribunal judiciaire de LILLE

Le greffier, le vendredi 07 novembre 2025

'''

[Y] [B]

a pris connaissance de la décision du vendredi 07 novembre 2025 n° 1933

' par truchement d'un interprète en langue :

signature

N° RG 25/01931 - N° Portalis DBVT-V-B7J-WPDO

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site