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Décisions

CA Aix-en-Provence, retention administrative, 7 novembre 2025, n° 25/02152

AIX-EN-PROVENCE

Ordonnance

Autre

CA Aix-en-Provence n° 25/02152

7 novembre 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 07 NOVEMBRE 2025

N° RG 25/02152 - N° Portalis DBVB-V-B7J-BPJ5L

Copie conforme

délivrée le 07 Novembre 2025 par courriel à :

- l'avocat

- le préfet

- le CRA

- le JLD/TJ

- le retenu

- le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention de [Localité 6] en date du 05 Novembre 2025 à 11H25.

APPELANT

Monsieur [V] [I]

né le 02 Avril 2005 à [Localité 4] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

comparant en visio conférence en application de l'article L743-7 du CESEDA.

Assisté de Maître Samy ARAISSIA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office.

INTIMÉE

PREFECTURE DES BOUCHES DU RHONE

Repréentée par le Cabinet de TOMASI/[C], barreau de Lyon

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé, non représenté

******

DÉBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 07 Novembre 2025 devant Madame Amandine ANCELIN, à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Himane EL FODIL, Greffière,

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 07 Novembre 2025 à XXX,

Signée par Madame Amandine ANCELIN, et Mme Himane EL FODIL, Greffière,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 07 novembre 2022 par PREFECTURE DES BOUCHES DU RHONE , notifié le même jour à 18h30 ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 06 octobre 2025 par PREFECTURE DES BOUCHES DU RHONE notifiée le 07 octobre 2025 à 11h18 ;

Vu l'ordonnance du 05 Novembre 2025 rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention décidant le maintien de Monsieur [V] [I] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu l'appel interjeté le 06 Novembre 2025 à 09H20 par Monsieur [V] [I] ;

Monsieur [V] [I] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare :

J'ai pris la décision de regagner le pays depuis le début. Je suis obligé de faire ça pour refaire mon visa. Je veux retourner en Algérie avec ma femme qui est enceinte et avec qui je vais me marier. Elle est en France et on va ensemble au pays pour faire le mariage civil. Ici, en France on a fait que le mariage religieux. Je demanderai ensuite le visa en Espagne ou la France mais en Espagne, je sais que l'on m'accordera le visa. Quand j'étais devant le jld, j'ai demandé la présence de l'interprète mais je ne l'ai pas eu et je n'ai pas compris la décision qui avait été rendue. Cela fait 5 ans que je suis ici, pour une affaire de 6 paquets de cigarettes je me suis retrouvé ici. Je veux repartir par mes propres moyens.

Me Samy ARAISSIA est entendu en sa plaidoirie : Je vous demande d'infirmer la demande de prolongation en rétention. L'administration n'a pas accompli toutes les diligences. Il y a 25 jours qui se sont écoulés sans que la préfecture n'a accompli de diligences. L'oqtf expire aujourd'hui le 07 novembre (décision rendue en 2022), la rétention doit prendre fin. Il n'y a plus de base légale justifiant la rétention.

Maître [T] [C] est entendu en ses observations : La requête préfectorale est recevable l'administration a bien justifié des diligences avec relances. Monsieur n'a pas de passeport, il faut vérifier de quel pays il vient donc la rétention dure sur le temps. L'étranger est placé en rétention par un arrêté pendant 4 jours, le jld intervient ensuite. Monsieur avait la possibilité de contester la légalité de l'arrêté de placement en rétention. Si l'arrêté de placement est fondé sur une base légale, le sujet est clos. Si le juge judiciaire considère que c'est régulier, l'arrêté est exécuté. On ne peut plus ensuite contester l'arrêté de placement en rétention. Il faut seulement 3 choses: soit un retrait soit une abrogation ou une annulation de cette décision administrative. Monsieur est en rétention par la décision prise par le juge judiciaire. Je vous demande de confirmer la décision du premier juge.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.

Monsieur [I] fait valoir in limine litis, dans le cadre du second renouvellement de la mesure de rétention subie, qu'il y a une irrégularité de la requête de prolongation liée à l'absence de documents attestant des diligences consulaires de l'administration préfectorale dont mention serait faite sur le registre.

Sur le fond, il soutient, d'une part, qu'il y a un défaut de diligences de l'administration envers les autorités consulaires effectuées en vue de son éloignement et, d'autre part,il fait valoir une impossibilité de maintien de la mesure de rétention 'sur le fondement d'une décision d'éloignement expirée'.

Sur l'irrecevabilité découlant de l'irrégularité de la requête

A peine d'irrecevabilité, selon l'article R.743-2 du CESEDA, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention, à savoir le préfet de département ou de police à [Localité 8] en application de l'article R.741-1. Dans ce cas la requête est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L.744-2.

Ce dernier énonce qu'il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l'état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Le registre mentionne également l'état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil. L'autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d'information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.

Selon les dispositions de l'article L. 743-9 du CESEDA le magistrat du siège du tribunal judiciaire, saisi aux fins de prolongation de la rétention, rappelle à l'étranger les droits qui lui sont reconnus et s'assure, d'après les mentions figurant au registre prévu à l'article L. 744-2 émargé par l'intéressé, que celui-ci a été, dans les meilleurs délais suivant la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir à compter de son arrivée au lieu de rétention. Le juge tient compte des circonstances particulières liées notamment au placement en rétention simultané d'un nombre important d'étrangers pour l'appréciation des délais relatifs à la notification de la décision, à l'information des droits et à leur prise d'effet.

Il résulte de la combinaison de ces textes que le registre doit être mis à jour et que la non-production d'une copie actualisée, permettant un contrôle de l'effectivité de l'exercice des droits reconnus à l'étranger au cours de la mesure de rétention, constitue une fin de non-recevoir. Celle-ci doit être accueillie sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief dès lors que le juge ne peut s'assurer que l'étranger a été en mesure d'exercer les droits qui lui sont reconnus par les articles L. 744-4 et suivants du CESEDA.

Le paragraphe IV de l'annexe de l'arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention et d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé «logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative» (LOGICRA) prévoit notamment que sont enregistrées dans les traitements au titre des données à caractère personnel concernant la fin de la rétention et l'éloignement les informations suivantes :

1° Demande de laissez-passer consulaire, consulat saisi, date de la demande d'identification ou de présentation consulaire, type de présentation, motif de non-présentation, date de I'entretien, moyen de transport utilisé, résultat de I'entretien, délivrance du laissez-passer consulaire, date de délivrance, date et fin de validité du laissez-passer consulaire;

2° Réservation du moyen de transport national et international: date prévisionnelle de départ, moyen de transport utilisé, pays de destination, demande de routing, escorte;

3° Fin de la rétention: date et motif de la fin de rétention.

En l'espèce l'appelant soulève le défaut d'actualisation du registre de rétention, dans la mesure où les diligences consulaires n'y sont pas mentionnées.

Toutefois les diligences consulaires effectuées par l'administration ne constituent nullement des droits au sens des articles L. 744-4 et suivants du CESEDA, dont le défaut de mention dans le registre de rétention rendrait irrecevable la requête en prolongation de la mesure de rétention, s'agissant au surplus d'une question de fond en application de l'article L741-3 du même code.

Pour le surplus l'intéressé ne précise pas quelles sont les pièces utiles qui seraient manquantes

En conséquence il y aura lieu de rejeter la fin de non recevoir tirée du défaut de mention des diligences consulaires dans le registre de rétention et de production de pièces utiles.

Sur le défaut de diligences de l'administration envers les autorités consulaires

Aux termes de l'article L741-3 du CESEDA, "Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet."

Il appartient au juge, en application de l'article L. 741-3 du CESEDA de rechercher concrètement les diligences accomplies par l'administration pour permettre que l'étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. Cela induit, sauf circonstances insurmontables, la production de pièces par l'administration qui établissent ces diligences, en fonction de la situation de l'étranger.

En l'espèce, l'administration justifie d'une demande d'identification auprès du consulat algérien, l'éloignement ayant été largement compromis par monsieur [I], en raison de la perte ou de la destruction, lui étant imputable(s), de l'ensemble de ses documents de voyage.

Par ailleurs, il convient de rappeler que la réalisation d'actes sans véritable effectivité, tels que des relances auprès des consulats n'est pas requis dès lors que l'administration ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires.

Dans ces conditions, il doit être considéré que l'administration justifie en l'espèce de diligences suffisantes au sens de la loi, mises en oeuvre en vue de l'effectivité de la mesure d'éloignement.

Sur la fin de période de validité de la décision d'éloignement fondant la mesure de rétention

Aux termes de l'article L.742-9 du CESEDA, 'Si la décision d'éloignement est annulée par le juge administratif, il est immédiatement mis fin au maintien de l'étranger en rétention. Une autorisation provisoire de séjour lui est fournie jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas.'

En application de ce texte, l'arrêté de placement en rétention repose sur une décision d'éloignement mentionnée au texte précité, à savoir une OQTF datée du 7 novembre 2022.

Monsieur [I] soutient que cette ordonnance, au fondement de la décision de placement en rétention le concernant, n'est plus valide depuis le 7 novembre 2025. Il sollicite, par suite, de voir invalider la décision de prolongation de la mesure de rétention subie.

Si, en effet, l'acte au fondement de la décision d'éloignement doit, selon l'interprétation jurisprudentielle en cours, dater de trois ans au maximum, tel est le cas en l'espèce, l'interprétation du délai ne devant pas se faire successivement.

Plus précisément, il convient que l'acte fondant la décision d'éloignement ait moins de trois ans révolus au moment de la décision de placement en rétention ; le fait que le délai de trois ans ait, depuis lors, été dépassé, étant sans incidence sur le maintien de la mesure.

En conséquence, le moyen soulevé par monsieur [I] est inopérant.

Au vu du rejet des moyens d'appel soulevés par monsieur [I], il y a lieu de confirmer l'ordonnance du juge chargé du contrôle des mesures d'éloignement et de rétention au Tribunal Judiciaire de Marseille.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision Contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Confirmons l'ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention en date du 05 Novembre 2025.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [V] [I]

Assisté d'un interprète

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11, Rétentions Administratives

[Adresse 7]

Téléphone : [XXXXXXXX02] - [XXXXXXXX03] - [XXXXXXXX01]

Courriel : [Courriel 5]

Aix-en-Provence, le 07 Novembre 2025

À

- PREFECTURE DES BOUCHES DU RHONE

- Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 6]

- Monsieur le procureur général

- Monsieur le greffier du Magistrat du siège du tribunal judiciaire chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de libertés de MARSEILLE

- Maître Samy ARAISSIA

NOTIFICATION D'UNE ORDONNANCE

J'ai l'honneur de vous notifier l'ordonnance ci-jointe rendue le 07 Novembre 2025, suite à l'appel interjeté par :

Monsieur [V] [I]

né le 02 Avril 2005 à [Localité 4] (99)

de nationalité Algérienne

Je vous remercie de m'accuser réception du présent envoi.

Le greffier,

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu'il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.

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