Cass. 1re civ., 9 avril 2015, n° 14-15.033
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Batut
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Caisse d'épargne Ile-de-France Nord, aux droits de laquelle vient la Caisse d'épargne Ile-de-France (la caisse), a consenti, le 3 septembre 2004, à la société Alphasoleil un prêt de 535 000 euros garanti, notamment, par la caution solidaire de MM. X... et Y..., ses seuls associés ; que les échéances n'ayant pas été réglées, la caisse a poursuivi le recouvrement de sa dette ;
Sur le premier moyen, le troisième moyen, pris en sa première branche et le quatrième moyen, pris en ses deux premières branches, du pourvoi principal, et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que ces griefs ne sont pas manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le deuxième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 621-24 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 25 juillet 2005, applicable à la cause ;
Attendu que, pour limiter la condamnation de la société Alphasoleil au titre du solde débiteur du prêt litigieux à un montant de 336 603 euros, avec intérêts au taux contractuel majoré, et celle de MM. Y... et X..., solidairement avec la société Alphasoleil, à la somme de 321 496,42 euros, avec intérêts au taux légal, l'arrêt énonce que la caisse qui ne disconvient pas avoir couvert par le prêt la dette qu'avait contractée la société Destin d'artistes major (DAM) à son égard, presque trois mois après la déclaration de cette société en état de liquidation judiciaire, ne saurait se disculper de cette violation des règles d'ordre public de suspension des créances et d'égalité des créanciers formant la masse passive de la société liquidée, que peu importe que MM. X... et Y... aient donné instruction de répartition des fonds notamment au bénéfice de la société DAM, qu'il appartenait à la caisse de ne pas débloquer la somme destinée à couvrir la position débitrice du compte de cette société, que, loin de refuser la demande de prêt qu'elle savait enfreindre le droit des procédures collectives, elle a délibérément manqué à son devoir contractuel de conseil, que le prêt en tant qu'affecté à la dette de la société DAM est ainsi nul et non avenu, que la caisse est censée n'avoir jamais prêté cette somme et que MM. Y... et X... et la société Alphasoleil ne peuvent être tenus de la lui rembourser ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le principe d'interdiction du paiement des créances nées antérieurement au jugement d'ouverture n'était pas opposable à la société Alphasoleil, tiers à la procédure collective de la société DAM, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche, et le quatrième moyen du même pourvoi, pris en sa troisième branche, réunis :
Vu les articles L. 341-1 et L. 341-6 du code de la consommation, ensemble l'article L. 313-22 du code monétaire et financier ;
Attendu qu'en disant la caisse déchue de la totalité de son droit aux intérêts conventionnels à l'égard de MM. Y... et X..., alors qu'elle avait retenu que la banque avait exécuté en 2006 son obligation d'information annuelle envers les cautions, circonstance qui ne pouvait être assimilée à un défaut total d'information, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite la condamnation de la société Alphasoleil au titre du solde débiteur du prêt litigieux à un montant de 336 603 euros, avec intérêts au taux contractuel majoré, et celle de MM. Y... et X..., solidairement avec la société Alphasoleil, à la somme de 321 496,42 euros, avec intérêts au taux légal, et en ce qu'il dit la caisse déchue de la totalité de son droit aux intérêts conventionnels vis-à-vis des cautions, l'arrêt rendu le 23 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Alphasoleil, M. Y... et M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Alphasoleil et M. Y... à payer à la Caisse d'épargne de Paris Ile-de-France la somme de 3 500 euros, condamne M. X... à payer la même somme à cette caisse et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf avril deux mille quinze.