Cass. com., 12 juin 2019, n° 18-14.788
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Rémery
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte du 16 juillet 2003, M. G... D... s'est rendu caution solidaire des engagements souscrits par la société Les Constructions D... au profit de la société Banque populaire Bourgogne Franche-Comté (la banque) au titre d'un découvert en compte ; que par un acte des 30 et 31 octobre 2006, M. G... D... et son épouse, mariés sous le régime de la séparation de biens, ont donné à leur fils, M. U... D..., la nue-propriété d'un bien immobilier leur appartenant chacun pour moitié ; que la société Les Constructions D... ayant été mise en liquidation judiciaire le 28 novembre 2008, la banque a assigné M. G... D... en exécution de son engagement et obtenu la condamnation de ce dernier au paiement de sa créance par un jugement du 30 novembre 2009 ; qu'estimant que la donation avait été consentie en fraude à ses droits, la banque a assigné les consorts D... en inopposabilité de la donation des 30 et 31 octobre 2006 sur le fondement de l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ; qu'en cours d'instance, elle s'est désistée de sa demande en ce qu'elle était formée contre Mme D... et a conclu à l'inopposabilité de la donation en ce qu'elle portait sur les droits en nue-propriété de M. G... D... ;
Sur la recevabilité du pourvoi en ce qu'il est formé par M. G... D..., contestée par la défense :
Vu l'article 612 du code de procédure civile ;
Attendu que M. G... D... s'est pourvu en cassation contre un arrêt qui lui a été signifié le 5 février 2018, par une déclaration déposée le 6 avril 2018, soit au delà du délai prévu par le texte susvisé ;
D'où il suit que le pourvoi n'est pas recevable ;
Sur la recevabilité du pourvoi en ce qu'il est formé par M. U... D..., contestée par la défense :
Attendu que la banque soutient qu'en raison de l'indivisibilité du litige, l'irrecevabilité du pourvoi en ce qu'il est formé par M. G... D... rend irrecevable celui formé par M. U... D... ;
Mais attendu que, selon l'article 615, alinéa 1er, du code de procédure civile, en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, le pourvoi de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne se sont pas jointes à l'instance de cassation ; qu'il en résulte que l'indivisibilité du litige entre deux demandeurs n'a pas pour effet d'étendre l'irrecevabilité pour tardiveté du pourvoi formé par l'un à celui, formé dans le délai légal, par l'autre ;
Qu'il n'est ni allégué ni établi que le pourvoi formé par M. U... D... l'ait été hors délai ;
D'où il suit que son pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour faire droit à l'action paulienne de la banque, l'arrêt retient qu'au vu de la chronologie des opérations, qui révèle un endettement croissant de la société cautionnée, M. G... D..., dirigeant de cette société, avait, en procédant à la donation-partage de ses biens, délibérément appauvri son patrimoine en faveur de son fils, et ce d'autant qu'il savait ne détenir aucun autre bien immobilier susceptible de lui permettre d'assumer ses obligations de caution, organisant de la sorte son insolvabilité ;
Qu'en statuant ainsi, en procédant par simple affirmation, sans préciser sur quel élément de preuve elle se fondait pour retenir, à la date de l'acte litigieux, l'insolvabilité apparente de M. G... D..., que ce dernier contestait, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte précité ;
Et attendu qu'en raison de l'indivisibilité du litige, la cassation de l'arrêt prononcée sur le pourvoi de M. U... D... doit profiter à M. G... D... en application de l'article 615, alinéa 1er, du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
Déclare irrecevable le pourvoi formé par M. G... D... ;
Déclare recevable le pourvoi formé par M. U... D... ;
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare parfait le désistement de la société Banque populaire Bourgogne Franche-Comté à l'égard de Mme P... J... épouse D..., l'arrêt rendu le 13 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Dit que la cassation produira effet à l'égard de M. G... D... ;
Condamne la société Banque populaire Bourgogne Franche-Comté aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. U... D... et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille dix-neuf.