Cass. com., 18 novembre 2014, n° 13-19.311
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mouillard
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 3 avril 2013), que, le 22 novembre 1999, la Caisse de crédit mutuel Mulhouse Concorde (la caisse) a consenti à M. et Mme A..., codébiteurs solidaires, un prêt de 430 000 francs (65 553, 08 euros) en garantie duquel René X... et son épouse, Mme X..., ont consenti une hypothèque sur un bien dont ils avaient l'usufruit ; qu'ils ont accordé la même garantie pour un prêt de 700 000 francs (106 714, 31 euros) consenti le 9 juillet 1998 par la caisse à la société Pompes funèbres de tradition dont M. A...était le gérant ; que M. A..., le 29 novembre 2000, puis Mme A...le 16 novembre 2010, ont été mis en liquidation judiciaire ; que la caisse a déclaré des créances au passif de M. A...; que, par ordonnance du 5 janvier 2006 devenue irrévocable, le juge commissaire a rejeté ces créances ; que, par ordonnance du 12 mai 2011, le juge commissaire a rejeté les créances que la caisse avait déclarées au passif de Mme A..., en raison de l'autorité de chose jugée attachée à la décision de rejet prononcée dans la procédure du codébiteur solidaire ; que René X... étant décédé, M. Claude X... est intervenu en qualité d'héritier ;
Sur le premier et le deuxième moyens, réunis :
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de dire que sa créance est éteinte à l'égard de M. A..., que son paiement ne peut être demandé à Mme A...et de déclarer, en conséquence, la créance également éteinte par voie accessoire à l'égard de M. Claude X... et de Mme X... alors, selon le moyen :
1°/ que l'extinction d'une sûreté hypothécaire consentie en garantie d'un emprunt souscrit par deux codébiteurs solidaires est subordonnée à l'existence de deux décisions irrévocables de rejet de la créance privilégiée déclarée dans chaque procédure collective ouverte contre chaque codébiteur ; qu'en prononçant l'extinction par « voie accessoire » de la créance à l'égard des garants hypothécaires, tout en relevant que la cour d'appel de Versailles était saisie de l'appel formé par le Crédit mutuel contre l'ordonnance du juge-commissaire ayant rejeté cette même créance déclarée au passif de la liquidation judiciaire ouverte contre la codébitrice, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil, ainsi que l'article L. 622-26 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi de sauvegarde du 26 juillet 2005, applicable en la cause ;
2°/ que la clause selon laquelle des co-emprunteurs s'engagent « solidairement et indivisiblement » à rembourser un prêt empêche le fractionnement de la dette et permet ainsi au créancier d'exiger de chaque débiteur, tenu pour la totalité de la dette, le paiement de l'intégralité de celle-ci ; qu'en se fondant sur l'indivisibilité conventionnelle stipulée dans l'acte de prêt du 22 novembre 1999 souscrit par M. et Mme A...au profit de la caisse pour affirmer que la créance, éteinte à l'égard de M. A..., ne pouvait être poursuivie contre son épouse, codébitrice solidaire, et en déduire que la créance était éteinte par voie accessoire à l'égard des garants hypothécaires, la cour d'appel, qui a dénaturé l'acte de prêt, a violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ que l'extinction d'une créance à l'égard d'un codébiteur solidaire, faisant l'objet d'une procédure collective, laisse subsister l'obligation distincte et autonome contractée par son épouse, codébitrice solidaire ; qu'il en résulte que le créancier hypothécaire qui a régulièrement déclaré sa créance au passif de la procédure collective ouverte ultérieurement contre celle-ci conserve ses droits dans cette procédure ; qu'en jugeant le contraire, motif pris qu'« il s'agirait d'une même créance dont le caractère indivisible a été exprimé dans l'acte de prêt », la cour d'appel a violé les articles 1208, 1217, 1351 du code civil, ainsi que l'article L. 621-46, alinéa 4, du code de commerce, dans sa rédaction applicable en la cause ;
4°/ que la règle de la représentation mutuelle des coobligés ne s'applique qu'en présence d'une décision d'admission irrévocable dans le cadre de la procédure collective ouverte contre un autre codébiteur et non dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, la créance a été définitivement rejetée dans le cadre de cette procédure ; qu'en décidant que la créance était éteinte par voie accessoire à l'égard des époux René X..., garants hypothécaires, au motif erroné que « la codébitrice solidaire se trouvait représentée par son époux », la cour d'appel a violé les articles 1208 et 1351 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que, dans la procédure collective ouverte à l'égard de M. A..., la créance de la caisse relative au prêt du 22 novembre 1999 avait été rejetée par une décision devenue irrévocable, la cour d'appel en a exactement déduit, ce rejet ayant autorité de chose jugée à l'égard d'un coobligé à la même dette, que la créance était éteinte et que ni Mme A..., en sa qualité de codébitrice solidaire, ni les consorts X..., en celle de garants hypothécaires à titre accessoire, n'en étaient tenus ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le troisième moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse de Crédit mutuel Mulhouse Concorde aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille quatorze.