Cass. com., 26 mai 2010, n° 09-13.884
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Favre
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1351 du code civil ;
Attendu que le prononcé à l'encontre de la caution d'un jugement la condamnant à exécuter son engagement ne fait pas obstacle à ce qu'elle oppose au créancier l'extinction de sa créance pour une cause postérieure audit jugement, celui-ci serait-il passé en force de chose jugée ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., dirigeant de la société Garage porte de France (la société GPF), s'est rendu caution solidaire, le 16 février 1990, de la société Labo Industrie, aux droits de laquelle vient la société Fuchs lubrifiant France (la société Fuchs), du montant d'un prêt de 75.463 euros ; que, par jugement du 2 mars 2000, M. X... a été condamné à payer à la société Labo industries une somme de 57.831,95 euros ; qu'au cours de l'instance devant conduire à ce jugement, par jugement du 29 novembre 1999, publié au Bodacc le 5 janvier 2000, la société GPF a été mise en liquidation judiciaire ; que la société créancière n'a procédé à aucune déclaration de créance, ni sollicité aucun relevé de forclusion ; que sur assignation de M. X..., le tribunal, par jugement du 28 juin 2007, a constaté l'extinction de la créance de la société Fuchs, faute d'avoir été déclarée au passif du débiteur ;
Attendu que pour rejeter l'action de M. X... tendant à la décharge des effets du jugement du 2 mars 2000, après avoir relevé qu'au cours de l'instance devant conduire à ce jugement, par jugement du 29 novembre 1999, publié au Bodacc le 5 janvier 2000, la société GPF avait été mise en liquidation judiciaire, que la société créancière ne paraissait pas avoir déclaré sa créance à la liquidation du débiteur principal s'étant contentée de poursuivre la caution, que M. X..., pourtant informé en qualité de dirigeant de la société cautionnée de sa mise en liquidation judiciaire, avait accepté le jugement de condamnation sans le contester par voie d'appel sur le fondement d'un défaut de déclaration au passif du débiteur principal de la créance poursuivie contre lui en qualité de caution et sans solliciter de renvoi pour faire vérifier l'existence d'une production au passif qu'il représentait et que s'il avait pu être admis un temps que l'autorité de chose jugée était limitée aux moyens juridiques développés dans le cadre de la procédure, cette analyse était actuellement abandonnée dans la mesure où il appartenait au débiteur de soulever au cours de l'instance en paiement contre lui tous les moyens susceptibles de faire déclarer éteinte la créance, l'arrêt retient que la remise en cause du jugement de condamnation de M. X... dans le cadre d'une procédure antérieure diligentée, en dehors des voies de recours légalement organisées, ne peut pas être admise et qu'en décider autrement produirait des incohérences juridiques graves et une prolongation des procédures aussi longtemps que le débiteur pourrait imaginer des moyens nouveaux ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il reçoit l'appel de la société Fuchs lubrifiant France contre le jugement du 28 juin 2007 du tribunal de grande instance de Strasbourg, l'arrêt rendu le 4 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que la créance de la société Fuchs lubrifiant France est éteinte, faute de déclaration régulière conformément à l'article L. 621-46, alinéa 4, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises applicable à la cause ;
Dit que M. X... était fondé à se prévaloir de cette extinction et que la société Fuchs lubrifiant France n'était plus en droit de poursuivre l'exécution du jugement du 2 mars 2000 (RG n° 1998/00289) contre celle-ci ;
Condamne la société Fuchs lubrifiant France aux dépens ;
Dit que les dépens afférents aux instances devant les juges du fond seront supportés par la société Fuchs lubrifiant France ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mai deux mille dix.