Cass. 1re civ., 11 mai 2017, n° 16-15.430
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Batut
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Compagnie européenne de garanties et cautions (la caution) s'est portée caution d'un prêt relais d'un montant de 500 000 euros consenti, le 21 mai 2007, pour une durée de vingt-quatre mois, par la Caisse d'épargne Rhône-Alpes (la banque) à M. et Mme X... (les emprunteurs), en vue de l'acquisition d'une maison d'habitation ; que, par actes des 8 et 11 février 2010, ces derniers ont constitué la SCI Gexall (la SCI), apportant à celle-ci l'immeuble ainsi financé, puis, par actes des 26 août et 18 septembre suivants, fait donation de l'usufruit des parts sociales à leurs deux enfants ; que, le 9 septembre 2010, la banque s'étant prévalue de la déchéance du terme du prêt, la caution a réglé à la banque la somme de 576 534,45 euros et assigné les emprunteurs en remboursement ; qu'estimant l'apport et l'acte de donation susvisés effectués en fraude de ses droits, la caution a assigné les emprunteurs, M. Xavier X..., Mme Estelle X... et la SCI en inopposabilité de ces actes ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
Attendu que, pour rejeter les demandes, l'arrêt retient que les actes litigieux sont intervenus avant la subrogation dont bénéficie la caution ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la créance à l'origine de la subrogation doit seulement être née antérieurement aux actes frauduleux, la cour d'appel, qui s'est fondée sur un motif inopérant, a violé le texte susvisé ;
Et sur les troisième et quatrième branches du moyen :
Vu l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
Attendu que, pour statuer comme il le fait, l'arrêt retient qu'au jour desdits actes, les emprunteurs étaient toujours propriétaires d'un immeuble qu'ils avaient mis en vente et qu'aucun élément ne permettait d'établir qu'ils auraient pu savoir que ce bien serait vendu à un prix inférieur à son évaluation initiale, de sorte que leur intention frauduleuse, lors de la conclusion des actes de disposition par eux consentis, n'est pas prouvée ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, en procédant aux actes en cause, les emprunteurs n'avaient pas nécessairement conscience d'organiser leur insolvabilité, les privant de la possibilité de régler leur dette, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne M. et Mme X..., M. Xavier X..., Mme Estelle X... et la SCI Gexall aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne in solidum à payer à la société Compagnie européenne de garanties et cautions la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille dix-sept.