Cass. 1re civ., 5 novembre 2025, n° 23-22.883
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Champalaune
Avocats :
SAS Zribi et Texier, SCP Richard
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2025
La Société d'exploitation de l'Institut européen de langues (Seiel) Groupe Capitole, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 23-22.883 contre l'arrêt rendu le 25 septembre 2023 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l'opposant à Mme [Z] [V], domiciliée chez M. et Mme [U] et [J] [V], [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Tréard, conseillère, les observations de la SAS Zribi et Texier, avocat de la société Seiel Groupe Capitole, de la SCP Richard, avocat de Mme [V], et l'avis de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 septembre 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, Mme Tréard, conseillère rapporteure, Mme Guihal, conseillère doyenne, MM. Bruyère, Ancel, Mmes Peyregne-Wable, Corneloup, conseillers, Mme Robin-Raschel, conseillère référendaire, M. Salomon, avocat général, et Mme Vignes, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, de la présidente et des conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 25 septembre 2023), à la suite d'un appel téléphonique de Mme [V], la Société d'exploitation de l'Institut européen de langues exerçant sous l'enseigne Groupe Capitole (la société Seiel) lui a transmis, le 14 septembre 2020, par courriel, de la documentation et un dossier d'inscription, que cette dernière est venue déposer dans les locaux de la société Seiel deux jours plus tard.
2. N'ayant pas obtenu le remboursement des sommes acquittées après avoir fait valoir l'exercice de son droit de rétractation, Mme [V] a assignée la société Seiel en restitution des sommes versées, le 16 octobre 2020.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses troisième à sixième branches
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
4. La société Seiel fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à Mme [V] la somme de 7 030 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 16 octobre 2020 et de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles, alors :
« 1°/ que le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s'engager ; que le contrat n'est conclu que lorsque l'acceptation parvient à l'offrant ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que suite à la transmission par la société de formation Seiel d'une brochure de présentation de la formation et du dossier d'inscription, Mme [V] a signé le contrat le 15 septembre 2020 à [Localité 3] et il est constant qu'elle ne l'a transmis que le 16 septembre à la société de formation dans ses locaux ; qu'en jugeant, pour retenir que le contrat était un contrat à distance, et qu'il pouvait être rétracté suivant les modalités prévues par l'article L. 221-18 du code de la consommation, qu'il avait été conclu le 15 septembre 2020, sans que l'acceptation n'ait été transmise à l'offrante, la cour d'appel a violé les articles 1113, 1121 du code civil, L. 221-1 du code de la consommation ;
2°/ que le contrat est formé par la rencontre d'une offre et d'une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté de s'engager ; que le contrat n'est conclu que lorsque l'acceptation parvient à l'offrant ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que suite à la transmission par la société de formation Seiel d'une brochure de présentation de la formation et du dossier d'inscription, Mme [V] a signé le contrat le 15 septembre 2020 à [Localité 3] ; qu'en jugeant, pour qualifier de contrat de contrat à distance, qu'il avait été conclu le 15 septembre 2020, dès lors qu'il avait été signé à cette date, sans rechercher, comme elle y était inviter, si l'acceptation avait été transmise à la société de formation avant qu'elle ne vienne la lui remettre dans ses locaux le 16 septembre 2020, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1113, 1121 du code civil, L. 221-1 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
5. Selon l'article L. 221-1 du code de la consommation, qui assure la transposition de l'article 2, point 7, de la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, est considéré comme un contrat à distance, tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat.
6. Il en résulte que, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, les conditions matérielles de remise au professionnel de l'offre, qui a été reçue et signée par le consommateur en dehors des locaux de ce professionnel, sans aucune négociation au moment de cette remise, sont sans influence sur la qualification de contrat à distance.
7. Sont également indifférents pour cette qualification les termes de l'article 1121 du code civil, selon lequel le contrat est conclu dès que l'acceptation parvient à l'offrant et réputé l'être au lieu où l'acceptation est parvenue, qui permet, à défaut de stipulation contraire, de fixer le point de départ du délai de rétractation prévu à l'article L. 221-18 du code de la consommation.
8. L'arrêt constate, d'abord, qu'à la suite d'un appel téléphonique de Mme [V], la société Seiel lui a envoyé, par courriel du 14 septembre 2020, une brochure de présentation, mentionnant la possibilité d'effectuer la formation exclusivement à distance, ainsi, que le dossier d'inscription, accompagné d'un formulaire de rétractation qui prévoyait la possibilité d'envoyer ce dernier à l'adresse de l'établissement. Il en déduit, par des motifs non contestés, que la société Seiel a ainsi mis en place un système organisé de prestation de service à distance.
9. L'arrêt rappelle, ensuite, que les conditions générales du dossier d'inscription indiquent qu'une inscription est validée par la constitution d'un dossier complet et que la société Seiel ne s'est pas réservée un droit d'agrément des candidats, de sorte que l'acceptation pure et simple de l'offre emporte formation du contrat d'enseignement. Il retient que l'acceptation étant intervenue le 15 septembre 2020 au domicile de Mme [V], les consentements tant de l'offrant que de l'acceptant ont été manifestés par le biais d'un moyen de communication à distance ou sans la présence physique du cocontractant, peu important que cette dernière se soit ensuite présentée dans les locaux de la société Seiel pour y déposer son dossier.
10. Il retient, enfin, par motifs propres et réputés adoptés, que Mme [V] a fait un usage régulier de son droit de rétractation, à partir du formulaire qui figurait dans le dossier d'inscription, par un courrier recommandé du 22 septembre 2020, faisant ainsi ressortir qu'il avait été exercé conformément aux conditions générales produites aux débats, qui prévoient que le client dispose d'un délai de quatorze jours à compter de son acceptation de l'offre pour exercer son droit de rétractation par tous moyens.
11. De ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel a justement déduit qu'un contrat à distance avait été conclu entre les parties et que Mme [V] avait régulièrement exercé le droit de rétractation qui y était attaché.
12. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Seiel Groupe Capitole aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Seiel Groupe Capitole et la condamne à payer à la SCP Richard la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé publiquement le cinq novembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.