Cass. 1re civ., 20 avril 2022, n° 20-23.617
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Chauvin
Rapporteur :
Vitse
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 octobre 2020), suivant offre acceptée le 14 août 2000, la Société générale (la banque) a consenti à M. [I] un prêt immobilier garanti par le cautionnement de la société Crédit logement.
2. Suivant offres acceptées le 8 juin 2007, la banque a consenti à la société civile immobilière SRG [K] (la SCI) trois prêts garantis par le cautionnement de la société Crédit logement, de M. [I] et de Mme [W].
3. A la suite d'échéances impayées, la banque a prononcé la déchéance du terme des prêts, avant d'être désintéressée par la société Crédit logement, qui a assigné les emprunteurs et ses cofidéjusseurs en paiement.
Examen des moyens
Sur les deux premiers moyens, ci-après annexés
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
5. M. [I] fait grief à l'arrêt d'ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 22 avril 2016 au titre du prêt immobilier qu'il a contracté, alors « que la règle selon laquelle aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles L. 311-29 à L. 311-31 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable à la cause, ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation ou de défaillance prévue par ces articles, fait obstacle à l'application de la capitalisation des intérêts prévue par l'article 1154 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 du code civil ; que cette interdiction s'applique aussi bien à l'action du prêteur contre l'emprunteur, qu'à celle de la caution qui exerce un recours contre l'emprunteur ; qu'en jugeant au contraire, pour ordonner la capitalisation des intérêts au titre du prêt personnel de M. [I] à compter du 22 avril 2016, qu'il ne s'agit pas d'intérêts de retard dus par l'emprunteur au prêteur mais d'intérêts moratoires dus au cofidéjusseur qui a payé, la cour d'appel a violé l'article L. 311-32 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, ensemble l'article 1154 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 312-23 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, et l'article 1154 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
6. La règle édictée par le premier de ces textes, selon lequel aucune indemnité ni aucun coût autres que ceux qui sont mentionnés aux articles L. 312-21 et L. 312-22 du code de la consommation ne peuvent être mis à la charge de l'emprunteur dans les cas de remboursement par anticipation d'un prêt immobilier ou de défaillance prévus par ces articles, fait obstacle à l'application de la capitalisation des intérêts prévue par le second texte susvisé.
7. Cette interdiction concerne tant l'action du prêteur contre l'emprunteur que les recours personnel et subrogatoire exercés contre celui-ci par la caution.
8. L'arrêt ordonne la capitalisation des intérêts à compter du 22 avril 2016 au titre du prêt immobilier.
9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
10. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
11. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il ordonne la capitalisation des intérêts au titre du prêt immobilier souscrit le 14 août 2000 par M. [I], l'arrêt rendu le 7 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Rejette la demande de capitalisation des intérêts formée par la société Crédit logement au titre du prêt immobilier souscrit le 14 août 2000 par M. [I] ;
Condamne la société Crédit logement aux dépens, en ce compris ceux exposés devant les juges du fond ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Crédit logement et la condamne à payer à M. [I] et à la société SRG [K] la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille vingt-deux.