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Décisions

Cass. com., 15 novembre 2017, n° 15-28.959

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Rémery

Cass. com. n° 15-28.959

14 novembre 2017

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte authentique reçu le 30 octobre 1995, M. et Mme X... se sont rendus cautions solidaires et hypothécaires de la société SMCM (la société) en garantie du remboursement du solde du compte courant ouvert par la société dans les livres de la société Banque parisienne de crédit, aux droits de laquelle sont venues successivement la société Fortis banque France et la société BNP Paribas (la banque) ; que la société a été mise en redressement judiciaire le 22 novembre 2001 puis, à la suite de la résolution du plan de redressement, en liquidation judiciaire le 29 avril 2004 ; qu'après le prononcé de la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, la banque a mis en demeure les cautions de lui payer une certaine somme en vertu de l'acte authentique ; que celles-ci l'ont assignée aux fins de voir constater la disparition de leur cautionnement ;

Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que M. et Mme X... font grief l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à la contestation de la créance invoquée par la banque alors, selon le moyen :

1°/ que l'extinction de la dette garantie met fin aux sûretés de paiement ; que la disparition de la personnalité morale du débiteur principal, en l'absence de toute transmission universelle de son patrimoine, éteint la dette et, corrélativement, les sûretés prises pour son paiement ; qu'en se fondant, pour écarter le moyen de M. et Mme X... tiré de l'extinction de leur garantie, sur le motif inopérant selon lequel la clôture de la liquidation pour insuffisance d'actifs n'emportait pas extinction de la dette sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la dissolution de la personne morale débitrice sans dévolution de son patrimoine n'avait pas éteint la dette garantie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2313 du code civil ;

2°/ que celui qui s'est obligé en qualité de caution envers un créancier ne peut être tenu des dettes contractées par le débiteur envers les successeurs de celui-ci ; que la caution ne peut être tenue envers ces derniers que du paiement des dettes du débiteur contractées envers le créancier originel ; que la cour d'appel a constaté que les époux X... s'étaient portés cautions solidaires et hypothécaires de la société SMCM à hauteur de 700 000 francs en garantie du remboursement du solde du compte courant de cette société au bénéfice de la Banque parisienne de crédit ; qu'en écartant la contestation de M. et Mme X... sur l'existence de la créance invoquée par la société BNP Paribas sans rechercher si la dette de la société SMCM invoquée par la société BNP Paribas était née avant que cette dernière ne succède à la Banque parisienne de crédit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2292 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, que, selon les dispositions de l'article L. 622-32 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, les créanciers conservent le droit de poursuite à l'encontre de la caution du débiteur, en dépit de la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, dès lors que la dette principale n'est pas éteinte ; qu'ayant énoncé que l'absence de vérification de la créance et la clôture pour insuffisance d'actif n'emportaient pas extinction de la créance contre le débiteur principal, et que la banque était en droit de poursuivre la caution dès lors que la créance avait été régulièrement déclarée au passif de la liquidation judiciaire, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche inopérante invoquée par la première branche, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu, d'autre part, que la cour d'appel n'était pas tenue d'effectuer la recherche invoquée par la deuxième branche, qui ne lui était pas demandée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche, qui est recevable, comme né de la décision attaquée :

Vu l'article 2290 du code civil ;

Attendu que pour rejeter les demandes de M. et Mme X... tendant à la contestation de la créance invoquée par la banque, l'arrêt retient que la banque verse aux débats un relevé de compte n° 24264 daté du 29 juin 2001, mentionnant un ancien solde débiteur de 118 045,63 euros au 15 juin 2001 et un virement au contentieux du 23 juin 2001 de cette somme, ainsi que le relevé de compte n° 28094293 daté du 29 juin 2001 sur lequel le solde débiteur de 118 045,63 euros a été transféré ; que la banque ne produit aucun autre relevé de compte, mais que M. et Mme X... ont versé aux débats des relevés du compte n° 24264 du 15 janvier 2001 au 29 juin 2001, ainsi qu'un relevé pour la période du 30 novembre 2001 au 14 décembre 2001, qu'ils critiquent l'absence de relevés pour la période du 29 juin 2001 au 30 novembre 2001, en communiquant cependant un état de créance établi par la banque le 2 août 2005 mentionnant un solde débiteur du compte n° 24264 de 118 045,63 euros, quatre virements à déduire (de 551,51 euros le 18 juin 2001, de 2 772,31 euros le 1er octobre 2001, de 2 772,31 euros le 31 octobre 2001 et de 325 euros le 7 novembre 2001) et un total de 112 585,25 euros, et que ce solde correspond bien au solde figurant sur le relevé de compte daté du 14 décembre 2001, de sorte que la banque rapporte la preuve du montant de sa créance au titre du solde débiteur du compte courant de la société ;

Qu'en se déterminant ainsi, sur le fondement du solde provisoire du compte courant au 14 décembre 2001, sans rechercher le montant du solde définitif de ce compte au 29 avril 2004, date du prononcé de la liquidation judiciaire, à laquelle elle constatait, sans contestation, que la clôture du compte avait eu lieu, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société BNP Paribas aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. et Mme X... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille dix-sept.

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