Cass. com., 28 janvier 2014, n° 12-28.728
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Espel
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 9 octobre 2012), que le 31 mai 2007, M. et Mme X... (les cédants) ont cédé à M. Y... les parts qu'ils détenaient dans la société Alpilles boissons (la société) ; que la clause de garantie de passif consentie par les cédants prévoyait que ceux-ci devaient souscrire une « caution bancaire à première demande » auprès d'un établissement bancaire ; que le 3 avril suivant, la société CIC Lyonnaise de banque (la banque) s'est rendue caution solidaire de M. X... envers M. Y... du paiement de toutes sommes dues au titre de cette garantie, à concurrence d'un certain montant ; qu'après mise en jeu de ladite garantie, la banque, mise en demeure par M. Y... d'exécuter son engagement, a procédé au paiement, puis débité de la somme correspondante le compte ouvert dans ses livres par les cédants ; que ceux-ci ont assigné la banque et M. Y..., lequel a formé une demande reconventionnelle au titre de la garantie de passif, en restitution de cette somme et paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné solidairement avec la banque à restituer aux cédants la somme de 30 000 euros, avec intérêts au taux légal et de l'avoir condamné à relever et garantir la banque de cette condamnation, alors, selon le moyen :
1°/ que le paiement effectué par la caution entre les mains du créancier n'est pas indu pour cette seule raison que la caution a négligé de s'enquérir des moyens de défense que le débiteur principal aurait pu faire valoir ; qu'en ce cas, la caution est seulement déchue de son recours contre le débiteur principal lorsque ces moyens auraient été de nature à éteindre la dette ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'après avoir délivré un engagement de caution solidaire en faveur de M. Y... à concurrence d'une somme de 30 000 euros pour sûreté d'une garantie d'actif et de passif contractée par les cédants en faveur de celui-ci, la banque s'est acquittée de cet engagement « en méconnaissance de son caractère accessoire (¿) comme s'il s'agissait d'une garantie autonome », sans égard pour la circonstance que la dette cautionnée était contestée par le débiteur principal ; qu'en jugeant que le paiement reçu, dans de telles circonstances, par le bénéficiaire du cautionnement devait être nécessairement considéré comme indu et sujet à répétition à l'égard du débiteur principal, au prétexte que « la créance alléguée n'était ni liquide, ni certaine, ni exigible à ce moment-là », la cour d'appel a violé les articles 2308 et 1235 du code civil ;
2°/ que l'exécution conforme d'un engagement régulièrement contracté ne saurait revêtir un caractère indu ; qu' il résultait de l'article 8-8 de la convention de cession de parts sociales que les cédants et débiteurs de la garantie d'actif et de passif contractée envers M. Y..., cessionnaire des parts sociales, s'étaient contractuellement obligés envers ce dernier à lui fournir « une caution bancaire à première demande délivrée par un établissement bancaire notoirement connu d'un montant de 30 000 euros jusqu'au 31 décembre 2010 » ; qu'en jugeant les cédants fondés à obtenir la condamnation solidaire de M. Y... et de la banque à leur restituer la somme de 30 000 euros, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que les cédants s'étaient engagés à procurer à M. Y... une sûreté pouvant être exercée « à première demande », ce dont il s'évinçait que le paiement reçu par celui-ci ne pouvait revêtir un caractère indu du seul fait que la dette cautionnée avait été contestée par le débiteur principal, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1235 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'il résulte de la combinaison des articles 1235 et 2308 du code civil que la caution qui a payé le créancier sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur, quand celui-ci disposait, au moment du paiement, de moyens de faire déclarer la dette éteinte, est déchue de son recours contre ce débiteur, lequel est fondé, dès lors que ce recours a néanmoins été exercé, à demander la répétition des sommes versées ; qu'après avoir, par motifs non critiqués, qualifié l'engagement litigieux de cautionnement, l'arrêt retient que la banque, qui avait payé le créancier cependant que la créance alléguée, étant contestée, n'était pas certaine, liquide et exigible, avait exécuté cet engagement en méconnaissance des conséquences de son caractère accessoire et ensuite débité le compte des cédants de la somme correspondant à celle réglée au créancier ; qu'ayant ainsi fait ressortir que la banque avait exercé un recours dont elle était déchue, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par le moyen, en a exactement déduit que le paiement reçu par ce créancier n'était pas dû et qu'il était donc sujet à répétition ;
Attendu, d'autre part, que la réponse apportée au grief de la première branche rend inopérant celui évoqué à la seconde ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que le second moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à M. et Mme X... la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quatorze.