CA Paris, Pôle 1 - ch. 2, 13 novembre 2025, n° 25/02708
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 2
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2025
(n° , 17 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/02708 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CKZN7
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Janvier 2025 -Président du TC de [Localité 17] - RG n° 2024R00332
APPELANTS
M. [H] [U]
[Adresse 7]
[Localité 12]
S.A.S. M & KZN HOLDING, RCS de [Localité 17] sous le n°789 311 040, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 7]
[Localité 12]
Représentés par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050
Ayant pour avocat plaidant Me Lauriane CENEDESE, avocat au barreau de PARIS, toque : R009
INTIMÉS
M. [S] [B]
[Adresse 3]
[Localité 14]
Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Ayant pour avocat plaidant Me Franck AMRAM, avocat au barreau du VAL D'OISE
M. [M] [V]
[Adresse 4]
[Localité 15]
Représenté par Me Isabelle LUCAS BALOUP, avocat au barreau de PARIS, toque : B0148
Mme [N] [R]
[Adresse 2]
[Localité 13]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle LUCAS-BALOUP, avocat au barreau de PARIS, toque : B148
S.A.S. EURODIALYSE représentée par son administrateur provisoire, la SCP D'ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES [A] [K],
[Adresse 1]
[Localité 10]
Représentée par Me Stéphane CATHELY de l'AARPI CATHELY & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : D0986
S.A.S. LA DIALOISE, RCS de [Localité 18] sous le n°499 622 140, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 8]
S.A.S. NEPHROS, RCS de [Localité 18] sous le n°934 791 674, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 8]
Représentées par Me Charles-hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029
Ayant pour avocat plaidant Me Louis GAUTHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1660
S.A.S. COMPAGNIE GENERALE DE SANTE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 11]
Défaillante, déclaration d'appel signifiée le 10.03.2025 à personne morale
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 9 octobre 2025 en audience publique, devant Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre chargée du rapport et Laurent NAJEM, Conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,
Michèle CHOPIN, Conseillère,
Laurent NAJEM, Conseiller,
Qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL
ARRÊT :
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSE DU LITIGE
La société Eurodialyse, immatriculée en 2014, exploite un centre de dialyse situé [Adresse 9] à [Localité 19]. Son activité réglementée est soumise à l'autorisation de l'agence régionale de la santé (l'[Localité 16]).
Cette société a commencé son activité en 2018. Elle a pour associés M. [U], la société M&KZN Holding (gérée par M. [U]), Mme [R], M. [V] et M. [B].
Elle a été dirigée par M. [U], son président désigné en 2014 pour une durée de trois ans, mais un conflit entre les associés a rendu impossible la désignation d'un nouveau dirigeant au terme du mandat de M. [U].
Par ordonnance du 11 janvier 2022, à la demande de ce dernier, le président du tribunal de commerce de Bobigny a désigné un administrateur judiciaire en la personne de Me [P], afin de convoquer une assemblée générale des associés pour désigner un nouveau président et les autres organes de direction. A l'issue de l'assemblée générale du 25 février 2022, aucun président n'a été désigné faute pour les candidats d'avoir obtenu la majorité des deux tiers requise par les statuts, de sorte que la société est demeurée sans organe de direction.
Le 14 janvier 2022, Mme [R] et M. [V] ont assigné la société Eurodialyse et M. [U] aux fins de voir nommer un administrateur provisoire à la société. Par ordonnance de référé du 28 février 2022 le tribunal de commerce de Bobigny a :
d'une part, ordonné une expertise comptable confiée à M [J], avec pour mission notamment de « rechercher toutes anomalies comptables et notamment ce qui concerne les sous-traitants, les créances clients, les règlements des fournisseurs et l'existence d'éventuels détournements au profit de tel ou tel associé ou dirigeant », son rapport devant être déposé avant le 31 juillet 2022 ;
d'autre part, désigné Me [D] [Y] en qualité d'administrateur judiciaire pour administrer provisoirement la société jusqu'au dépôt du rapport de l'expert-comptable.
Par requête en date du 23 mars 2022, Me [Y] a sollicité son remplacement en raison de la défiance manifestée à son égard par les associés l'ayant fait désigner. Par ordonnance du 24 mars 2022, Me [K] a été désigné à la place de Me [Y] « pour une durée de trois mois, qui pourra, en cas de besoin justifié, être prorogée par ordonnance rendue sur simple requête de l'administrateur ».
Par trois ordonnances successives en date des 23 juin, 19 septembre et 22 décembre 2022 le président du tribunal de commerce de Bobigny a prorogé la mission de Me [K]. Par son ordonnance du 19 septembre 2022, il a en outre autorisé l'administrateur provisoire à faire signer par la société Eurodialyse un mandat de gestion de son centre de dialyse avec la société La Dialoise.
Par acte du 25 octobre 2022, M. [U] et la société M&KZN Holding ont assigné M. [B], M. [V], Mme [R] et la société Eurodialyse représentée par son administrateur provisoire la SCP [A] [K] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny, aux fins de rétractation de l'ordonnance rendue le 19 septembre 2022 par le président du tribunal judiciaire de Bobigny.
Cette demande a été rejetée par ordonnance de référé du 14 février 2023, dont M. [U] et la société M&KZN Holding ont interjeté appel et qui a été confirmée en toutes ses dispositions par arrêt de cette cour en date du 23 novembre 2023.
Par ordonnance rendue sur requête de l'administrateur provisoire le 2 avril 2024, le président du tribunal de commerce de Bobigny a, d'une part, prorogé la mission de Me [K] pour une durée de neuf mois jusqu'au 31 décembre 2024, d'autre part, autorisé celui-ci à « rechercher des acquéreurs en vue de la cession forcée du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024, permettant d'escompter voire aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'établissement avant le 31 décembre 2024. »
Par acte du 2 juillet 2024, M. [U] et la société M&KZN Holding ont assigné devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny M. [B], M. [V], Mme [R] et la société Eurodialyse prise en la personne de son administrateur judiciaire provisoire la SCP [A] [K], aux fins de voir :
Ordonner la rétractation de l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par le président près le tribunal judiciaire de Bobigny (sic) en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Me [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 Juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 Décembre 2024 » ;
Constater la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Prononcer la nullité de tous les actes subséquents à cette ordonnance ;
Rejeter la demande de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d'Administrateur Provisoire de la société Eurodialyse, de se voir autorisé (sic) à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024 ;
Condamner les défendeurs aux dépens ;
Ordonner, vu l'urgence, l'exécution provisoire de l'ordonnance sur minute.
Par ordonnance du 14 janvier 2025, le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny a :
Dit que le caractère conflictuel des relations entretenues entre les associés est de nature à créer une situation de péril éminent, et que donc les circonstances justifient que le principe du contradictoire ne soit pas respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président de commerce de [Localité 17] et que la responsabilité de l'administrateur provisoire est de prendre toutes dispositions utiles pour sauvegarder les intérêts de la personne morale ;
Rejeté la demande de rétractation partielle formée par MM. [U] et [B] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 (RG n° 2024O01357) ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée, les demandeurs ne précisant pas de quels actes il s'agirait ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un acte de disposition est le seul acte possible pour lui permettre de respecter son obligation de préservation de la personne morale qui entre de manière incontestable dans le périmètre de sa mission, revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM. [U] et [B] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Déclaré que les demandes d'intervention volontaire des société compagnie générale de santé, la Dialoise et Nephros à la présente instance sont recevables et bien fondées ;
Ordonné à M. [U] et la société M&KZN solidairement d'une part et M. [B] d'autre part de payer à la société Eurodialyse la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné solidairement MM. [U] et [B] et la société M&KZN aux entiers dépens ;
Liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 153,12 euros TTC (dont 25,30 euros de TVA).
Par déclaration du 29 janvier 2025, M. [U] et la société M&KZN Holding ont relevé appel de cette décision.
Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 6 octobre 2025, ils demandent à la cour, sur le fondement des articles 493 et suivants du code de procédure civile, de :
Sur l'exception de procédure :
A titre principal :
Juger que la société Eurodialyse est irrecevable à soulever l'irrecevabilité des demandes de M. [U] et de la société M&KZN Holding, faute d'avoir formulé une telle exception de procédure in limine litis ;
A titre subsidiaire et en tout état de cause,
Juger que la demande de rétractation de l'ordonnance sur requête du 2 avril 2024 et les demandes y afférentes formulées par M. [U] et par la société M&KZN Holding sont recevables ;
Juger M. [U] et la société M&KZN Holding recevables et bien fondés en leurs conclusions et demandes ;
Sur le respect de la procédure d'appel :
Juger que l'appel de M. [U] et de la société M&KZN n'est pas caduc à l'égard de Mme [R] et les conclusions d'appel incident de Mme [R] signifiées le 21 juillet 2025 sont recevables.
Sur la demande de rétractation :
Infirmer l'ordonnance prononcée le 14 janvier 2025 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a :
Jugé que les circonstances justifient que le principe du contradictoire n'ait pas été respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président du tribunal de commerce de Bobigny le 2 avril 2024 ;
Rejeté la demande de rétractation formée par M. [U] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM. [U] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Condamné M. [U] et la société M&KZN Holding solidairement à payer à la société Eurodialyse la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné solidairement M. [U] et la société M&KZN aux entiers dépens ;
Statuant à nouveau :
Juger que l'administrateur provisoire, SCP [A] [K], n'a pas le pouvoir de céder le fonds de commerce de la société Eurodialyse qu'il administre ;
Rejeter la demande de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d'administrateur provisoire de la société Eurodialyse, de se voir autorisé à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rétracter l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par le président près le tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Me [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 Juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 Décembre 2024 » ;
Juger la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Juger nuls tous les actes subséquents à cette ordonnance du 2 avril 2024 dont la rétractation sera jugée, en particulier l'ensemble des offres d'acquisition reçues par Me [K] ès qualités d'administrateur provisoire de Eurodialyse au 30 juin 2024, l'ordonnance sur requête rendue le 17 juillet 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny (RG 2024O15030), les actes de signification des offres d'acquisition aux associés de la société Eurodialyse du mois de juillet 2024 et signifiés aux deux concluants le 23 juillet 2024, le courrier de la société la Dialoise du 16 septembre 2024 par lequel ladite Société a entendu exercer son droit de préemption, l'ordonnance sur requête rendue le 15 octobre 2024 par le président du tribunal de Commerce de Bobigny (2024O16979), l'acte de cession de fonds de commerce de la société Eurodialyse signé le 18 novembre 2024 entre la société Eurodialyse et la société Nephros ;
Débouter les parties intimées de toutes demandes, fins et prétentions formulées à l'encontre de M. [U] et/ou de la Société M&KZN Holding ;
Condamner solidairement Eurodialyse, la Dialoise et Nephros à verser à M. [U] et M&KZN Holding la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner Eurodialyse aux dépens, dont distraction au profit de Maître Lauriane Cenedese, avocat au Barreau de Paris, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 21 juillet 2025, Mme [R] demande à la cour, sur le fondement des articles 14, 462, 495, 496 et 700 du code de procédure civile, de l'article 1988 du code civil, de :
Déclarer recevable le Docteur [R] en ses conclusions et demandes ;
En conséquence,
Infirmer l'ordonnance de référé du 14 janvier 2025 en ce qu'elle a :
Dit que le caractère conflictuel des relations entretenues entre les associés est de nature à créer une situation de péril éminent, et que donc les circonstances justifient que le principe du contradictoire ne soit pas respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président du tribunal de commerce de Bobigny et que la responsabilité de l'administrateur provisoire est de prendre toutes dispositions utiles pour sauvegarder les intérêts de la personne morale ;
Rejeté la demande de rétractation partielle formée par MM. [U] et [B] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 (RG n° 2024O01357) ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée, les demandeurs ne précisant pas de quels actes il s'agirait ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un acte de disposition est le seul acte possible pour lui permettre de respecter son obligation de préservation de la personne morale qui entre de manière incontestable dans le périmètre de sa mission, revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM. [U] et [B] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Déclaré que les demandes d'intervention volontaire des société compagnie générale de santé, la Dialoise et Nephros à la présente instance sont recevables et bien fondée.
Et statuant à nouveau :
Juger que l'administrateur provisoire, la société [K], n'a pas le pouvoir de céder le fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rejeter la demande de la société [K] de se voir autorisée à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rétracter l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 décembre 2024 » ;
Juger la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Juger nuls tous les actes subséquents à cette ordonnance du 2 avril 2024 dont la rétractation sera ordonnée, en particulier l'ensemble des offres d'acquisition reçues par Me [K] ès qualités d'administrateur provisoire de la société Eurodialyse au 30 juin 2024, l'ordonnance sur requête rendue le 17 juillet 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny (RG 2024015030), les actes de signification des offres d'acquisition aux associés de la société Eurodialyse du mois de juillet 2024, le courrier de la Dialoise du 16 septembre 2024 par lequel ladite Société a entendu exercer son droit de préemption, la requête de l'administrateur du 10 octobre 2024 aux fins d'autorisation à signer les actes nécessaires à la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse, l'ordonnance sur requête rendue le 15 octobre 2024 par le Président du Tribunal de commerce de Bobigny (2024O16979), l'acte de cession de fonds de commerce de la Société Eurodialyse signé le 18 novembre 2024 entre la société Eurodialyse et la société Nephros ;
Rejeter l'intégralité des demandes, fins et prétentions de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d'administrateur provisoire de la société Eurodialyse, à l'encontre de Mme le Docteur [R] ;
Débouter les parties intimées de toutes demandes, fins et prétentions formulées à l'encontre de Mme le Docteur [R] ;
Condamner la société Eurodialyse à verser à Mme le Docteur [R] la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la société Eurodialyse aux dépens.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 23 juin 2025, M. [B] demande à la cour, de :
Déclarer ses demandes recevables et en conséquence ;
Infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
Dit que le caractère conflictuel des relations entretenues entre les associés est de nature à créer une situation de péril éminent, et que donc les circonstances justifient que le principe du contradictoire ne soit pas respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président de commerce de [Localité 17] et que la responsabilité de l'administrateur provisoire est de prendre toutes dispositions utiles pour sauvegarder les intérêts de la personne morale ;
Rejeté la demande de rétractation partielle formée par MM. [U] et [B] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 (RG n° 2024O01357) ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée, les demandeurs ne précisant pas de quels actes il s'agirait ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un acte de disposition est le seul acte possible pour lui permettre de respecter son obligation de préservation de la personne morale qui entre de manière incontestable dans le périmètre de sa mission, revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM. [U] et [B] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Ordonné à MM. [U] et la société M&KZN solidairement d'une part et M. [B] d'autre part de payer à la société Eurodialyse la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné solidairement MM. [U] et [B] et la société M&KZN aux entiers dépens ;
Liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 153,12 Euros TTC (dont 25,30 Euros de TVA) ;
Statuant à nouveau,
Ordonner la rétractation de l'ordonnance rendue le 2 avril2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Me [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la SAS Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 Juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'établissement avant le 31 décembre 2024 » ;
Constater la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Prononcer la nullité de tous les actes subséquents à cette ordonnance, en particulier l'ensemble des offres d'acquisition reçues par Me [K] ès qualités d'administrateur provisoire de Eurodialyse au 30 juin 2024, l 'ordonnance sur requête rendue le 17 juillet 2024, les actes de signification des offres d'acquisition aux associés de la société Eurodialyse du mois de juillet 2024, le courrier de la société la Dialoise du 16 septembre 2024 par lequel ladite Société a entendu exercer son droit de préemption ;
Rejeter la demande de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d 'administrateur provisoire de la société Eurodialyse, de se voir autorisé à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30juin 2024 ;
Condamner la société Eurodialyse aux dépens de première instance et d'appel ;
Condamner Eurodialyse à verser à M. [B], M. [U] et M&KZN Holding la somme de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions, remises et notifiées le 23 juillet 2025, M. [V], demande à la cour, sur le fondement des articles 14, 462, 495, 496 et 700 du code de procédure civile et de l'article 1988 du code civil, de :
Le déclarer recevable en ses conclusions et demandes ;
En conséquence,
Infirmer l'ordonnance de référé du 14 janvier 2025 (RG 2024R00332) en ce qu'elle a :
Dit que le caractère conflictuel des relations entretenues entre les associés est de nature à créer une situation de péril éminent, et que donc les circonstances justifient que le principe du contradictoire ne soit pas respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président du tribunal de commerce de Bobigny et que la responsabilité de l'administrateur provisoire est de prendre toutes dispositions utiles pour sauvegarder les intérêts de la personne morale ;
Rejeté la demande de rétractation partielle formée par MM. [U] et [B] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 (RG n° 2024O01357) ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée, les demandeurs ne précisant pas de quels actes il s'agirait ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un acte de disposition est le seul acte possible pour lui permettre de respecter son obligation de préservation de la personne morale qui entre de manière incontestable dans le périmètre de sa mission, revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM [U] et [B] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Déclaré que les demandes d'intervention volontaire des société compagnie générale de santé, la Dialoise et Nephros à la présente instance sont recevables et bien fondées ;
Et statuant à nouveau :
Juger que l'administrateur provisoire, la SCP [K], n'a pas le pouvoir de céder le fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rejeter la demande de la SCP [K] de se voir autorisée à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rétracter l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 décembre 2024 » ;
Juger la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Juger nuls tous les actes subséquents à cette ordonnance du 2 avril 2024 dont la rétractation sera ordonnée, en particulier l'ensemble des offres d'acquisition reçues par Me [K] ès qualités d'administrateur provisoire de la société Eurodialyse au 30 juin 2024, l'ordonnance sur requête rendue le 17 juillet 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny (RG 2024015030), les actes de signification des offres d'acquisition aux associés de la société Eurodialyse du mois de juillet 2024, le courrier de la Dialoise du 16 septembre 2024 par lequel ladite Société a entendu exercer son droit de préemption, la requête de l'Administrateur du 10 octobre 2024 aux fins d'autorisation à signer les actes nécessaires à la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse, l'ordonnance sur requête rendue le 15 octobre 2024 par le président du Tribunal de commerce de Bobigny (2024O16979), l'acte de cession de fonds de commerce de la Société Eurodialyse signé le 18 novembre 2024 entre la société Eurodialyse et la société Nephros ;
Rejeter l'intégralité des demandes, fins et prétentions de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d'administrateur provisoire de la SAS Eurodialyse, à l'encontre du Docteur [V] ;
Débouter les parties intimées de toutes demandes, fins et prétentions formulées à l'encontre du Docteur [V] ;
Condamner la société Eurodialyse à verser au Docteur [V] la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la société Eurodialyse aux dépens.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 6 octobre 2025, la société Eurodialyse demande à la cour, de :
Déclarer irrecevables les demandes principales et incidentes de MM. [U], [B] et [V], de Mme [R] et de la société M&KZN en rétractation d'une ordonnance rendue sur requête, formées devant la juridiction des référés du tribunal de commerce de Bobigny ;
En toute hypothèse,
Confirmer l'ordonnance de référé rendue en date du 14 janvier 2025 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en l'ensemble de ses dispositions et notamment en ce qu'elle a rejeté les demandes en rétractation partielle de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 et déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée ;
Débouter Mme [R], MM. [U], [B] et [V] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Y ajoutant,
Condamner Mme [R], MM. [U], [B], [V], la société Eurodialyse et la société M&KZN solidairement, à payer, chacun, la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner solidairement Mme [R], MM. [U], [B], [V] et la société M&KZN aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Stéphane Cathely, avocat au Barreau de Paris, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 9 octobre 2025, la société Dialoise et la société Nephros demandent à la cour, sur le fondement des articles 31 et 325 et suivants du code de procédure civile, de :
Confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise du 14 janvier 2025 (confirmant l'ordonnance du 2 avril 2024) ;
Débouter M. [U], la société M&KZN, M. [B], Mme [R] et M. [V] de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions ;
Les condamner solidairement aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Les condamner solidairement à verser aux sociétés la Dialoise et Nephros, chacune, la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
La société Compagnie générale de santé n'a pas constitué avocat. M. [U] et la société M&KZN Holding lui ont fait signifier leur déclaration d'appel par acte de commissaire de justice du 10 mars 2025 et leurs conclusions par acte du 29 avril 2025 (remis à personne morale).
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 octobre 2025, date de l'audience des plaidoiries, avant l'ouverture des débats et sans opposition des parties.
SUR CE, LA COUR
Sur le respect de la procédure d'appel
Les appelants demandent qu'il soit jugé que leur appel n'est pas caduc à l'égard de Mme [R] et que les conclusions d'appel incident de Mme [R] signifiées le 21 juillet 2025 sont recevables.
Cependant, contrairement à ce que les appelants exposent dans leurs écritures, la caducité de la déclaration d'appel n'est pas sollicitée par la société Eurodialyse, ni dans le dispositif de ses conclusions n°2 du 15 septembre 2025 auxquelles les appelants se réfèrent, ni en tout état de cause dans le dispositif de leurs dernières conclusions du 6 octobre 2025 qui saisit la cour.
Il n'y a donc pas lieu de répondre à ce moyen, la cour n'étant saisie d'aucune prétention de ce chef.
Sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Eurodialyse
La société Eurodialyse soutient à titre principal, sur le fondement de l'article 496 du code de procédure civile, que la demande de rétractation de l'ordonnance litigieuse formée par M. [U] et la société M&KZN est irrecevable, ceux-ci ayant saisi par leur assignation la juridiction des référés (« la chambre des référés ») aux lieu et place du juge des requêtes seul compétent pour connaître de la demande de rétractation de l'ordonnance rendue sur requête. Elle ajoute que le juge des référés saisi a d'ailleurs rendu sa décision au visa des articles 808, 809 et 875 du code de procédure civile et il n'a pas été sais de la seule demande de rétractation mais aussi de demandes outrepassant la compétence juridictionnelle du juge des requêtes (la nullité de tous les actes subséquents à cette ordonnance). Elle se réfère à une décision de la Cour de cassation (Civ. 2ème, 19 mars 2020, n° 19-11.323) qui sanctionne cette erreur de droit par l'irrecevabilité des demandes ainsi formées.
Les appelants opposent d'abord l'irrecevabilité de cette « exception d'irrecevabilité » au visa des articles 73 et 74 du code de procédure civile, faute d'avoir été soulevée in limine litis avant tout débat au fond. Ils font ensuite valoir, en substance, que la procédure dite de « référé-rétractation » emprunte à la procédure de référé et que selon la Cour de cassation, la demande de rétractation qui est portée devant le juge des référés est recevable dans la mesure où il s'agit du même juge que le président de la juridiction qui a fait droit à la requête (le président du tribunal de commerce).
Le moyen soulevé par la société Eurodialyse s'analyse pas en une exception de procédure mais en une fin de non-recevoir.
Elle n'avait donc pas à être présentée avant toute défense au fond en application de l'article 74 du code de procédure civile lequel est applicable aux exceptions de procédure.
Conformément à l'article 123 du même code, cette fin de non-recevoir pouvait être présentée en tout état de cause, y compris pour la première fois en cause d'appel.
Il résulte de l'article 496 alinéa 2 du code de procédure civile que seul le juge des requêtes qui a rendu l'ordonnance peut être saisi d'une demande de rétractation de celle-ci.
En l'espèce, M. [U] et la société M&KZN Holding ont saisi le président du tribunal de commerce de Bobigny par une assignation en référé-rétractation de l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par ce même président du tribunal de commerce de Bobigny, cela au visa des articles 496 et 497 du code de procédure civile.
Ce faisant ils ont bien saisi le même juge que celui qui a statué sur requête. Leur action est recevable.
La jurisprudence de la Cour de cassation à laquelle se réfère la société Eurodialyse (Civ. 2ème, 19 mars 2020, n° 19-11.323) n'a pas la portée qu'elle lui prête. Dans cette espèce le juge des référés avait été saisi par une société d'une demande de mainlevée du séquestre des documents appréhendés en exécution d'une ordonnance sur requête, et la société défenderesse avait formé, à titre reconventionnel, une demande en rétractation de cette ordonnance. Cette demande reconventionnelle était irrecevable dès lors qu'elle avait été formée devant le juge des référés initialement saisi, qui n'était pas le juge des requêtes.
Sur la demande de rétractation
Selon l'article 493 du code de procédure civile, l'ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler la partie adverse.
Il résulte de l'article 496 du même code que s'il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l'ordonnance.
L'article 497 prévoit que le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est saisi de l'affaire.
Le juge saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête est investi des attributions du juge qui l'a rendue et doit, après débat contradictoire, statuer sur les mérites de la requête.
Saisi de la demande de nullité des mesures d'instruction exécutées sur le fondement de l'ordonnance sur requête dont il prononce la rétractation, le juge doit constater la perte de fondement juridique de ces mesures et la nullité qui en découle.
L'instance en rétractation a pour seul objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire, de sorte que la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet.
Au cas présent, les appelants sollicitent la rétractation de l'ordonnance rendue sur requête le 2 avril 2025 pour deux motifs:
Le non-respect du principe de la contradiction, ni la requête du 25 mars 2024 ni l'ordonnance du 2 avril 2024 n'expliquant en quoi les circonstances exigeaient que la mesure ne soit pas prise contradictoirement ;
L'administrateur provisoire ne pouvait se voir conférer le pouvoir d'engager une procédure de cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse, s'agissant d'un acte de disposition majeur nécessitant l'accord des associés et qui dès lors dépasse les pouvoirs de l'administrateur provisoire. Cette procédure a été décidée hâtivement, alors qu'il pouvait être décidé de renouveler le mandat de de gestion de la société La Dialoise pour laisser aux actionnaires un temps suffisant pour finaliser leur accord sur la gouvernance de la société, laquelle a toujours été in bonis et dont le fonctionnement n'a jamais été bloqué. En outre, la vente du fonds de commerce a été conclue au bénéfice de la société La Dialoise à des conditions de prix particulièrement défavorable à société Eurodialyse et ses associés. Aucune situation de péril imminent ne justifiait la mise en 'uvre de cette procédure de cession du fonds de commerce. C'est par pure opportunité que Me [K] se réfugie derrière l'[Localité 16] pour justifier son excès de pouvoir, alors que cet organisme n'a aucune compétence pour apprécier la validité d'une cession de fonds de commerce.
Il convient d'abord de rappeler que l'administrateur judiciaire provisoire est, selon l'article L.811-1 du code de commerce, un mandataire chargé par décision de justice d'administrer les biens d'autrui ou d'exercer des fonctions d'assistance ou de surveillance dans la gestion de ces biens. Selon la Cour de cassation, il est investi des pouvoirs conférés par la loi à un dirigeant social, sa mission de gestion et d'administration entraîne le dessaisissement des organes sociaux en place.
L'étendue de sa mission est déterminée par le juge et peut être variable. Il peut lui être confié une mission de gestion courante mais il peut aussi être spécialement autorisé, dans le cadre de sa mission initiale de gestion courante, à faire des actes spéciaux autres que de gestion courante tels que des actes de disposition comme la réalisation d'un actif, si un tel acte est indispensable à la survie de l'entreprise. En effet, c'est la mesure d'administration provisoire qui a une nature conservatoire, ce qui ne veut pas dire que l'administrateur ne peut être habilité à passer que des actes de nature conservatoire.
Au cas présent, lors de sa désignation par ordonnance de référé du 28 février 2022, Me [K] s'est vu confier la mission suivante : « administrer provisoirement tant activement que passivement la société Eurodialyse, avec les pouvoirs les plus étendus selon les délais et usages de commerce et cela jusqu'au dépôt du rapport de l'expert-comptable », étant rappelé que depuis cette date sa mission a été renouvelée à plusieurs reprises indépendamment de cette expertise comptable.
S'il est certain que dans le cadre de cette mission générale d'administration Me [K] n'aurait pu de son propre chef décider de mettre en 'uvre la réalisation d'un actif de la société Eurodialyse, en l'occurrence son fonds de commerce, il le pouvait sur autorisation spéciale du président du tribunal de commerce, qu'il a requise et qui lui a été donnée par l'ordonnance litigieuse du 2 avril 2024 laquelle, pour rappel, lui accorde l'autorisation de: « rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la SAS Eurodialyse et fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 décembre 2024. »
Aucun excès de pouvoir n'a donc été commis par l'administrateur provisoire qui a agi sur autorisation judiciaire, laquelle a été donnée dans l'intérêt de la société Eurodialyse afin d'assurer sa survie par la préservation de son principal actif constitué de son fonds de commerce, lequel était exposé à un péril imminent.
Il convient en effet de rappeler que l'activité de soins par dialyse qu'exerce la société Eurodialyse est soumise à l'autorisation de l'[Localité 16] (Agence Régionale de Santé), qui peut refuser de renouveler son autorisation d'activité de soins à un centre de dialyse même s'il bénéficie, comme la société Eurodialyse, de la certification de la Haute Autorité de Santé.
Or, par courrier du 9 septembre 2022 l'[Localité 16] répondait à Me [K], qui à l'époque sollicitait son avis sur la mise en place du mandat de gestion qu'il projetait de conférer à la société La Dialoise, que si l'Agence n'est pas compétente pour s'immiscer dans la gouvernance d'une société privée, elle comprend de la situation de la société (toujours dépourvue de gouvernance du fait du conflit entre les associés) que sans la mise en place d'un tel mandat de gestion la prise en charge et la continuité des soins des parties pourraient ne plus être assurées de sorte que, bien entendu, elle ne s'oppose pas à la mise en place de ce mandat de gestion, concluant sa lettre dans les termes suivants: « La qualité et la sécurité de la prise en charge des patients devant être la priorité de tous, nous comptons sur vous et sur les associés de la SAS Eurodialyse pour que la situation soit stabilisée le plus rapidement possible, à défaut de quoi nous serons obligés d'en tirer les conséquences sur le devenir de l'autorisation d'activité de soins détenue par la SAS. »
L'[Localité 16] conditionnait ainsi le renouvellement de l'autorisation d'activité du centre Eurodialyse à la stabilisation de la gouvernance de la société.
Dans un courrier adressé le 5 septembre 2024, l'[Localité 16] répondait au conseil de Me [K] qui l'informait de la réalisation en cours de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse :
« (')
Aujourd'hui, si l'activité sanitaire d'Eurodialyse est sécurisée grâce aux actions susvisées (référence aux actions menées par Me [K]), la mésentente persistante entre les associés de la société Eurodialyse semble mettre en péril l'existence même de cette société.
Comme vous le savez, l'Agence ne saurait intervenir sur les modalités de gouvernance d'une société privée ou la cession de son fonds de commerce par exemple. Dans ces conditions, il n'est donc bien entendu pas envisageable de conditionner le renouvellement éventuel de l'autorisation de traitement de l'IRC d'Eurodialyse à une quelconque cession de son fonds de commerce.
En revanche, l'Agence a notamment pour mission de veiller au respect des dispositions légales et réglementaires concernant l'obtention, l'exploitation et le renouvellement des autorisations d'activités de soins. Le renouvellement d'une telle autorisation n'est pas automatique et il peut être refusé notamment si le dossier concerné présente un défaut de qualité ou de sécurité. Or une incertitude quant à la pérennité de l'entité titulaire de l'autorisation par exemple nous semble constituer un défaut majeur de sécurité pour une activité de soins concernant des patients très fragiles (').
Dans ces conditions, renouveler l'autorisation de traitement d'IRC d'une structure dont la gouvernance ne serait pas stabilisée au moment du dépôt du dossier conduirait à prendre un risque pour la sécurité des prises en charge. Aussi, compte tenu de la situation actuelle, à défaut de garantie quant à la pérennité de la SAS Eurodialyse, l'Agence ne pourrait émettre que les plus vives réserves sur les suites qui seraient données à la demande de renouvellement de l'autorisation de traitement de l'IRC d'Eurodialyse, demande qui devra obligatoirement être déposée par les titulaires avant le 7 février 2025 en vue de son examen par les services de l'Agence. » (souligné par la cour)
L'administrateur provisoire se trouvait ainsi confronté à la nécessité de présenter avant le 7 février 2025 à l'[Localité 16] la demande de renouvellement de l'autorisation d'activité de la société Eurodialyse, et afin d'obtenir cette autorisation de présenter à cette autorité les garanties d'une stabilisation de la gouvernance de la société.
Or, compte tenu de la persistance de la mésentente entre les associés faisant obstacle à la désignation d'un nouveau dirigeant à la société Eurodialyse (lors de l'assemblée générale des associés du 21 juin 2024 la majorité requise par les statuts n'a pas été réunie pour désigner le président et la candidature de M. [U] a de nouveau été rejetée), et de la prochaine échéance de renouvellement de l'autorisation à donner par l'[Localité 16] (mai 2025 au plus tard), afin d'obtenir cette autorisation conditionnant la poursuite de l'activité de soins de la société Eurodialyse Me [K] devait présenter à l'[Localité 16], au plus tard le 7 février 2025, date limite du dépôt de la demande de renouvellement de l'autorisation d'activité, une solution garantissant la pérennité de la société Eurodialyse,
A cette fin, comme il l'explique dans sa requête adressée au président du tribunal de commerce ayant donné lieu à l'ordonnance litigieuse du 2 avril 2024, Me [K], après un exposé détaillé de la situation de la société Eurodialyse, explique qu'en l'absence d'évolution de la position des associés dont le différend n'entraine pas seulement une vacance dans la gouvernance de la société mais porte également atteinte à son fonctionnement, l'absence d'affectio societatis étant susceptible d'entraîner la dissolution de la personne morale, il a envisagé deux solutions, soit la cession des actions composant le capital de la société Eurodialyse, soit la cession de son fonds de commerce, optant pour la seconde solution dont la mise en 'uvre était plus simple et plus rapide alors que « la préservation de la personne morale de la société Eurodialyse suppose qu'une solution pérenne puisse être arrêtée de manière certaine dès avant l'échéance d'autorisation de l'ARS ». Me [K] indiquait aussi dans sa requête que le mandat de gestion de la société La Dialoise expirait le 30 septembre 2024 et pouvait être renouvelé pour un an jusqu'au 30 septembre 2025 mais que cette échéance au 30 septembre 2025 n'était pas compatible avec l'éventuelle expiration de l'autorisation de l'[Localité 16].
Ce faisant, Me [K] a exposé dans sa requête les circonstances qui justifiaient la nécessité de déroger au principe de la contradiction, compte tenu de l'urgence à mettre en 'uvre la procédure de cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse pour que celle-ci puisse aboutir avant la date du 7 février 2025 fixée par l'[Localité 16] pour le dépôt de la demande de renouvellement de l'autorisation de l'activité de soins. En reprenant ces circonstances dans son ordonnance et en visant la requête, le président du tribunal de commerce a lui-même motivé la nécessité de déroger au principe du contradictoire.
Comme le souligne la société Eurodialyse, le caractère conflictuel des relations entre associés et leur opposition aux solutions proposées par l'administrateur auraient conduit, si celui-ci avait agi par voie de référé, à allonger de manière certaine la durée de la procédure de sorte que le risque était trop important que la mesure de cession du fonds de commerce, nécessaire à la conservation de cet actif, ne puisse intervenir dans le délai contraint par l'échéance imposée par l'[Localité 16]. A cet égard, il doit être observé que l'acte de cession du fonds de commerce a été signé le 18 novembre 2024, soit deux mois et demi seulement avant la date limite du 7 février 2025 impartie par l'[Localité 16] pour déposer la demande de renouvellement de l'activité de soins de la société Eurodialyse.
Me [K] a en outre justifié dans sa requête de la nécessité de la mesure soumise à l'autorisation du juge ayant pour finalité, dans l'intérêt de la société Eurodialyse, de sauvegarder son fonds de commerce qui, sans autorisation donnée par l'[Localité 16] de poursuivre son activité de soins, serait perdu. L'incapacité des associés à trouver un accord sur la gouvernance de la société était en effet indiscutable au moment du dépôt de la requête et perdure d'ailleurs à ce jour, car comme le souligne la société Eurodialyse le rapprochement qui s'est depuis opéré entre les associés n'a pour objet que de s'opposer ensemble à la cession du fonds de commerce dans le cadre de la présente instance.
Enfin, il convient de rappeler qu'une mesure d'administration judiciaire provisoire n'a pas vocation à durer dans le temps, alors que Me [K] est désigné depuis 2022, cette mesure ayant pour finalité de tenter de résoudre la crise et d'écarter le péril qui menace la société, la perte durable de l'affection societatis comme en l'espèce ne pouvant qu'aboutir à la dissolution de la société, issue que Me [K] a cherché à éviter par la mesure sollicitée et judiciairement autorisée, le mandat de gestion mis en place avec la société La Dialoise ne pouvant lui-même qu'être provisoire.
C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de M. [U] et la société M&KZN Holding tendant à la rétractation de l'ordonnance rendue sur requête le 2 avril 2024. L'ordonnance sera confirmée de ce chef.
Par voie de conséquence, est sans objet leur demande tendant à voir juger la perte de fondement juridique des mesures ordonnées et la nullité de tous les actes subséquents à cette ordonnance du 2 avril 2024. L'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevable cette demande.
Sur les mesure accessoires
Le premier juge a justement condamné MM. [U] et [B] et la société M&KZN Holding, parties perdantes, aux dépens de la première instance et à payer à la société Eurodialyse la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Ces condamnations doivent toutefois être prononcées in solidum et non solidairement.
Perdant en appel, M. [U], la société M&KZN Holding, Mme [R], MM. [B] et [V] seront condamnés in solidum aux dépens de l'instance d'appel et à payer, ensemble, la somme de 5.000 euros à la société Eurodialyse.
Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des sociétés La Dialoise et Nephros leurs frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant dans les limites de sa saisine,
Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la société Eurodialyse,
Confirme l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance sur requête du 2 avril 2024, et sauf en ce qu'elle a prononcé solidairement la condamnation de MM. [U] et [B] et de la société M&KZN Holding au titre des dépens et frais irrépétibles,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Dit sans objet la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance sur requête du 2 avril 2024,
Condamne in solidum MM. [U] et [B] et la société M&KZN Holding aux dépens de première instance et au paiement pour cette instance de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum M. [U], la société M&KZN Holding, Mme [R] et MM. [B] et [V] aux dépens de l'instance d'appel,
Les condamne in solidum à payer, ensemble, la somme de 5.000 euros à la société Eurodialyse au titre de ses frais irrépétibles exposés en appel,
Rejette toute autre demande.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 2
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2025
(n° , 17 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/02708 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CKZN7
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Janvier 2025 -Président du TC de [Localité 17] - RG n° 2024R00332
APPELANTS
M. [H] [U]
[Adresse 7]
[Localité 12]
S.A.S. M & KZN HOLDING, RCS de [Localité 17] sous le n°789 311 040, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 7]
[Localité 12]
Représentés par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050
Ayant pour avocat plaidant Me Lauriane CENEDESE, avocat au barreau de PARIS, toque : R009
INTIMÉS
M. [S] [B]
[Adresse 3]
[Localité 14]
Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Ayant pour avocat plaidant Me Franck AMRAM, avocat au barreau du VAL D'OISE
M. [M] [V]
[Adresse 4]
[Localité 15]
Représenté par Me Isabelle LUCAS BALOUP, avocat au barreau de PARIS, toque : B0148
Mme [N] [R]
[Adresse 2]
[Localité 13]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle LUCAS-BALOUP, avocat au barreau de PARIS, toque : B148
S.A.S. EURODIALYSE représentée par son administrateur provisoire, la SCP D'ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES [A] [K],
[Adresse 1]
[Localité 10]
Représentée par Me Stéphane CATHELY de l'AARPI CATHELY & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : D0986
S.A.S. LA DIALOISE, RCS de [Localité 18] sous le n°499 622 140, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 8]
S.A.S. NEPHROS, RCS de [Localité 18] sous le n°934 791 674, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 8]
Représentées par Me Charles-hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029
Ayant pour avocat plaidant Me Louis GAUTHIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1660
S.A.S. COMPAGNIE GENERALE DE SANTE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 11]
Défaillante, déclaration d'appel signifiée le 10.03.2025 à personne morale
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 9 octobre 2025 en audience publique, devant Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre chargée du rapport et Laurent NAJEM, Conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,
Michèle CHOPIN, Conseillère,
Laurent NAJEM, Conseiller,
Qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL
ARRÊT :
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSE DU LITIGE
La société Eurodialyse, immatriculée en 2014, exploite un centre de dialyse situé [Adresse 9] à [Localité 19]. Son activité réglementée est soumise à l'autorisation de l'agence régionale de la santé (l'[Localité 16]).
Cette société a commencé son activité en 2018. Elle a pour associés M. [U], la société M&KZN Holding (gérée par M. [U]), Mme [R], M. [V] et M. [B].
Elle a été dirigée par M. [U], son président désigné en 2014 pour une durée de trois ans, mais un conflit entre les associés a rendu impossible la désignation d'un nouveau dirigeant au terme du mandat de M. [U].
Par ordonnance du 11 janvier 2022, à la demande de ce dernier, le président du tribunal de commerce de Bobigny a désigné un administrateur judiciaire en la personne de Me [P], afin de convoquer une assemblée générale des associés pour désigner un nouveau président et les autres organes de direction. A l'issue de l'assemblée générale du 25 février 2022, aucun président n'a été désigné faute pour les candidats d'avoir obtenu la majorité des deux tiers requise par les statuts, de sorte que la société est demeurée sans organe de direction.
Le 14 janvier 2022, Mme [R] et M. [V] ont assigné la société Eurodialyse et M. [U] aux fins de voir nommer un administrateur provisoire à la société. Par ordonnance de référé du 28 février 2022 le tribunal de commerce de Bobigny a :
d'une part, ordonné une expertise comptable confiée à M [J], avec pour mission notamment de « rechercher toutes anomalies comptables et notamment ce qui concerne les sous-traitants, les créances clients, les règlements des fournisseurs et l'existence d'éventuels détournements au profit de tel ou tel associé ou dirigeant », son rapport devant être déposé avant le 31 juillet 2022 ;
d'autre part, désigné Me [D] [Y] en qualité d'administrateur judiciaire pour administrer provisoirement la société jusqu'au dépôt du rapport de l'expert-comptable.
Par requête en date du 23 mars 2022, Me [Y] a sollicité son remplacement en raison de la défiance manifestée à son égard par les associés l'ayant fait désigner. Par ordonnance du 24 mars 2022, Me [K] a été désigné à la place de Me [Y] « pour une durée de trois mois, qui pourra, en cas de besoin justifié, être prorogée par ordonnance rendue sur simple requête de l'administrateur ».
Par trois ordonnances successives en date des 23 juin, 19 septembre et 22 décembre 2022 le président du tribunal de commerce de Bobigny a prorogé la mission de Me [K]. Par son ordonnance du 19 septembre 2022, il a en outre autorisé l'administrateur provisoire à faire signer par la société Eurodialyse un mandat de gestion de son centre de dialyse avec la société La Dialoise.
Par acte du 25 octobre 2022, M. [U] et la société M&KZN Holding ont assigné M. [B], M. [V], Mme [R] et la société Eurodialyse représentée par son administrateur provisoire la SCP [A] [K] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny, aux fins de rétractation de l'ordonnance rendue le 19 septembre 2022 par le président du tribunal judiciaire de Bobigny.
Cette demande a été rejetée par ordonnance de référé du 14 février 2023, dont M. [U] et la société M&KZN Holding ont interjeté appel et qui a été confirmée en toutes ses dispositions par arrêt de cette cour en date du 23 novembre 2023.
Par ordonnance rendue sur requête de l'administrateur provisoire le 2 avril 2024, le président du tribunal de commerce de Bobigny a, d'une part, prorogé la mission de Me [K] pour une durée de neuf mois jusqu'au 31 décembre 2024, d'autre part, autorisé celui-ci à « rechercher des acquéreurs en vue de la cession forcée du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024, permettant d'escompter voire aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'établissement avant le 31 décembre 2024. »
Par acte du 2 juillet 2024, M. [U] et la société M&KZN Holding ont assigné devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny M. [B], M. [V], Mme [R] et la société Eurodialyse prise en la personne de son administrateur judiciaire provisoire la SCP [A] [K], aux fins de voir :
Ordonner la rétractation de l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par le président près le tribunal judiciaire de Bobigny (sic) en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Me [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 Juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 Décembre 2024 » ;
Constater la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Prononcer la nullité de tous les actes subséquents à cette ordonnance ;
Rejeter la demande de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d'Administrateur Provisoire de la société Eurodialyse, de se voir autorisé (sic) à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024 ;
Condamner les défendeurs aux dépens ;
Ordonner, vu l'urgence, l'exécution provisoire de l'ordonnance sur minute.
Par ordonnance du 14 janvier 2025, le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny a :
Dit que le caractère conflictuel des relations entretenues entre les associés est de nature à créer une situation de péril éminent, et que donc les circonstances justifient que le principe du contradictoire ne soit pas respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président de commerce de [Localité 17] et que la responsabilité de l'administrateur provisoire est de prendre toutes dispositions utiles pour sauvegarder les intérêts de la personne morale ;
Rejeté la demande de rétractation partielle formée par MM. [U] et [B] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 (RG n° 2024O01357) ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée, les demandeurs ne précisant pas de quels actes il s'agirait ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un acte de disposition est le seul acte possible pour lui permettre de respecter son obligation de préservation de la personne morale qui entre de manière incontestable dans le périmètre de sa mission, revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM. [U] et [B] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Déclaré que les demandes d'intervention volontaire des société compagnie générale de santé, la Dialoise et Nephros à la présente instance sont recevables et bien fondées ;
Ordonné à M. [U] et la société M&KZN solidairement d'une part et M. [B] d'autre part de payer à la société Eurodialyse la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné solidairement MM. [U] et [B] et la société M&KZN aux entiers dépens ;
Liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 153,12 euros TTC (dont 25,30 euros de TVA).
Par déclaration du 29 janvier 2025, M. [U] et la société M&KZN Holding ont relevé appel de cette décision.
Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 6 octobre 2025, ils demandent à la cour, sur le fondement des articles 493 et suivants du code de procédure civile, de :
Sur l'exception de procédure :
A titre principal :
Juger que la société Eurodialyse est irrecevable à soulever l'irrecevabilité des demandes de M. [U] et de la société M&KZN Holding, faute d'avoir formulé une telle exception de procédure in limine litis ;
A titre subsidiaire et en tout état de cause,
Juger que la demande de rétractation de l'ordonnance sur requête du 2 avril 2024 et les demandes y afférentes formulées par M. [U] et par la société M&KZN Holding sont recevables ;
Juger M. [U] et la société M&KZN Holding recevables et bien fondés en leurs conclusions et demandes ;
Sur le respect de la procédure d'appel :
Juger que l'appel de M. [U] et de la société M&KZN n'est pas caduc à l'égard de Mme [R] et les conclusions d'appel incident de Mme [R] signifiées le 21 juillet 2025 sont recevables.
Sur la demande de rétractation :
Infirmer l'ordonnance prononcée le 14 janvier 2025 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a :
Jugé que les circonstances justifient que le principe du contradictoire n'ait pas été respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président du tribunal de commerce de Bobigny le 2 avril 2024 ;
Rejeté la demande de rétractation formée par M. [U] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM. [U] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Condamné M. [U] et la société M&KZN Holding solidairement à payer à la société Eurodialyse la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné solidairement M. [U] et la société M&KZN aux entiers dépens ;
Statuant à nouveau :
Juger que l'administrateur provisoire, SCP [A] [K], n'a pas le pouvoir de céder le fonds de commerce de la société Eurodialyse qu'il administre ;
Rejeter la demande de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d'administrateur provisoire de la société Eurodialyse, de se voir autorisé à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rétracter l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par le président près le tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Me [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 Juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 Décembre 2024 » ;
Juger la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Juger nuls tous les actes subséquents à cette ordonnance du 2 avril 2024 dont la rétractation sera jugée, en particulier l'ensemble des offres d'acquisition reçues par Me [K] ès qualités d'administrateur provisoire de Eurodialyse au 30 juin 2024, l'ordonnance sur requête rendue le 17 juillet 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny (RG 2024O15030), les actes de signification des offres d'acquisition aux associés de la société Eurodialyse du mois de juillet 2024 et signifiés aux deux concluants le 23 juillet 2024, le courrier de la société la Dialoise du 16 septembre 2024 par lequel ladite Société a entendu exercer son droit de préemption, l'ordonnance sur requête rendue le 15 octobre 2024 par le président du tribunal de Commerce de Bobigny (2024O16979), l'acte de cession de fonds de commerce de la société Eurodialyse signé le 18 novembre 2024 entre la société Eurodialyse et la société Nephros ;
Débouter les parties intimées de toutes demandes, fins et prétentions formulées à l'encontre de M. [U] et/ou de la Société M&KZN Holding ;
Condamner solidairement Eurodialyse, la Dialoise et Nephros à verser à M. [U] et M&KZN Holding la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner Eurodialyse aux dépens, dont distraction au profit de Maître Lauriane Cenedese, avocat au Barreau de Paris, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 21 juillet 2025, Mme [R] demande à la cour, sur le fondement des articles 14, 462, 495, 496 et 700 du code de procédure civile, de l'article 1988 du code civil, de :
Déclarer recevable le Docteur [R] en ses conclusions et demandes ;
En conséquence,
Infirmer l'ordonnance de référé du 14 janvier 2025 en ce qu'elle a :
Dit que le caractère conflictuel des relations entretenues entre les associés est de nature à créer une situation de péril éminent, et que donc les circonstances justifient que le principe du contradictoire ne soit pas respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président du tribunal de commerce de Bobigny et que la responsabilité de l'administrateur provisoire est de prendre toutes dispositions utiles pour sauvegarder les intérêts de la personne morale ;
Rejeté la demande de rétractation partielle formée par MM. [U] et [B] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 (RG n° 2024O01357) ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée, les demandeurs ne précisant pas de quels actes il s'agirait ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un acte de disposition est le seul acte possible pour lui permettre de respecter son obligation de préservation de la personne morale qui entre de manière incontestable dans le périmètre de sa mission, revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM. [U] et [B] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Déclaré que les demandes d'intervention volontaire des société compagnie générale de santé, la Dialoise et Nephros à la présente instance sont recevables et bien fondée.
Et statuant à nouveau :
Juger que l'administrateur provisoire, la société [K], n'a pas le pouvoir de céder le fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rejeter la demande de la société [K] de se voir autorisée à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rétracter l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 décembre 2024 » ;
Juger la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Juger nuls tous les actes subséquents à cette ordonnance du 2 avril 2024 dont la rétractation sera ordonnée, en particulier l'ensemble des offres d'acquisition reçues par Me [K] ès qualités d'administrateur provisoire de la société Eurodialyse au 30 juin 2024, l'ordonnance sur requête rendue le 17 juillet 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny (RG 2024015030), les actes de signification des offres d'acquisition aux associés de la société Eurodialyse du mois de juillet 2024, le courrier de la Dialoise du 16 septembre 2024 par lequel ladite Société a entendu exercer son droit de préemption, la requête de l'administrateur du 10 octobre 2024 aux fins d'autorisation à signer les actes nécessaires à la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse, l'ordonnance sur requête rendue le 15 octobre 2024 par le Président du Tribunal de commerce de Bobigny (2024O16979), l'acte de cession de fonds de commerce de la Société Eurodialyse signé le 18 novembre 2024 entre la société Eurodialyse et la société Nephros ;
Rejeter l'intégralité des demandes, fins et prétentions de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d'administrateur provisoire de la société Eurodialyse, à l'encontre de Mme le Docteur [R] ;
Débouter les parties intimées de toutes demandes, fins et prétentions formulées à l'encontre de Mme le Docteur [R] ;
Condamner la société Eurodialyse à verser à Mme le Docteur [R] la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la société Eurodialyse aux dépens.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 23 juin 2025, M. [B] demande à la cour, de :
Déclarer ses demandes recevables et en conséquence ;
Infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
Dit que le caractère conflictuel des relations entretenues entre les associés est de nature à créer une situation de péril éminent, et que donc les circonstances justifient que le principe du contradictoire ne soit pas respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président de commerce de [Localité 17] et que la responsabilité de l'administrateur provisoire est de prendre toutes dispositions utiles pour sauvegarder les intérêts de la personne morale ;
Rejeté la demande de rétractation partielle formée par MM. [U] et [B] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 (RG n° 2024O01357) ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée, les demandeurs ne précisant pas de quels actes il s'agirait ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un acte de disposition est le seul acte possible pour lui permettre de respecter son obligation de préservation de la personne morale qui entre de manière incontestable dans le périmètre de sa mission, revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM. [U] et [B] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Ordonné à MM. [U] et la société M&KZN solidairement d'une part et M. [B] d'autre part de payer à la société Eurodialyse la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamné solidairement MM. [U] et [B] et la société M&KZN aux entiers dépens ;
Liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 153,12 Euros TTC (dont 25,30 Euros de TVA) ;
Statuant à nouveau,
Ordonner la rétractation de l'ordonnance rendue le 2 avril2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Me [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la SAS Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 Juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'établissement avant le 31 décembre 2024 » ;
Constater la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Prononcer la nullité de tous les actes subséquents à cette ordonnance, en particulier l'ensemble des offres d'acquisition reçues par Me [K] ès qualités d'administrateur provisoire de Eurodialyse au 30 juin 2024, l 'ordonnance sur requête rendue le 17 juillet 2024, les actes de signification des offres d'acquisition aux associés de la société Eurodialyse du mois de juillet 2024, le courrier de la société la Dialoise du 16 septembre 2024 par lequel ladite Société a entendu exercer son droit de préemption ;
Rejeter la demande de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d 'administrateur provisoire de la société Eurodialyse, de se voir autorisé à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30juin 2024 ;
Condamner la société Eurodialyse aux dépens de première instance et d'appel ;
Condamner Eurodialyse à verser à M. [B], M. [U] et M&KZN Holding la somme de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions, remises et notifiées le 23 juillet 2025, M. [V], demande à la cour, sur le fondement des articles 14, 462, 495, 496 et 700 du code de procédure civile et de l'article 1988 du code civil, de :
Le déclarer recevable en ses conclusions et demandes ;
En conséquence,
Infirmer l'ordonnance de référé du 14 janvier 2025 (RG 2024R00332) en ce qu'elle a :
Dit que le caractère conflictuel des relations entretenues entre les associés est de nature à créer une situation de péril éminent, et que donc les circonstances justifient que le principe du contradictoire ne soit pas respecté quant à l'ordonnance rendue par M. le président du tribunal de commerce de Bobigny et que la responsabilité de l'administrateur provisoire est de prendre toutes dispositions utiles pour sauvegarder les intérêts de la personne morale ;
Rejeté la demande de rétractation partielle formée par MM. [U] et [B] et par la société M&KZN de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 (RG n° 2024O01357) ;
Déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée, les demandeurs ne précisant pas de quels actes il s'agirait ;
Dit et jugé que toute contestation sur l'étendue des pouvoirs dont dispose l'administrateur provisoire lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un acte de disposition est le seul acte possible pour lui permettre de respecter son obligation de préservation de la personne morale qui entre de manière incontestable dans le périmètre de sa mission, revêtira un caractère sérieux et échappera à la compétence de la juridiction des référés ;
Débouté MM [U] et [B] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Déclaré que les demandes d'intervention volontaire des société compagnie générale de santé, la Dialoise et Nephros à la présente instance sont recevables et bien fondées ;
Et statuant à nouveau :
Juger que l'administrateur provisoire, la SCP [K], n'a pas le pouvoir de céder le fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rejeter la demande de la SCP [K] de se voir autorisée à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse ;
Rétracter l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'elle a « autorisé la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], à rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse et à fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 décembre 2024 » ;
Juger la perte de fondement juridique des mesures y ordonnées ;
Juger nuls tous les actes subséquents à cette ordonnance du 2 avril 2024 dont la rétractation sera ordonnée, en particulier l'ensemble des offres d'acquisition reçues par Me [K] ès qualités d'administrateur provisoire de la société Eurodialyse au 30 juin 2024, l'ordonnance sur requête rendue le 17 juillet 2024 par le président du tribunal de commerce de Bobigny (RG 2024015030), les actes de signification des offres d'acquisition aux associés de la société Eurodialyse du mois de juillet 2024, le courrier de la Dialoise du 16 septembre 2024 par lequel ladite Société a entendu exercer son droit de préemption, la requête de l'Administrateur du 10 octobre 2024 aux fins d'autorisation à signer les actes nécessaires à la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse, l'ordonnance sur requête rendue le 15 octobre 2024 par le président du Tribunal de commerce de Bobigny (2024O16979), l'acte de cession de fonds de commerce de la Société Eurodialyse signé le 18 novembre 2024 entre la société Eurodialyse et la société Nephros ;
Rejeter l'intégralité des demandes, fins et prétentions de la SCP [A] [K], en la personne de Maître [A] [K], en qualité d'administrateur provisoire de la SAS Eurodialyse, à l'encontre du Docteur [V] ;
Débouter les parties intimées de toutes demandes, fins et prétentions formulées à l'encontre du Docteur [V] ;
Condamner la société Eurodialyse à verser au Docteur [V] la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner la société Eurodialyse aux dépens.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 6 octobre 2025, la société Eurodialyse demande à la cour, de :
Déclarer irrecevables les demandes principales et incidentes de MM. [U], [B] et [V], de Mme [R] et de la société M&KZN en rétractation d'une ordonnance rendue sur requête, formées devant la juridiction des référés du tribunal de commerce de Bobigny ;
En toute hypothèse,
Confirmer l'ordonnance de référé rendue en date du 14 janvier 2025 par le président du tribunal de commerce de Bobigny en l'ensemble de ses dispositions et notamment en ce qu'elle a rejeté les demandes en rétractation partielle de l'ordonnance rendue sur requête en date du 2 avril 2024 et déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance critiquée, une telle demande étant indéterminée ;
Débouter Mme [R], MM. [U], [B] et [V] et la société M&KZN de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
Y ajoutant,
Condamner Mme [R], MM. [U], [B], [V], la société Eurodialyse et la société M&KZN solidairement, à payer, chacun, la somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamner solidairement Mme [R], MM. [U], [B], [V] et la société M&KZN aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Stéphane Cathely, avocat au Barreau de Paris, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 9 octobre 2025, la société Dialoise et la société Nephros demandent à la cour, sur le fondement des articles 31 et 325 et suivants du code de procédure civile, de :
Confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise du 14 janvier 2025 (confirmant l'ordonnance du 2 avril 2024) ;
Débouter M. [U], la société M&KZN, M. [B], Mme [R] et M. [V] de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions ;
Les condamner solidairement aux entiers dépens de première instance et d'appel ;
Les condamner solidairement à verser aux sociétés la Dialoise et Nephros, chacune, la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
La société Compagnie générale de santé n'a pas constitué avocat. M. [U] et la société M&KZN Holding lui ont fait signifier leur déclaration d'appel par acte de commissaire de justice du 10 mars 2025 et leurs conclusions par acte du 29 avril 2025 (remis à personne morale).
L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 octobre 2025, date de l'audience des plaidoiries, avant l'ouverture des débats et sans opposition des parties.
SUR CE, LA COUR
Sur le respect de la procédure d'appel
Les appelants demandent qu'il soit jugé que leur appel n'est pas caduc à l'égard de Mme [R] et que les conclusions d'appel incident de Mme [R] signifiées le 21 juillet 2025 sont recevables.
Cependant, contrairement à ce que les appelants exposent dans leurs écritures, la caducité de la déclaration d'appel n'est pas sollicitée par la société Eurodialyse, ni dans le dispositif de ses conclusions n°2 du 15 septembre 2025 auxquelles les appelants se réfèrent, ni en tout état de cause dans le dispositif de leurs dernières conclusions du 6 octobre 2025 qui saisit la cour.
Il n'y a donc pas lieu de répondre à ce moyen, la cour n'étant saisie d'aucune prétention de ce chef.
Sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Eurodialyse
La société Eurodialyse soutient à titre principal, sur le fondement de l'article 496 du code de procédure civile, que la demande de rétractation de l'ordonnance litigieuse formée par M. [U] et la société M&KZN est irrecevable, ceux-ci ayant saisi par leur assignation la juridiction des référés (« la chambre des référés ») aux lieu et place du juge des requêtes seul compétent pour connaître de la demande de rétractation de l'ordonnance rendue sur requête. Elle ajoute que le juge des référés saisi a d'ailleurs rendu sa décision au visa des articles 808, 809 et 875 du code de procédure civile et il n'a pas été sais de la seule demande de rétractation mais aussi de demandes outrepassant la compétence juridictionnelle du juge des requêtes (la nullité de tous les actes subséquents à cette ordonnance). Elle se réfère à une décision de la Cour de cassation (Civ. 2ème, 19 mars 2020, n° 19-11.323) qui sanctionne cette erreur de droit par l'irrecevabilité des demandes ainsi formées.
Les appelants opposent d'abord l'irrecevabilité de cette « exception d'irrecevabilité » au visa des articles 73 et 74 du code de procédure civile, faute d'avoir été soulevée in limine litis avant tout débat au fond. Ils font ensuite valoir, en substance, que la procédure dite de « référé-rétractation » emprunte à la procédure de référé et que selon la Cour de cassation, la demande de rétractation qui est portée devant le juge des référés est recevable dans la mesure où il s'agit du même juge que le président de la juridiction qui a fait droit à la requête (le président du tribunal de commerce).
Le moyen soulevé par la société Eurodialyse s'analyse pas en une exception de procédure mais en une fin de non-recevoir.
Elle n'avait donc pas à être présentée avant toute défense au fond en application de l'article 74 du code de procédure civile lequel est applicable aux exceptions de procédure.
Conformément à l'article 123 du même code, cette fin de non-recevoir pouvait être présentée en tout état de cause, y compris pour la première fois en cause d'appel.
Il résulte de l'article 496 alinéa 2 du code de procédure civile que seul le juge des requêtes qui a rendu l'ordonnance peut être saisi d'une demande de rétractation de celle-ci.
En l'espèce, M. [U] et la société M&KZN Holding ont saisi le président du tribunal de commerce de Bobigny par une assignation en référé-rétractation de l'ordonnance rendue le 2 avril 2024 par ce même président du tribunal de commerce de Bobigny, cela au visa des articles 496 et 497 du code de procédure civile.
Ce faisant ils ont bien saisi le même juge que celui qui a statué sur requête. Leur action est recevable.
La jurisprudence de la Cour de cassation à laquelle se réfère la société Eurodialyse (Civ. 2ème, 19 mars 2020, n° 19-11.323) n'a pas la portée qu'elle lui prête. Dans cette espèce le juge des référés avait été saisi par une société d'une demande de mainlevée du séquestre des documents appréhendés en exécution d'une ordonnance sur requête, et la société défenderesse avait formé, à titre reconventionnel, une demande en rétractation de cette ordonnance. Cette demande reconventionnelle était irrecevable dès lors qu'elle avait été formée devant le juge des référés initialement saisi, qui n'était pas le juge des requêtes.
Sur la demande de rétractation
Selon l'article 493 du code de procédure civile, l'ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler la partie adverse.
Il résulte de l'article 496 du même code que s'il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l'ordonnance.
L'article 497 prévoit que le juge a la faculté de modifier ou de rétracter son ordonnance, même si le juge du fond est saisi de l'affaire.
Le juge saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête est investi des attributions du juge qui l'a rendue et doit, après débat contradictoire, statuer sur les mérites de la requête.
Saisi de la demande de nullité des mesures d'instruction exécutées sur le fondement de l'ordonnance sur requête dont il prononce la rétractation, le juge doit constater la perte de fondement juridique de ces mesures et la nullité qui en découle.
L'instance en rétractation a pour seul objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire, de sorte que la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet.
Au cas présent, les appelants sollicitent la rétractation de l'ordonnance rendue sur requête le 2 avril 2025 pour deux motifs:
Le non-respect du principe de la contradiction, ni la requête du 25 mars 2024 ni l'ordonnance du 2 avril 2024 n'expliquant en quoi les circonstances exigeaient que la mesure ne soit pas prise contradictoirement ;
L'administrateur provisoire ne pouvait se voir conférer le pouvoir d'engager une procédure de cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse, s'agissant d'un acte de disposition majeur nécessitant l'accord des associés et qui dès lors dépasse les pouvoirs de l'administrateur provisoire. Cette procédure a été décidée hâtivement, alors qu'il pouvait être décidé de renouveler le mandat de de gestion de la société La Dialoise pour laisser aux actionnaires un temps suffisant pour finaliser leur accord sur la gouvernance de la société, laquelle a toujours été in bonis et dont le fonctionnement n'a jamais été bloqué. En outre, la vente du fonds de commerce a été conclue au bénéfice de la société La Dialoise à des conditions de prix particulièrement défavorable à société Eurodialyse et ses associés. Aucune situation de péril imminent ne justifiait la mise en 'uvre de cette procédure de cession du fonds de commerce. C'est par pure opportunité que Me [K] se réfugie derrière l'[Localité 16] pour justifier son excès de pouvoir, alors que cet organisme n'a aucune compétence pour apprécier la validité d'une cession de fonds de commerce.
Il convient d'abord de rappeler que l'administrateur judiciaire provisoire est, selon l'article L.811-1 du code de commerce, un mandataire chargé par décision de justice d'administrer les biens d'autrui ou d'exercer des fonctions d'assistance ou de surveillance dans la gestion de ces biens. Selon la Cour de cassation, il est investi des pouvoirs conférés par la loi à un dirigeant social, sa mission de gestion et d'administration entraîne le dessaisissement des organes sociaux en place.
L'étendue de sa mission est déterminée par le juge et peut être variable. Il peut lui être confié une mission de gestion courante mais il peut aussi être spécialement autorisé, dans le cadre de sa mission initiale de gestion courante, à faire des actes spéciaux autres que de gestion courante tels que des actes de disposition comme la réalisation d'un actif, si un tel acte est indispensable à la survie de l'entreprise. En effet, c'est la mesure d'administration provisoire qui a une nature conservatoire, ce qui ne veut pas dire que l'administrateur ne peut être habilité à passer que des actes de nature conservatoire.
Au cas présent, lors de sa désignation par ordonnance de référé du 28 février 2022, Me [K] s'est vu confier la mission suivante : « administrer provisoirement tant activement que passivement la société Eurodialyse, avec les pouvoirs les plus étendus selon les délais et usages de commerce et cela jusqu'au dépôt du rapport de l'expert-comptable », étant rappelé que depuis cette date sa mission a été renouvelée à plusieurs reprises indépendamment de cette expertise comptable.
S'il est certain que dans le cadre de cette mission générale d'administration Me [K] n'aurait pu de son propre chef décider de mettre en 'uvre la réalisation d'un actif de la société Eurodialyse, en l'occurrence son fonds de commerce, il le pouvait sur autorisation spéciale du président du tribunal de commerce, qu'il a requise et qui lui a été donnée par l'ordonnance litigieuse du 2 avril 2024 laquelle, pour rappel, lui accorde l'autorisation de: « rechercher des acquéreurs en vue de la cession du fonds de commerce de la SAS Eurodialyse et fixer la date de réception des offres au 30 juin 2024, permettant d'escompter voir aboutir la mise en 'uvre de la reprise de l'Etablissement avant le 31 décembre 2024. »
Aucun excès de pouvoir n'a donc été commis par l'administrateur provisoire qui a agi sur autorisation judiciaire, laquelle a été donnée dans l'intérêt de la société Eurodialyse afin d'assurer sa survie par la préservation de son principal actif constitué de son fonds de commerce, lequel était exposé à un péril imminent.
Il convient en effet de rappeler que l'activité de soins par dialyse qu'exerce la société Eurodialyse est soumise à l'autorisation de l'[Localité 16] (Agence Régionale de Santé), qui peut refuser de renouveler son autorisation d'activité de soins à un centre de dialyse même s'il bénéficie, comme la société Eurodialyse, de la certification de la Haute Autorité de Santé.
Or, par courrier du 9 septembre 2022 l'[Localité 16] répondait à Me [K], qui à l'époque sollicitait son avis sur la mise en place du mandat de gestion qu'il projetait de conférer à la société La Dialoise, que si l'Agence n'est pas compétente pour s'immiscer dans la gouvernance d'une société privée, elle comprend de la situation de la société (toujours dépourvue de gouvernance du fait du conflit entre les associés) que sans la mise en place d'un tel mandat de gestion la prise en charge et la continuité des soins des parties pourraient ne plus être assurées de sorte que, bien entendu, elle ne s'oppose pas à la mise en place de ce mandat de gestion, concluant sa lettre dans les termes suivants: « La qualité et la sécurité de la prise en charge des patients devant être la priorité de tous, nous comptons sur vous et sur les associés de la SAS Eurodialyse pour que la situation soit stabilisée le plus rapidement possible, à défaut de quoi nous serons obligés d'en tirer les conséquences sur le devenir de l'autorisation d'activité de soins détenue par la SAS. »
L'[Localité 16] conditionnait ainsi le renouvellement de l'autorisation d'activité du centre Eurodialyse à la stabilisation de la gouvernance de la société.
Dans un courrier adressé le 5 septembre 2024, l'[Localité 16] répondait au conseil de Me [K] qui l'informait de la réalisation en cours de la cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse :
« (')
Aujourd'hui, si l'activité sanitaire d'Eurodialyse est sécurisée grâce aux actions susvisées (référence aux actions menées par Me [K]), la mésentente persistante entre les associés de la société Eurodialyse semble mettre en péril l'existence même de cette société.
Comme vous le savez, l'Agence ne saurait intervenir sur les modalités de gouvernance d'une société privée ou la cession de son fonds de commerce par exemple. Dans ces conditions, il n'est donc bien entendu pas envisageable de conditionner le renouvellement éventuel de l'autorisation de traitement de l'IRC d'Eurodialyse à une quelconque cession de son fonds de commerce.
En revanche, l'Agence a notamment pour mission de veiller au respect des dispositions légales et réglementaires concernant l'obtention, l'exploitation et le renouvellement des autorisations d'activités de soins. Le renouvellement d'une telle autorisation n'est pas automatique et il peut être refusé notamment si le dossier concerné présente un défaut de qualité ou de sécurité. Or une incertitude quant à la pérennité de l'entité titulaire de l'autorisation par exemple nous semble constituer un défaut majeur de sécurité pour une activité de soins concernant des patients très fragiles (').
Dans ces conditions, renouveler l'autorisation de traitement d'IRC d'une structure dont la gouvernance ne serait pas stabilisée au moment du dépôt du dossier conduirait à prendre un risque pour la sécurité des prises en charge. Aussi, compte tenu de la situation actuelle, à défaut de garantie quant à la pérennité de la SAS Eurodialyse, l'Agence ne pourrait émettre que les plus vives réserves sur les suites qui seraient données à la demande de renouvellement de l'autorisation de traitement de l'IRC d'Eurodialyse, demande qui devra obligatoirement être déposée par les titulaires avant le 7 février 2025 en vue de son examen par les services de l'Agence. » (souligné par la cour)
L'administrateur provisoire se trouvait ainsi confronté à la nécessité de présenter avant le 7 février 2025 à l'[Localité 16] la demande de renouvellement de l'autorisation d'activité de la société Eurodialyse, et afin d'obtenir cette autorisation de présenter à cette autorité les garanties d'une stabilisation de la gouvernance de la société.
Or, compte tenu de la persistance de la mésentente entre les associés faisant obstacle à la désignation d'un nouveau dirigeant à la société Eurodialyse (lors de l'assemblée générale des associés du 21 juin 2024 la majorité requise par les statuts n'a pas été réunie pour désigner le président et la candidature de M. [U] a de nouveau été rejetée), et de la prochaine échéance de renouvellement de l'autorisation à donner par l'[Localité 16] (mai 2025 au plus tard), afin d'obtenir cette autorisation conditionnant la poursuite de l'activité de soins de la société Eurodialyse Me [K] devait présenter à l'[Localité 16], au plus tard le 7 février 2025, date limite du dépôt de la demande de renouvellement de l'autorisation d'activité, une solution garantissant la pérennité de la société Eurodialyse,
A cette fin, comme il l'explique dans sa requête adressée au président du tribunal de commerce ayant donné lieu à l'ordonnance litigieuse du 2 avril 2024, Me [K], après un exposé détaillé de la situation de la société Eurodialyse, explique qu'en l'absence d'évolution de la position des associés dont le différend n'entraine pas seulement une vacance dans la gouvernance de la société mais porte également atteinte à son fonctionnement, l'absence d'affectio societatis étant susceptible d'entraîner la dissolution de la personne morale, il a envisagé deux solutions, soit la cession des actions composant le capital de la société Eurodialyse, soit la cession de son fonds de commerce, optant pour la seconde solution dont la mise en 'uvre était plus simple et plus rapide alors que « la préservation de la personne morale de la société Eurodialyse suppose qu'une solution pérenne puisse être arrêtée de manière certaine dès avant l'échéance d'autorisation de l'ARS ». Me [K] indiquait aussi dans sa requête que le mandat de gestion de la société La Dialoise expirait le 30 septembre 2024 et pouvait être renouvelé pour un an jusqu'au 30 septembre 2025 mais que cette échéance au 30 septembre 2025 n'était pas compatible avec l'éventuelle expiration de l'autorisation de l'[Localité 16].
Ce faisant, Me [K] a exposé dans sa requête les circonstances qui justifiaient la nécessité de déroger au principe de la contradiction, compte tenu de l'urgence à mettre en 'uvre la procédure de cession du fonds de commerce de la société Eurodialyse pour que celle-ci puisse aboutir avant la date du 7 février 2025 fixée par l'[Localité 16] pour le dépôt de la demande de renouvellement de l'autorisation de l'activité de soins. En reprenant ces circonstances dans son ordonnance et en visant la requête, le président du tribunal de commerce a lui-même motivé la nécessité de déroger au principe du contradictoire.
Comme le souligne la société Eurodialyse, le caractère conflictuel des relations entre associés et leur opposition aux solutions proposées par l'administrateur auraient conduit, si celui-ci avait agi par voie de référé, à allonger de manière certaine la durée de la procédure de sorte que le risque était trop important que la mesure de cession du fonds de commerce, nécessaire à la conservation de cet actif, ne puisse intervenir dans le délai contraint par l'échéance imposée par l'[Localité 16]. A cet égard, il doit être observé que l'acte de cession du fonds de commerce a été signé le 18 novembre 2024, soit deux mois et demi seulement avant la date limite du 7 février 2025 impartie par l'[Localité 16] pour déposer la demande de renouvellement de l'activité de soins de la société Eurodialyse.
Me [K] a en outre justifié dans sa requête de la nécessité de la mesure soumise à l'autorisation du juge ayant pour finalité, dans l'intérêt de la société Eurodialyse, de sauvegarder son fonds de commerce qui, sans autorisation donnée par l'[Localité 16] de poursuivre son activité de soins, serait perdu. L'incapacité des associés à trouver un accord sur la gouvernance de la société était en effet indiscutable au moment du dépôt de la requête et perdure d'ailleurs à ce jour, car comme le souligne la société Eurodialyse le rapprochement qui s'est depuis opéré entre les associés n'a pour objet que de s'opposer ensemble à la cession du fonds de commerce dans le cadre de la présente instance.
Enfin, il convient de rappeler qu'une mesure d'administration judiciaire provisoire n'a pas vocation à durer dans le temps, alors que Me [K] est désigné depuis 2022, cette mesure ayant pour finalité de tenter de résoudre la crise et d'écarter le péril qui menace la société, la perte durable de l'affection societatis comme en l'espèce ne pouvant qu'aboutir à la dissolution de la société, issue que Me [K] a cherché à éviter par la mesure sollicitée et judiciairement autorisée, le mandat de gestion mis en place avec la société La Dialoise ne pouvant lui-même qu'être provisoire.
C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de M. [U] et la société M&KZN Holding tendant à la rétractation de l'ordonnance rendue sur requête le 2 avril 2024. L'ordonnance sera confirmée de ce chef.
Par voie de conséquence, est sans objet leur demande tendant à voir juger la perte de fondement juridique des mesures ordonnées et la nullité de tous les actes subséquents à cette ordonnance du 2 avril 2024. L'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevable cette demande.
Sur les mesure accessoires
Le premier juge a justement condamné MM. [U] et [B] et la société M&KZN Holding, parties perdantes, aux dépens de la première instance et à payer à la société Eurodialyse la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Ces condamnations doivent toutefois être prononcées in solidum et non solidairement.
Perdant en appel, M. [U], la société M&KZN Holding, Mme [R], MM. [B] et [V] seront condamnés in solidum aux dépens de l'instance d'appel et à payer, ensemble, la somme de 5.000 euros à la société Eurodialyse.
Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des sociétés La Dialoise et Nephros leurs frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant dans les limites de sa saisine,
Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la société Eurodialyse,
Confirme l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance sur requête du 2 avril 2024, et sauf en ce qu'elle a prononcé solidairement la condamnation de MM. [U] et [B] et de la société M&KZN Holding au titre des dépens et frais irrépétibles,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Dit sans objet la demande de nullité des actes subséquents à l'ordonnance sur requête du 2 avril 2024,
Condamne in solidum MM. [U] et [B] et la société M&KZN Holding aux dépens de première instance et au paiement pour cette instance de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum M. [U], la société M&KZN Holding, Mme [R] et MM. [B] et [V] aux dépens de l'instance d'appel,
Les condamne in solidum à payer, ensemble, la somme de 5.000 euros à la société Eurodialyse au titre de ses frais irrépétibles exposés en appel,
Rejette toute autre demande.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE