CA Colmar, ch. 2 a, 13 novembre 2025, n° 22/00226
COLMAR
Arrêt
Autre
MINUTE N° 555/2025
Copie exécutoire
aux avocats
Le
La greffière
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/00226 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HX4L
Décision déférée à la cour : 14 Décembre 2021 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG
APPELANTES sous le n° 22/226 et intimées sous le n° 22/705 :
La S.A.R.L. [Z] [J] PROMOTION IMMOBILIER, en redressement judiciaire,
ayant son siège social [Adresse 4]
La SELARL CM [ER] & N. [N], prise en la personne de Me [X] [S] [ER], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la Sarl [Z] [J] Promotion immobilière
ayant son siège social [Adresse 3]
La SELARL [B] ET ASSOCIES ès qualités de mandataire judiciaire de la Sarl [Z] [J] Promotion immobilière prise en la personne de [V] [B]
ayant son siège social [Adresse 7]
représentées par Me Eulalie LEPINAY, avocat à la cour.
INTIMÉE sous le n° 22/226 et appelante sous le n° 22/705 :
Madame [P] [G] veuve [O], sous tutelle, représentée par sa tutrice, Madame [M] [K], demeurant [Adresse 16]
représentée par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour
APPELEE EN INTERVENTION FORCEE :
Madame [M] [K], tutrice de Mme [P] [G] veuve [O], intimée sous le n° 22/226
[Adresse 12]
[Localité 10]
représentée par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour
INTIMÉS sous le n° 22/226 :
Maître [D] [Y] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl Atelier Blanc Architecture, intimé sous le n° 22/226
exerçant son activité [Adresse 5]
assigné le 21 juin 2022 à domicile, n'ayant pas constitué avocat
Maître [A] [I] es-qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [E] ARCHITECTURE, intimé sous le n° 22/226
SAS DMJ - Mandataires Judiciaires [Adresse 6]
[Localité 8]
représentée par Me Valérie SPIESER-DECHRISTE de la SELARL V² AVOCATS, avocat à la cour
S.A.R.L. ATELIER BLANC ARCHITECTURE en liquidation judiciaire, intimée sous le n° 22/226
[Adresse 11]
[Localité 9]
tentative d'assignation le 23 juin 2022
INTIMÉE sous le n° 22/226 et sous le n° 22/705 :
La S.A. KS CONSTRUCTION prise en la personne de son représentant légal,
ayant son siège social [Adresse 2]
représentée par Me Loïc RENAUD de la SELARL ARTHUS, avocat à la cour
La S.A. ALLIANZ IARD prise en la personne de son représentant légal,
ayant son siège social [Adresse 1]
représentée par Me Valérie SPIESER-DECHRISTE de la SELARL V² AVOCATS, avocat à la cour
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 21 Mars 2025, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère
Madame Nathalie HERY, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Sylvie SCHIRMANN
ARRÊT rendu par défaut
- prononcé publiquement après prorogation du 04 septembre 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Emeline THIEBAUX, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Selon acte de vente en l'état futur d'achèvement du 2 mai 2012, la société [Z] [J] promotion immobilière (ci-après la société PSPI) a vendu aux époux [T] [O] et [P] [W] un appartement au sein de la Résidence '[Adresse 13]' à [Localité 15], devant être livré au cours du quatrième trimestre 2013.
Sont intervenus à l'opération de construction :
- l'EURL [L] [E] architecture, assurée auprès de la société Allianz, en qualité de maître d'oeuvre,
- la SARL Atelier Blanc architecture, également assurée auprès de la société Allianz, maître d'oeuvre, qui a succédé à la société [L] [F] architecture, et a également été chargée d'une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination, conjointement avec la société KS constructions,
- la société KS construction en tant qu'entreprise générale et chargée d'une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination, conjointement avec la société Atelier Blanc architecture.
Les acquéreurs ont été convoqués en vue d'une livraison le 20 juin 2014. L'immeuble n'étant pas achevé à cette date, la livraison n'a pas eu lieu.
Selon exploit du 21 janvier 2015, les époux [O] ont fait citer la société PSPI devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins d'obtenir sa condamnation à livrer l'appartement, sous astreinte.
La livraison étant intervenue le 12 février 2015, les époux [O] ont alors sollicité une provision à valoir sur l'indemnisation de leur préjudice consécutif au retard de livraison.
Par arrêt du 22 juin 2017, la cour de céans, infirmant une ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg en date du 30 juin 2015, a condamné la société PSPI au paiement d'une provision de 12 000 euros à valoir sur le préjudice de jouissance subi par les époux [O], et ces derniers solidairement au paiement d'une provision de 15 800 euros à la société PSPI au titre du solde du prix, et ordonné la compensation des créances réciproque dans la limite de la plus faible d'entre elles.
Par exploit du 21 avril 2017, les époux [O] ont fait citer la société PSPI devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins d'indemnisation de leur préjudice.
La société PSPI a successivement appelé en cause Me [I], en qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [E] architecture, la société Allianz, la SARL Atelier Blanc architecture, la SA KS construction, et enfin Me [Y], en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Atelier Blanc architecture.
La société PSPI ayant été placée en redressement judiciaire le 18 mai 2020, l'instance a été interrompue, puis reprise après intervention volontaire de la SELAS [ER] et [N], en qualité d'administrateur judiciaire de la société PSPI et de la SELARL [B] et associés, en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement en date du 14 décembre 2021, le tribunal judiciaire a :
- rappelé que la procédure était interrompue à l'égard de M. [T] [O] (décédé) ;
- déclaré Mme [P] [R], épouse [O] irrecevable en sa demande de condamnation de la SARL PSPI à faire lever les réserves résultant du défaut de fixation du panneau de la douche et de fonctionnement du visiophone ;
- déclaré Mme [P] [R], épouse [O] recevable en ses demandes pour le surplus ;
- fixé la créance de Mme [P] [G], épouse [O] au passif de la SARL PSPI à la somme de 6 200 euros se décomposant ainsi :
- 3 700 euros au titre du préjudice de jouissance lié au retard de livraison de l'appartement,
- 500 euros au titre du préjudice de jouissance lié à la levée tardive des réserves,
- 2 000 euros au titre du préjudice moral ;
- condamné Mme [P] [G], épouse [O] à payer à la SARL PSPI la somme de 15 800 euros, avec intérêts de 1 % par mois de retard à compter du 3 mai 2016 et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
- débouté les parties de leurs demandes pour le surplus ;
- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile
- fixé les dépens de la procédure au passif de la SARL PSPI ;
- ordonné l'exécution provisoire.
Le tribunal, après avoir constaté que la livraison était intervenue avec 14 mois de retard, a retenu que la société PSPI pouvait, conformément aux stipulations contractuelles, se prévaloir de 87 jours d'intempéries, ce qui ramenait le retard à 9 mois et une semaine, évalué le préjudice de jouissance subi du fait du retard à 7 400 euros, et a fixé la créance de Mme [G] à la moitié de cette somme, soit 3 700 euros.
S'agissant de la levée des réserves, le tribunal, après avoir écarté la forclusion, en retenant que l'assignation en référé avait interrompu le délai pour agir jusqu'à l'arrêt de la cour d'appel, a relevé que les réserves listées avaient été levées plus d'un an après la livraison ce qui justifiait une indemnité de 500 euros.
Le tribunal a considéré que la demande de levée des autres réserves, sous couvert d'une obligation de faire, était en réalité une demande en paiement, laquelle était irrecevable en application de l'article L.622-21 du code de commerce.
Enfin, il a estimé que l'incertitude quant à la date de livraison justifiait une indemnité de 2 000 euros pour préjudice moral.
Pour rejeter les appels en garantie formés par la société PSPI le tribunal a retenu que :
- le lien de causalité entre la faute reprochée à la société [L] [E] architecture consistant en une absence de relevé des existants au sous-sol, et le retard n'était pas démontré,
- aucun délai d'exécution ne figurait dans le contrat de maîtrise d'oeuvre signé avec la société Atelier Blanc architecture,
- aucune faute de la société KS construction n'était établie.
Le tribunal a accueilli la demande reconventionnelle de la société PSPI dirigée contre Mme [P] [R], veuve [O] au titre du solde du prix relevant que les problèmes subsistants signalés dans le procès-verbal de levée des réserves n'avaient pas fait l'objet de réserves à la livraison et ne pouvaient donc justifier le non-paiement du prix.
La société PSPI, la SELAS [ER] - [N], en sa qualité d'administrateur judiciaire de cette société et la SELARL [B] et associés, en sa qualité de mandataire judiciaire de cette société ont interjeté appel de ce jugement le 14 janvier 2022, en tant qu'il a fixé la créance de Mme [P] [R], veuve [O] au passif de la société PSPI à 6 200 euros et les dépens, et a débouté cette société de ses appels en garantie et de son action directe contre la société Allianz.
Mme [P] [R], veuve [O], assistée de sa curatrice, Mme [M] [K], a également interjeté appel de ce jugement le 17 février 2022, son appel portant sur toutes ses dispositions la concernant.
Les deux procédures ont été jointes le 7 mars 2023.
Mme [O] a été placée sous tutelle par jugement du 25 mars 2024.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 4 mars 2025, et l'affaire fixée à l'audience de plaidoiries du 21 mars 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 14 février 2025, Mme [P] [R], veuve [O], représentée par sa tutrice, Madame [K] demande à la cour de déclarer son appel recevable et bien fondé, et de :
- annuler, subsidiairement, infirmer le jugement déféré du l4 décembre 2021 du tribunal judiciaire de Strasbourg en ce qu'il a :
* déclaré Mme [P] [R], épouse [O] irrecevable en sa demande de condamnation de la SARL PSPI à faire lever les réserves résultant du défaut de fixation du panneau de la douche et de fonctionnement du visiophone ;
* fixé la créance de Mme [P] [G] épouse [O] au passif de la SARL PSPI à la somme de 6 200 euros ;
* condamné Mme [P] [G] épouse [O] à payer à la SARL PSPI la somme de 15 800 euros avec intérêts de 1 % par mois de retard à compter du 3 mai 2016 et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
* débouté Mme [G] de ses demandes pour le surplus ;
Statuant à nouveau et usant, le cas échéant, de son pouvoir d'évocation,
- fixer la créance de Madame [O], représentée par sa tutrice au passif de la société [Z] [J] Promotion Immobilière, en sus des montants fixés en première instance, à la somme supplémentaire de 13 000,00 euros se décomposant comme suit :
- 7 500,00 euros au titre de son préjudice de jouissance lié au retard de livraison de l'appartement ;
- 2 500,00 euros au titre du préjudice de jouissance lié à la levée tardive des réserves ;
- 3 000,00 euros au titre du préjudice moral ;
- condamner la société [Z] [J] Promotion Immobilière à faire lever les réserves résultant du défaut de fixation du panneau de la douche et de fonctionnement du visiophone sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé un délai de 15 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir ;
- déclarer Madame [O], représentée par sa tutrice, recevable et bien fondé en son exception d'inexécution qu'elle oppose à la société [Z] [J] Promotion Immobilière ;
- débouter par suite, la société [Z] [J] Promotion Immobilière de sa demande en paiement du solde du prix de vente de l'appartement acquis par Madame [O] ;
Subsidiairement,
- déclarer la société [Z] [J] Promotion Immobilière irrecevable, subsidiairement mal fondée, en sa demande de paiement d'intérêts moratoires sur le solde du prix précité et en conséquence, la débouter desdits intérêts, très subsidiairement, les fixer au taux de l'intérêt légal ;
- condamner la société [Z] [J] Promotion Immobilière à payer à Madame [O], représentée par sa tutrice une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de 1'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
- rejeter toutes conclusions plus amples ou contraires.
Au soutien de sa demande de nullité du jugement, Mme [P] [G], veuve [O] fait valoir, au visa de l'article 468 du code civil, que le jugement déféré a été rendu alors qu'elle était sous curatelle renforcée depuis le 5 avril 2019 et n'était pas assistée de sa curatrice, Mme [K], peu important que la société PSPI n'ait pas eu connaissance de cette circonstance et que le jugement ait été dûment signifié à Mme [K], curatrice.
Elle demande que la cour statue sur évocation et soutient en substance que :
- la demande de levée des réserves signalées à la 'réception' concernant le panneau de douche et le visiophone, sous astreinte, n'est pas une demande en paiement se heurtant à l'interdiction des poursuites individuelles, et ces réserves n'ayant pas été levées, sa demande devra donc être accueillie ;
- selon le contrat de vente en l'état futur d'achèvement, les jours d'intempéries susceptibles de proroger le délai de livraison doivent être dûment constatés par une attestation de l'architecte ou d'un bureau d'études, ce qui n'est pas le cas, de sorte qu'elle peut prétendre à une indemnisation au titre de 14 mois de retard sur une base de 800 euros par mois, ce montant correspondant à la valeur locative de l'appartement ;
- le montant qui lui a été alloué à titre d'indemnisation du retard dans la levée des réserves est insuffisant au regard du préjudice subi, l'absence de garde-corps de la terrasse l'ayant empêchée d'en jouir ; un montant de 250 euros par mois n'est pas excessif ; à tout le moins, le montant alloué devra être doublé puisqu'elle vient également aux droits de son défunt mari ;
- il en est de même pour le préjudice moral dont le montant doit être doublé ;
- la société PSPI n'ayant pas exécuté totalement ses obligations, elle est en droit de ne pas exécuter les siennes ;
- la consignation du prix entre les mains du notaire vaut paiement et a arrêté le cours des intérêts ;
- aucun intérêt sur des intérêts ne peut être réclamé, la société PSPI opérant une capitalisation subreptice contraire aux dispositions du code civil.
* Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 janvier 2025, la société PSPI représentée par son gérant, la SELAS [ER] - [N], en sa qualité d'administrateur judiciaire de cette société, et la SELARL [B] et associés, en sa qualité de mandataire judiciaire de cette société demandent que soient écartées les conclusions du 30 décembre 2024 pour violation du principe du contradictoire, et l'infirmation du jugement, en tous ses chefs, autres que l'irrecevabilité de la demande de levée des réserves et la condamnation de Mme [P] [W], veuve [O] au titre du solde du prix et que la cour, statuant à nouveau, :
- déboute Mme [P] [W], veuve [O], représentées par sa tutrice, de toutes ses demandes ;
- fixe la créance de la société PSPI au passif de la liquidation judiciaire de l'EURL [L] [F] architecture et au passif de la société Atelier Blanc architecture au montant des condamnations prononcées en principal, intérêts, frais et accessoires dont elle pourra être tenue à l'égard de Mme [P] [W], veuve [O] ;
- condamne la société KS construction et la société Allianz à la garantir des mêmes condamnations ;
- condamne la société KS construction et la société Allianz solidairement à prendre en charge, à titre de garantie, le montant de 12 000 euros prononcé à titre de provision par la cour d'appel ;
- condamne Mme [P] [W], veuve [O], assistée de son curatrice Mme [M] [K], à payer à la Société PSPI le montant du solde du prix de vente de 15 800 euros assorti des intérêts au taux de 1% par mois de retard, qui s'évalue au 1er octobre 2022 au montant de 26 627,50 euros, dont les intérêts conventionnels de 1 % par mois continuent de courir ;
- ordonne la capitalisation des intérêts ;
- condamne Mme [P] [W], veuve [O] assistée de sa curatrice, Mme [M] [K], à payer à la société PSPI la somme de 834,01 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de procédure augmentée des intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;
En tout état de cause,
- condamne la compagnie Allianz à payer à la société PSPI, une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts du préjudice spécifique subi avec les intérêts de droit à compter du jour de la décision à intervenir ;
- déboute Mme [O], la compagnie Allianz, la société KS construction et Me [A] [I], en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [F] architecture, de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre la société PSPI, la SELAS [ER] & [N], prise en la personne de Me [H] [ER], et la SELARL [B] & Associes, prise en la personne de Me [V] [B] ;
- condamne Mme [O], assistée de sa curatrice Mme [M] [K], à restituer à la société PSPI la somme de 1 500 euros payée par cette dernière lors de l'incident de procédure au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne in solidum Mme [O], assistée de sa curatrice Mme [M] [K], la société KS Construction et la compagnie Allianz aux entiers frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement à la société PSPI d'une somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par note du 20 mars 2025, le conseil de la société PSPI et des mandataires judiciaires a précisé que Maître [H] [ER], de la SELAS [ER]-[N], intervenait désormais en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société PSPI.
Invoquant l'adage fraus omnia corrumpit, ils font valoir que Mme [O] ne peut demander l'annulation du jugement puisque c'est elle qui a introduit la procédure, et qu'elle n'a pas fait connaître le fait qu'elle était sous curatelle, alors qu'elle était représentée par un avocat. De plus, le jugement a été signifié à sa curatrice.
Au fond, ils font valoir que :
- la demande d'indemnisation du retard doit être rejetée, car l'acte de vente en l'état futur d'achèvement ne prévoit pas d'indemniser l'acquéreur en cas de retard de livraison ; par ailleurs, les jours d'intempéries peuvent être listés à partir des pièces produites par la société KS construction ; en outre, le retard est, en tout état de cause, lié aux manquements de la maîtrise d'oeuvre, qui ont nécessité de reprendre une partie du programme immobilier ;
- rien ne justifie d'augmenter le montant alloué par le tribunal au titre de l'indemnisation du retard de levée des réserves, et Mme [P] [W], veuve [O] ne peut prétendre à la part de son défunt mari,
- le même raisonnement doit être tenu s'agissant du préjudice moral,
- la procédure collective ne permet pas de condamner au paiement d'une astreinte, de sorte que la demande de condamnation à lever de prétendues réserves, sous astreinte, est irrecevable,
- le jugement doit être confirmé sur les sommes dues par Mme [P] [W], veuve [O] qui s'élèvent désormais à 26 627,50 euros compte-tenu des intérêts, lesquels ont, à tout le moins, couru entre le 3 mai 2016 et le 12 juillet 2018.
Les intimés demandent ensuite l'infirmation du jugement en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité des maîtres d'oeuvre et de l'entreprise KS construction et demande leur garantie, ainsi que celle de la société Allianz, assureur de l'EURL [L] [F] architecture et de la société Atelier Blanc architecture. À cet égard, ils font valoir que :
- l'EURL [L] [F] architecture a commis différentes fautes, consistant en des erreurs de plans, une absence de relevé complet des existants, une prise en compte d'esquisses erronées s'agissant du sous-sol, une omission de tenir compte de poteaux de soutènement ce qui a empêché la réalisation de tous les garages prévus, et en l'absence d'aménagement des délais de livraison au regard de l'étendue du projet en prenant en considération la compatibilité des lieux avec le programme envisagé ;
- sa responsabilité a déjà été retenue par la cour dans différentes décisions, et ces fautes sont à l'origine des retards de livraison ;
- la société Atelier Blanc architecture, qui a succédé à l'EURL [L] [F] architecture, et la société KS construction se sont vu confier conjointement des missions d'ordonnancement, de pilotage et de coordination et étaient chargées du recalage des calendriers, la société Atelier Blanc architecture s'étant engagée à rattraper le retard ;
- la société KS construction n'a pas respecté les délais de livraison auxquels elle s'était engagée, et c'est à elle qu'il incombait d'achever les travaux.
Ils estiment enfin que la garantie de la société Allianz, assureur de l'EURL [L] [F] architecture, puis de la société Atelier Blanc architecture qui a repris son contrat, est due, et que les dommages dont Mme [P] [W], veuve [O] demande indemnisation qui sont des 'conséquences pécuniaires' au sens du contrat, ouvrent droit à garantie.
La société PSPI prétend par ailleurs avoir subi un préjudice spécifique du fait des manquements de l'EURL [L] [F] architecture puisqu'elle a dû faire face aux recours de nombreux acquéreurs ce qui a affaibli sa situation financière, et nuit à sa réputation.
* Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 mai 2024, la société Allianz et Me [I], en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [F] architecture demandent à la cour de déclarer l'appel de la société PSPI irrecevable, respectivement sa demande, en tant que dirigée contre Me [I], ès qualités, pour défaut de déclaration de créance, rejeter l'appel et confirmer le jugement en toutes ses dispositions. Ils concluent au débouté de la société PSPI et à sa condamnation au paiement de la somme de 7 500 euros à chacun d'eux sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Subsidiairement, ils demandent l'infirmation du jugement, qu'il soit jugé que la police souscrite par l'EURL [L] [F] architecture et celle souscrite par la société Atelier Blanc architecture ne pourront être mobilisées que dans les strictes limites de garantie, notamment de plafond et de franchise, et la condamnation de la société KS construction à les garantir, ainsi qu'à payer à chacun d'eux la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et celle globale de 3 500 euros au titre de son appel incident et en provoqué en garantie.
Ils concluent par ailleurs à l'irrecevabilité de l'appel incident et des demandes de la société PSPI, et au rejet des autres demandes, appels incidents et provoqués.
Ils font valoir que l'appel et les demandes de la société PSPI sont irrecevables en l'absence de déclaration de créance au titre de cette procédure.
Ils contestent toute faute de l'EURL [L] [F] architecture qui ne devait pas les plans de géomètre et l'existence d'un lien de causalité entre les prétendus manquements et le retard de livraison dont se plaint Mme [P] [G], veuve [O], lequel n'est pas lié au problème d'implantation de la cage d'escalier.
La société Allianz soutient que la société Atelier Blanc architecture a respecté ses engagements à l'égard de la société PSPI, et fait valoir que Mme [O] est tiers au contrat d'ordonnancement, pilotage et coordination, et que le recalage des calendriers est sans incidence sur la livraison et la levée des réserves.
Ils considèrent que les précédents arrêts de la cour de céans, qui concernent la problématique des parkings, sont sans emport sur la solution du présent litige.
La société Allianz estime qu'il n'y a aucune raison de mettre à sa charge la provision de 12 000 euros allouée par la cour, soulignant que le jugement se substitue à la décision prise en référé. Elle ajoute qu'elle n'est pas non plus concernée par le paiement du solde du prix, et que la demande de dommages et intérêts ne peut aboutir en l'absence de faute des maîtres d'oeuvre. Elle se prévaut enfin des limites de sa garantie qui ne couvre les préjudices immatériels que s'il s'agit de préjudices pécuniaires.
* Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 mars 2023, la société KS construction conclut au rejet de l'appel, à la confirmation du jugement, au rejet de l'appel en garantie de la société PSPI, de Me [I], ès-qualités, et de la société Allianz. Subsidiairement, elle demande la condamnation de la société Allianz, en qualité d'assureur de l'EURL [L] [F] architecture et de la société Atelier Blanc architecture, à la garantir. Elle sollicite la fixation et l'admission au passif de la société PSPI d'une créance à hauteur de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir qu'elle n'était pas tenue par les délais de livraison convenus par la société PSPI avec les acquéreurs qui lui sont inopposables, mais par les délais figurant dans son contrat, qu'elle a respectés ; que son délai d'exécution qui s'achevait au 22 février 2014 excédait le délai de livraison fixé au 31 décembre 2013 ; que son marché a fait l'objet de 17 avenants ; qu'il faut tenir compte des intempéries, qui ont conduit à reporter la date contractuelle de réception au 28 juillet 2015, or la livraison de l'appartement des époux [O] est intervenue antérieurement à cette date.
Elle conteste avoir commis une faute dans sa mission d'ordonnancement et de pilotage, soulignant que c'est la société PSPI qui s'était engagée à livrer l'appartement dans des délais incompatibles avec le déroulement du chantier, et qu'aucune faute de sa part n'est à l'origine du retard de livraison. Enfin, elle n'était pas tenue, en tant que locateur d'ouvrage, de lever les réserves formulées par les acquéreurs, cette obligation pesant sur le vendeur en l'état futur d'achèvement, la réception de ses travaux étant intervenue sans réserve. Elle conteste également la demande visant à mettre à sa charge la provision allouée par la cour et forme des appels en garantie.
* Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées ou signifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.
La société Atelier Blanc architecture a été assignée par exploit du 23 juin 2022, lequel n'a pu être remis à raison de la procédure collective. Me [Y], a été assigné, en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société, à domicile, le 21 juin 2022, les conclusions d'appel incident de la société KS construction lui ont été signifiées le 28 juin 2022 selon les mêmes modalités.
Ces parties n'ayant pas constitué avocat, il sera statué par défaut. Elles sont réputés s'approprier les motifs du jugement conformément à l'article 954, dernier alinéa du code de procédure civile.
MOTIFS
A titre liminaire, il n'y a pas lieu d'écarter les conclusions de Mme [P] [G], veuve [O] du 30 décembre 2024 et le bordereau de pièces joint, dans la mesure où le prononcé de l'ordonnance de clôture initialement prévu le 7 janvier 2025 a été reporté au 4 mars 2025 afin de permettre aux autres parties d'y répondre.
Il sera ensuite donné acte à la société [ER] et [N] de ce qu'elle intervient désormais en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société PSPI.
Enfin, il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour n'est tenue de statuer que sur les prétentions figurant au dispositif des dernières écritures des parties et n'a pas à répondre à des demandes tendant à voir 'dire et juger' ou 'constater' qui correspondent seulement à la reprise de moyens développés dans les motifs des conclusions et sont dépourvues d'effets juridiques.
1- Sur la recevabilité de l'appel de la société PSPI, de la SELAS [ER] & [N] et de la SELARL [B] et associés, contre Me [I], en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [E] architecture
Me [I], ès-qualités, fait valoir qu'en l'absence de déclaration de sa créance au passif de l'EURL [L] [E] architecture, l'appel de la société PSPI et des organes de sa procédure collective est irrecevable.
L'absence de déclaration de créance ne constituant pas un motif d'irrecevabilité de l'appel, il sera déclaré recevable.
Cependant, dès lors qu'il n'est pas justifié que la créance déclarée par la société PSPI au passif de la société [L] [E] architecture inclut le litige l'opposant aux époux [O], ce qui est contesté par Me [I], ès-qualités, et ne peut être déduit du seul montant déclaré, la cour ne peut que constater que la procédure n'a pas été régulièrement reprise et qu'elle demeure interrompue à l'égard de cette dernière société.
2- Sur la nullité du jugement
Conformément à l'article 468, alinéa 3 du code civil l'assistance du curateur est requise pour introduire une action en justice au nom de la personne protégée ou pour défendre à une telle action.
En l'espèce, l'action a été introduite devant le tribunal de grande instance de Strasbourg le 21 avril 2017 par les époux [O]. M. [T] [O] est décédé en cours de procédure, et Mme [P] [G], veuve [O] qui a poursuivi l'instance a été placée sous curatelle renforcée par jugement du 5 avril 2019.
Il ne ressort ni du jugement frappé d'appel, ni des pièces de la procédure, que le tribunal avait été informé de cette mesure de protection.
Mme [P] [G], veuve [O], représentée par sa tutrice, Mme [K], est dès lors recevable et bien fondée à demander l'annulation du jugement qui a été prononcé alors qu'elle n'était pas assistée de sa curatrice, sans que puisse lui être opposée une quelconque fraude qui résulterait de l'omission d'informer son conseil et la juridiction de cette circonstance, laquelle ne peut être retenue à l'égard d'une personne faisant l'objet d'une mesure de protection, le fait que le jugement ait été dûment signifié à Mme [K], curatrice, n'emportant pas régularisation de la procédure.
Le jugement sera donc annulé. Il n'y a toutefois pas matière à évocation, dès lors que par l'effet dévolutif de l'appel, la cour est saisie de l'entier litige et doit statuer au fond.
3- Sur la demande de Mme [O]
3-1 sur le préjudice de jouissance pour retard de livraison
Le retard de livraison est avéré dans la mesure où l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 2 mai 2012 prévoyait une livraison au cours du quatrième trimestre 2013, soit au plus tard le 31 décembre 2013, et qu'elle n'est intervenue que le 12 février 2015, soit avec 13 mois et 12 jours de retard, soit 377 jours.
La société PSPI et la société [ER] et [N], commissaire à l'exécution du plan, soutiennent qu'il convient toutefois de déduire les jours d'intempéries.
Mme [O] oppose que l'acte de vente en l'état futur d'achèvement prévoit, en page 24, que 'le délai sera, le cas échéant, majoré des journées d'intempéries prises en compte au sens de la réglementation du travail sur les chantiers du bâtiment, et que ces jours seront dûment constatés par une attestation de l'architecte ou du bureau d'études auquel les parties conviennent de se rapporter à cet égard'.
En l'espèce, aux termes du marché d'ordonnancement-pilotage-coordination du 21 février 2012, conclu entre la société PSPI, d'une part, la société Atelier Blanc architecture et la société KS constructions, conjointement, d'autre part, le contrôle des délais et la tenue à jour des relevés d'intempéries étaient dévolus à l'entreprise générale. C'est donc à cette dernière qu'incombait l'établissement du relevé des intempéries tel que visé dans la clause ci-dessus rappelée.
Il y a donc lieu de retenir le tableau récapitulatif des intempéries établi par cette société, conformément à sa mission, quand bien même n'est-elle ni un architecte, ni un bureau d'études, la convention précitée lui confiant une mission partielle de maîtrise d'oeuvre sur ce point. Ce tableau qui fait apparaître 87 jours d'intempéries est corroboré par un relevé Météo France.
Le retard imputable à la société PSPI s'établit donc à 377 - 87 = 290 jours.
Le fait que l'acte de vente ne prévoit pas de pénalités de retard ne prive pas l'acquéreur de la possibilité de demander indemnisation du préjudice que lui a causé le retard, le vendeur ayant ainsi manqué à ses obligations contractuelles. Le préjudice subi par les époux [O] qui ont été privés de la possibilité de jouir de l'appartement qu'ils avaient acquis est avéré. Il est en relation causale directe avec le manquement reproché à la société PSPI qui ne peut s'exonérer de sa responsabilité à l'égard des acquéreurs en invoquant d'éventuels manquements commis par la maîtrise d'oeuvre.
Mme [O] met en compte un montant de 800 euros par mois correspondant à la valeur locative de l'appartement, ce montant n'est discuté ni par la société PSPI, ni par les appelés en garantie.
La créance de Mme [O] au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance qu'elle a subi du fait du retard de livraison de l'appartement qu'elle avait acquis avec son époux, s'établit donc à un montant de 800 x 290/ 30 = 7 733 euros, qui sera toutefois limité à 7 500 euros au vu du libellé de la demande de Mme [O], le jugement étant annulé. La créance de Mme [O] au titre du préjudice découlant du retard de livraison sera donc fixée au passif de la société PSPI à hauteur de ce montant.
3-2 sur le préjudice de jouissance du fait du retard de levée des réserves
Mme [O] fait valoir qu'étant mariée sous le régime de la communauté universelle elle a recueilli le patrimoine de son défunt mari, et que le préjudice subi est important au regard du nombre des réserves et du retard avec lequel elles ont été levées, plus particulièrement s'agissant de l'absence de garde-corps du balcon.
La société PSPI et la société [ER] et [N] opposent que Mme [O] ne peut prétendre à indemnisation au titre de la part de son défunt mari qui n'est plus partie à la procédure car elle ne représente pas les intérêts de son époux.
Il est constant que la livraison est intervenue le 12 février 2015 avec 13 réserves, dont l'absence d'un garde-corps de la terrasse, et qu'un procès-verbal de levée des réserves a établi le 3 mai 2016, lequel fait seulement mention de deux points, lesquels ne constituaient cependant pas des réserves.
Il ressort des mentions de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement que les époux étaient mariés sous le régime de la communauté universelle. Toutefois, Mme [O] ne justifie pas être seule héritière de son défunt mari, pas plus qu'elle ne prétend agir en son nom. Elle ne peut dès lors demander indemnisation que de son seul préjudice de jouissance du fait du retard de levée des réserves.
À cet égard, il sera relevé que les réserves portaient essentiellement sur des réglages ou finitions, à l'exception de l'absence d'un garde-corps nuisant à l'usage de la terrasse, et du dysfonctionnement de la VMC de la salle de bains. Les réserves ayant été levées plus d'une année après la livraison, il sera alloué à Mme [O] une somme de 1 000 à ce titre, et sa créance au passif de la société PSPI sera fixée à ce montant.
3-3 sur le préjudice moral
Mme [O] fait valoir qu'étant mariée sous le régime de la communauté universelle elle a recueilli le patrimoine de son défunt mari et que le montant alloué par le tribunal devra être doublé.
La société PSPI et la société [ER] et [N] concluent au rejet de la demande et font valoir que cette justification est inopérante.
La cour constate que Mme [O] ne caractérise pas le préjudice moral qu'elle invoque. Sa demande sera donc rejetée.
Il convient enfin de préciser, s'agissant des montants fixés plus haut, qu'il devra être tenu compte de la provision allouée par la cour par son arrêt du 22 juin 2017.
3-4 sur la demande de levée des réserves relatives au panneau de douche et au visiophone
Mme [O] fait valoir que le défaut de fixation du panneau de la douche et le dysfonctionnement du visiophone constituent des réserves non levées et signalées à la 'réception'. Elle demande la condamnation de la société PSPI, sous astreinte, à lever ces réserves, et estime sa demande recevable, y compris s'agissant de l'astreinte, le fait que la société PSPI fasse l'objet d'une procédure collective ne faisant pas obstacle à ce qu'elle puisse être condamnée, sous astreinte, à exécuter une obligation de faire.
La société PSPI et la société [ER] et [N] considèrent que la demande devra être rejetée, conformément à l'article L.622-21 qui interdit toute action en paiement d'une somme d'argent par le débiteur en redressement judiciaire, qui ne peut être condamné à paiement au titre d'une astreinte pour une cause antérieure au jugement d'ouverture.
Ce moyen est toutefois inopérant dans la mesure où il résulte des articles L. 131-1 et L. 131-2 du code des procédures civiles d'exécution que l'action en fixation d'une astreinte provisoire destinée à assurer l'exécution d'une obligation de faire exécutable en nature, qui ne tend pas, en soi, au paiement d'une somme d'argent, ne relève pas des dispositions des articles L. 622-21 et L. 622-22 du code de commerce (en ce sens Com.11sept.2024 n°23-15.441).
Toutefois, la cour ne peut que constater, comme le relève la société Allianz, que s'il résulte du procès-verbal de levée des réserves établi le 3 mai 2016 que 'reste à lever au titre des réserves' la tenue du panneau latéral de la douche (pose d'un arrêtoir l'entreprise JS verre décor doit intervenir sous peu), et qu'il est fait état du fait que M. et Mme [O] se plaignent, pour le visiophone, que 'l'on ne reconnaît pas bien les personnes à l'écran', ces deux points n'avaient cependant pas été visés dans le procès-verbal de livraison, de sorte que la cour ne peut condamner la société PSPI à lever des réserves inexistantes. La demande doit donc être rejetée.
4 - Sur la demande de la société PSPI
4 -1 au titre du solde du prix
Il résulte de ce qui précède que les réserves ont été levées, de sorte que Mme [O] ne peut se prévaloir d'une absence de levée des réserves pour s'opposer au paiement du solde du prix de 15 800 euros.
Elle conteste les intérêts de retard au taux de l % à compter du 3 mai 2016, de surcroît capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil, tels que mis en compte par la société PSPI, au motif qu'elle a consigné le solde du prix entre les mains du notaire instrumentaire, et que la consignation qui vaut paiement a arrêté le cours des intérêts. Elle demande, en tout état de cause, que la cour considère que ce taux est prohibitif et le réduise au taux légal, en application de l'article 1231-6 du code civil s'agissant d'une clause pénale.
La société PSPI et la société [ER] et [N] contestent cette analyse, et soulignent que Mme [O] a établi un chèque de 2 223,41 euros le 12 juillet 2018, de sorte que les intérêts conventionnels ont, à tout le moins, couru du 3 mai 2016 jusqu'à cette date.
La cour constate que lors de la livraison, les parties sont convenues du versement par les époux [O] du solde du prix s'élevant à 15 800 euros en séquestre chez Me [U] à [Localité 14], avec cette précision que ce montant sera libéré contre la levée totale des réserves.
Le contrat de vente en l'état futur d'achèvement prévoit, en page 40, l'application d'une pénalité de 1% par mois de retard en cas de retard, en cas de défaut de paiement des sommes dues par l'acquéreur dans un délai de 8 jours à compter de la réception de la mise en demeure envoyée par le vendeur. Le montant de cette pénalité de retard est conforme, au taux maximum prévu par l'article R.261-14 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version antérieure à celle issue du décret n°2019-873 du 21 août 2019.
Il résulte de ce texte que le solde du prix peut être consigné en cas de contestation sur la conformité avec les prévisions du contrat, et il est de principe que la consignation effectuée en application du texte précité vaut paiement (en ce sens Civ. 3ème 15 déc. 2010, n°09-67. 232 et 6 mai 2015 n°14.13-032).
Les parties étant convenues de consigner le solde du prix jusqu'à la levée des réserves, et cette consignation valant paiement, la société PSPI n'est pas fondée à solliciter le paiement des pénalités de retard contractuelles, seuls étant dus les intérêts au taux légal sur la somme consignée à compter du 3 mai 2016, date de levée des réserves, cette somme devant alors être débloquée, et ce jusqu'au 12 juillet 2018 date du paiement du solde comme l'admet la société PSPI. Il sera donc fait droit à la demande de la société PSPI et des organes de la procédure, dans cette limite, étant au surplus observé qu'il conviendra de tenir compte de la provision allouée par la cour dans son arrêt du 22 juin 2017.
La capitalisation des intérêts échus depuis un e année entière sera ordonnée dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.
4-2 au titre de l'indemnité conventionnelle de procédure
La société PSPI ne précisant pas à quoi correspond l'indemnité conventionnelle de 834,01 euros qu'elle réclame. Le contrat de vente en l'état futur d'achèvement prévoit seulement une indemnité en cas de nécessité pour le vendeur de produire à un ordre, ce qui n'est pas le cas, sa demande sera donc rejetée.
5- Sur les appels en garantie formés par la société PSPI et la société [ER] et [N]
Ainsi qu'il a été dit ci-dessus la procédure n'ayant pas été régulièrement reprise à l'égard de la société [L] [E] architecture, la procédure est toujours interrompue.
5-1 contre la société Atelier Blanc architecture et son assureur la société Allianz
La société PSPI justifie avoir déclaré sa créance au passif de cette société. Elle lui reproche d'avoir manqué à son obligation de recalage des calendriers. La société Allianz, assureur de l'architecte, conteste toute faute de sa part.
Il sera en effet relevé que la société PSPI ne précise pas en quoi la société Atelier Blanc architecture a manqué à son obligation, étant observé qu'aucun délai d'exécution n'est indiqué que ce soit dans le contrat d'ordonnancement, pilotage et coordination du 21 février 2012, ou dans l'avenant à effet au 1er octobre 2011 par lequel cette société a repris le contrat de maîtrise d'oeuvre conclu en avril 2010 avec la société [L] [E] architecture dont elle a racheté la clientèle, ou dans ce contrat, et qu'il n'est pas davantage fait référence aux délais de livraison convenus entre la société PSPI et les acquéreurs.
De même, comme le souligne la société Allianz, le manquement allégué de l'architecte à son obligation de recalage des calendriers est dépourvu de tout lien avec le retard dans la levée des réserves.
L'appel en garantie sera donc rejeté en tant que dirigé contre cette société, représentée par son liquidateur, et son assureur, la société Allianz, y compris en tant qu'il porte sur la provision allouée par la cour le 22 juin 2017.
5-2 contre la société KS constructions
La société PSPI et le commissaire à l'exécution du plan de cette société font valoir que cette société avait une mission d'entreprise générale et qu'elle était également investie, conjointement avec la société Atelier Blanc architecture, d'une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination au titre de laquelle elle était chargée du recalage des calendriers.
Toutefois, la société PSPI admet, comme le relève la société KS constructions, que le contrat les liant prévoyait un délai global d'exécution de 24 mois courant à compter du 22 février 2012, le planning global d'exécution fixant au 14 février 2014 la date de réception des travaux. Ce seul constat suffit à démontrer que le délai de livraison fixé au cours du quatrième trimestre 2013 auquel s'était engagé la société PSPI envers les acquéreurs ne pouvait à l'évidence pas être tenu, quels qu'aient pu être par ailleurs les aléas du chantier.
La société PSPI et la société [ER] et [N] ne se prévalent enfin d'aucune faute imputable à la société KS constructions s'agissant du retard de levée des réserves émises par les acquéreurs lors de la livraison, alors même que la réception des travaux a été prononcée par la société PSPI, le 24 avril 2015, après livraison de leur appartement aux époux [O], sans réserves s'agissant de ce lot, le procès-verbal de réception prévoyant en effet que 'les parties décident à ce jour que l'effet de la levée des réserves est fixé à la date de livraison de chaque lot valant réception'.
L'appel en garantie dirigé contre cette société sera donc rejeté, y compris en tant qu'il porte sur la provision allouée par la cour le 22 juin 2017.
5-3 sur l'appel en garantie dirigé contre la société Allianz, en qualité d'assureur de la société [L] [E] architecture
La société PSPI et la société [ER] et [N] reprochent à l'architecte des erreurs de plans, lesquels ont été élaborés sans que la société [L] [E] architecture ne fasse procéder à un relevé des existants par un géomètre, l'architecte s'étant basé sur des esquisses erronées établies par l'ancien architecte du vendeur, la société Imopolis, aux droits de laquelle est venue la société PSPI, qu'il n'a pas vérifiées. Ainsi il n'a pas été tenu compte de l'implantation des poteaux de soutènement, de sorte que le nombre de garages initialement prévus n'a pu être réalisé. Ces erreurs sont à l'origine du retard pris par le chantier, et sont par voie de conséquence, directement à l'origine du retard de livraison de l'appartement acquis par les époux [O] et du retard de levée des réserves.
La société Allianz oppose tout d'abord que les plans de géomètre n'étaient pas dus par l'architecte mais par le maître de l'ouvrage qui a confié une mission partielle au géomètre qu'il avait mandaté. Elle soutient ensuite que la problématique du chantier concernant le nombre de garages et l'implantation d'une cage d'escalier qui en a résulté, est dépourvue de tout lien de causalité avec le retard allégué par les époux [O].
La cour constate en effet d'une part, que les époux [O] n'avaient pas acquis de garage, d'autre part, qu'il n'est pas démontré que leur lot était concerné par la démolition d'une cage d'escalier, la société PSPI n'en faisant d'ailleurs pas elle-même état, et surtout que, selon M. [C], expert judiciaire ayant été désigné dans d'autres procédures, dont le rapport est versé aux débats, les travaux se sont poursuivis et n'ont pas été suspendus. Enfin, il résulte ce qui précède qu'indépendamment de la problématique révélée en cours de chantier, le délai de livraison fixé par la société PSPI était incompatible avec celui imparti à l'entreprise générale, de sorte que le lien de causalité entre les manquements reprochés à la société [L] [E] architecture et le préjudice lié au retard de livraison et au retard de levée des réserves n'est pas démontré.
Cet appel en garantie sera également rejeté, y compris en tant qu'il porte sur la provision allouée par la cour le 22 juin 2017.
6 - Sur la demande de dommages et intérêts dirigées contre la société Allianz
La société PSPI et les organes de la procédure collective font valoir que la présente procédure a été initiée par Mme [O] du fait des fautes commises par la société [L] [E] architecture, lesquelles ont amené la société PSPI à faire face à de multiples procédures, ce qui a affaibli sa trésorerie et nuit à sa réputation.
Ainsi que cela a été relevé précédemment, la responsabilité de la société [L] [E] architecture n'a pas été retenue dans le cadre du présent litige opposant la société PSPI à Mme [O]. La demande formée au titre d'un préjudice spécifique qu'aurait subi la société PSPI sera donc rejetée.
7 - Sur les dépens et les frais exclus des dépens
En considération de la solution du litige, et de la succombance réciproque, Mme [O], d'une part, la société PSPI et ses mandataires d'autre part, supporteront chacun les dépens de première instance et d'appel qu'ils ont exposés dans le cadre de l'instance principale et leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
La société PSPI et le commissaire à l'exécution du plan supporteront les dépens de première instance et d'appel afférents aux appels en garantie, et il sera alloué une somme de 1 500 euros à la société Allianz IARD, d'une part, à Me [I], ès qualités, d'autre part et à la société KS construction, de troisième part sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande de restitution par Mme [O] de la somme de 1 500 euros qui lui a été allouée dans le cadre de l'incident de procédure sera rejetée comme n'étant pas justifiée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par défaut, par arrêt prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,
REJETTE la demande tendant à voir d'écarter les conclusions de Mme [P] [G], veuve [O] du 30 décembre 2024 et le bordereau de pièces joint ;
DECLARE l'appel de la SARL [Z] [J] promotion immobilière, de la SELAS [ER] et [N] et de la SELARL [B] et associés, contre Me [I], en sa qualité de liquidateur de l'EURL [L] [E] architecture recevable ;
CONSTATE que la procédure en tant que dirigée contre Me [I], en sa qualité de liquidateur de l'EURL [L] [E] architecture, est toujours interrompue ;
ANNULE le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 14 décembre 2021 ;
Statuant au fond,
FIXE la créance de Mme [P] [G], veuve [O], représentée par sa tutrice Mme [M] [K], au passif de la SARL [Z] [J] promotion immobilière à la somme de 7 500 euros au titre du préjudice de jouissance lié au retard de livraison de l'appartement ;
FIXE la créance de Mme [P] [G], veuve [O], représentée par sa tutrice Mme [M] [K], au passif de la SARL [Z] [J] promotion immobilière à la somme de 1 000 euros au titre du préjudice de jouissance lié a la levée tardive des réserves ;
REJETTE les demandes de Mme [P] [G], veuve [O] au titre de la levée des 'réserves' concernant la paroi de douche et le visiophone, et au titre d'un préjudice moral ;
CONDAMNE Mme [P] [G], épouse [O], représentée par sa tutrice Mme [M] [K], à payer à la SARL [Z] [J] promotion immobilière la somme de 15 800 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2016 jusqu'au 12 juillet 2018, avec capitalisation des intérêts échus depuis une année entière dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
DIT que pour l'exécution du présent arrêt il devra être tenu compte des provisions versées suite à l'arrêt de cette cour du 22 juin 2017 ;
REJETTE les appels en garantie formés par la société [Z] [J] promotion immobilière et la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, contre la SARL Atelier Blanc architecture, représentée par son liquidateur, Me [Y], contre la SA Allianz IARD, en sa qualité d'assureur de cette société et de la société [L] [E] architecture, et contre la société KS constructions ;
REJETTE la demande de dommages et intérêts de la société [Z] [J] promotion immobilière et de la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, dirigée contre la SA Allianz au titre d'un préjudice spécifique ;
REJETTE les demandes de la société [Z] [J] promotion immobilière et de la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, en paiement par Mme [O] d'une indemnité conventionnelle de procédure et en restitution de la somme de 1 500 euros qui lui a été allouée dans le cadre de l'incident de procédure ;
CONDAMNE la société [Z] [J] promotion immobilière et la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cette société, d'une part, Mme [P] [G], épouse [O], représentée par sa tutrice Mme [M] [K], d'autre part, à supporter les dépens afférents à l'instance principale qu'elles ont exposés en première instance et en appel ;
CONDAMNE la SARL [Z] [J] promotion immobilière et la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cette société, à supporter les dépens de première instance et d'appel afférents aux appels en garantie ;
CONDAMNE la SARL [Z] [J] promotion immobilière et la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cette société, à payer la somme de 1 500 euros, chacun, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à Me [I], en sa qualité de liquidateur de l'EURL [L] [E] architecture, à la SA Allianz IARD et à la SA KS construction ;
REJETTE les autres demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière, La présidente,
Copie exécutoire
aux avocats
Le
La greffière
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE COLMAR
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : 2 A N° RG 22/00226 - N° Portalis DBVW-V-B7G-HX4L
Décision déférée à la cour : 14 Décembre 2021 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG
APPELANTES sous le n° 22/226 et intimées sous le n° 22/705 :
La S.A.R.L. [Z] [J] PROMOTION IMMOBILIER, en redressement judiciaire,
ayant son siège social [Adresse 4]
La SELARL CM [ER] & N. [N], prise en la personne de Me [X] [S] [ER], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de la Sarl [Z] [J] Promotion immobilière
ayant son siège social [Adresse 3]
La SELARL [B] ET ASSOCIES ès qualités de mandataire judiciaire de la Sarl [Z] [J] Promotion immobilière prise en la personne de [V] [B]
ayant son siège social [Adresse 7]
représentées par Me Eulalie LEPINAY, avocat à la cour.
INTIMÉE sous le n° 22/226 et appelante sous le n° 22/705 :
Madame [P] [G] veuve [O], sous tutelle, représentée par sa tutrice, Madame [M] [K], demeurant [Adresse 16]
représentée par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour
APPELEE EN INTERVENTION FORCEE :
Madame [M] [K], tutrice de Mme [P] [G] veuve [O], intimée sous le n° 22/226
[Adresse 12]
[Localité 10]
représentée par Me Nadine HEICHELBECH, avocat à la cour
INTIMÉS sous le n° 22/226 :
Maître [D] [Y] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sarl Atelier Blanc Architecture, intimé sous le n° 22/226
exerçant son activité [Adresse 5]
assigné le 21 juin 2022 à domicile, n'ayant pas constitué avocat
Maître [A] [I] es-qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [E] ARCHITECTURE, intimé sous le n° 22/226
SAS DMJ - Mandataires Judiciaires [Adresse 6]
[Localité 8]
représentée par Me Valérie SPIESER-DECHRISTE de la SELARL V² AVOCATS, avocat à la cour
S.A.R.L. ATELIER BLANC ARCHITECTURE en liquidation judiciaire, intimée sous le n° 22/226
[Adresse 11]
[Localité 9]
tentative d'assignation le 23 juin 2022
INTIMÉE sous le n° 22/226 et sous le n° 22/705 :
La S.A. KS CONSTRUCTION prise en la personne de son représentant légal,
ayant son siège social [Adresse 2]
représentée par Me Loïc RENAUD de la SELARL ARTHUS, avocat à la cour
La S.A. ALLIANZ IARD prise en la personne de son représentant légal,
ayant son siège social [Adresse 1]
représentée par Me Valérie SPIESER-DECHRISTE de la SELARL V² AVOCATS, avocat à la cour
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 21 Mars 2025, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Isabelle DIEPENBROEK, Présidente de chambre
Madame Murielle ROBERT-NICOUD, Conseillère
Madame Nathalie HERY, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Sylvie SCHIRMANN
ARRÊT rendu par défaut
- prononcé publiquement après prorogation du 04 septembre 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle DIEPENBROEK, présidente et Madame Emeline THIEBAUX, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Selon acte de vente en l'état futur d'achèvement du 2 mai 2012, la société [Z] [J] promotion immobilière (ci-après la société PSPI) a vendu aux époux [T] [O] et [P] [W] un appartement au sein de la Résidence '[Adresse 13]' à [Localité 15], devant être livré au cours du quatrième trimestre 2013.
Sont intervenus à l'opération de construction :
- l'EURL [L] [E] architecture, assurée auprès de la société Allianz, en qualité de maître d'oeuvre,
- la SARL Atelier Blanc architecture, également assurée auprès de la société Allianz, maître d'oeuvre, qui a succédé à la société [L] [F] architecture, et a également été chargée d'une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination, conjointement avec la société KS constructions,
- la société KS construction en tant qu'entreprise générale et chargée d'une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination, conjointement avec la société Atelier Blanc architecture.
Les acquéreurs ont été convoqués en vue d'une livraison le 20 juin 2014. L'immeuble n'étant pas achevé à cette date, la livraison n'a pas eu lieu.
Selon exploit du 21 janvier 2015, les époux [O] ont fait citer la société PSPI devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins d'obtenir sa condamnation à livrer l'appartement, sous astreinte.
La livraison étant intervenue le 12 février 2015, les époux [O] ont alors sollicité une provision à valoir sur l'indemnisation de leur préjudice consécutif au retard de livraison.
Par arrêt du 22 juin 2017, la cour de céans, infirmant une ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Strasbourg en date du 30 juin 2015, a condamné la société PSPI au paiement d'une provision de 12 000 euros à valoir sur le préjudice de jouissance subi par les époux [O], et ces derniers solidairement au paiement d'une provision de 15 800 euros à la société PSPI au titre du solde du prix, et ordonné la compensation des créances réciproque dans la limite de la plus faible d'entre elles.
Par exploit du 21 avril 2017, les époux [O] ont fait citer la société PSPI devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins d'indemnisation de leur préjudice.
La société PSPI a successivement appelé en cause Me [I], en qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [E] architecture, la société Allianz, la SARL Atelier Blanc architecture, la SA KS construction, et enfin Me [Y], en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Atelier Blanc architecture.
La société PSPI ayant été placée en redressement judiciaire le 18 mai 2020, l'instance a été interrompue, puis reprise après intervention volontaire de la SELAS [ER] et [N], en qualité d'administrateur judiciaire de la société PSPI et de la SELARL [B] et associés, en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement en date du 14 décembre 2021, le tribunal judiciaire a :
- rappelé que la procédure était interrompue à l'égard de M. [T] [O] (décédé) ;
- déclaré Mme [P] [R], épouse [O] irrecevable en sa demande de condamnation de la SARL PSPI à faire lever les réserves résultant du défaut de fixation du panneau de la douche et de fonctionnement du visiophone ;
- déclaré Mme [P] [R], épouse [O] recevable en ses demandes pour le surplus ;
- fixé la créance de Mme [P] [G], épouse [O] au passif de la SARL PSPI à la somme de 6 200 euros se décomposant ainsi :
- 3 700 euros au titre du préjudice de jouissance lié au retard de livraison de l'appartement,
- 500 euros au titre du préjudice de jouissance lié à la levée tardive des réserves,
- 2 000 euros au titre du préjudice moral ;
- condamné Mme [P] [G], épouse [O] à payer à la SARL PSPI la somme de 15 800 euros, avec intérêts de 1 % par mois de retard à compter du 3 mai 2016 et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
- débouté les parties de leurs demandes pour le surplus ;
- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile
- fixé les dépens de la procédure au passif de la SARL PSPI ;
- ordonné l'exécution provisoire.
Le tribunal, après avoir constaté que la livraison était intervenue avec 14 mois de retard, a retenu que la société PSPI pouvait, conformément aux stipulations contractuelles, se prévaloir de 87 jours d'intempéries, ce qui ramenait le retard à 9 mois et une semaine, évalué le préjudice de jouissance subi du fait du retard à 7 400 euros, et a fixé la créance de Mme [G] à la moitié de cette somme, soit 3 700 euros.
S'agissant de la levée des réserves, le tribunal, après avoir écarté la forclusion, en retenant que l'assignation en référé avait interrompu le délai pour agir jusqu'à l'arrêt de la cour d'appel, a relevé que les réserves listées avaient été levées plus d'un an après la livraison ce qui justifiait une indemnité de 500 euros.
Le tribunal a considéré que la demande de levée des autres réserves, sous couvert d'une obligation de faire, était en réalité une demande en paiement, laquelle était irrecevable en application de l'article L.622-21 du code de commerce.
Enfin, il a estimé que l'incertitude quant à la date de livraison justifiait une indemnité de 2 000 euros pour préjudice moral.
Pour rejeter les appels en garantie formés par la société PSPI le tribunal a retenu que :
- le lien de causalité entre la faute reprochée à la société [L] [E] architecture consistant en une absence de relevé des existants au sous-sol, et le retard n'était pas démontré,
- aucun délai d'exécution ne figurait dans le contrat de maîtrise d'oeuvre signé avec la société Atelier Blanc architecture,
- aucune faute de la société KS construction n'était établie.
Le tribunal a accueilli la demande reconventionnelle de la société PSPI dirigée contre Mme [P] [R], veuve [O] au titre du solde du prix relevant que les problèmes subsistants signalés dans le procès-verbal de levée des réserves n'avaient pas fait l'objet de réserves à la livraison et ne pouvaient donc justifier le non-paiement du prix.
La société PSPI, la SELAS [ER] - [N], en sa qualité d'administrateur judiciaire de cette société et la SELARL [B] et associés, en sa qualité de mandataire judiciaire de cette société ont interjeté appel de ce jugement le 14 janvier 2022, en tant qu'il a fixé la créance de Mme [P] [R], veuve [O] au passif de la société PSPI à 6 200 euros et les dépens, et a débouté cette société de ses appels en garantie et de son action directe contre la société Allianz.
Mme [P] [R], veuve [O], assistée de sa curatrice, Mme [M] [K], a également interjeté appel de ce jugement le 17 février 2022, son appel portant sur toutes ses dispositions la concernant.
Les deux procédures ont été jointes le 7 mars 2023.
Mme [O] a été placée sous tutelle par jugement du 25 mars 2024.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 4 mars 2025, et l'affaire fixée à l'audience de plaidoiries du 21 mars 2025.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 14 février 2025, Mme [P] [R], veuve [O], représentée par sa tutrice, Madame [K] demande à la cour de déclarer son appel recevable et bien fondé, et de :
- annuler, subsidiairement, infirmer le jugement déféré du l4 décembre 2021 du tribunal judiciaire de Strasbourg en ce qu'il a :
* déclaré Mme [P] [R], épouse [O] irrecevable en sa demande de condamnation de la SARL PSPI à faire lever les réserves résultant du défaut de fixation du panneau de la douche et de fonctionnement du visiophone ;
* fixé la créance de Mme [P] [G] épouse [O] au passif de la SARL PSPI à la somme de 6 200 euros ;
* condamné Mme [P] [G] épouse [O] à payer à la SARL PSPI la somme de 15 800 euros avec intérêts de 1 % par mois de retard à compter du 3 mai 2016 et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
* débouté Mme [G] de ses demandes pour le surplus ;
Statuant à nouveau et usant, le cas échéant, de son pouvoir d'évocation,
- fixer la créance de Madame [O], représentée par sa tutrice au passif de la société [Z] [J] Promotion Immobilière, en sus des montants fixés en première instance, à la somme supplémentaire de 13 000,00 euros se décomposant comme suit :
- 7 500,00 euros au titre de son préjudice de jouissance lié au retard de livraison de l'appartement ;
- 2 500,00 euros au titre du préjudice de jouissance lié à la levée tardive des réserves ;
- 3 000,00 euros au titre du préjudice moral ;
- condamner la société [Z] [J] Promotion Immobilière à faire lever les réserves résultant du défaut de fixation du panneau de la douche et de fonctionnement du visiophone sous astreinte de 500 euros par jour de retard, passé un délai de 15 jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir ;
- déclarer Madame [O], représentée par sa tutrice, recevable et bien fondé en son exception d'inexécution qu'elle oppose à la société [Z] [J] Promotion Immobilière ;
- débouter par suite, la société [Z] [J] Promotion Immobilière de sa demande en paiement du solde du prix de vente de l'appartement acquis par Madame [O] ;
Subsidiairement,
- déclarer la société [Z] [J] Promotion Immobilière irrecevable, subsidiairement mal fondée, en sa demande de paiement d'intérêts moratoires sur le solde du prix précité et en conséquence, la débouter desdits intérêts, très subsidiairement, les fixer au taux de l'intérêt légal ;
- condamner la société [Z] [J] Promotion Immobilière à payer à Madame [O], représentée par sa tutrice une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de 1'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;
- rejeter toutes conclusions plus amples ou contraires.
Au soutien de sa demande de nullité du jugement, Mme [P] [G], veuve [O] fait valoir, au visa de l'article 468 du code civil, que le jugement déféré a été rendu alors qu'elle était sous curatelle renforcée depuis le 5 avril 2019 et n'était pas assistée de sa curatrice, Mme [K], peu important que la société PSPI n'ait pas eu connaissance de cette circonstance et que le jugement ait été dûment signifié à Mme [K], curatrice.
Elle demande que la cour statue sur évocation et soutient en substance que :
- la demande de levée des réserves signalées à la 'réception' concernant le panneau de douche et le visiophone, sous astreinte, n'est pas une demande en paiement se heurtant à l'interdiction des poursuites individuelles, et ces réserves n'ayant pas été levées, sa demande devra donc être accueillie ;
- selon le contrat de vente en l'état futur d'achèvement, les jours d'intempéries susceptibles de proroger le délai de livraison doivent être dûment constatés par une attestation de l'architecte ou d'un bureau d'études, ce qui n'est pas le cas, de sorte qu'elle peut prétendre à une indemnisation au titre de 14 mois de retard sur une base de 800 euros par mois, ce montant correspondant à la valeur locative de l'appartement ;
- le montant qui lui a été alloué à titre d'indemnisation du retard dans la levée des réserves est insuffisant au regard du préjudice subi, l'absence de garde-corps de la terrasse l'ayant empêchée d'en jouir ; un montant de 250 euros par mois n'est pas excessif ; à tout le moins, le montant alloué devra être doublé puisqu'elle vient également aux droits de son défunt mari ;
- il en est de même pour le préjudice moral dont le montant doit être doublé ;
- la société PSPI n'ayant pas exécuté totalement ses obligations, elle est en droit de ne pas exécuter les siennes ;
- la consignation du prix entre les mains du notaire vaut paiement et a arrêté le cours des intérêts ;
- aucun intérêt sur des intérêts ne peut être réclamé, la société PSPI opérant une capitalisation subreptice contraire aux dispositions du code civil.
* Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 3 janvier 2025, la société PSPI représentée par son gérant, la SELAS [ER] - [N], en sa qualité d'administrateur judiciaire de cette société, et la SELARL [B] et associés, en sa qualité de mandataire judiciaire de cette société demandent que soient écartées les conclusions du 30 décembre 2024 pour violation du principe du contradictoire, et l'infirmation du jugement, en tous ses chefs, autres que l'irrecevabilité de la demande de levée des réserves et la condamnation de Mme [P] [W], veuve [O] au titre du solde du prix et que la cour, statuant à nouveau, :
- déboute Mme [P] [W], veuve [O], représentées par sa tutrice, de toutes ses demandes ;
- fixe la créance de la société PSPI au passif de la liquidation judiciaire de l'EURL [L] [F] architecture et au passif de la société Atelier Blanc architecture au montant des condamnations prononcées en principal, intérêts, frais et accessoires dont elle pourra être tenue à l'égard de Mme [P] [W], veuve [O] ;
- condamne la société KS construction et la société Allianz à la garantir des mêmes condamnations ;
- condamne la société KS construction et la société Allianz solidairement à prendre en charge, à titre de garantie, le montant de 12 000 euros prononcé à titre de provision par la cour d'appel ;
- condamne Mme [P] [W], veuve [O], assistée de son curatrice Mme [M] [K], à payer à la Société PSPI le montant du solde du prix de vente de 15 800 euros assorti des intérêts au taux de 1% par mois de retard, qui s'évalue au 1er octobre 2022 au montant de 26 627,50 euros, dont les intérêts conventionnels de 1 % par mois continuent de courir ;
- ordonne la capitalisation des intérêts ;
- condamne Mme [P] [W], veuve [O] assistée de sa curatrice, Mme [M] [K], à payer à la société PSPI la somme de 834,01 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de procédure augmentée des intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;
En tout état de cause,
- condamne la compagnie Allianz à payer à la société PSPI, une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts du préjudice spécifique subi avec les intérêts de droit à compter du jour de la décision à intervenir ;
- déboute Mme [O], la compagnie Allianz, la société KS construction et Me [A] [I], en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [F] architecture, de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre la société PSPI, la SELAS [ER] & [N], prise en la personne de Me [H] [ER], et la SELARL [B] & Associes, prise en la personne de Me [V] [B] ;
- condamne Mme [O], assistée de sa curatrice Mme [M] [K], à restituer à la société PSPI la somme de 1 500 euros payée par cette dernière lors de l'incident de procédure au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamne in solidum Mme [O], assistée de sa curatrice Mme [M] [K], la société KS Construction et la compagnie Allianz aux entiers frais et dépens de la procédure de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement à la société PSPI d'une somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par note du 20 mars 2025, le conseil de la société PSPI et des mandataires judiciaires a précisé que Maître [H] [ER], de la SELAS [ER]-[N], intervenait désormais en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société PSPI.
Invoquant l'adage fraus omnia corrumpit, ils font valoir que Mme [O] ne peut demander l'annulation du jugement puisque c'est elle qui a introduit la procédure, et qu'elle n'a pas fait connaître le fait qu'elle était sous curatelle, alors qu'elle était représentée par un avocat. De plus, le jugement a été signifié à sa curatrice.
Au fond, ils font valoir que :
- la demande d'indemnisation du retard doit être rejetée, car l'acte de vente en l'état futur d'achèvement ne prévoit pas d'indemniser l'acquéreur en cas de retard de livraison ; par ailleurs, les jours d'intempéries peuvent être listés à partir des pièces produites par la société KS construction ; en outre, le retard est, en tout état de cause, lié aux manquements de la maîtrise d'oeuvre, qui ont nécessité de reprendre une partie du programme immobilier ;
- rien ne justifie d'augmenter le montant alloué par le tribunal au titre de l'indemnisation du retard de levée des réserves, et Mme [P] [W], veuve [O] ne peut prétendre à la part de son défunt mari,
- le même raisonnement doit être tenu s'agissant du préjudice moral,
- la procédure collective ne permet pas de condamner au paiement d'une astreinte, de sorte que la demande de condamnation à lever de prétendues réserves, sous astreinte, est irrecevable,
- le jugement doit être confirmé sur les sommes dues par Mme [P] [W], veuve [O] qui s'élèvent désormais à 26 627,50 euros compte-tenu des intérêts, lesquels ont, à tout le moins, couru entre le 3 mai 2016 et le 12 juillet 2018.
Les intimés demandent ensuite l'infirmation du jugement en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité des maîtres d'oeuvre et de l'entreprise KS construction et demande leur garantie, ainsi que celle de la société Allianz, assureur de l'EURL [L] [F] architecture et de la société Atelier Blanc architecture. À cet égard, ils font valoir que :
- l'EURL [L] [F] architecture a commis différentes fautes, consistant en des erreurs de plans, une absence de relevé complet des existants, une prise en compte d'esquisses erronées s'agissant du sous-sol, une omission de tenir compte de poteaux de soutènement ce qui a empêché la réalisation de tous les garages prévus, et en l'absence d'aménagement des délais de livraison au regard de l'étendue du projet en prenant en considération la compatibilité des lieux avec le programme envisagé ;
- sa responsabilité a déjà été retenue par la cour dans différentes décisions, et ces fautes sont à l'origine des retards de livraison ;
- la société Atelier Blanc architecture, qui a succédé à l'EURL [L] [F] architecture, et la société KS construction se sont vu confier conjointement des missions d'ordonnancement, de pilotage et de coordination et étaient chargées du recalage des calendriers, la société Atelier Blanc architecture s'étant engagée à rattraper le retard ;
- la société KS construction n'a pas respecté les délais de livraison auxquels elle s'était engagée, et c'est à elle qu'il incombait d'achever les travaux.
Ils estiment enfin que la garantie de la société Allianz, assureur de l'EURL [L] [F] architecture, puis de la société Atelier Blanc architecture qui a repris son contrat, est due, et que les dommages dont Mme [P] [W], veuve [O] demande indemnisation qui sont des 'conséquences pécuniaires' au sens du contrat, ouvrent droit à garantie.
La société PSPI prétend par ailleurs avoir subi un préjudice spécifique du fait des manquements de l'EURL [L] [F] architecture puisqu'elle a dû faire face aux recours de nombreux acquéreurs ce qui a affaibli sa situation financière, et nuit à sa réputation.
* Aux termes de leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 mai 2024, la société Allianz et Me [I], en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [F] architecture demandent à la cour de déclarer l'appel de la société PSPI irrecevable, respectivement sa demande, en tant que dirigée contre Me [I], ès qualités, pour défaut de déclaration de créance, rejeter l'appel et confirmer le jugement en toutes ses dispositions. Ils concluent au débouté de la société PSPI et à sa condamnation au paiement de la somme de 7 500 euros à chacun d'eux sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Subsidiairement, ils demandent l'infirmation du jugement, qu'il soit jugé que la police souscrite par l'EURL [L] [F] architecture et celle souscrite par la société Atelier Blanc architecture ne pourront être mobilisées que dans les strictes limites de garantie, notamment de plafond et de franchise, et la condamnation de la société KS construction à les garantir, ainsi qu'à payer à chacun d'eux la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et celle globale de 3 500 euros au titre de son appel incident et en provoqué en garantie.
Ils concluent par ailleurs à l'irrecevabilité de l'appel incident et des demandes de la société PSPI, et au rejet des autres demandes, appels incidents et provoqués.
Ils font valoir que l'appel et les demandes de la société PSPI sont irrecevables en l'absence de déclaration de créance au titre de cette procédure.
Ils contestent toute faute de l'EURL [L] [F] architecture qui ne devait pas les plans de géomètre et l'existence d'un lien de causalité entre les prétendus manquements et le retard de livraison dont se plaint Mme [P] [G], veuve [O], lequel n'est pas lié au problème d'implantation de la cage d'escalier.
La société Allianz soutient que la société Atelier Blanc architecture a respecté ses engagements à l'égard de la société PSPI, et fait valoir que Mme [O] est tiers au contrat d'ordonnancement, pilotage et coordination, et que le recalage des calendriers est sans incidence sur la livraison et la levée des réserves.
Ils considèrent que les précédents arrêts de la cour de céans, qui concernent la problématique des parkings, sont sans emport sur la solution du présent litige.
La société Allianz estime qu'il n'y a aucune raison de mettre à sa charge la provision de 12 000 euros allouée par la cour, soulignant que le jugement se substitue à la décision prise en référé. Elle ajoute qu'elle n'est pas non plus concernée par le paiement du solde du prix, et que la demande de dommages et intérêts ne peut aboutir en l'absence de faute des maîtres d'oeuvre. Elle se prévaut enfin des limites de sa garantie qui ne couvre les préjudices immatériels que s'il s'agit de préjudices pécuniaires.
* Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 mars 2023, la société KS construction conclut au rejet de l'appel, à la confirmation du jugement, au rejet de l'appel en garantie de la société PSPI, de Me [I], ès-qualités, et de la société Allianz. Subsidiairement, elle demande la condamnation de la société Allianz, en qualité d'assureur de l'EURL [L] [F] architecture et de la société Atelier Blanc architecture, à la garantir. Elle sollicite la fixation et l'admission au passif de la société PSPI d'une créance à hauteur de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir qu'elle n'était pas tenue par les délais de livraison convenus par la société PSPI avec les acquéreurs qui lui sont inopposables, mais par les délais figurant dans son contrat, qu'elle a respectés ; que son délai d'exécution qui s'achevait au 22 février 2014 excédait le délai de livraison fixé au 31 décembre 2013 ; que son marché a fait l'objet de 17 avenants ; qu'il faut tenir compte des intempéries, qui ont conduit à reporter la date contractuelle de réception au 28 juillet 2015, or la livraison de l'appartement des époux [O] est intervenue antérieurement à cette date.
Elle conteste avoir commis une faute dans sa mission d'ordonnancement et de pilotage, soulignant que c'est la société PSPI qui s'était engagée à livrer l'appartement dans des délais incompatibles avec le déroulement du chantier, et qu'aucune faute de sa part n'est à l'origine du retard de livraison. Enfin, elle n'était pas tenue, en tant que locateur d'ouvrage, de lever les réserves formulées par les acquéreurs, cette obligation pesant sur le vendeur en l'état futur d'achèvement, la réception de ses travaux étant intervenue sans réserve. Elle conteste également la demande visant à mettre à sa charge la provision allouée par la cour et forme des appels en garantie.
* Pour l'exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions notifiées ou signifiées et transmises par voie électronique aux dates susvisées.
La société Atelier Blanc architecture a été assignée par exploit du 23 juin 2022, lequel n'a pu être remis à raison de la procédure collective. Me [Y], a été assigné, en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société, à domicile, le 21 juin 2022, les conclusions d'appel incident de la société KS construction lui ont été signifiées le 28 juin 2022 selon les mêmes modalités.
Ces parties n'ayant pas constitué avocat, il sera statué par défaut. Elles sont réputés s'approprier les motifs du jugement conformément à l'article 954, dernier alinéa du code de procédure civile.
MOTIFS
A titre liminaire, il n'y a pas lieu d'écarter les conclusions de Mme [P] [G], veuve [O] du 30 décembre 2024 et le bordereau de pièces joint, dans la mesure où le prononcé de l'ordonnance de clôture initialement prévu le 7 janvier 2025 a été reporté au 4 mars 2025 afin de permettre aux autres parties d'y répondre.
Il sera ensuite donné acte à la société [ER] et [N] de ce qu'elle intervient désormais en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société PSPI.
Enfin, il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour n'est tenue de statuer que sur les prétentions figurant au dispositif des dernières écritures des parties et n'a pas à répondre à des demandes tendant à voir 'dire et juger' ou 'constater' qui correspondent seulement à la reprise de moyens développés dans les motifs des conclusions et sont dépourvues d'effets juridiques.
1- Sur la recevabilité de l'appel de la société PSPI, de la SELAS [ER] & [N] et de la SELARL [B] et associés, contre Me [I], en sa qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [L] [E] architecture
Me [I], ès-qualités, fait valoir qu'en l'absence de déclaration de sa créance au passif de l'EURL [L] [E] architecture, l'appel de la société PSPI et des organes de sa procédure collective est irrecevable.
L'absence de déclaration de créance ne constituant pas un motif d'irrecevabilité de l'appel, il sera déclaré recevable.
Cependant, dès lors qu'il n'est pas justifié que la créance déclarée par la société PSPI au passif de la société [L] [E] architecture inclut le litige l'opposant aux époux [O], ce qui est contesté par Me [I], ès-qualités, et ne peut être déduit du seul montant déclaré, la cour ne peut que constater que la procédure n'a pas été régulièrement reprise et qu'elle demeure interrompue à l'égard de cette dernière société.
2- Sur la nullité du jugement
Conformément à l'article 468, alinéa 3 du code civil l'assistance du curateur est requise pour introduire une action en justice au nom de la personne protégée ou pour défendre à une telle action.
En l'espèce, l'action a été introduite devant le tribunal de grande instance de Strasbourg le 21 avril 2017 par les époux [O]. M. [T] [O] est décédé en cours de procédure, et Mme [P] [G], veuve [O] qui a poursuivi l'instance a été placée sous curatelle renforcée par jugement du 5 avril 2019.
Il ne ressort ni du jugement frappé d'appel, ni des pièces de la procédure, que le tribunal avait été informé de cette mesure de protection.
Mme [P] [G], veuve [O], représentée par sa tutrice, Mme [K], est dès lors recevable et bien fondée à demander l'annulation du jugement qui a été prononcé alors qu'elle n'était pas assistée de sa curatrice, sans que puisse lui être opposée une quelconque fraude qui résulterait de l'omission d'informer son conseil et la juridiction de cette circonstance, laquelle ne peut être retenue à l'égard d'une personne faisant l'objet d'une mesure de protection, le fait que le jugement ait été dûment signifié à Mme [K], curatrice, n'emportant pas régularisation de la procédure.
Le jugement sera donc annulé. Il n'y a toutefois pas matière à évocation, dès lors que par l'effet dévolutif de l'appel, la cour est saisie de l'entier litige et doit statuer au fond.
3- Sur la demande de Mme [O]
3-1 sur le préjudice de jouissance pour retard de livraison
Le retard de livraison est avéré dans la mesure où l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 2 mai 2012 prévoyait une livraison au cours du quatrième trimestre 2013, soit au plus tard le 31 décembre 2013, et qu'elle n'est intervenue que le 12 février 2015, soit avec 13 mois et 12 jours de retard, soit 377 jours.
La société PSPI et la société [ER] et [N], commissaire à l'exécution du plan, soutiennent qu'il convient toutefois de déduire les jours d'intempéries.
Mme [O] oppose que l'acte de vente en l'état futur d'achèvement prévoit, en page 24, que 'le délai sera, le cas échéant, majoré des journées d'intempéries prises en compte au sens de la réglementation du travail sur les chantiers du bâtiment, et que ces jours seront dûment constatés par une attestation de l'architecte ou du bureau d'études auquel les parties conviennent de se rapporter à cet égard'.
En l'espèce, aux termes du marché d'ordonnancement-pilotage-coordination du 21 février 2012, conclu entre la société PSPI, d'une part, la société Atelier Blanc architecture et la société KS constructions, conjointement, d'autre part, le contrôle des délais et la tenue à jour des relevés d'intempéries étaient dévolus à l'entreprise générale. C'est donc à cette dernière qu'incombait l'établissement du relevé des intempéries tel que visé dans la clause ci-dessus rappelée.
Il y a donc lieu de retenir le tableau récapitulatif des intempéries établi par cette société, conformément à sa mission, quand bien même n'est-elle ni un architecte, ni un bureau d'études, la convention précitée lui confiant une mission partielle de maîtrise d'oeuvre sur ce point. Ce tableau qui fait apparaître 87 jours d'intempéries est corroboré par un relevé Météo France.
Le retard imputable à la société PSPI s'établit donc à 377 - 87 = 290 jours.
Le fait que l'acte de vente ne prévoit pas de pénalités de retard ne prive pas l'acquéreur de la possibilité de demander indemnisation du préjudice que lui a causé le retard, le vendeur ayant ainsi manqué à ses obligations contractuelles. Le préjudice subi par les époux [O] qui ont été privés de la possibilité de jouir de l'appartement qu'ils avaient acquis est avéré. Il est en relation causale directe avec le manquement reproché à la société PSPI qui ne peut s'exonérer de sa responsabilité à l'égard des acquéreurs en invoquant d'éventuels manquements commis par la maîtrise d'oeuvre.
Mme [O] met en compte un montant de 800 euros par mois correspondant à la valeur locative de l'appartement, ce montant n'est discuté ni par la société PSPI, ni par les appelés en garantie.
La créance de Mme [O] au titre de l'indemnisation du préjudice de jouissance qu'elle a subi du fait du retard de livraison de l'appartement qu'elle avait acquis avec son époux, s'établit donc à un montant de 800 x 290/ 30 = 7 733 euros, qui sera toutefois limité à 7 500 euros au vu du libellé de la demande de Mme [O], le jugement étant annulé. La créance de Mme [O] au titre du préjudice découlant du retard de livraison sera donc fixée au passif de la société PSPI à hauteur de ce montant.
3-2 sur le préjudice de jouissance du fait du retard de levée des réserves
Mme [O] fait valoir qu'étant mariée sous le régime de la communauté universelle elle a recueilli le patrimoine de son défunt mari, et que le préjudice subi est important au regard du nombre des réserves et du retard avec lequel elles ont été levées, plus particulièrement s'agissant de l'absence de garde-corps du balcon.
La société PSPI et la société [ER] et [N] opposent que Mme [O] ne peut prétendre à indemnisation au titre de la part de son défunt mari qui n'est plus partie à la procédure car elle ne représente pas les intérêts de son époux.
Il est constant que la livraison est intervenue le 12 février 2015 avec 13 réserves, dont l'absence d'un garde-corps de la terrasse, et qu'un procès-verbal de levée des réserves a établi le 3 mai 2016, lequel fait seulement mention de deux points, lesquels ne constituaient cependant pas des réserves.
Il ressort des mentions de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement que les époux étaient mariés sous le régime de la communauté universelle. Toutefois, Mme [O] ne justifie pas être seule héritière de son défunt mari, pas plus qu'elle ne prétend agir en son nom. Elle ne peut dès lors demander indemnisation que de son seul préjudice de jouissance du fait du retard de levée des réserves.
À cet égard, il sera relevé que les réserves portaient essentiellement sur des réglages ou finitions, à l'exception de l'absence d'un garde-corps nuisant à l'usage de la terrasse, et du dysfonctionnement de la VMC de la salle de bains. Les réserves ayant été levées plus d'une année après la livraison, il sera alloué à Mme [O] une somme de 1 000 à ce titre, et sa créance au passif de la société PSPI sera fixée à ce montant.
3-3 sur le préjudice moral
Mme [O] fait valoir qu'étant mariée sous le régime de la communauté universelle elle a recueilli le patrimoine de son défunt mari et que le montant alloué par le tribunal devra être doublé.
La société PSPI et la société [ER] et [N] concluent au rejet de la demande et font valoir que cette justification est inopérante.
La cour constate que Mme [O] ne caractérise pas le préjudice moral qu'elle invoque. Sa demande sera donc rejetée.
Il convient enfin de préciser, s'agissant des montants fixés plus haut, qu'il devra être tenu compte de la provision allouée par la cour par son arrêt du 22 juin 2017.
3-4 sur la demande de levée des réserves relatives au panneau de douche et au visiophone
Mme [O] fait valoir que le défaut de fixation du panneau de la douche et le dysfonctionnement du visiophone constituent des réserves non levées et signalées à la 'réception'. Elle demande la condamnation de la société PSPI, sous astreinte, à lever ces réserves, et estime sa demande recevable, y compris s'agissant de l'astreinte, le fait que la société PSPI fasse l'objet d'une procédure collective ne faisant pas obstacle à ce qu'elle puisse être condamnée, sous astreinte, à exécuter une obligation de faire.
La société PSPI et la société [ER] et [N] considèrent que la demande devra être rejetée, conformément à l'article L.622-21 qui interdit toute action en paiement d'une somme d'argent par le débiteur en redressement judiciaire, qui ne peut être condamné à paiement au titre d'une astreinte pour une cause antérieure au jugement d'ouverture.
Ce moyen est toutefois inopérant dans la mesure où il résulte des articles L. 131-1 et L. 131-2 du code des procédures civiles d'exécution que l'action en fixation d'une astreinte provisoire destinée à assurer l'exécution d'une obligation de faire exécutable en nature, qui ne tend pas, en soi, au paiement d'une somme d'argent, ne relève pas des dispositions des articles L. 622-21 et L. 622-22 du code de commerce (en ce sens Com.11sept.2024 n°23-15.441).
Toutefois, la cour ne peut que constater, comme le relève la société Allianz, que s'il résulte du procès-verbal de levée des réserves établi le 3 mai 2016 que 'reste à lever au titre des réserves' la tenue du panneau latéral de la douche (pose d'un arrêtoir l'entreprise JS verre décor doit intervenir sous peu), et qu'il est fait état du fait que M. et Mme [O] se plaignent, pour le visiophone, que 'l'on ne reconnaît pas bien les personnes à l'écran', ces deux points n'avaient cependant pas été visés dans le procès-verbal de livraison, de sorte que la cour ne peut condamner la société PSPI à lever des réserves inexistantes. La demande doit donc être rejetée.
4 - Sur la demande de la société PSPI
4 -1 au titre du solde du prix
Il résulte de ce qui précède que les réserves ont été levées, de sorte que Mme [O] ne peut se prévaloir d'une absence de levée des réserves pour s'opposer au paiement du solde du prix de 15 800 euros.
Elle conteste les intérêts de retard au taux de l % à compter du 3 mai 2016, de surcroît capitalisés dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil, tels que mis en compte par la société PSPI, au motif qu'elle a consigné le solde du prix entre les mains du notaire instrumentaire, et que la consignation qui vaut paiement a arrêté le cours des intérêts. Elle demande, en tout état de cause, que la cour considère que ce taux est prohibitif et le réduise au taux légal, en application de l'article 1231-6 du code civil s'agissant d'une clause pénale.
La société PSPI et la société [ER] et [N] contestent cette analyse, et soulignent que Mme [O] a établi un chèque de 2 223,41 euros le 12 juillet 2018, de sorte que les intérêts conventionnels ont, à tout le moins, couru du 3 mai 2016 jusqu'à cette date.
La cour constate que lors de la livraison, les parties sont convenues du versement par les époux [O] du solde du prix s'élevant à 15 800 euros en séquestre chez Me [U] à [Localité 14], avec cette précision que ce montant sera libéré contre la levée totale des réserves.
Le contrat de vente en l'état futur d'achèvement prévoit, en page 40, l'application d'une pénalité de 1% par mois de retard en cas de retard, en cas de défaut de paiement des sommes dues par l'acquéreur dans un délai de 8 jours à compter de la réception de la mise en demeure envoyée par le vendeur. Le montant de cette pénalité de retard est conforme, au taux maximum prévu par l'article R.261-14 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version antérieure à celle issue du décret n°2019-873 du 21 août 2019.
Il résulte de ce texte que le solde du prix peut être consigné en cas de contestation sur la conformité avec les prévisions du contrat, et il est de principe que la consignation effectuée en application du texte précité vaut paiement (en ce sens Civ. 3ème 15 déc. 2010, n°09-67. 232 et 6 mai 2015 n°14.13-032).
Les parties étant convenues de consigner le solde du prix jusqu'à la levée des réserves, et cette consignation valant paiement, la société PSPI n'est pas fondée à solliciter le paiement des pénalités de retard contractuelles, seuls étant dus les intérêts au taux légal sur la somme consignée à compter du 3 mai 2016, date de levée des réserves, cette somme devant alors être débloquée, et ce jusqu'au 12 juillet 2018 date du paiement du solde comme l'admet la société PSPI. Il sera donc fait droit à la demande de la société PSPI et des organes de la procédure, dans cette limite, étant au surplus observé qu'il conviendra de tenir compte de la provision allouée par la cour dans son arrêt du 22 juin 2017.
La capitalisation des intérêts échus depuis un e année entière sera ordonnée dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.
4-2 au titre de l'indemnité conventionnelle de procédure
La société PSPI ne précisant pas à quoi correspond l'indemnité conventionnelle de 834,01 euros qu'elle réclame. Le contrat de vente en l'état futur d'achèvement prévoit seulement une indemnité en cas de nécessité pour le vendeur de produire à un ordre, ce qui n'est pas le cas, sa demande sera donc rejetée.
5- Sur les appels en garantie formés par la société PSPI et la société [ER] et [N]
Ainsi qu'il a été dit ci-dessus la procédure n'ayant pas été régulièrement reprise à l'égard de la société [L] [E] architecture, la procédure est toujours interrompue.
5-1 contre la société Atelier Blanc architecture et son assureur la société Allianz
La société PSPI justifie avoir déclaré sa créance au passif de cette société. Elle lui reproche d'avoir manqué à son obligation de recalage des calendriers. La société Allianz, assureur de l'architecte, conteste toute faute de sa part.
Il sera en effet relevé que la société PSPI ne précise pas en quoi la société Atelier Blanc architecture a manqué à son obligation, étant observé qu'aucun délai d'exécution n'est indiqué que ce soit dans le contrat d'ordonnancement, pilotage et coordination du 21 février 2012, ou dans l'avenant à effet au 1er octobre 2011 par lequel cette société a repris le contrat de maîtrise d'oeuvre conclu en avril 2010 avec la société [L] [E] architecture dont elle a racheté la clientèle, ou dans ce contrat, et qu'il n'est pas davantage fait référence aux délais de livraison convenus entre la société PSPI et les acquéreurs.
De même, comme le souligne la société Allianz, le manquement allégué de l'architecte à son obligation de recalage des calendriers est dépourvu de tout lien avec le retard dans la levée des réserves.
L'appel en garantie sera donc rejeté en tant que dirigé contre cette société, représentée par son liquidateur, et son assureur, la société Allianz, y compris en tant qu'il porte sur la provision allouée par la cour le 22 juin 2017.
5-2 contre la société KS constructions
La société PSPI et le commissaire à l'exécution du plan de cette société font valoir que cette société avait une mission d'entreprise générale et qu'elle était également investie, conjointement avec la société Atelier Blanc architecture, d'une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination au titre de laquelle elle était chargée du recalage des calendriers.
Toutefois, la société PSPI admet, comme le relève la société KS constructions, que le contrat les liant prévoyait un délai global d'exécution de 24 mois courant à compter du 22 février 2012, le planning global d'exécution fixant au 14 février 2014 la date de réception des travaux. Ce seul constat suffit à démontrer que le délai de livraison fixé au cours du quatrième trimestre 2013 auquel s'était engagé la société PSPI envers les acquéreurs ne pouvait à l'évidence pas être tenu, quels qu'aient pu être par ailleurs les aléas du chantier.
La société PSPI et la société [ER] et [N] ne se prévalent enfin d'aucune faute imputable à la société KS constructions s'agissant du retard de levée des réserves émises par les acquéreurs lors de la livraison, alors même que la réception des travaux a été prononcée par la société PSPI, le 24 avril 2015, après livraison de leur appartement aux époux [O], sans réserves s'agissant de ce lot, le procès-verbal de réception prévoyant en effet que 'les parties décident à ce jour que l'effet de la levée des réserves est fixé à la date de livraison de chaque lot valant réception'.
L'appel en garantie dirigé contre cette société sera donc rejeté, y compris en tant qu'il porte sur la provision allouée par la cour le 22 juin 2017.
5-3 sur l'appel en garantie dirigé contre la société Allianz, en qualité d'assureur de la société [L] [E] architecture
La société PSPI et la société [ER] et [N] reprochent à l'architecte des erreurs de plans, lesquels ont été élaborés sans que la société [L] [E] architecture ne fasse procéder à un relevé des existants par un géomètre, l'architecte s'étant basé sur des esquisses erronées établies par l'ancien architecte du vendeur, la société Imopolis, aux droits de laquelle est venue la société PSPI, qu'il n'a pas vérifiées. Ainsi il n'a pas été tenu compte de l'implantation des poteaux de soutènement, de sorte que le nombre de garages initialement prévus n'a pu être réalisé. Ces erreurs sont à l'origine du retard pris par le chantier, et sont par voie de conséquence, directement à l'origine du retard de livraison de l'appartement acquis par les époux [O] et du retard de levée des réserves.
La société Allianz oppose tout d'abord que les plans de géomètre n'étaient pas dus par l'architecte mais par le maître de l'ouvrage qui a confié une mission partielle au géomètre qu'il avait mandaté. Elle soutient ensuite que la problématique du chantier concernant le nombre de garages et l'implantation d'une cage d'escalier qui en a résulté, est dépourvue de tout lien de causalité avec le retard allégué par les époux [O].
La cour constate en effet d'une part, que les époux [O] n'avaient pas acquis de garage, d'autre part, qu'il n'est pas démontré que leur lot était concerné par la démolition d'une cage d'escalier, la société PSPI n'en faisant d'ailleurs pas elle-même état, et surtout que, selon M. [C], expert judiciaire ayant été désigné dans d'autres procédures, dont le rapport est versé aux débats, les travaux se sont poursuivis et n'ont pas été suspendus. Enfin, il résulte ce qui précède qu'indépendamment de la problématique révélée en cours de chantier, le délai de livraison fixé par la société PSPI était incompatible avec celui imparti à l'entreprise générale, de sorte que le lien de causalité entre les manquements reprochés à la société [L] [E] architecture et le préjudice lié au retard de livraison et au retard de levée des réserves n'est pas démontré.
Cet appel en garantie sera également rejeté, y compris en tant qu'il porte sur la provision allouée par la cour le 22 juin 2017.
6 - Sur la demande de dommages et intérêts dirigées contre la société Allianz
La société PSPI et les organes de la procédure collective font valoir que la présente procédure a été initiée par Mme [O] du fait des fautes commises par la société [L] [E] architecture, lesquelles ont amené la société PSPI à faire face à de multiples procédures, ce qui a affaibli sa trésorerie et nuit à sa réputation.
Ainsi que cela a été relevé précédemment, la responsabilité de la société [L] [E] architecture n'a pas été retenue dans le cadre du présent litige opposant la société PSPI à Mme [O]. La demande formée au titre d'un préjudice spécifique qu'aurait subi la société PSPI sera donc rejetée.
7 - Sur les dépens et les frais exclus des dépens
En considération de la solution du litige, et de la succombance réciproque, Mme [O], d'une part, la société PSPI et ses mandataires d'autre part, supporteront chacun les dépens de première instance et d'appel qu'ils ont exposés dans le cadre de l'instance principale et leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
La société PSPI et le commissaire à l'exécution du plan supporteront les dépens de première instance et d'appel afférents aux appels en garantie, et il sera alloué une somme de 1 500 euros à la société Allianz IARD, d'une part, à Me [I], ès qualités, d'autre part et à la société KS construction, de troisième part sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande de restitution par Mme [O] de la somme de 1 500 euros qui lui a été allouée dans le cadre de l'incident de procédure sera rejetée comme n'étant pas justifiée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par défaut, par arrêt prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450, alinéa 2 du code de procédure civile,
REJETTE la demande tendant à voir d'écarter les conclusions de Mme [P] [G], veuve [O] du 30 décembre 2024 et le bordereau de pièces joint ;
DECLARE l'appel de la SARL [Z] [J] promotion immobilière, de la SELAS [ER] et [N] et de la SELARL [B] et associés, contre Me [I], en sa qualité de liquidateur de l'EURL [L] [E] architecture recevable ;
CONSTATE que la procédure en tant que dirigée contre Me [I], en sa qualité de liquidateur de l'EURL [L] [E] architecture, est toujours interrompue ;
ANNULE le jugement du tribunal judiciaire de Strasbourg du 14 décembre 2021 ;
Statuant au fond,
FIXE la créance de Mme [P] [G], veuve [O], représentée par sa tutrice Mme [M] [K], au passif de la SARL [Z] [J] promotion immobilière à la somme de 7 500 euros au titre du préjudice de jouissance lié au retard de livraison de l'appartement ;
FIXE la créance de Mme [P] [G], veuve [O], représentée par sa tutrice Mme [M] [K], au passif de la SARL [Z] [J] promotion immobilière à la somme de 1 000 euros au titre du préjudice de jouissance lié a la levée tardive des réserves ;
REJETTE les demandes de Mme [P] [G], veuve [O] au titre de la levée des 'réserves' concernant la paroi de douche et le visiophone, et au titre d'un préjudice moral ;
CONDAMNE Mme [P] [G], épouse [O], représentée par sa tutrice Mme [M] [K], à payer à la SARL [Z] [J] promotion immobilière la somme de 15 800 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2016 jusqu'au 12 juillet 2018, avec capitalisation des intérêts échus depuis une année entière dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
DIT que pour l'exécution du présent arrêt il devra être tenu compte des provisions versées suite à l'arrêt de cette cour du 22 juin 2017 ;
REJETTE les appels en garantie formés par la société [Z] [J] promotion immobilière et la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, contre la SARL Atelier Blanc architecture, représentée par son liquidateur, Me [Y], contre la SA Allianz IARD, en sa qualité d'assureur de cette société et de la société [L] [E] architecture, et contre la société KS constructions ;
REJETTE la demande de dommages et intérêts de la société [Z] [J] promotion immobilière et de la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, dirigée contre la SA Allianz au titre d'un préjudice spécifique ;
REJETTE les demandes de la société [Z] [J] promotion immobilière et de la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, en paiement par Mme [O] d'une indemnité conventionnelle de procédure et en restitution de la somme de 1 500 euros qui lui a été allouée dans le cadre de l'incident de procédure ;
CONDAMNE la société [Z] [J] promotion immobilière et la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cette société, d'une part, Mme [P] [G], épouse [O], représentée par sa tutrice Mme [M] [K], d'autre part, à supporter les dépens afférents à l'instance principale qu'elles ont exposés en première instance et en appel ;
CONDAMNE la SARL [Z] [J] promotion immobilière et la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cette société, à supporter les dépens de première instance et d'appel afférents aux appels en garantie ;
CONDAMNE la SARL [Z] [J] promotion immobilière et la SELAS [ER] et [N], en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cette société, à payer la somme de 1 500 euros, chacun, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à Me [I], en sa qualité de liquidateur de l'EURL [L] [E] architecture, à la SA Allianz IARD et à la SA KS construction ;
REJETTE les autres demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière, La présidente,