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Décisions

CA Douai, ch. 2 sect. 1, 13 novembre 2025, n° 24/05836

DOUAI

Arrêt

Autre

CA Douai n° 24/05836

13 novembre 2025

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 13/11/2025

****

MINUTE ELECTRONIQUE

N° RG 24/05836 - N° Portalis DBVT-V-B7I-V5KW

Jugement (N° 2024006226) rendu le 28 novembre 2024 par le tibunal de commerce de Boulogne-Sur-Mer

APPELANT

Monsieur [V] [P]

né le [Date naissance 1] 1992 à [Localité 9]

de nationalité française

demeurant [Adresse 3]

[Localité 8]

représenté par Me Anne Painset Beauvillain, avocat au barreau de Boulogne-sur-mer, avocat constitué

INTIMÉES

DGFIP - Pôle Recouvrement Spécialisé du Pas-de-calais

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 5]

défaillante

S.E.L.A.R.L. [H] Mandataires et Associés, représentée par Maître [G] [U], es-qualité de liquidateur de Monsieur [V] [P]

ayant son siège social [Adresse 10]

[Localité 6]

représentée par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

SARL Debacker & Richmond - Encheres Cote D'opale

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 7]

défaillante

DÉBATS à l'audience publique du 10 septembre 2025 tenue par Pauline Mimiague magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

En présence de Madame [J], représentant le ministère public

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Béatrice Capliez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Déborah Bohée, présidente de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Carole Catteau, conseiller

ARRÊT RENDU PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 13 novembre 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Déborah Bohée, présidente et Béatrice Capliez, adjoint administratif, faisant fonction de greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

OBSERVATIONS ÉCRITES ET ORAL DU MINISTÈRE PUBLIC :

réquisitions du 21 juillet 2025

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 3 septembre 2025

****

EXPOSÉ DU LITIGE

Saisi par assignation du 7 octobre 2024 délivrée par la Direction générale des finances publiques Pôle de recouvrement spécialié du Pas-de-Calais (la DGFIP), le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer a, par jugement du 28 novembre 2024, ouvert une procédure de liquidation judiciaire simplifiée à l'égard de M. [V] [P], immatriculé au registre du commerce et des sociétés de Boulogne-sur-Mer sous le numéro 832 498 935, a fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 28 mai 2023, a désigné la SELARL [H] mandataires et associées, représentée par Me [G] [U], en qualité de liquidateur et nommé juge-commissaire et commissaires de justice.

Par deux déclarations reçues au greffe de la cour le 12 décembre 2024, M. [P] a relevé appel de ce jugement déférant à la cour l'intégralité de ses chefs, intimant la DGFIP, la SELARL [H] mandataire et associés, liquidateur judiciaire, la société Debacker et Richmond, commissaire de justice désigné par le jugement pour réaliser un inventaire, et le Procureur général. Les deux dossiers, enregistrés sous les numéros de répertoire général 24/5836 et 24/5843, ont été joints par ordonnance du 16 janvier 2025.

La déclaration d'appel a été signifiée à la DGFIP le 30 janvier 2025.

Par jugement du 13 février 2025 le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer a converti la procédure collective en liquidation judiciaire de droit commun.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 14 mars 2025, signifiées à la DGFIP par acte du 20 mars 2025, M. [P] demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

- le recevoir en ses demandes,

- infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, énoncées dans le dispositif des conclusions,

statuant à nouveau,

- déclarer irrecevable la demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire par la DGFIP,

- lui octroyer les plus amples délais pour s'acquitter de la dette à hauteur de 36 215 euros au profit de la DGFIP,

- la condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 13 mai 2025, signifiées à la DGFIP par acte 20 mai 2025, le liquidateur judiciaire demande à la cour de :

- juger recevable la demande d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire,

- constater l'état de cessation des paiements de M. [P],

- en conséquence, confirmer le jugement en ce qu'il a ouvert une procédure de liquidation judiciaire sauf à juger qu'il s'agira de faire application des règles de droit commun,

- en toute hypothèse, débouter M. [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions, le condamner à lui régler la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers frais et dépens.

Suivant avis notifié par voie électronique le 21 juillet 2025, et soutenu oralement à l'audience, le ministère public requiert la confirmation du jugement.

La DGFIP n'a pas constitué avocat.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties constituées pour l'exposé de leurs moyens.

La clôture de l'instruction est intervenue le 3 septembre 2025 et l'affaire a été renvoyée à l'audience de plaidoiries du 10 septembre suivant.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la demande d'ouverture d'une procédure collective

Selon l'article L. 640-5 du code de commerce :

Lorsqu'il n'y a pas de procédure de conciliation en cours, le tribunal peut également être saisi sur requête du ministère public aux fins d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire.

Sous cette même réserve, la procédure peut aussi être ouverte sur l'assignation d'un créancier, quelle que soit la nature de sa créance. Toutefois, lorsque le débiteur a cessé son activité professionnelle, cette assignation doit intervenir dans le délai d'un an à compter de :

1° La radiation du registre du commerce et des sociétés. S'il s'agit d'une personne morale, le délai court à compter de la radiation consécutive à la publication de la clôture des opérations de liquidation ;

2° La cessation de l'activité, s'il s'agit d'une personne exerçant une activité artisanale, d'un agriculteur ou d'une personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;

3° La publication de l'achèvement de la liquidation, s'il s'agit d'une personne morale non soumise à l'immatriculation.

En l'espèce, M. [P] est commerçant, immatriculé au registre du commerce et des sociétés ; ce sont donc les dispositions du 1° de cet article qui s'appliquent à sa situation et non les dispositions du 2°.

Dès lors, s'il a cessé son activité en février 2023 comme il le soutient, il apparaît que, selon l'extrait kbis versé aux débats, au 15 octobre 2024, il n'avait pas fait l'objet d'une radiation. M. [P] indique lui-même avoir fait une demande de radiation au greffe unique des entreprises le 28 octobre 2024.

En conséquence, la demande d'ouverture d'une procédure collective fait par assignation du 7 octobre 2024 n'est pas hors délais au regard des exigences de l'article L. 640-1. Le moyen sera en conséquence écarté.

Sur l'ouverture d'une procédure collective

L'article L. 640-1 du code de commerce institue une procédure de liquidation judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné à l'article L. 640-2 en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible. En application de l'article L. 641-2 il est fait application de la liquidation judiciaire simplifiée lorsque le débiteur est une personne physique, si l'actif du débiteur ne comprend pas de bien immobilier.

Il résulte des termes de l'article L. 631-1 du code de commerce, applicable à la liquidation judiciaire par renvoi de l'article L. 640-1, qu'est en état de cessation des paiements tout débiteur qui est dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible.

L'appelant ne développe aucun moyen pour critiquer le jugement qui a constaté l'état de cessation des paiements et décidé de l'ouverture d'une liquidation judiciaire simplifiée et se borne à solliciter des délais de paiement sur le fondement des articles L. 626-6 du code de commerce et L. 247 du livre des procédures fiscales, invoquant sa bonne foi.

Toutefois la juridiction statuant sur une demande d'ouverture d'une procédure collective, et non saisie d'une demande en paiement, n'a pas le pouvoir d'accorder des délais de paiement, de sorte que la demande ne peut qu'être rejetée.

Par ailleurs, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, M. [P] ne conteste pas la créance de la DGFIP. Le rapport du liquidateur judiciaire en date du 5 décembre 2024, qui propose la clôture pour insuffisance d'actif, fait état d'une créance privilégiée des services fiscaux de plus de 36 k€ et indique qu'il n'y a aucun actif corporel. Selon l'état des créances édité par le liquidateur judiciaire le 12 mai 2025, le montant total des créances déclarées nées avant le jugement d'ouverture s'élève à 351 054,33 euros (316 054 euros à titre définitif).

Il n'existe pas d'élément d'actif disponible permettant de faire face au passif exigible de sorte que le débiteur se trouve en état de cessation des paiements et, n'exerçant plus aucune activité depuis plusieurs années, il n'apparaît pas mesure de présenter un projet d'activité fiable de nature à désintéresser ses créanciers et le redressement judiciaire n'est en conséquence pas possible.

Il convient dès lors de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sans qu'il y ait lieu de préciser qu'il s'agit d'une liquidation judiciaire de droit commun, le jugement du 13 février 2025 qui prévoit l'application de la liquidation judiciaire de droit commun, conservant son plein effet.

Les dépens de première instance et d'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

En équité, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Ecarte le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande d'ouverture d'une procédure collective ;

Déboute M. [V] [P] de sa demande de délai de paiement ;

Ordonne l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de la procédure collective ;

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier

La présidente

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