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Décisions

CA Paris, Pôle 5 - ch. 9, 12 novembre 2025, n° 25/01016

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 25/01016

11 novembre 2025

Exposé des faits et de la procédure

Le 31 octobre 2024, la SARLU Ze Boîte a déclaré la cessation de ses paiements aux fins d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire. Cette entreprise est immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Créteil sous le numéro 532709466 (2021 B 7520). Elle a déclaré exercer une activité commerciale de toutes activités de prestations de services se rattachant directement ou non à la publicité, au conseil, à la stratégie pratiquée. Son siège social est sis [Adresse 3].

Par jugement du 27 novembre 2024, le tribunal de commerce de Créteil :

- Constate l'état de cessation des paiements ;

- Fixe provisoirement au 27 mai 2023 la date de cessation des paiements ;

- Ouvre une procédure de liquidation judiciaire simplifiée en application de l'article L. 641-2-1 à l'égard de la SARLU Ze Boîte et fixe à 1 an le délai au terme duquel la clôture de la procédure devra être examinée, conformément aux dispositions de l'article L. 644-5 du code de commerce ;

- Dit que ce délai pourra être prorogé pour une durée qui ne peut excéder 3 mois, par décision du tribunal si la clôture ne peut être prononcée à cette date ;

- Désigne :

o M. [Y] [W], juge commissaire ;

o la SARL MJL prise en la personne de Me [R] [G], liquidateur ;

- Constate que le débiteur pourra accomplir les actes et exercer les actions qui ne sont pas comprises dans la mission du liquidateur conformément à l'article L. 641-9 du code de commerce,

- Conformément aux dispositions de l'article L. 641-2 du code de commerce, le tribunal confie à la SARL MJL prise en la personne de Me [R] [G], liquidateur la mission de réaliser l'inventaire prévu à l'article L. 622-6 du code de commerce et dit que celui-ci devra le déposer au greffe du tribunal et le communiquer aux personnes prévues à l'article R. 622-4 alinéa 5 du code de commerce ;

- Dit que le liquidateur devra déposer la liste des créances dans un délai de cinq mois à compter du terme du délai de déclaration des créances ;

- Dit que le liquidateur procédera à la vente des biens de gré à gré ou aux enchères publiques dans les 4 mois suivant le jugement de liquidation judiciaire ;

- Ordonne à tout séquestre ou détenteur de fonds de les remettre au liquidateur ci-dessus désigné sur sa demande ;

- Dit que le jugement sera publié conformément à la loi ;

- Ordonne l'exécution provisoire ;

- Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Par déclaration formée par voie électronique le 26 décembre 2024, SARLU Ze Boîte représentée par sa gérante, Mme [D] [N] épouse [T], a interjeté appel du jugement en visant l'intégralité du dispositif de celui-ci.

Dans ses conclusions ultérieures, la SARLU Ze Boîte a limité son appel à la date de cessation des paiements.

Par ordonnance du 15 octobre 2025, la président constatait le désitement de l'incident.

Par conclusions n° 5 notifiées par RPVA le 15 octobre 2025, la SARLU Ze Boîte demande à la cour de :

- La déclarer la recevable et bien-fondée en son appel ;

- Infirmer le jugement rendu le 27 novembre 2024 par la 5ème Chambre du Tribunal de Commerce de Créteil en ce qu'il a fixé provisoirement au 27 mai 2023 la date de cessation des paiements ;

Statuant à nouveau,

- Fixer au 5 septembre 2024 la date de cessation des paiements ;

- Confirmer le jugement rendu pour le surplus ;

- Ordonner l'emploi des dépens d'appel en frais privilégiés de la procédure collective ;

- Débouter la société MJL agissant par Maître [R] [G] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARLU Ze Boîte de toutes ses demandes, fins et prétentions.

La SARLU Ze Boîte expose que les factures évoquées à l'audience du tribunal de Commerce de Créteil sont celles de la société I Conseil ; or, l'état de cessation des paiements à la date du 27 mai 2023 ne peut pas être caractérisé au regard desdites factures puisque la société lui avait accordé des délais de paiement ; elle a, en définitive, renoncé définitivement à sa créance ; relativement aux autres créances déclarées, les loyers échus ont été payés, la créance déclarée à ce titre l'étant à tire éventuel ; l'URSSAF avait déclaré à titre provisionnel la somme de 30 000 euros ; or cette créance infondée a été rejetée d'un commun accord avec l'URSSAF et a été définitivement rejetée ; le reliquat de créance évoqué pour le mois d'avril 2022 s'établit à 97 euros ; Mme [D] [N] épouse [T] n'a pas demandé le remboursement de son compte courant ; dès lors, l'état de cessation des paiements serait au plus tôt intervenu le 5 septembre 2024 puisque c'est à cette date que sa condamnation prononcée par la cour d'appel de Paris est devenue définitive.

Par conclusions n° 3 notifiées par RPVA le 13 octobre 2025, la société MJL demande à la cour de :

- Constater, dire et juger la SARL MJL, prise en la personne de Maître [R] [G], ès qualité de Liquidateur de la SARLU Ze Boîte recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Constater, dire et juger Mme [D] [N] épouse [T] mal fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

- Confirmer en son intégralité le jugement du tribunal de commerce de Créteil du 27 novembre 2024,

- Fixer la date de cessation des paiements au 27 mai 2023,

- Débouter la SARLU Ze Boîte, représentée par Mme [D] [N] épouse [T] de l'intégralité de ses demandes,

- Condamner la SARLU Ze Boîte au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SARL MJL, prise en la personne de Maître [R] [G], es qualité de Liquidateur de la SARLU Ze Boîte,

- Condamner Mme [D] [N] épouse [T] aux entiers dépens.

La société MJL expose que très opportunément la société I Conseil a décidé purement et simplement d'abandonner sa créance ; elle a été très étonnée d'un tel revirement et a sollicité, en vain, des explications ; en effet, la société I Conseil avait été, dans un premier temps, très virulente avec le liquidateur qui avait fait une erreur matérielle sur le montant de la créance (1.920 € au lieu de 19.200 €) pour finalement abandonner sa créance sans apporter la moindre justification ; le bailleur a déclaré une créance d'un montant global de 44 296 euros qui n'a pas été contesté pour les loyers impayés depuis le 1er janvier 2023 ; contrairement à ce qu'affirme Mme [D] [N] épouse [T] au sein de ses conclusions d'appelante, rien ne vient justifier qu'il s'agit d'une créance éventuelle dans la rédaction de la déclaration de créance ; dans le cadre de la vérification du passif, la créance de loyers antérieures, pour un montant de 26 487,78 euros, n'a pas été contestée ; s'agissant du compte courant associé, il s'agit d'une créance exigible pour laquelle Mme [D] [N] épouse [T] a formé une déclaration de créances que la cour devra prendre en considération ; dès lors, Mme [D] [N] épouse [T] ne peut sérieusement affirmer devant la cour qu'elle n'a pas demandé le remboursement de son compte courant d'associé.

La clôture a été prononcée le 22 octobre 2025.

SUR CE

La cessation des paiements au sens de l'article L. 631-1 du code de commerce est caractérisée par l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.

L'actif disponible est composé des liquidités et des valeurs immédiatement réalisables, de la trésorerie disponible, incluant les effets de commerce échus ou escomptables, la provision des chèques de banque durant l'année de la prescription de l'action bancaire et des ouvertures de crédit non utilisées. Les créances à recouvrer en sont exclues sauf si leur mobilisation a été acceptée. Les créances à vue n'en font pas partie sauf facilité de recouvrement rapide et à date certaines ou quasi immédiates.

Le passif exigible est composé des créances certaines, liquides et exigibles, non contestées, non provisionnelles discutées lors d'une instance au fond. Il ne peut s'agir de créances devenues échues du fait de l'ouverture de la procédure ou déclarées à titre provisionnel. Une avance en compte courant non bloquée ou dont le remboursement n'est pas demandé ne constitue pas un passif exigible. Si la créance a fait l'objet d'un moratoire exprès, elle n'est pas exigible.

En l'espèce, la liste des créances déclarées mentionne une créance déclarée de [L], bailleur de la société, d'un montant de 44 296 euros dont 24 487,78 euros a été admise à titre définitif, et 17 802,22 euros sont contestés du fait d'instance. La déclaration de créance du bailleur mentionne une créance de loyer de 26 478,78 euros TTC correspondant aux loyers de l'année 2023 et de l'année 2024 outre la régularisation des charges. Est déclaré le solde de la créance de loyer du second semestre 2024 du 27 novembre au 9 décembre 2024 et 13 359,45 euros correspondant à l'indemnité pour résiliation du bail. Le bailleur indique que 27 000 euros sont déclarés à titre éventuel.

Toutefois, la réserve que le bailleur émet sur sa créance ne repose sur aucun fondement, dès lors que celle-ci repose sur des factures de loyers impayés. Cette créance était donc dès l'origine, certaine, liquide et exigible. Le montant échu de 24 487,78 euros n'a jamais été contesté par la société débitrice.

Dès lors, le passif exigible au 27 mai 2023 s'élevait à cette somme.

La SARLU Ze Boîte ne justifie d'aucun actif disponible à cette date.

La date de cessation des paiements doit donc être fixée au 27 mai 2023.

Le jugement déféré sera donc confirmé.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire. La demande formée par le liquidateur au titre des frais irrépétibles sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement du 27 novembre 2024 du tribunal de commerce de Créteil ;

DISONS que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire.

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