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Décisions

Cass. 1re civ., 18 décembre 2014, n° 13-23.781

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Batut

Cass. 1re civ. n° 13-23.781

17 décembre 2014

Vu leur connexité, joint les pourvois n° T 13-23. 781 et D 13-23. 009 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte reçu le 6 novembre 1992 par M. X..., notaire à Bayonne, le Crédit foncier de France (le CFF) a consenti à la société Innovimmo un crédit de 152 449, 17 euros, pour une durée de trois ans, M. C... se portant caution solidaire des engagements de la société ; qu'en garantie du remboursement de ce prêt, une hypothèque a été inscrite sur des biens immobiliers appartenant à M. C... ; que reprochant à la SCP Y...- D...- E...- F...- G... et à la SCP H...- Z..., notaires, à la suite de la vente de divers biens dépendant du patrimoine de M. C..., d'avoir procédé sans son accord à la mainlevée de l'ensemble des hypothèques, alors qu'il avait uniquement consenti à la levée partielle de celles-ci, le CFF les a assignés en responsabilité ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal n° D 13-23. 009 :

Attendu que la SCP Y...- D...- E...- F...- G... et la SCP H...- Z... font grief à l'arrêt de retenir leur responsabilité professionnelle, alors, selon le moyen, qu'est seul sujet à réparation le préjudice certain ; qu'en affirmant que la perte des hypothèques imputée à la SCP Y... et à la SCP H...- Z... avait causé au CFF un préjudice équivalent au montant de sa créance garantie, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée si le CFF était dans l'impossibilité de recouvrer sa créance malgré la perte de ces sûretés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu que procédant à la recherche prétendument omise, la cour d'appel a constaté que l'action en responsabilité contre les notaires n'avait été engagée qu'après que le CFF eut adressé une mise en demeure à la société Innovimmo et à M. C..., le 23 novembre 1995, tenté de mettre en oeuvre une procédure de saisie immobilière à l'encontre de la société Innovimmo en novembre 2005, cette dernière ayant depuis cessé toute activité, procédé, en mars 1996, à une saisie-attribution entre les mains des locataires de M. C... et perçu le produit de la vente de divers biens immobiliers appartenant à ce dernier ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal n° T 13-23. 781 :

Attendu que le CFF fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable la fin de non-recevoir tirée des demandes nouvelles de M. C... relatives à la validité des taux d'intérêt, à la prescription, au moins partielle, de l'action en paiement de ces intérêts et à la remise en cause du quantum de la créance et d'avoir en conséquence déclaré prescrite l'action en recouvrement des intérêts antérieurement au 28 avril 2004, déclaré irrégulier le taux effectif global contractuel de 12, 74 % et d'avoir dit qu'il y a lieu d'appliquer le taux légal d'intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que le CFF demandait devant la cour d'appel de voir déclarer irrecevable comme prescrite la demande formée par l'associé gérant caution de la société Innovimmo tendant à la nullité de la clause d'intérêt contractuel ; qu'en énonçant que le CFF demandait de voir déclarer irrecevable comme prescrite la demande de nullité du cautionnement, la cour d'appel a dénaturé les conclusions du CFF, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°/ que le CFF soutenait devant la cour d'appel que la demande de nullité de la clause d'intérêt contractuel formée par son contradicteur était prescrite pour avoir été introduite plus de cinq ans après la conclusion du contrat de prêt ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel engagée en raison d'une irrégularité affectant le taux effectif global d'un prêt contracté pour les besoins de l'activité professionnelle de l'emprunteur se prescrit par cinq ans à compter du jour de conclusion du contrat de prêt ; qu'au cas présent, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que le contrat de prêt avait été conclu le 6 novembre 1992 et que M. C..., l'associé gérant caution de la société Innovimmo, avait sollicité, au plus tôt au mois de mars 2009, la nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel contenue dans ce contrat en invoquant l'irrégularité du taux effectif global mentionné au contrat de prêt ; qu'en accueillant cette demande tendant à obtenir la nullité de la stipulation d'intérêt conventionnel, cependant qu'il ressortait de ses propres constatations que cette demande était prescrite, pour avoir été introduite plus de cinq ans après la conclusion du contrat de prêt, la cour d'appel a violé les articles 1304 et 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation ;

4°/ que l'exception de nullité d'une stipulation d'intérêt conventionnel contenue dans un contrat de prêt conclu pour les besoins professionnels de l'emprunteur se prescrit par cinq ans à compter de la conclusion du contrat de prêt lorsque le contrat a été exécuté ; qu'au cas présent, il ressort des constatations de l'arrêt que le contrat de prêt du 6 novembre 1992 avait été exécuté ; qu'en accueillant la demande tendant à l'annulation de la stipulation d'intérêt conventionnel, formée plus de cinq ans après la conclusion dudit contrat, la cour d'appel a en tout état de cause violé les articles 1304 et 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation ;

Mais attendu que le moyen critique en réalité une omission de statuer qui, pouvant être réparée par la procédure prévue par l'article 463 du code de procédure civile, ne donne pas lieu à ouverture à cassation ; qu'il est donc irrecevable ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident n° D 13-23. 009 et le premier moyen du pourvoi incident n° T 13-23. 781, rédigés en des termes identiques, et le second moyen du pourvoi incident n° T 13-23. 781, réunis, tels que reproduits en annexe :

Attendu que M. C... fait grief à l'arrêt d'accueillir les fins de non-recevoir tirées de sa demande nouvelle relative à la nullité de son acte de caution et des demandes nouvelles de la société Innovimmo afférentes à la validité des taux d'intérêt, à la prescription, au moins partielle de l'action en paiement de ces intérêts et à la remise du quantum de la créance ;

Attendu que M. C... ne s'étant pas prévalu devant la cour d'appel des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile et n'ayant pas répondu aux conclusions du CFF invoquant l'irrecevabilité des demandes présentées pour la première fois en cause d'appel par l'intéressé et la société Innovimmo, le moyen est nouveau et mélangé de fait, partant irrecevable ;

Mais sur le second moyen du pourvoi principal n° D 13-23. 009 :

Vu l'article 1251, 3°, du code civil ;

Attendu que pour déclarer la SCP Y...- D...- E...- F...- G... irrecevable en sa demande de subrogation dans les droits du Crédit foncier de France, l'arrêt énonce que le principe de réparation à la charge des notaires se fondant sur une faute civile professionnelle, la SCP ne peut demander à être subrogée dans les droits du CFF en application des dispositions de l'article 1251, 2°, du code civil en se fondant sur une qualité qu'elle n'a pas, à savoir celle de la personne tenue avec d'autres ou pour d'autres au paiement de la dette et qui avait intérêt à l'acquitter ; qu'en effet, étrangère au prêt consenti par le CFF, elle n'est aucunement tenue à son remboursement et a encore moins intérêt à s'en acquitter ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le notaire, qui par sa faute a fait perdre à un créancier le bénéfice d'une sûreté et qui s'est ainsi trouvé dans l'obligation de payer, fût-ce partiellement, le montant de la créance, est légalement subrogé dans les droits et actions de ce créancier contre celui dont il a éteint la dette à hauteur de l'indemnité dont il s'est acquitté, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare la SCP Y...- D...- E...- F...- G... irrecevable en sa demande de subrogation dans les droits du CFF, l'arrêt rendu le 15 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne le CFF aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le CFF à payer à M. Y... et à la SCP Y...- D...- E...- F...- G... la somme globale de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille quatorze.

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