Livv
Décisions

Cass. com., 11 avril 2018, n° 16-27.947

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mouillard

Cass. com. n° 16-27.947

10 avril 2018


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte notarié du 28 mars 2003, Mme X... s'est rendue caution solidaire des engagements de la société civile immobilière Maxiane (la SCI) envers la société Banque populaire Val-de-France (la banque) ; que la SCI ayant été mise en liquidation judiciaire, le liquidateur a vendu un immeuble appartenant à la société débitrice, sur lequel la banque avait pris une inscription d'hypothèque conventionnelle ; qu'alléguant ne pas avoir été totalement désintéressée par le liquidateur à la suite de cette vente, la banque a saisi le tribunal d'une demande de saisie des rémunérations de Mme X... pour un certain montant ; que celle-ci a soutenu être déchargée de ses obligations envers la banque, en raison de la perte d'un droit préférentiel qu'elle imputait à sa faute ;

Sur le second moyen :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de dire que la banque n'a pas commis de faute de nature à la décharger du paiement des sommes dues en sa qualité de caution et de fixer la créance de la banque à son encontre à la somme de 51 680,26 euros, outre intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que le créancier qui bénéficie d'une hypothèque peut exercer un droit de poursuite individuelle quand bien même le débiteur principal serait en liquidation judiciaire ; qu'en relevant qu'il ne peut être fait grief à la banque de ce que le liquidateur « n'ait décidé de vendre qu'une partie des biens de la société liquidée » pour en déduire que la banque n'a pas commis de faute en poursuivant directement la caution sans exercer son droit de poursuite individuelle sur le bien immobilier hypothéqué préalablement, cependant que la banque avait la faculté d'exercer des poursuites individuelles sur les biens hypothéqués que le liquidateur n'avait pas vendus, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 643-2 du code de commerce et 2314 du code civil ;

2°/ que commet une faute de nature à décharger la caution de son engagement le créancier qui agit contre celle-ci sans avoir préalablement agi en réalisation des sûretés réelles garantissant la même dette ; qu'en l'espèce, la banque reconnaissait avoir sollicité la caution sans avoir réalisé la garantie hypothécaire dont elle bénéficiait sur l'immeuble objet du prêt en faisant valoir qu'elle n'était pas responsable de l'inaction du liquidateur ; qu'en considérant que la banque n'avait pas commis de faute, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 2314 du code civil ;

Mais attendu que ne constitue pas une faute, au sens de l'article 2314 du code civil, le seul fait pour le créancier, qui bénéficie à la fois d'un cautionnement et d'une sûreté réelle garantissant la même dette, de ne pas poursuivre, par priorité, la réalisation du bien grevé, avant d'agir contre la caution, de sorte que la banque n'avait pas, par sa faute, fait perdre à Mme X... un droit préférentiel dans lequel elle avait vocation à être subrogée ; que le moyen, qui procède d'un postulat erroné, n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour dire que l'action de la banque n'était pas prescrite et fixer la créance de celle-ci contre Mme X... à la somme de 51 680,26 euros, l'arrêt retient que c'est à bon droit que la banque soutient que la SCI, dont l'objet social et l'activité portent sur la location de terrains et biens immobiliers, n'est pas un consommateur puisqu'elle n'est pas une personne physique agissant dans le cadre d'une activité non professionnelle, et qu'il s'ensuit que la prescription applicable est de cinq ans, conformément aux dispositions de l'article L. 110-4 du code de commerce et 2224 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008 ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme X... qui faisait valoir, à l'appui de sa fin de non-recevoir tirée de la prescription, que les parties avaient, par une manifestation de volonté dépourvue d'équivoque, entendu soumettre le prêt litigieux aux dispositions du code de la consommation, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que l'action de la Banque populaire du Val-de-France n'est pas prescrite et fixe la créance de la banque contre Mme X..., épouse Y... à la somme de 51 680,26 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 septembre 2014, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 13 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Condamne la société Banque populaire Val-de-France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à Mme X..., épouse Y..., la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille dix-huit.

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site