CA Toulouse, 3e ch., 14 novembre 2025, n° 24/02472
TOULOUSE
Arrêt
Autre
14/11/2025
ARRÊT N° 551/2025
N° RG 24/02472 - N° Portalis DBVI-V-B7I-QLZM
EV/KM
Décision déférée du 28 Mai 2024
Président du TGI de [Localité 13]
( 24/00100)
MICHEL
[D] [W]
C/
[H] [W]
S.C.I. A & CIE
DESIGNATION MANDATAIRE AD HOC
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU QUATORZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANT
Monsieur [D] [W]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représenté par Me Cécile CHAPEAU, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMEES
Madame [H] [W]
[Adresse 8]
[Localité 6]
Représentée par Me Mathieu PORÉE, avocat au barreau de TOULOUSE
S.C.I. A & CIE
[Adresse 5]
[Localité 7]
Représentée par Me Mathieu PORÉE, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Octobre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant E. VET, Conseiller faisant fonction de président de chambre, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
E. VET, président
P. BALISTA, conseiller
S. GAUMET, conseiller
Greffier, lors des débats : K. MOKHTARI
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par E. VET, président, et par K. MOKHTARI, greffier de chambre
FAITS ET PROCÉDURE
M. [W] détient 135 des 300 parts de la Sci A&Cie, dont sa fille, gérante, détient 30 parts, son époux en détenant 135.
Par acte d'huissier du 21 février 2021, M. [W] a fait assigner en référé devant le tribunal judiciaire de Toulouse Mme [H] [W] et la Sci A&Cie aux fins d'obtenir la désignation d'un administrateur provisoire.
Suivant ordonnance du 28 avril 2021, le juge des référés a fait injonction aux parties de rencontrer un médiateur.
Au terme de cette médiation M. [W] a pu voir partiellement satisfait son droit à l'information d'associé.
Par ordonnance du 10 janvier 2023, l'affaire a été radiée.
Les parties n'ayant pu aboutir à un accord, par conclusions reçues le 10 janvier 2024, M. [W] a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle.
Par ordonnance contradictoire du 28 mai 2024, le juge des référés a :
- condamné la Sci A&Cie à payer à M. [D] [W] la somme provisionnelle de
17 237,90 € au titre de son compte courant d'associé, avec intérêts au taux égal à compter du 24 juillet 2020,
- débouté M.[D] [W] de sa demande en désignation d'un administrateur provisoire de la Sci A&Cie,
- débouté les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- laissé à chaque parties la charge de ses propres dépens.
Par déclaration du 18 juillet 2024, M. [D] [W] a relevé appel de la décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
M. [D] [W] dans ses dernières conclusions du 29 septembre 2025, demande à la cour au visa des articles 835 al 1er et 373 du code de procédure civile, de :
- infirmer la décision de première instance en ce qu'elle a débouté M. [W] de sa demande de désignation d'un administrateur provisoire au profit de la Sci A&Cie,
- infirmer la décision de première instance en ce qu'elle a débouté M. [W] de ses demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter la Sci A& Cie et Mme [W] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
- désigner tel administrateur provisoire, ou subsidiairement tel mandataire ad hoc, qu'il lui plaira, pour une durée de 6 mois renouvelable pour une nouvelle période de 6 mois s'il l'estime nécessaire, avec la mission suivante :
(i) Procéder à la représentation, à l'administration et à la gestion courante de la Sci A&Cie,
(ii) Se faire remettre tous documents, juridiques, comptables, fiscaux, financiers, commerciaux, tous identifiants et codes d'accès utiles, tant par la société A&Cie que son dirigeant, et/ou que par tout tiers détenteur, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel, à savoir notamment les associés de la Sci A&Cie et le cas échéant, l'expert-comptable, le ou les banquiers de la société, les services fiscaux, services administratifs et organismes sociaux, clients et fournisseurs, dont dépend la Sci A&Cie,
(iii) Examiner les comptes de la Sci A&Cie au titre des exercices clos entre les 31 décembre 2017 et le 31 décembre 2023, ainsi qu'au titre de l'exercice en cours,
(iv) Donner son avis sur la légitimité et l'intérêt des dépenses significatives de la Sci, et celles qui semblent étrangères et/ou contraire à l'intérêt social,
(v) Établir un rapport sur les mouvements de trésoreries étrangers à l'objet social et sur les mouvements significatifs
(vi) Mandater le cas échéant tout technicien aux fins de procéder à l'inscription des écritures non encore comptabilisées et /ou à la révision des comptes sociaux,
(vii) Le cas échéant, convoquer in fine les associés de la Sci A&Cie en Assemblée(s) Générale(s) et y participer, afin de statuer sur les rapports de la Gérance et les comptes rectifiés des exercices clos les 31 décembre 2017, 31 décembre 2018, 31 décembre 2019, 31 décembre 2020 et 31 décembre 2021, 31 décembre 2022 et 31 décembre 2023, 31 décembre 2024 ,
(viii) Répondre aux questions écrites des associés et intégrer les projets de résolution que souhaiteraient présenter les associés,
(ix) Dresser procès-verbal des réunions d'assemblées générales qui seront tenues par les associés,
(x) Permettre à M.[W] de mettre en 'uvre son droit à l'information et au titre de l'article 48 du Décret n°78-704 du 3 juillet 1978 sur les sociétés civiles,
- dire que l'administrateur provisoire ou le mandataire ad hoc établira un compte-rendu à la fin de sa mission,
- dire qu'en cas d'empêchement, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur simple requête,
- dire que sa rémunération sera supportée par la Sci A&Cie et fixer le montant de sa provision,
- autoriser l'administrateur provisoire ou le mandataire ad hoc à se faire assister de toute personne compétente de son choix, dont les coûts seront supportés par la Sci A&Cie,
- dire qu'en cas de difficulté, il en sera référé au juge des référés,
- ordonner la remise par Mme [W] à l'administrateur ou au mandataire ainsi désigné, sous astreinte de 100 € par jour de retard, à l'expiration d'un délai de 15 jours à compter de la signification de l'ordonnance à venir, toutes les pièces comptables, juridiques, sociales, commerciales et d'une façon générale tous documents, toutes pièces, tous identifiants et codes d'accès, et tous objets ainsi que tout ce qui intéresse la Sci A&Cie en général et qui est nécessaire à son fonctionnement, notamment les clefs et les cartes grises du véhicule dont la Sci A&Cie serait locataire ou propriétaire,
Sur la communication des documents sociaux,
- condamner Mme [H] [W] à remettre à M. [D] [W], sous astreinte de 300€ par jour de retard à compter d'un délai de huit jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir les documents suivants :
* les éléments justifiant de la variation du compte courant d'associé de M. [Y],
* les justificatifs comptables de l'entretien du [Adresse 1] pour 38 194,39 €,
* les justificatifs concernant le produit exceptionnel concernant également le [Adresse 1],
* les procès-verbaux des assemblées générales ordinaires et extraordinaires tenues le 17 juillet 2024,
En tout état de cause,
- condamner la Sci A&Cie au paiement d'une somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Mme [H] [W] et la Sci A&Cie dans leurs dernières conclusions du 28 mars 2025, demandent à la cour au visa des articles 32-1 et 835 du code de procédure civile et l'article 1240 du code civil, de :
- constater que les éléments produits par M. [W] ne sont pas de nature à caractériser une défaillance de la gérance ou un péril imminent de la Sci A&Cie,
- juger que les nouveaux griefs de M. [W] sont infondés,
- juger que l'attitude de M. [W] procède d'un abus de minorité et d'une stratégie
dilatoire,
- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
* débouté M. [D] [W] de sa demande de désignation d'un administrateur provisoire,
* débouté M. [D] [W] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. [D] [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner M. [D] [W] à payer à la société A&Cie, ainsi qu'à Mme [H] [W]:
* à chacune la somme de 5000 € à titre de dommages-et-intérêts,
- condamner M. [D] [W] au paiement d'une amende civile en application des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- condamner M. [D] [W] à payer à la société A&Cie, ainsi qu'à Mme [H] [W] la somme de 3 000 € TTC sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [D] [W] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le remboursement aux intimées des timbres fiscaux, avec distraction au profit de Me Poree, sur ses affirmations de droit, en application de l'article 669 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 octobre 2025.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence à la décision déférée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS
M. [W] souligne que ce n'est qu'en août 2025 qu'il a obtenu la communication de pièces sollicitées depuis le 1er juillet 2024, la trésorerie de la Sci fait l'objet de ponctions importantes et injustifiées des associés majoritaires qui ne sont divorcés que pour des raisons fiscales, M. [Y] étant très lourdement endetté auprès d'établissements de crédit.
Il critique la décision déférée en ce que :
' le premier juge a relevé des opérations irrégulières sans en tirer les conséquences quant à la désignation d'un administrateur provisoire alors que l'intérêt social est manifestement menacé lorsque des dépenses importantes sont engagées sans consultation des associés et/ou sans lien avec l'intérêt social,
' le premier juge a constaté des intitulés de dépenses sans rapport avec l'objet social de la société sans en déduire l'existence d'un préjudice pour les associés et n'a pas évoqué les cinq véhicules dont la location a été assumée par la Sci à hauteur d'environ 30'000 €,
' bien que relevant l'absence de convocation aux assemblées générales d'un associé le premier juge n'a pas considéré qu'il s'agissait d'une atteinte au fonctionnement de la société mettant en péril l'intérêt social.
Il fait valoir que :
' il résulte des bilans communiqués que certaines des opérations réalisées vont à l'encontre de l'intérêt social et pour d'autres auraient nécessité une décision d'assemblée générale: achat de matériel pour 16'000 €, cession de produits immobiliers pour 11'000 €, cession de matériel pour 20'000 €, révélant que les associés se servent de la trésorerie de la Sci à des fins personnelles pour l'acquisition et la revente de véhicules sans lien avec l'objet social de la société,
' le poste des charges d'exploitation a plus que doublé pendant les exercices 2017/2018 et des remboursements de compte courant d'associé été effectués sans être soumis à l'approbation de l'assemblée des associés,
' la société a disposé a minima de cinq véhicules en leasing, sans lien avec son objet et entraînant des dépenses importantes et a acquis une caravane et un mobilehome,
' le grand livre 2019 révèle l'imbrication de dépenses personnelles à Mme [W] avec celles de la société,
' l'intervention récurrente et onéreuse de la société de M. [Y] pour réaliser des travaux sans devis pose problème, les devis produits tardivement étant de complaisance,
' pendant plusieurs années il n'a pas été convoqué aux assemblées générales et sa signature a été falsifiée sur le compte rendu d'assemblée générale sur les comptes clos au 31 décembre 2017, par ailleurs il n'a pas eu accès aux documents sociaux pour les deux assemblées générales suivantes les comptes des exercices clos au 31 décembre 2018 et 31 décembre 2019 n'ont pas été approuvés et il a été convoqué hors délai aux assemblées générales de 2020,
' la situation financière de M. [Y] qui a vu ses parts saisies par le Crédit agricole en raison de dettes personnelles fait craindre que des décisions soient prises dans l'intérêt personnel des deux associés majoritaires, ainsi qu'il résulte de la résolution relative à la vente d'un bien de la Sci pour un montant de 600'000 € sans explication,
' depuis l'établissement des derniers comptes annuels au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2023 il a sollicité sans succès l'envoi de documents pouvant justifier de certaines dépenses, il s'oppose par ailleurs à la consultation des documents au siège de la Sci compte tenu de la mésentente entre les associés, il relève que la plaquette des comptes 2024 laisse apparaître la réalisation de travaux d'entretien pour près de 58'000 € sans que le détail des postes apparaisse et alors que l'année précédente cette dépense avoisinait déjà 46'000 €,
' à l'appui de sa demande subsidiaire de désignation d'un mandataire ad hoc il rappelle que les motifs de désignation tiennent aux mêmes dysfonctionnements de la société.
Mme [W] et la Sci A&Cie opposent que:
' jusqu'à l'exercice clos le 31 décembre 2017 les comptes ont été régulièrement approuvés par tous les associés, M. [W] a refusé de signer le procès-verbal de l'exercice suivant ni souhaité se déplacer pour l'exercice clos le 31 décembre 2019,
' M. [W] ne justifie pas des deux conditions justifiant la désignation d'un administrateur provisoire c'est-à-dire l'atteinte au fonctionnement normal de la société et l'existence d'un péril imminent alors que les comptes de la société sont bénéficiaires à hauteur de 69'984,78 €,
' M. [W] ne rapporte pas la preuve que les dépenses invoquées seraient contraires aux intérêts de la société ou même irrégulières,
' s'agissant de la signature contestée par M. [W] pour l'exercice clos le 31 décembre 2017, elles rappellent que l'ordre du jour portait sur l'approbation des comptes et l'affectation du résultat aux autres réserves et en tout état de cause les deux autres associés étant majoritaires auraient de toute façon voté en faveur de ces postes, ils n'avaient donc aucun intérêt à imiter la signature de l'associé minoritaire,
' M. [W] a parfaitement eu accès aux comptes sociaux, réalisant ses déclarations fiscales annuelles sur leur base et a, pendant plusieurs années, signé les procès-verbaux des assemblées générales, statuant sur les comptes annuels, tous les documents étant par ailleurs à la disposition des associés au siège social de la société,
' compte tenu du caractère familial de la société aucune convocation n'était adressée aux associés et ce n'est qu'à compter des difficultés rencontrées entre eux, en 2020, qu'il a été décidé de procéder par voie de convocation; par ailleurs, le retard aux convocations des assemblées générales d'octobre 2020 a été par la suite régularisé,
' l'absence de distribution des bénéfices résulte de leur affectation au remboursement des emprunts bancaires et de la charge des travaux d'entretien de l'actif immobilier,
' les deux fourgons qui ont été acquis ont été revendus pour des montants supérieurs à leur prix d'achat,
' M. [Y] a effectué des travaux d'entretien gratuitement et le mobilehome a été acquis afin de stocker la documentation sociale dans un lieu neutre,
' la procédure de saisie initiée par le Crédit agricole sur les parts de M. [Y] a fait l'objet d'un recours devant le juge de l'exécution,
' M. [W] n'avait sollicité aucune communication de documents sociaux dans le cadre de l'assignation initiale, cette demande ayant été présentée pour la première fois après réinscription du dossier après médiation et a été pour ce motif rejeté par le premier juge, les documents étant en tout état de cause à la disposition de l'associé minoritaire au siège social,
' M. [Y] facture ses prestations, à un prix inférieur à ceux du marché et depuis 2019, date à laquelle les crédits immobiliers ont été réglés, l'appel à d'autres artisans a été un échec,
' la demande de désignation d'un mandataire ad hoc doit être déclarée irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile,
' la situation financière de M. [Y] est sans conséquence sur le fonctionnement de la Sci dont la gestion reste saine et bénéficiaire.
- sur la désignation d'un administrateur judiciaire :
Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
La désignation d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle, qui suppose que soient réunies cumulativement deux conditions relatives à la gravité de la crise sociale, de nature à rendre impossible le fonctionnement normal de la société, et à l'urgence, du fait d'un péril imminent menaçant la société.
Le simple constat du non-respect des statuts ne justifie pas la désignation d'un administrateur provisoire dès lors que n'est pas démontré au surplus le péril imminent de la société.
En l'espèce, il est constant qu'il existe une mésentente entre les associés, M. [W], associé minoritaire d'un côté, sa fille et son ex-gendre, associés majoritaires de l'autre.
M. [W] conteste la signature du procès-verbal de l'assemblée générale du 25 juin 2018 et produit à cette fin un rapport établi de manière non contradictoire le 22 février 2021 par Mme [X] qui a conclu à des dissemblances entre le paraphe et la signature figurant sur le procès-verbal contesté et les pièces de comparaison remises par M. [W]. Les intimées opposent que M. [W] souffre de tremblements.
À ce stade, la cour ne peut tirer aucune conclusion de l'expertise établie de manière non contradictoire alors qu'au surplus M. [W] ne justifie pas avoir agi en nullité du procès-verbal.
Par ailleurs, M. [W] a été convoqué tardivement à deux assemblées générales en octobre 2020, la première aux fins d'approbation des comptes clos au 31 décembre 2018 et au 31 décembre 2019, la seconde pour voir statuer sur la cession d'un des lots de la Sci au prix de 600'000 €. Il n'est pas prétendu qu'une vente soit intervenue.
Enfin, aucune convocation ne lui a été adressée en 2021 et 2022.
En cours de procédure, M. [W] a été convoqué à une assemblée générale et finalement été destinataire du procès-verbal de l'assemblée générale du 17 juillet 2024 portant approbation des comptes des exercices clos depuis le 31 décembre 2020 et jusqu'au 31 décembre 2023.
M. [W] considère que le vote d'une rémunération à la gérante participe du risque social. Cependant, le vote d'une rémunération la gérante ne paraît pas de nature à mettre en péril la société au regard des dernières pièces comptables produites, quand bien même aucune rémunération n'était prévue à l'origine, les intimées indiquant par ailleurs dans leurs conclusions que cette rémunération est limitée à 500 € par mois.
Il résulte de l'article 22 des statuts qu'une décision collective doit être prise à la majorité des deux tiers pour tout investissement ou acquisition de biens, toute vente de biens mobiliers ou immobiliers appartenant à la société.
M. [W] invoque l'inutilité de travaux concernant des terrains équipés des réseaux nécessaires, voiries et parking. Si ces travaux sont évoqués dans les conclusions n°2 des intimées et si le projet de mise en lotissement de l'actif propriété de la société allant du [Adresse 4] au [Adresse 1] a été voté à la dernière assemblée générale, il n'est pas justifié de la réalité du coût de l'aménagement allégué. Par ailleurs, les intimées considèrent qu'en l'absence d'une approbation des deux tiers la valorisation du patrimoine ne sera pas réalisée et reconnaissent ainsi la capacité de blocage de l'associé minoritaire.
Par ailleurs, l'existence d'opérations comptables sans validation (achat de matériel pour 16'000 €, cession de produits immobiliers pour 11'000 € au bilan 2018, cession de matériel pour 20'000 € au bilan 2019) sans que la règle des deux tiers soit respectée ne caractérise pas le péril d'une société qui présentait un résultat bénéficiaire de 84'564 € pour l'exercice arrêté au 31 décembre 2023 ni même que ces opérations étaient contraires à ses intérêts.
Enfin, il est constant que M. [Y] travaille pour la Sas Sos Bâtiment dont il est président, au vu de l'extrait K bis produit et que la Sci fait travailler cette société pour la réalisation de travaux dont M. [W] reconnaît au moins partiellement la nécessité.
Il fait valoir que certaines dépenses sont excessives et souligne l'augmentation des postes de charges d'exploitation. Cependant il s'agit d'une Sci dont l'activité est la mise en valeur et la gestion d'un patrimoine immobilier important que les parties ont évalué à 3 millions d'euros et composé de plusieurs villas en location. Les charges d'exploitation ne paraissent donc pas disproportionnées, l'appelant ne produisant d'ailleurs aucun devis établissant le montant excessif des sommes figurant à ce poste.
Si M. [W] estime que la réalisation de travaux pour ces montants par la société dans laquelle travaille son ex-gendre sont contraires à l'intérêt social, la SCI n'apparaît pas paralysée dans son fonctionnement et la désignation d'un administrateur ne serait d'aucune utilité quant aux voies de droit qu'il lui appartient de mettre en oeuvre s'il estime devoir faire sanctionner une ou plusieurs atteintes passées à l'intérêt social.
Par ailleurs, les dépenses personnelles relevées dans le [Localité 11] livre en avril et décembre 2019 pour 178,12 et 167,70 € ne démontrent pas l'existence d'un péril alors que l'exercice 2019 révèlait un résultat d'exercice de 69'984,78 € .
M. [W] relève enfin que la société a disposé a minima de cinq véhicules ce qui semble déraisonnable. Cependant, les intimées indiquent sans être contestées sur ce point que deux des véhicules ont été revendus avec bénéfice et que le mobilehome a été acquis aux fins d'entreposer les pièces relatives à la société et de permettre leur consultation par les associés en un lieu neutre. En tout état de cause aucun péril de la société n'est démontré.
Aux termes des articles 1855 et 1856 du code civil, «'Les associés ont le droit d'obtenir, au moins une fois par an, communication des livres et des documents sociaux, et de
poser par écrit des questions sur la gestion sociale auxquelles il devra être répondu par écrit dans le délai d'un mois ». Et, «Les gérants doivent, au moins une fois dans l'année, rendre compte de leur gestion aux associés. Cette reddition de compte doit comporter un rapport écrit d'ensemble sur l'activité de la société au cours de l'année ou de l'exercice écoulé comportant l'indication des bénéfices réalisés ou prévisibles et des pertes encourues ou prévues».
M. [W] rappelle avoir adressé les 3 juillet et 27 octobre 2020 des mises en demeure à la société afin d'être autorisé à prendre connaissance des documents sociaux relatifs aux cinq derniers exercices et déplore que malgré la médiation intervenue en cours de la procédure de référé il n'a pas obtenu la totalité des pièces sollicitées. Il précise qu'il n'est pas envisageable d'organiser une consultation des documents sociaux au siège social compte tenu de la mésentente entre les associés.
La cour relève que les statuts de la société ne précisent pas les modalités de l'information donnée aux associés alors que l'article 48 du décret du 7 juillet 1978, prévoit que l'associé peut prendre par lui-même, au siège social, connaissance de tous les documents sociaux, correspondances factures et de tout document établi par la société ou reçu par elle au siège social. Dès lors, il revient à M. [W] de se déplacer pour prendre connaissance des pièces dont il réclame communication.
En l'état, M. [W] ne justifie pas qu'un refus lui a été opposé de consulter les pièces de la société au siège social, solution proposée par les intimées.
Par ailleurs, les intimées produisent une attestation de l'expert-comptable de la société certifiant avoir reçu M. [W] au moins deux fois les 3 octobre 2017 et 24 mai 2018 afin de lui expliquer le contenu des bilans de la société.
Enfin, l'existence d'une saisie-conservatoire sur les parts de l'un des associés n'induit pas un dysfonctionnement de la société en elle-même.
En conséquence, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de désignation d'un administrateur provisoire à défaut de caractérisation par M. [W] de l'existence d'un péril.
- sur la demande de désignation d'un mandataire ad hoc :
En vertu de l'article 564 du code de procédure civile,à peine d'irrecevabilité relevée d'office « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
Cependant, l'article 565 du code de procédure civile prévoit que les prétentions ne sont pas nouvelles, dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
L'irrecevabilité tirée de la nouveauté d'une demande peut être relevée d'office, sous réserve du respect du principe du contradictoire.
En l'espèce, si les intimées n'ont pas saisi la cour d'une demande d'irrecevabilité de cette demande qui ne figure pas au dispositif de leurs conclusions qui seul saisit la cour, elles ont développé ce moyen dans leurs conclusions et M. [W] a été mis en mesure d'y répondre, ce qu'il a fait.
En conséquence, ce moyen étant soulevé d'office par la cour, il n'y a pas lieu d'ordonner de réouverture des débats.
Il résulte de l'application combinée des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, sauf si ces dernières tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge ou si ces prétentions étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.
En première instance, M. [W] réclamait la désignation d'un administrateur provisoire. Cette demande ayant été rejetée, il a interjeté appel et a ajouté, à titre subsidiaire, une demande de désignation d'un mandataire ad hoc. Si les conditions exigées pour la désignation d'une administrateur provisoire et pour la désignation d'un mandataire ad hoc ne sont pas les mêmes et si leur mission diffère, les motifs qui conduisent un associé à solliciter de telles désignations sont liés et tiennent aux dysfonctionnements dénoncés dans la société en cause.
Cette demande subsidiaire devant la cour sera, en conséquence, déclarée recevable en ce qu'elle présente un lien étroit et est le complément d'une demande précédemment formulée devant le premier juge et rejetée par celui-ci.
Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit, si l'appelant ne démontre pas l'existence d'un péril imminent pour la société, il souligne des dysfonctionnements résultant essentiellement de :
- l'absence d'approbation des comptes de la société pour les exercices clos le 31 décembre 2018 et le 31 décembre 2019, pour lesquels aucun procès-verbal d'assemblée générale n'est produit,
- la critique des charges d'exploitation pour les années 2020 à 2024.
En conséquence, il convient de faire droit à sa demande de désignation d'un mandataire ad hoc aux fins de réunir une assemblée générale pour approbation des comptes de la société pour ces deux années. Par ailleurs, le mandataire ad hoc ne peut se voir confier une mission d'expertise et, s'agissant des critiques sur le montant des charges d'exploitation, l'associé minoritaire ne conteste pas qu'elles correspondent à des factures effectivement établies. Dès lors, il n'y a pas lieu d'ordonner au mandataire de reprendre pour chaque année les dépenses réalisées et de vérifier si elles correspondent à une facture effectivement établie, sa mission ne pouvant aller au-delà.
La gérante devra communiquer les pièces qui seront sollicitées par l'administrateur ad hoc, sans qu'il soit besoin, à ce stade de la procédure, d'ordonner une quelconque astreinte.
- sur la demande de communication de pièces à M. [W] :
M. [W] demande de voir:
- condamner Mme [H] [W] à lui remettre, sous astreinte de 300 € par jour de retard à compter d'un délai de huit jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir les documents suivants :
* les éléments justifiants de la variation du compte courant d'associé de M. [Y],
* les justificatifs comptables de l'entretien du [Adresse 1] pour
38 194,39 €,
* les justificatifs concernant le produit exceptionnel concernant également le [Adresse 1],
* les procès-verbaux des assemblées générales ordinaires et extraordinaires tenues le 17 juillet 2024.
Les intimés opposent que Mme [W] ne s'est jamais opposée à sa demande mais l'a seulement invité à consulter les documents au siège de la société ce à quoi l'appelant s'oppose en raison de la mésentente entre les parties.
La cour observe que le procès-verbal de délibération de l'assemblée générale qui s'est tenue le 17 juillet 2024 été remis à l'appelant en cours de procédure.
Ainsi qu'il a été dit en application de l'article 48 du décret du 7 juillet 1978, l'associé peut prendre de prendre par lui-même, au siège social, connaissance de tous les documents sociaux, correspondances factures et de tout document établi par la société ou reçu par elle au siège social.
La simple mésentente invoquée par M. [W] est insuffisante à caractériser une impossibilité pour lui à venir consulter les documents sociaux et il lui revient de se déplacer pour prendre connaissance des pièces dont il réclame communication alors qu'il ne démontre aucune opposition des autres associés à la consultation par lui des pièces de la société au siège social.
Il convient en conséquence de rejeter cette demande.
- sur la demande de prononcé d'une amende civile et de dommages-intérêts pour appel abusif :
L'engagement d'une action en justice et sa poursuite en appel constituent un droit dont l'exercice ne dégénère en abus qu'en cas de démonstration d'une faute.
Les intimées soulignent la mauvaise foi de M. [W] qui s'oppose systématiquement à toutes les décisions des autres associés et perturbe par les procédures qu'il engage le fonctionnement de la société en raison d'une vendetta personnelle contre M. [Y].
La société a connu certains dysfonctionnements, notamment dans les convocations aux assemblées générales de l'associé minoritaire. Par ailleurs, même si elle a échoué, M. [W] a accepté en cours de procédure une tentative de conciliation qui a été en partie fructueuse ce qui démontre une volonté d'apaisement. Enfin, il est partiellement fait droit aux demandes de l'appelant.
Au regard de ces éléments il ne peut être considéré que l'action engagée par M. [W] caractérise une faute.
Les demandes des intimées seront en conséquence rejetées.
- sur les demandes annexes:
Les dépens de première instance seront confirmés et chaque partie gardera la charge des dépens engagés par elle en cause d'appel.
L'équité commande de rejeter les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS:
La cour,
Statuant dans les limites de sa saisine:
Confirme la décision déférée,
Y ajoutant:
Rejette la demande en communication de pièces présentée par M. [D] [W],
Déclare recevable la demande en désignation d'un mandataire ad hoc par M. [D] [W],
Y faisant droit:
Désigne, Mme [V] [L]
[Adresse 2]
Mèl : [Courriel 10]
A défaut, M. [Z] [M]
[Adresse 9]
Mél : [Courriel 12]
en qualité de mandataire ad hoc pour accomplir la mission suivante :
- se faire communiquer tous les documents sociaux et comptables de la Sci A&Cie ainsi que tout document et informations qu'elle jugera utiles à sa mission,
- réunir une assemblée générale ordinaire pour statuer sur les exercices clos le 31 décembre 2018 et le 31 décembre 2019, aux fins d'approbation des comptes et de se prononcer sur l'affectation des résultats,
- Dit que la mission prendra fin après établissement des rapports pour les exercices
clos mentionnés, et dans un délai de 6 mois à compter du versement de la consignation,
- Dit que le mandataire ad hoc pourra se faire assister pour toutes personnes de son choix et dit que les honoraires seront supportés par la Sci A&Cie ,
- Fixe le montant de la provision à valoir sur les frais et honoraires du mandataire la somme de 2000 € que la Sci A&Cie devra consigner à la régie de la cour d'appel de Toulouse dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, faute de quoi la désignation du professionnel qualifié sera caduque,
- Dit qu'en cas de refus, d'empêchement ou de retard injustifié du professionnel qualifié, il sera procédé à son remplacement à la requête de la partie la plus diligente,
Déboute Mme [H] [W] et la Sci A&Cie de leur demande en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie gardera la charge des dépens d'appel engagés par elle,
Rejette la demande de Mme [H] [W] et la Sci A&Cie en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
K.MOKHTARI E.VET
ARRÊT N° 551/2025
N° RG 24/02472 - N° Portalis DBVI-V-B7I-QLZM
EV/KM
Décision déférée du 28 Mai 2024
Président du TGI de [Localité 13]
( 24/00100)
MICHEL
[D] [W]
C/
[H] [W]
S.C.I. A & CIE
DESIGNATION MANDATAIRE AD HOC
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU QUATORZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANT
Monsieur [D] [W]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représenté par Me Cécile CHAPEAU, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMEES
Madame [H] [W]
[Adresse 8]
[Localité 6]
Représentée par Me Mathieu PORÉE, avocat au barreau de TOULOUSE
S.C.I. A & CIE
[Adresse 5]
[Localité 7]
Représentée par Me Mathieu PORÉE, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Octobre 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant E. VET, Conseiller faisant fonction de président de chambre, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
E. VET, président
P. BALISTA, conseiller
S. GAUMET, conseiller
Greffier, lors des débats : K. MOKHTARI
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par E. VET, président, et par K. MOKHTARI, greffier de chambre
FAITS ET PROCÉDURE
M. [W] détient 135 des 300 parts de la Sci A&Cie, dont sa fille, gérante, détient 30 parts, son époux en détenant 135.
Par acte d'huissier du 21 février 2021, M. [W] a fait assigner en référé devant le tribunal judiciaire de Toulouse Mme [H] [W] et la Sci A&Cie aux fins d'obtenir la désignation d'un administrateur provisoire.
Suivant ordonnance du 28 avril 2021, le juge des référés a fait injonction aux parties de rencontrer un médiateur.
Au terme de cette médiation M. [W] a pu voir partiellement satisfait son droit à l'information d'associé.
Par ordonnance du 10 janvier 2023, l'affaire a été radiée.
Les parties n'ayant pu aboutir à un accord, par conclusions reçues le 10 janvier 2024, M. [W] a sollicité la réinscription de l'affaire au rôle.
Par ordonnance contradictoire du 28 mai 2024, le juge des référés a :
- condamné la Sci A&Cie à payer à M. [D] [W] la somme provisionnelle de
17 237,90 € au titre de son compte courant d'associé, avec intérêts au taux égal à compter du 24 juillet 2020,
- débouté M.[D] [W] de sa demande en désignation d'un administrateur provisoire de la Sci A&Cie,
- débouté les parties de leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- laissé à chaque parties la charge de ses propres dépens.
Par déclaration du 18 juillet 2024, M. [D] [W] a relevé appel de la décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
M. [D] [W] dans ses dernières conclusions du 29 septembre 2025, demande à la cour au visa des articles 835 al 1er et 373 du code de procédure civile, de :
- infirmer la décision de première instance en ce qu'elle a débouté M. [W] de sa demande de désignation d'un administrateur provisoire au profit de la Sci A&Cie,
- infirmer la décision de première instance en ce qu'elle a débouté M. [W] de ses demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter la Sci A& Cie et Mme [W] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
- désigner tel administrateur provisoire, ou subsidiairement tel mandataire ad hoc, qu'il lui plaira, pour une durée de 6 mois renouvelable pour une nouvelle période de 6 mois s'il l'estime nécessaire, avec la mission suivante :
(i) Procéder à la représentation, à l'administration et à la gestion courante de la Sci A&Cie,
(ii) Se faire remettre tous documents, juridiques, comptables, fiscaux, financiers, commerciaux, tous identifiants et codes d'accès utiles, tant par la société A&Cie que son dirigeant, et/ou que par tout tiers détenteur, sans que puisse lui être opposé le secret professionnel, à savoir notamment les associés de la Sci A&Cie et le cas échéant, l'expert-comptable, le ou les banquiers de la société, les services fiscaux, services administratifs et organismes sociaux, clients et fournisseurs, dont dépend la Sci A&Cie,
(iii) Examiner les comptes de la Sci A&Cie au titre des exercices clos entre les 31 décembre 2017 et le 31 décembre 2023, ainsi qu'au titre de l'exercice en cours,
(iv) Donner son avis sur la légitimité et l'intérêt des dépenses significatives de la Sci, et celles qui semblent étrangères et/ou contraire à l'intérêt social,
(v) Établir un rapport sur les mouvements de trésoreries étrangers à l'objet social et sur les mouvements significatifs
(vi) Mandater le cas échéant tout technicien aux fins de procéder à l'inscription des écritures non encore comptabilisées et /ou à la révision des comptes sociaux,
(vii) Le cas échéant, convoquer in fine les associés de la Sci A&Cie en Assemblée(s) Générale(s) et y participer, afin de statuer sur les rapports de la Gérance et les comptes rectifiés des exercices clos les 31 décembre 2017, 31 décembre 2018, 31 décembre 2019, 31 décembre 2020 et 31 décembre 2021, 31 décembre 2022 et 31 décembre 2023, 31 décembre 2024 ,
(viii) Répondre aux questions écrites des associés et intégrer les projets de résolution que souhaiteraient présenter les associés,
(ix) Dresser procès-verbal des réunions d'assemblées générales qui seront tenues par les associés,
(x) Permettre à M.[W] de mettre en 'uvre son droit à l'information et au titre de l'article 48 du Décret n°78-704 du 3 juillet 1978 sur les sociétés civiles,
- dire que l'administrateur provisoire ou le mandataire ad hoc établira un compte-rendu à la fin de sa mission,
- dire qu'en cas d'empêchement, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance rendue sur simple requête,
- dire que sa rémunération sera supportée par la Sci A&Cie et fixer le montant de sa provision,
- autoriser l'administrateur provisoire ou le mandataire ad hoc à se faire assister de toute personne compétente de son choix, dont les coûts seront supportés par la Sci A&Cie,
- dire qu'en cas de difficulté, il en sera référé au juge des référés,
- ordonner la remise par Mme [W] à l'administrateur ou au mandataire ainsi désigné, sous astreinte de 100 € par jour de retard, à l'expiration d'un délai de 15 jours à compter de la signification de l'ordonnance à venir, toutes les pièces comptables, juridiques, sociales, commerciales et d'une façon générale tous documents, toutes pièces, tous identifiants et codes d'accès, et tous objets ainsi que tout ce qui intéresse la Sci A&Cie en général et qui est nécessaire à son fonctionnement, notamment les clefs et les cartes grises du véhicule dont la Sci A&Cie serait locataire ou propriétaire,
Sur la communication des documents sociaux,
- condamner Mme [H] [W] à remettre à M. [D] [W], sous astreinte de 300€ par jour de retard à compter d'un délai de huit jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir les documents suivants :
* les éléments justifiant de la variation du compte courant d'associé de M. [Y],
* les justificatifs comptables de l'entretien du [Adresse 1] pour 38 194,39 €,
* les justificatifs concernant le produit exceptionnel concernant également le [Adresse 1],
* les procès-verbaux des assemblées générales ordinaires et extraordinaires tenues le 17 juillet 2024,
En tout état de cause,
- condamner la Sci A&Cie au paiement d'une somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Mme [H] [W] et la Sci A&Cie dans leurs dernières conclusions du 28 mars 2025, demandent à la cour au visa des articles 32-1 et 835 du code de procédure civile et l'article 1240 du code civil, de :
- constater que les éléments produits par M. [W] ne sont pas de nature à caractériser une défaillance de la gérance ou un péril imminent de la Sci A&Cie,
- juger que les nouveaux griefs de M. [W] sont infondés,
- juger que l'attitude de M. [W] procède d'un abus de minorité et d'une stratégie
dilatoire,
- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :
* débouté M. [D] [W] de sa demande de désignation d'un administrateur provisoire,
* débouté M. [D] [W] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. [D] [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner M. [D] [W] à payer à la société A&Cie, ainsi qu'à Mme [H] [W]:
* à chacune la somme de 5000 € à titre de dommages-et-intérêts,
- condamner M. [D] [W] au paiement d'une amende civile en application des dispositions de l'article 32-1 du code de procédure civile,
- condamner M. [D] [W] à payer à la société A&Cie, ainsi qu'à Mme [H] [W] la somme de 3 000 € TTC sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [D] [W] aux entiers dépens de l'instance, en ce compris le remboursement aux intimées des timbres fiscaux, avec distraction au profit de Me Poree, sur ses affirmations de droit, en application de l'article 669 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 octobre 2025.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence à la décision déférée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS
M. [W] souligne que ce n'est qu'en août 2025 qu'il a obtenu la communication de pièces sollicitées depuis le 1er juillet 2024, la trésorerie de la Sci fait l'objet de ponctions importantes et injustifiées des associés majoritaires qui ne sont divorcés que pour des raisons fiscales, M. [Y] étant très lourdement endetté auprès d'établissements de crédit.
Il critique la décision déférée en ce que :
' le premier juge a relevé des opérations irrégulières sans en tirer les conséquences quant à la désignation d'un administrateur provisoire alors que l'intérêt social est manifestement menacé lorsque des dépenses importantes sont engagées sans consultation des associés et/ou sans lien avec l'intérêt social,
' le premier juge a constaté des intitulés de dépenses sans rapport avec l'objet social de la société sans en déduire l'existence d'un préjudice pour les associés et n'a pas évoqué les cinq véhicules dont la location a été assumée par la Sci à hauteur d'environ 30'000 €,
' bien que relevant l'absence de convocation aux assemblées générales d'un associé le premier juge n'a pas considéré qu'il s'agissait d'une atteinte au fonctionnement de la société mettant en péril l'intérêt social.
Il fait valoir que :
' il résulte des bilans communiqués que certaines des opérations réalisées vont à l'encontre de l'intérêt social et pour d'autres auraient nécessité une décision d'assemblée générale: achat de matériel pour 16'000 €, cession de produits immobiliers pour 11'000 €, cession de matériel pour 20'000 €, révélant que les associés se servent de la trésorerie de la Sci à des fins personnelles pour l'acquisition et la revente de véhicules sans lien avec l'objet social de la société,
' le poste des charges d'exploitation a plus que doublé pendant les exercices 2017/2018 et des remboursements de compte courant d'associé été effectués sans être soumis à l'approbation de l'assemblée des associés,
' la société a disposé a minima de cinq véhicules en leasing, sans lien avec son objet et entraînant des dépenses importantes et a acquis une caravane et un mobilehome,
' le grand livre 2019 révèle l'imbrication de dépenses personnelles à Mme [W] avec celles de la société,
' l'intervention récurrente et onéreuse de la société de M. [Y] pour réaliser des travaux sans devis pose problème, les devis produits tardivement étant de complaisance,
' pendant plusieurs années il n'a pas été convoqué aux assemblées générales et sa signature a été falsifiée sur le compte rendu d'assemblée générale sur les comptes clos au 31 décembre 2017, par ailleurs il n'a pas eu accès aux documents sociaux pour les deux assemblées générales suivantes les comptes des exercices clos au 31 décembre 2018 et 31 décembre 2019 n'ont pas été approuvés et il a été convoqué hors délai aux assemblées générales de 2020,
' la situation financière de M. [Y] qui a vu ses parts saisies par le Crédit agricole en raison de dettes personnelles fait craindre que des décisions soient prises dans l'intérêt personnel des deux associés majoritaires, ainsi qu'il résulte de la résolution relative à la vente d'un bien de la Sci pour un montant de 600'000 € sans explication,
' depuis l'établissement des derniers comptes annuels au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2023 il a sollicité sans succès l'envoi de documents pouvant justifier de certaines dépenses, il s'oppose par ailleurs à la consultation des documents au siège de la Sci compte tenu de la mésentente entre les associés, il relève que la plaquette des comptes 2024 laisse apparaître la réalisation de travaux d'entretien pour près de 58'000 € sans que le détail des postes apparaisse et alors que l'année précédente cette dépense avoisinait déjà 46'000 €,
' à l'appui de sa demande subsidiaire de désignation d'un mandataire ad hoc il rappelle que les motifs de désignation tiennent aux mêmes dysfonctionnements de la société.
Mme [W] et la Sci A&Cie opposent que:
' jusqu'à l'exercice clos le 31 décembre 2017 les comptes ont été régulièrement approuvés par tous les associés, M. [W] a refusé de signer le procès-verbal de l'exercice suivant ni souhaité se déplacer pour l'exercice clos le 31 décembre 2019,
' M. [W] ne justifie pas des deux conditions justifiant la désignation d'un administrateur provisoire c'est-à-dire l'atteinte au fonctionnement normal de la société et l'existence d'un péril imminent alors que les comptes de la société sont bénéficiaires à hauteur de 69'984,78 €,
' M. [W] ne rapporte pas la preuve que les dépenses invoquées seraient contraires aux intérêts de la société ou même irrégulières,
' s'agissant de la signature contestée par M. [W] pour l'exercice clos le 31 décembre 2017, elles rappellent que l'ordre du jour portait sur l'approbation des comptes et l'affectation du résultat aux autres réserves et en tout état de cause les deux autres associés étant majoritaires auraient de toute façon voté en faveur de ces postes, ils n'avaient donc aucun intérêt à imiter la signature de l'associé minoritaire,
' M. [W] a parfaitement eu accès aux comptes sociaux, réalisant ses déclarations fiscales annuelles sur leur base et a, pendant plusieurs années, signé les procès-verbaux des assemblées générales, statuant sur les comptes annuels, tous les documents étant par ailleurs à la disposition des associés au siège social de la société,
' compte tenu du caractère familial de la société aucune convocation n'était adressée aux associés et ce n'est qu'à compter des difficultés rencontrées entre eux, en 2020, qu'il a été décidé de procéder par voie de convocation; par ailleurs, le retard aux convocations des assemblées générales d'octobre 2020 a été par la suite régularisé,
' l'absence de distribution des bénéfices résulte de leur affectation au remboursement des emprunts bancaires et de la charge des travaux d'entretien de l'actif immobilier,
' les deux fourgons qui ont été acquis ont été revendus pour des montants supérieurs à leur prix d'achat,
' M. [Y] a effectué des travaux d'entretien gratuitement et le mobilehome a été acquis afin de stocker la documentation sociale dans un lieu neutre,
' la procédure de saisie initiée par le Crédit agricole sur les parts de M. [Y] a fait l'objet d'un recours devant le juge de l'exécution,
' M. [W] n'avait sollicité aucune communication de documents sociaux dans le cadre de l'assignation initiale, cette demande ayant été présentée pour la première fois après réinscription du dossier après médiation et a été pour ce motif rejeté par le premier juge, les documents étant en tout état de cause à la disposition de l'associé minoritaire au siège social,
' M. [Y] facture ses prestations, à un prix inférieur à ceux du marché et depuis 2019, date à laquelle les crédits immobiliers ont été réglés, l'appel à d'autres artisans a été un échec,
' la demande de désignation d'un mandataire ad hoc doit être déclarée irrecevable en application de l'article 564 du code de procédure civile,
' la situation financière de M. [Y] est sans conséquence sur le fonctionnement de la Sci dont la gestion reste saine et bénéficiaire.
- sur la désignation d'un administrateur judiciaire :
Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
La désignation d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle, qui suppose que soient réunies cumulativement deux conditions relatives à la gravité de la crise sociale, de nature à rendre impossible le fonctionnement normal de la société, et à l'urgence, du fait d'un péril imminent menaçant la société.
Le simple constat du non-respect des statuts ne justifie pas la désignation d'un administrateur provisoire dès lors que n'est pas démontré au surplus le péril imminent de la société.
En l'espèce, il est constant qu'il existe une mésentente entre les associés, M. [W], associé minoritaire d'un côté, sa fille et son ex-gendre, associés majoritaires de l'autre.
M. [W] conteste la signature du procès-verbal de l'assemblée générale du 25 juin 2018 et produit à cette fin un rapport établi de manière non contradictoire le 22 février 2021 par Mme [X] qui a conclu à des dissemblances entre le paraphe et la signature figurant sur le procès-verbal contesté et les pièces de comparaison remises par M. [W]. Les intimées opposent que M. [W] souffre de tremblements.
À ce stade, la cour ne peut tirer aucune conclusion de l'expertise établie de manière non contradictoire alors qu'au surplus M. [W] ne justifie pas avoir agi en nullité du procès-verbal.
Par ailleurs, M. [W] a été convoqué tardivement à deux assemblées générales en octobre 2020, la première aux fins d'approbation des comptes clos au 31 décembre 2018 et au 31 décembre 2019, la seconde pour voir statuer sur la cession d'un des lots de la Sci au prix de 600'000 €. Il n'est pas prétendu qu'une vente soit intervenue.
Enfin, aucune convocation ne lui a été adressée en 2021 et 2022.
En cours de procédure, M. [W] a été convoqué à une assemblée générale et finalement été destinataire du procès-verbal de l'assemblée générale du 17 juillet 2024 portant approbation des comptes des exercices clos depuis le 31 décembre 2020 et jusqu'au 31 décembre 2023.
M. [W] considère que le vote d'une rémunération à la gérante participe du risque social. Cependant, le vote d'une rémunération la gérante ne paraît pas de nature à mettre en péril la société au regard des dernières pièces comptables produites, quand bien même aucune rémunération n'était prévue à l'origine, les intimées indiquant par ailleurs dans leurs conclusions que cette rémunération est limitée à 500 € par mois.
Il résulte de l'article 22 des statuts qu'une décision collective doit être prise à la majorité des deux tiers pour tout investissement ou acquisition de biens, toute vente de biens mobiliers ou immobiliers appartenant à la société.
M. [W] invoque l'inutilité de travaux concernant des terrains équipés des réseaux nécessaires, voiries et parking. Si ces travaux sont évoqués dans les conclusions n°2 des intimées et si le projet de mise en lotissement de l'actif propriété de la société allant du [Adresse 4] au [Adresse 1] a été voté à la dernière assemblée générale, il n'est pas justifié de la réalité du coût de l'aménagement allégué. Par ailleurs, les intimées considèrent qu'en l'absence d'une approbation des deux tiers la valorisation du patrimoine ne sera pas réalisée et reconnaissent ainsi la capacité de blocage de l'associé minoritaire.
Par ailleurs, l'existence d'opérations comptables sans validation (achat de matériel pour 16'000 €, cession de produits immobiliers pour 11'000 € au bilan 2018, cession de matériel pour 20'000 € au bilan 2019) sans que la règle des deux tiers soit respectée ne caractérise pas le péril d'une société qui présentait un résultat bénéficiaire de 84'564 € pour l'exercice arrêté au 31 décembre 2023 ni même que ces opérations étaient contraires à ses intérêts.
Enfin, il est constant que M. [Y] travaille pour la Sas Sos Bâtiment dont il est président, au vu de l'extrait K bis produit et que la Sci fait travailler cette société pour la réalisation de travaux dont M. [W] reconnaît au moins partiellement la nécessité.
Il fait valoir que certaines dépenses sont excessives et souligne l'augmentation des postes de charges d'exploitation. Cependant il s'agit d'une Sci dont l'activité est la mise en valeur et la gestion d'un patrimoine immobilier important que les parties ont évalué à 3 millions d'euros et composé de plusieurs villas en location. Les charges d'exploitation ne paraissent donc pas disproportionnées, l'appelant ne produisant d'ailleurs aucun devis établissant le montant excessif des sommes figurant à ce poste.
Si M. [W] estime que la réalisation de travaux pour ces montants par la société dans laquelle travaille son ex-gendre sont contraires à l'intérêt social, la SCI n'apparaît pas paralysée dans son fonctionnement et la désignation d'un administrateur ne serait d'aucune utilité quant aux voies de droit qu'il lui appartient de mettre en oeuvre s'il estime devoir faire sanctionner une ou plusieurs atteintes passées à l'intérêt social.
Par ailleurs, les dépenses personnelles relevées dans le [Localité 11] livre en avril et décembre 2019 pour 178,12 et 167,70 € ne démontrent pas l'existence d'un péril alors que l'exercice 2019 révèlait un résultat d'exercice de 69'984,78 € .
M. [W] relève enfin que la société a disposé a minima de cinq véhicules ce qui semble déraisonnable. Cependant, les intimées indiquent sans être contestées sur ce point que deux des véhicules ont été revendus avec bénéfice et que le mobilehome a été acquis aux fins d'entreposer les pièces relatives à la société et de permettre leur consultation par les associés en un lieu neutre. En tout état de cause aucun péril de la société n'est démontré.
Aux termes des articles 1855 et 1856 du code civil, «'Les associés ont le droit d'obtenir, au moins une fois par an, communication des livres et des documents sociaux, et de
poser par écrit des questions sur la gestion sociale auxquelles il devra être répondu par écrit dans le délai d'un mois ». Et, «Les gérants doivent, au moins une fois dans l'année, rendre compte de leur gestion aux associés. Cette reddition de compte doit comporter un rapport écrit d'ensemble sur l'activité de la société au cours de l'année ou de l'exercice écoulé comportant l'indication des bénéfices réalisés ou prévisibles et des pertes encourues ou prévues».
M. [W] rappelle avoir adressé les 3 juillet et 27 octobre 2020 des mises en demeure à la société afin d'être autorisé à prendre connaissance des documents sociaux relatifs aux cinq derniers exercices et déplore que malgré la médiation intervenue en cours de la procédure de référé il n'a pas obtenu la totalité des pièces sollicitées. Il précise qu'il n'est pas envisageable d'organiser une consultation des documents sociaux au siège social compte tenu de la mésentente entre les associés.
La cour relève que les statuts de la société ne précisent pas les modalités de l'information donnée aux associés alors que l'article 48 du décret du 7 juillet 1978, prévoit que l'associé peut prendre par lui-même, au siège social, connaissance de tous les documents sociaux, correspondances factures et de tout document établi par la société ou reçu par elle au siège social. Dès lors, il revient à M. [W] de se déplacer pour prendre connaissance des pièces dont il réclame communication.
En l'état, M. [W] ne justifie pas qu'un refus lui a été opposé de consulter les pièces de la société au siège social, solution proposée par les intimées.
Par ailleurs, les intimées produisent une attestation de l'expert-comptable de la société certifiant avoir reçu M. [W] au moins deux fois les 3 octobre 2017 et 24 mai 2018 afin de lui expliquer le contenu des bilans de la société.
Enfin, l'existence d'une saisie-conservatoire sur les parts de l'un des associés n'induit pas un dysfonctionnement de la société en elle-même.
En conséquence, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de désignation d'un administrateur provisoire à défaut de caractérisation par M. [W] de l'existence d'un péril.
- sur la demande de désignation d'un mandataire ad hoc :
En vertu de l'article 564 du code de procédure civile,à peine d'irrecevabilité relevée d'office « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
Cependant, l'article 565 du code de procédure civile prévoit que les prétentions ne sont pas nouvelles, dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
L'irrecevabilité tirée de la nouveauté d'une demande peut être relevée d'office, sous réserve du respect du principe du contradictoire.
En l'espèce, si les intimées n'ont pas saisi la cour d'une demande d'irrecevabilité de cette demande qui ne figure pas au dispositif de leurs conclusions qui seul saisit la cour, elles ont développé ce moyen dans leurs conclusions et M. [W] a été mis en mesure d'y répondre, ce qu'il a fait.
En conséquence, ce moyen étant soulevé d'office par la cour, il n'y a pas lieu d'ordonner de réouverture des débats.
Il résulte de l'application combinée des articles 564, 565 et 566 du code de procédure civile que les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, sauf si ces dernières tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge ou si ces prétentions étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément.
En première instance, M. [W] réclamait la désignation d'un administrateur provisoire. Cette demande ayant été rejetée, il a interjeté appel et a ajouté, à titre subsidiaire, une demande de désignation d'un mandataire ad hoc. Si les conditions exigées pour la désignation d'une administrateur provisoire et pour la désignation d'un mandataire ad hoc ne sont pas les mêmes et si leur mission diffère, les motifs qui conduisent un associé à solliciter de telles désignations sont liés et tiennent aux dysfonctionnements dénoncés dans la société en cause.
Cette demande subsidiaire devant la cour sera, en conséquence, déclarée recevable en ce qu'elle présente un lien étroit et est le complément d'une demande précédemment formulée devant le premier juge et rejetée par celui-ci.
Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit, si l'appelant ne démontre pas l'existence d'un péril imminent pour la société, il souligne des dysfonctionnements résultant essentiellement de :
- l'absence d'approbation des comptes de la société pour les exercices clos le 31 décembre 2018 et le 31 décembre 2019, pour lesquels aucun procès-verbal d'assemblée générale n'est produit,
- la critique des charges d'exploitation pour les années 2020 à 2024.
En conséquence, il convient de faire droit à sa demande de désignation d'un mandataire ad hoc aux fins de réunir une assemblée générale pour approbation des comptes de la société pour ces deux années. Par ailleurs, le mandataire ad hoc ne peut se voir confier une mission d'expertise et, s'agissant des critiques sur le montant des charges d'exploitation, l'associé minoritaire ne conteste pas qu'elles correspondent à des factures effectivement établies. Dès lors, il n'y a pas lieu d'ordonner au mandataire de reprendre pour chaque année les dépenses réalisées et de vérifier si elles correspondent à une facture effectivement établie, sa mission ne pouvant aller au-delà.
La gérante devra communiquer les pièces qui seront sollicitées par l'administrateur ad hoc, sans qu'il soit besoin, à ce stade de la procédure, d'ordonner une quelconque astreinte.
- sur la demande de communication de pièces à M. [W] :
M. [W] demande de voir:
- condamner Mme [H] [W] à lui remettre, sous astreinte de 300 € par jour de retard à compter d'un délai de huit jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir les documents suivants :
* les éléments justifiants de la variation du compte courant d'associé de M. [Y],
* les justificatifs comptables de l'entretien du [Adresse 1] pour
38 194,39 €,
* les justificatifs concernant le produit exceptionnel concernant également le [Adresse 1],
* les procès-verbaux des assemblées générales ordinaires et extraordinaires tenues le 17 juillet 2024.
Les intimés opposent que Mme [W] ne s'est jamais opposée à sa demande mais l'a seulement invité à consulter les documents au siège de la société ce à quoi l'appelant s'oppose en raison de la mésentente entre les parties.
La cour observe que le procès-verbal de délibération de l'assemblée générale qui s'est tenue le 17 juillet 2024 été remis à l'appelant en cours de procédure.
Ainsi qu'il a été dit en application de l'article 48 du décret du 7 juillet 1978, l'associé peut prendre de prendre par lui-même, au siège social, connaissance de tous les documents sociaux, correspondances factures et de tout document établi par la société ou reçu par elle au siège social.
La simple mésentente invoquée par M. [W] est insuffisante à caractériser une impossibilité pour lui à venir consulter les documents sociaux et il lui revient de se déplacer pour prendre connaissance des pièces dont il réclame communication alors qu'il ne démontre aucune opposition des autres associés à la consultation par lui des pièces de la société au siège social.
Il convient en conséquence de rejeter cette demande.
- sur la demande de prononcé d'une amende civile et de dommages-intérêts pour appel abusif :
L'engagement d'une action en justice et sa poursuite en appel constituent un droit dont l'exercice ne dégénère en abus qu'en cas de démonstration d'une faute.
Les intimées soulignent la mauvaise foi de M. [W] qui s'oppose systématiquement à toutes les décisions des autres associés et perturbe par les procédures qu'il engage le fonctionnement de la société en raison d'une vendetta personnelle contre M. [Y].
La société a connu certains dysfonctionnements, notamment dans les convocations aux assemblées générales de l'associé minoritaire. Par ailleurs, même si elle a échoué, M. [W] a accepté en cours de procédure une tentative de conciliation qui a été en partie fructueuse ce qui démontre une volonté d'apaisement. Enfin, il est partiellement fait droit aux demandes de l'appelant.
Au regard de ces éléments il ne peut être considéré que l'action engagée par M. [W] caractérise une faute.
Les demandes des intimées seront en conséquence rejetées.
- sur les demandes annexes:
Les dépens de première instance seront confirmés et chaque partie gardera la charge des dépens engagés par elle en cause d'appel.
L'équité commande de rejeter les demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS:
La cour,
Statuant dans les limites de sa saisine:
Confirme la décision déférée,
Y ajoutant:
Rejette la demande en communication de pièces présentée par M. [D] [W],
Déclare recevable la demande en désignation d'un mandataire ad hoc par M. [D] [W],
Y faisant droit:
Désigne, Mme [V] [L]
[Adresse 2]
Mèl : [Courriel 10]
A défaut, M. [Z] [M]
[Adresse 9]
Mél : [Courriel 12]
en qualité de mandataire ad hoc pour accomplir la mission suivante :
- se faire communiquer tous les documents sociaux et comptables de la Sci A&Cie ainsi que tout document et informations qu'elle jugera utiles à sa mission,
- réunir une assemblée générale ordinaire pour statuer sur les exercices clos le 31 décembre 2018 et le 31 décembre 2019, aux fins d'approbation des comptes et de se prononcer sur l'affectation des résultats,
- Dit que la mission prendra fin après établissement des rapports pour les exercices
clos mentionnés, et dans un délai de 6 mois à compter du versement de la consignation,
- Dit que le mandataire ad hoc pourra se faire assister pour toutes personnes de son choix et dit que les honoraires seront supportés par la Sci A&Cie ,
- Fixe le montant de la provision à valoir sur les frais et honoraires du mandataire la somme de 2000 € que la Sci A&Cie devra consigner à la régie de la cour d'appel de Toulouse dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision, faute de quoi la désignation du professionnel qualifié sera caduque,
- Dit qu'en cas de refus, d'empêchement ou de retard injustifié du professionnel qualifié, il sera procédé à son remplacement à la requête de la partie la plus diligente,
Déboute Mme [H] [W] et la Sci A&Cie de leur demande en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie gardera la charge des dépens d'appel engagés par elle,
Rejette la demande de Mme [H] [W] et la Sci A&Cie en application de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
K.MOKHTARI E.VET