CA Orléans, ch. com., 14 janvier 2021, n° 19/032271
ORLÉANS
Arrêt
Infirmation partielle
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
CAILLARD
Conseillers :
CHENOT, MICHEL
EXPOSE DU LITIGE :
Le 8 octobre 2014, la SARL Bati Loire, représentée par son gérant M. O... M..., a conclu avec la société Caisse d'épargne Loire-Centre (la Caisse d'épargne) une convention d'ouverture de compte courant.
Le 19 novembre suivant, la Caisse d'épargne a consenti à la société Bati Loire, sur ce compte courant, une autorisation de découvert à durée indéterminée d'un montant maximum de 30 000 euros.
Ce même jour, M. M... s'est rendu caution solidaire, dans la limite de 39 000 euros et jusqu'au 1er décembre 2019 de tous les engagements souscrits par la société Batiloire envers la Caisse d'épargne.
Par courrier recommandé du 6 juin 2016 réceptionné le 7 juin suivant, la Caisse d'épargne a informé la société Bati Loire qu'elle résiliait à effet au 6 août 2016 son autorisation de découvert présentée comme étant limitée à 12 000 euros et par courrier recommandé du 16 août 2016 réceptionné le 20 août suivant, la Caisse d'épargne a mis en demeure la société Bati Loire de lui régler sous quinzaine la somme de 12 899,21 euros correspondant au montant de son découvert en compte courant, sous peine de résiliation de la convention de compte.
Par courrier recommandé du 17 novembre 2016 réceptionné le 21 novembre suivant, la Caisse d'épargne a adressé à M. M... copie du courrier qu'elle avait adressé le 16 août 2016 à la société Bati Loire et l'a mis en demeure de lui régler sous huitaine, en sa qualité de caution, la somme sus-énoncée de 12 899,21 euros.
Par actes du 7 février 2017, la Caisse d'épargne a fait assigner la société Bati Loire et M. M... devant le tribunal de commerce d'Orléans aux fins de les entendre solidairement condamner à lui payer la somme de 12 899,21 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 août 2016, capitalisés annuellement en application de l'article 1154 [ancien] du code civil, outre une indemnité de procédure de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Bati Loire a été placée en liquidation judiciaire le 22 février 2017 par le tribunal de commerce d'Orléans.
Le 8 mars 2017, la Caisse d'épargne a déclaré une créance de 12 960,98 euros, dont 12 899,21 euros en principal, au passif de la liquidation judiciaire de la société Bati Loire et, par acte du 28 mars suivant, joint à l'instance principale, la banque a fait assigner la SELARL [...], ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la société Bati Loire, à fin d'entendre fixer sa créance au passif de ladite liquidation à la somme de 12 960,98 euros.
Par jugement réputé contradictoire du 22 mars 2018, le tribunal de commerce d'Orléans a :
-dit la Caisse d'épargne recevable et bien fondée en sa demande d'intervention forcée de Maître D... F..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Bati Loire
-ordonné à Maître F..., ès qualités, d'inscrire la créance de 12 899,21 euros de la Caisse d'épargne au passif de la société Bati Loire
-dit que M. M... est toujours engagé vis-à-vis de la Caisse d'épargne au titre de son engagement de caution
-débouté M. M... de « sa demande de disproportion » de son engagement de caution du 19 novembre 2014
-condamné M. M... à payer pour solde du prêt 12 899,21euros au titre de son engagement de caution du 19 novembre 2014, avec intérêts légaux à compter du 16 août 2016
-ordonné la capitalisation annuelle des intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement
-débouté M. M... de sa demande de dommages et intérêts de 12 899,21 euros
-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire
-condamné M. M... à payer à la Caisse d'épargne la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires
-condamné M. M... aux dépens de l'instance
Pour statuer comme ils l'ont fait, les premiers juges ont retenu en substance qu'il importait peu que M. M... ait cessé d'être le gérant de la société Bati Loire le 18 mars 2015, dès lors qu'il n'avait pas sollicité de la banque la levée de son engagement de caution, que cet engagement, inférieur à la valeur nette de son patrimoine, n'apparaissait pas manifestement disproportionné à ses biens et revenus et qu'enfin M. M... ne pouvait qu'être débouté de sa demande de dommages et intérêts, faute de justifier du préjudice dont il réclamait réparation.
M. M... a relevé appel de cette décision par déclaration du 7 octobre 2019, en critiquant expressément tous les chefs du jugement en cause, et en indiquant intimer à la fois la Caisse d'épargne et la SELARL [...], ès qualités.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 21 septembre 2020, dont la SELARL [...], ès qualités, a refusé de recevoir signification en raison de la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Bati Loire le 25 avril 2018,auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé de ses moyens,M. M... demande à la cour, au visa des articles 1134 ancien, 1105, 1147 ancien, 1231, 123l-6, 1347 et suivants, 1240, 1343-5 et 2293 du code civil, L. 332-1, L. 333-1 et L. 333-2 du code de la consommation, de :
-le dire et juger recevable et bien fondé en son appel,
-réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Or1éans le 22 mars 2018 en son entier dispositif
En conséquence :
A titre principal :
-dire et juger la créance « revendiquée » par la SA Caisse d'épargne infondée,
-débouter la SA Caisse d'épargne de l'ensemble de ses demandes, ns et conclusions,
A titre subsidiaire
-dire et juger que M. M... « n'est redevable » d'aucun engagement de caution à titre personnel au bénéfice de la Caisse d'épargne dans l'intérêt de la SARL Bati Loire ,
-débouter la Caisse d'épargne de l'ensemble de ses demandes, ns et conclusions,
A titre infiniment subsidiaire et à titre reconventionnel :
-dire et juger que la Caisse d'épargne a engagé sa responsabilité professionnelle, en ne respectant pas son obligation de mise en garde à son égard
-condamner la Caisse d'épargne à l'indemniser à hauteur de la créance dont elle se prévaut, nonobstant l'application des dispositions de l'article 2293 du code civil,
-prononcer la compensation entre la créance de la Caisse d'épargne à son égard et les dommages et intérêts dus par ladite caisse
A titre « très infiniment subsidiaire »
-prononcer la déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités, présentés par la Caisse d'épargne
A titre « très très infiniment subsidiaire »
-lui octroyer les délais les plus longs pour apurer « la dette de 1a Caisse d'épargne »
-condamner la Caisse d'épargne à lui régler la somme de 3 000 au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civil ainsi qu'en tous les dépens d'appel et accorder à Maître Y... L... le droit prévu à l'article 699 du code de procédure civile
Dans ses dernières conclusions notifiées le 3 septembre 2020, dont la SELARL [...] a pareillement refusé de recevoir signification compte tenu de la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Bati Loire, auxquelles il est également renvoyé pour l'exposé de ses moyens, la Caisse d'épargne demande à la cour, au visa des articles 1134 [ancien] et 2288 et suivants du code civil, de :
-dire et juger irrecevables ou à tout le moins mal fondées les demandes de M. M... et l'en débouter
-confirmer le jugement entrepris
-condamner solidairement M. M... et la SELARL [...], ès qualités de la liquidateur judiciaire de la société Bati Loire, à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile
-condamner solidairement M. M... et la SELARL [...], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Bati Loire, aux dépens
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 24 septembre 2020, pour l'affaire être plaidée le 12 novembre suivant et mise en délibéré à ce jour sans que la SELARL [...], ès qualités de liquidateur de la société Bati Loire, ait constitué avocat.
A l'audience, la cour a observé que la liquidation judiciaire de la SARL Bati Loire avait été clôturée le 25 avril 2018, que la SELARL [...] avait en conséquence refusé, ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de cette société, de recevoir la signification de la déclaration d'appel de M. M... aussi bien que celle des conclusions que les parties ont postérieurement tenté de lui faire signifier, et a en conséquence invité M. M... et la Caisse d'épargne à présenter leurs observations, au moyen d'une note en délibéré à transmettre contradictoirement sous quinzaine :
1o sur la fin de non-recevoir soulevée d'office en application de l'article 914 du code de procédure civile, tirée de la caducité, à l'égard de la SELARL [...] prise ès qualités de liquidation judiciaire de la société Bati Loire, de la déclaration d'appel de M. M...
2o sur les conséquences, sur leurs demandes respectives, de cette fin de non-recevoir et des effets de la clôture de la liquidation judiciaire de la société Bati Loire sur la qualité de la SELARL [...] pour représenter ladite société
Par une note transmise par voie électronique le 25 novembre 2020, M. M... souligne qu'il n'a formé aucune demande à l'encontre de la société Bati Loire et, sans faire aucune autre observation, indique s'en rapporter à justice.
Par une note transmise le même jour par voie électronique, la Caisse d'épargne indique elle aussi s'en rapporter à droit.
SUR CE, LA COUR :
Sur les fins de non-recevoir soulevées d'office par la cour
En application de l'article 125, alinéa 2, du code de procédure civile, la cour peut relever d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et, par application de l'article 914, alinéa 2, du même code, en l'absence de décision du conseiller de la mise en état, la cour peut, d'office, relever la fin de non-recevoir tirée de la caducité de l'appel.
Au cas particulier, conformément aux prescriptions de l'article 902 du code de procédure civile, le greffe a invité le conseil de M. M..., par avis adressé par voie électronique le 25 novembre 2019, à signifier sa déclaration d'appel à la SELARL [...], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Bati Loire, dans le mois dudit avis.
Selon acte du 18 décembre 2019, l'huissier chargé de signifier à la SELARL [...], ès qualités, la déclaration d'appel de M. M..., ainsi qu'une assignation à comparaître devant ladite cour, a transformé son procès-verbal de signification en procès-verbal de difficultés, en indiquant que le liquidateur avait refusé de recevoir signification d'un acte destiné à la SARL Bati Loire dont la liquidation judiciaire était clôturée.
Par acte du 7 janvier 2020, l'huissier chargé de procéder à la signification des dernières conclusions de M. M... a de nouveau dressé un procès-verbal de difficultés dont il résulte que la liquidation judiciaire de la SARL Bati Loire a été clôturée le 25 avril 2018 et que la SELARL [...] n'a donc plus qualité, depuis cette date, pour représenter ladite société ou recevoir quelque acte qui lui soit destiné.
Dans ces circonstances, la cour ne peut que constater la caducité de l'appel à l'égard de la société Bati Loire, à qui la déclaration d'appel de M. M... n'a pas été régulièrement signifiée dans le délai prévu à l'article 902.
En application de l'article 14 du code de procédure civile selon lequel nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée, et de l'article 16 du même code qui oblige le juge à faire observer en toutes circonstances le principe de contradiction, la Caisse d'épargne ne peut en outre qu'être déclarée irrecevable en toutes ses demandes accessoires dirigées contre la société Bati Loire, qui n'a pas été régulièrement appelée à la cause.
Sur la demande principale en paiement dirigée contre la caution
L'article 2288 du code civil énonce que celui qui se rend caution d'une obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même.
Pour s'opposer à la demande de la Caisse d'épargne, M. M... commence par soutenir que la créance de la Caisse d'épargne n'aurait pas été admise au passif de la liquidation judiciaire de la société Bati Loire, et serait en conséquence infondée, au motif qu'en première instance nul ne s'est exprimé dans l'intérêt de la débitrice puisque la SELARL [...], ès qualités, n'a pas comparu.
La société Bati Loire, représentée par son liquidateur ou par qui de droit postérieurement à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire, n'a pas formé appel contre le jugement en cause, mais rien ne permet de savoir si ce jugement a été régulièrement signifié à la débitrice principale.
Quoi qu'il en soit, l'appelant ne peut utilement soutenir que la créance de la Caisse d'épargne n'aurait pas été admise au passif de la société Bati Loire, alors que par jugement ayant autorité de chose jugée, le tribunal de commerce d'Orléans a fixé la créance de la Caisse d'épargne au passif de la débitrice principale à 12 899,21 euros et que, sauf à méconnaître le principe selon lequel nul ne plaide par procureur, M. M... n'a pas qualité pour défendre au nom de la société Bati Loire.
La demande de M. M... tendant à entendre juger que « la créance revendiquée par la Caisse d'épargne est infondée », qui ne peut s'entendre que comme une demande tendant à entendre juger que la créance de la Caisse d'épargne n'a pas été fixée au passif de la société Bati Loire, sera donc écartée.
A titre subsidiaire, M. M... soutient que la Caisse d'épargne ne peut plus agir contre lui, en faisant valoir que le 7 janvier 2015, la banque lui a indiqué que le découvert de 30 000 euros [de la société Bati Loire] prendrait fin automatiquement le 1er mars 2015 et, en conséquence, sa caution personnelle.
La Caisse d'épargne rétorque que cette défense de M. M... est irrecevable, de première part en ce qu'elle constituerait une demande nouvelle, en tant que telle irrecevable par application des articles 564 et 566 du code de procédure civile ; de seconde part en ce qu'elle se heurterait au principe de l'estoppel.
Outre que les moyens nouveaux ne sont pas proscrits en cause d'appel, l'article 564 du code de procédure civile autorise expressément les parties à soumettre à la cour de nouvelles prétentions pour faire écarter les prétentions adverses et la Caisse d'épargne ne peut sérieusement soutenir que M. M... se contredirait à son détriment alors qu'en première instance, l'intéressé contestait déjà devoir les sommes qui lui sont réclamées en faisant valoir qu'il n'était plus le gérant de la société Bati Loire depuis le 18 mars 2015 et que, pour obtenir l'infirmation du jugement dans lequel les premiers juges ont relevé que M. M... ne justifiait pas avoir demandé à la banque de transférer la charge de son engagement de caution sur la personne du nouveau gérant de la société Bati Loire, rien n'interdit à M. M..., en cause d'appel, de produire de nouvelles pièces dans le but d'établir que la banque aurait accepté de le libérer de son engagement avant son terme conventionnel.
Sur le fond, il résulte d'un échange de courriels produits aux débats par l'appelant (pièce 19) qu'en réponse à un message que M. M... a adressé à Mme U... pour lui demander « l'arrêt de l'autorisation de découvert de 30 000 euros sur la société Bati Loire, et de ce fait, l'annulation de [sa] caution personnelle sur celle-ci », Mme U... lui a répondu par courriel du 7 janvier 2015 : « je ne peux pas résilier [l'autorisation de] découvert de 30 K€ car celle-ci est à durée déterminée de manière contractuelle ; elle prendra fin automatiquement le 1er mars 2015 et la caution personnelle prendra fin aussi en automatique ».
Ce mail a été adressé à M. M... par Mme B... U..., depuis une adresse mail « [...], avec copie à M. C... J..., dont l'adresse électronique est [...]
La Caisse d'épargne, qui émet « toute réserve sur la validité de ce mail », n'explique pas les raisons de ses réserves, alors que dans ce courriel, Mme U... répondait par ailleurs aux demandes de M. M... portant sur des commissions et intérêts débiteurs prélevés sur le compte de la société Bati Loire le 2 janvier 2015 (170,36 € de commission et 151,66 € d'intérêts débiteurs) et que Mme U... a répondu à M. M... qu'il était « normal que [la Caisse d'épargne] tarife l'utilisation du découvert », en indiquant en ces termes : « intérêts débiteurs = à agios car c'est un prêt à court terme et idem les commissions (= mouvements débiteurs) ».
Sans qu'il y ait lieu d'apprécier la pertinence des explications données, le relevé du compte de la société Bati Loire ( pièces 5 et 19 des parties) montre qu'une commission de 170,36 euros et des intérêts débiteurs de 151,66 euros ont effectivement été prélevés sur le compte de la société Bati Loire le 2 janvier 2015, en sorte que rien ne permet, en l'absence de toute explication de la Caisse d'épargne, de mettre en doute la réalité de cet échange de courriels.
Il en résulte, d'une part que M. M... a bien demandé à ce qu'il soit mis fin à son engagement de caution ; d'autre part que le 7 janvier 2015, deux préposés de la Caisse d'épargne, Mme U... et M. J... à qui le message a été adressé en copie, ont informé la caution qu'il n'était pas possible de mettre immédiatement fin à son engagement, mais que cet engagement « prendrait automatiquement fin le 1er mars 2015 ».
M. M... fait donc valoir à raison que son engagement de caution a « pris fin » le 1er mars 2015, avant le terme initialement convenu, mais n'en tire pas les conséquences exactes, car il omet que lorsque le cautionnement n'est pas souscrit pour garantir une dette déterminée, mais un ensemble de dettes ou, comme en l'espèce, un compte courant, l'arrivée du terme met fin à l'obligation de couverture, mais que la caution reste tenue des dettes nées antérieurement s'il n'a pas été expressément prévu que le terme mettait aussi fin à l'obligation de règlement.
De son côté la Caisse d'épargne soutient de manière elle aussi inexacte, en se prévalant de l'obligation de couverture de M. M..., que ce dernier lui serait redevable de la somme de 19 096,59 euros, qui correspond au montant du solde provisoire du compte courant de la société Bati Loire à la date du 31 mars 2015.
En matière de cautionnement de compte courant en effet, il est acquis depuis un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 22 novembre 1972 (no 71-10.745) qu'en dépit du principe d'indivisibilité du compte courant, toute remise en crédit postérieure à la résiliation constitue, au moins à l'égard de la caution, un paiement distinct qui doit s'imputer sur la dette garantie et vient l'effacer progressivement même si le solde du compte reste débiteur jusqu'à sa clôture et que toute avance nouvelle s'inscrivant en débit est, toujours à l'égard de la caution, une dette nouvelle non couverte par la garantie résiliée.
En d'autres termes, il est admis que la caution profite de la totalité des remises effectuées sur le compte postérieurement à la fin de son engagement sans qu'on puisse lui opposer le principe d'indivisibilité du compte courant, sauf stipulation contractuelle, non alléguée en l'espèce, ayant exclu la fusion de la remise dans le compte courant.
La somme à laquelle est tenue la caution doit donc être calculée sur la base du solde débiteur existant au jour de la fin de son engagement, duquel doivent être déduites les remises subséquentes, sans prendre en considération les avances postérieures.
Au 1er mars 2015, le compte courant de la société Bati Loire présentait un solde débiteur de 22 714,89 euros.
Les relevés du compte produits aux débats (pièce 6 de l'intimée) révèlent que les remises postérieures représentent une somme totale qui excède très largement le montant de ce solde provisoire.
Dans ces circonstances, la Caisse d'épargne ne peut qu'être déboutée, par infirmation du jugement entrepris, de sa demande en paiement dirigée contre M. M....
Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts
Le banquier dispensateur de crédit est tenu d'un devoir de mise en garde envers la caution non avertie, ou lorsqu'il a sur les revenus de la caution, son patrimoine et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles, en l'état du succès escompté de l'opération cautionnée, des informations que la caution ignorait.
La responsabilité du banquier peut donc être engagée pour manquement à ce devoir si l'engagement de caution n'est pas adapté, soit aux capacités financières de la caution, soit au risque d'endettement excessif né de l'octroi du prêt, lequel s'apprécie, au jour de l'engagement de caution, compte tenu d'un risque caractérisé de défaillance de l'emprunteur, lequel résulte de l'inadaptation du prêt à ses capacités financières.
Il appartient à la caution qui invoque le manquement d'une banque à son devoir de mise en garde d'apporter la preuve du risque d'endettement qui serait né de l'octroi du crédit.
En l'espèce, M. M... ne justifie ni même n'allègue d'un risque né de l'octroi d'un crédit à la société Bati Loire et ne peut pas sérieusement soutenir que son engagement de caution était inadapté à ses facultés financières alors que les premiers juges ont relevé à raison qu'il résultait de la fiche de renseignement qu'il a signée le 17 octobre 2014 en certifiant que les informations qui y étaient mentionnées étaient sincères que la valeur nette de son patrimoine immobilier excédait le montant de son engagement de caution.
Par confirmation du jugement entrepris, M. M... sera donc débouté de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts.
Sur les demandes accessoires
La Caisse d'épargne, qui succombe au sens de l'article 696 du code de procédure civile, devra supporter les dépens de première instance et d'appel, en ce non compris les frais exposés par M. M... pour tenter de faire signifier ses actes de procédure en cause d'appel à la SELARL [...], ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la société Bati Loire, qui resteront à la charge de l'appelant.
Condamnée aux dépens, la Caisse d'épargne sera déboutée de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Sur ce même fondement, la Caisse d'épargne sera en revanche condamnée à régler à M. M..., à qui il serait inéquitable de laisser la charge de la totalité de ses frais irrépétibles, une indemnité de 3 000 euros.
PAR CES MOTIFS
CONSTATE d'office la caducité de la déclaration d'appel de M. M... à l'égard de la société Bati Loire,
CONFIRME la décision entreprise, mais seulement en ce qu'elle a débouté M. M... de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,
L'INFIRME pour le surplus de ses dispositions critiquées,
STATUANT À NOUVEAU sur les chefs infirmés et y ajoutant :
ECARTE la demande de M. M... tendant à entendre juger que la créance de SA Caisse d'épargne Loire Centre n'aurait pas été fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société Bati Loire,
DIT n'y avoir lieu de déclarer irrecevable la prétention nouvelle de M. M... tendant à entendre juger que la banque aurait accepté de le libérer de son engagement avant son terme conventionnel,
DEBOUTE la SA Caisse d'épargne Loire Centre de sa demande en paiement dirigée contre M. M...,
CONDAMNE la SA Caisse d'épargne Loire Centre à payer à M. M... la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
DEBOUTE la SA Caisse d'épargne Loire Centre de sa demande formée contre M. M... sur le même fondement,
DECLARE la SA Caisse d'épargne Loire Centre irrecevable en sa demande dirigée contre la société Bati Loire fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SA Caisse d'épargne Loire Centre aux dépens de première instance d'appel, en ce non compris les frais exposés par M. M... pour tenter de faire signifier ses actes de procédure en cause d'appel à la SELARL [...], ès qualités de mandataire à la liquidation judiciaire de la société Bati Loire, qui resteront à sa charge,
ACCORDE à Maître Anne Paladino le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Madame Carole CAILLARD, Président de la chambre commerciale à la Cour d'Appel d'ORLEANS, présidant la collégialité et Madame Marie-Claude DONNAT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.