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Décisions

Cass. com., 5 février 2020, n° 18-22.533

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Rémery

Rapporteur :

Remeniéras

Avocat général :

Guinamant

Cass. com. n° 18-22.533

4 février 2020

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par un acte du 29 juillet 2010, M. F... s'est rendu caution solidaire de la société Modeldirect (la société), dans la limite de 150 000 euros et pour une durée de cinq ans, pour tout ce que doit ou devra le débiteur cautionné à la société HSBC France (la banque) au cas où elle ne ferait pas face à ce paiement pour un motif quelconque ; qu'à la suite de la désignation d'un mandataire ad hoc, la société et ses principaux créanciers, dont la banque, ont conclu, le 11 juin 2013, un accord ayant, notamment, pour objet la consolidation de crédits documentaires impayés, moyennant différentes garanties, au nombre desquelles un gage sur stock ; qu'en exécution de cet accord, la banque a, par un acte du 5 août 2013, consenti un prêt à la société ; que la société a bénéficié d'une procédure de sauvegarde ; que le 17 mars 2015, le tribunal de commerce a converti la sauvegarde en redressement judiciaire, arrêté un plan de cession des actifs de la société et prononcé la liquidation judiciaire de cette dernière ; qu'assignée en paiement, la caution a demandé sa décharge, en reprochant au créancier d'avoir laissé perdre son gage, en acceptant le 6 mars 2015, l'offre du cessionnaire de reprise du stock gagé pour un vil prix au lieu d'exercer sa faculté d'attribution judiciaire du stock ;
Attendu que pour condamner M. F... à paiement, l'arrêt retient d'abord qu'au regard du jugement du 17 mars 2015 du tribunal de commerce de Grenoble, la créance globale des cinq établissements bancaires garantie par un gage sur stock s'élevait à 782 867,71 euros, dont 30 463,85 euros correspondant à celle de la société HSBC France, qu'il a été proposé au repreneur, soit d'exclure le stock gagé du périmètre des actifs repris, soit de payer leurs créances aux créanciers gagistes, en application de l'article L. 642-12 du code du commerce, soit de négocier avec eux un accord dérogatoire en vue du versement d'une somme inférieure au solde de la créance garantie par le gage, que le repreneur a proposé de porter le prix d'achat du stock à la somme de 115 000 euros, dont 107 000 euros au titre des stocks gagés et que la société HSBC France, par courrier du 6 mars 2015, ainsi que les quatre autres banques intéressées, ont donné leur accord pour ce prix ; que l'arrêt ajoute que, selon l'alinéa 4 de l'article L. 642-12 du code du commerce, la charge des sûretés mobilières spéciales garantissant le remboursement d'un crédit consenti à l'entreprise pour lui permettre le financement d'un bien sur lequel portent ces sûretés est transmise au cessionnaire et celui-ci est alors tenu d'acquitter entre les mains du créancier les échéances convenues avec lui et qui restent dues à compter du transfert de la propriété ; que l'arrêt retient toutefois qu'il peut être dérogé aux dispositions de ce texte par un accord entre le cessionnaire et les créanciers titulaires de ces sûretés et que tel est le cas en l'espèce, de sorte que, n'étant pas reproché à la banque d'avoir abusé de son droit de consentir à une telle dérogation, cet établissement de crédit n'a pas commis de faute propre à engager sa responsabilité ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en acceptant l'offre du cessionnaire de reprise du stock gagé pour une valeur prétendument dérisoire, tout en se sachant par ailleurs garantie par le cautionnement litigieux, la banque n'avait pas empêché la subrogation de la caution dans des droits qui pouvaient lui profiter, et donc commis une faute de nature à engager sa responsabilité civile, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce que, confirmant le jugement, il ordonne à la société HSBC France de procéder à la mainlevée de l'hypothèque judiciaire inscrite sur le domicile de M. F... sis [...] , cadastré [...] et [...] à [...] et en ce qu'il ordonne l'exécution provisoire, l'arrêt rendu le 21 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne la société HSBC France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. F... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille vingt.

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