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Cass. crim., 18 novembre 2025, n° 25-82.012

COUR DE CASSATION

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Annulation

Cass. crim. n° 25-82.012

18 novembre 2025

N° K 25-82.012 F-D

N° 01472

ODVS
18 NOVEMBRE 2025

ANNULATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 18 NOVEMBRE 2025

M. [F] [R] a formé un pourvoi contre l'ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Rennes, en date du 5 mars 2025, qui, dans la procédure suivie contre lui, du chef de blanchiment en bande organisée, a rejeté sa requête aux fins de recevabilité immédiate de l'appel.

Par ordonnance du 6 juin 2025, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen du pourvoi.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [F] [R], et les conclusions de Mme Gulphe-Berbain, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Pradel, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces soumises à l'examen de la Cour de cassation ce qui suit.

2. MM. [F] [R] et [T] [H] ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel du chef susvisé, le premier, selon la procédure de comparution à délai différé, le second, sur citation directe.

3. Par jugement en date du 27 février 2025, le tribunal correctionnel a notamment ordonné le renvoi de la procédure au ministère public au regard de la complexité des faits.

4. Le même jour, M. [R] a relevé appel de ce jugement et déposé une requête aux fins d'examen immédiat de son appel.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a rejeté la requête de M. [R] et dit n'y avoir lieu à examen immédiat de l'appel interjeté contre le jugement du tribunal correctionnel de Rennes du 27 février 2025, alors « que le tribunal correctionnel qui, saisi à l'égard de deux prévenus respectivement par citation directe et par comparution à délai différé, joint les deux procédures et renvoie la procédure unique au ministère public sur le fondement de l'article 397-2, alinéa 2, du Code de procédure pénale, met fin à la procédure à l'égard du prévenu ayant fait l'objet de la citation directe ; que son jugement comporte ainsi parmi d'autres dispositions, des dispositions définitives en sorte qu'il n'entre pas dans la classe des décisions visées par les articles 507 et 508 du code de procédure pénale, l'appel interjeté à l'encontre de l'entièreté du dispositif de ce jugement étant
immédiatement recevable de droit sans qu'il y ait lieu au dépôt de la requête prévue à l'article 507 du Code de procédure pénale ni à appréciation par le président de la chambre des appels correctionnels de l'opportunité d'un examen immédiat selon les critères posés par l'article 508 du même Code ; que commet un excès de pouvoir le président qui se livre à une telle appréciation pour déclarer l'appel non immédiatement recevable ; qu'au cas d'espèce, il résulte des éléments de la procédure que par jugement du 27 février 2025, le Tribunal judiciaire de Rennes, saisi pour la même procédure par voie de citation directe à l'égard de Monsieur [T] [H] et par voie de comparution à délai différé à l'égard de Monsieur [F] [R], a joint les procédures et renvoyé la procédure issue de la jonction au ministère public pour prise d'un réquisitoire introductif et désignation d'un juge d'instruction ; qu'en déclarant non immédiatement recevable l'appel interjeté par Monsieur [R] à l'encontre de ce jugement, motif pris de ce que « ni l'intérêt de l'ordre public, ni une bonne administration de la justice ne commandent » une telle recevabilité immédiate, quand il lui appartenait de constater que ce jugement n'entrait pas dans la classe des décisions visées par les articles 507 et 508 du Code de procédure pénale et d'ordonner la transmission de l'appel à la cour, la présidente de la 11ème Chambre des appels correctionnels a excédé ses pouvoirs en violation des articles 507, 508, 397-1-1, 397-2, 520, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 507 et 508 du code de procédure pénale :

6. Selon ces textes, lorsque le tribunal statue par jugement distinct du jugement sur le fond, l'appel est immédiatement recevable si ce jugement met fin à la procédure et, dans le cas contraire, la partie appelante peut déposer au greffe une requête adressée au président de la chambre des appels correctionnels tendant à faire déclarer l'appel immédiatement recevable. Le président de la chambre des appels correctionnels décide, par ordonnance, s'il y a lieu ou non de faire droit à une telle requête.

7. Il en résulte que la procédure prévue à ces articles n'est pas applicable au jugement qui, statuant par jugement distinct du jugement sur le fond, met fin à la procédure ou comporte, parmi d'autres dispositions, des dispositions définitives.

8. Pour rejeter la requête aux fins de voir ordonner l'examen immédiat comme étant de droit de l'appel formé contre le jugement renvoyant la procédure au ministère public, l'ordonnance attaquée retient que ni l'intérêt, ni une bonne administration de la justice ne commandent qu'il soit fait droit à cette requête.

9. En statuant ainsi, le président a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.

10. En effet, le jugement frappé d'appel a, parmi d'autres dispositions, maintenu le prévenu en détention provisoire, ce qui constitue une décision définitive au sens de l'article 507 susvisé.

11. Dès lors, en rejetant la requête, alors qu'il devait constater que le jugement n'entrait pas dans la classe des décisions visées par les articles 507 et 508 du code de procédure pénale et ordonner la transmission de l'appel à la cour d'appel, saisie dans les termes de la déclaration d'appel, soit, en l'espèce, de l'entièreté du dispositif pénal du jugement, le président de la chambre des appels correctionnels a excédé ses pouvoirs.

12. L'annulation est par conséquent encourue.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

ANNULE l'ordonnance susvisée du président de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Rennes, en date du 5 mars 2025 ;

CONSTATE que, du fait de cette annulation, la chambre des appels correctionnels, autrement présidée, se trouve saisie de l'appel de M. [R] ;

ORDONNE le retour de la procédure à cette juridiction ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Rennes et sa mention en marge ou à la suite de l'ordonnance annulée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt-cinq.

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