CA Nîmes, 5e ch. Pôle soc., 13 novembre 2025, n° 24/01929
NÎMES
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/01929 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JG7I
EM/DO
POLE SOCIAL DU TJ D'AVIGNON
16 mai 2024
RG :20/00114
Société [17]
C/
URSSAF PROVENCE ALPES COTE D'AZUR
Grosse délivrée le 13 NOVEMBRE 2025 à :
- Me EL MABROUK
- Me MALDONADO
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5e chambre Pole social
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ d'AVIGNON en date du 16 Mai 2024, N°20/00114
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 16 Septembre 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 Novembre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Société [17]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Chaima EL MABROUK de la SELARL CHAIMA EL MABROUK, avocat au barreau D'AVIGNON
INTIMÉE :
URSSAF PROVENCE ALPES COTE D'AZUR
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Hélène MALDONADO, avocat au barreau de NIMES
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 13 Novembre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SAS [17] a fait l'objet, pour son établissement de [Localité 6], d'un contrôle portant sur l'application de la législation de la sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires, par les services de l'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur (PACA) pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017.
Par une lettre d'observations du 10 décembre 2018, l'Urssaf PACA a notifié à la SAS [17] le redressement envisagé, pour un montant global de 149 073 euros, au titre des chefs de redressement suivants :
- n°1 :contribution FNAL,
- n°2: prise en charge par l'employeur des cotisations ouvrières,
- n°3 : assiette minimum des cotisations BTP, indemnités de trajet,
- n°4 : CSG/CRDS sur part patronale aux régimes de prévoyance complémentaire,
- n°5 : comptes courants débiteurs,
- n°6 : rémunérations non déclarées,
- n°7 : prise en charge par l'employeur des cotisations,
- n°8 : frais professionnels non justifiés, restaurations hors des locaux de l'entreprise,
- n°9 : frais professionnels non justifiés, allocations forfaitaires dirigeants de sociétés et mandataires,
- n°10 :frais professionnels non justifiés, limites d'exonération, restauration hors locaux et hors restaurant,
- n°11 : frais professionnels non justifiés ; principes généraux,
- N°12 : frais professionnels : limites d'exonération, utilisation du véhicule personnel,
- n°13 : réduction générale des cotisations, rémunération brute à prendre en compte dans la formule,
n°14 : non fourniture de documents ou documents non conformes, fixation forfaitaire de l'assiette.
En réponse aux observations de la SAS [17] formulées dans un courrier du 10 janvier 2019, l'Urssaf PACA a, par courrier du 20 février 2019, informé la société que le chef de redressement n°14 était ramené de 60 814 euros à 47 614 euros, et que le redressement total s'élevait désormais à 135 873 euros.
La SAS [17] a contesté le montant du redressement et a saisi à cet effet la commission de recours amiable ( CRA) de l'Urssaf PACA par courrier du 08 avril 2019.
Le 14 juin 2019, l'Urssaf PACA a mis en demeure la SAS [17] de lui régler la somme de 149 554 euros correspondant à 135 977 euros de cotisations et contributions sociales et 13 677 euros de majorations de retard.
Le 27 novembre 2019, la CRA de l'Urssaf PACA a, dans sa décision rendue en sa séance du 25 septembre 2019, maintenu l'ensemble des redressements contestés à l'exception du point 12 qu'elle a annulé en totalité, soit 28 396 euros.
Par requête du 28 janvier 2020, la SAS [17] a saisi le tribunal judiciaire d'Avignon- contentieux de la protection sociale aux fins de contester cette décision.
Par jugement contradictoire rendu le 16 mai 2024, le pôle social du tribunal judiciaire d'Avignon a :
- Débouté la SAS [17] de ses demandes d'annulation du contrôle et de la lettre d'observations,
- Déclaré irrecevable la contestation du point n°13 de la lettre d'observations,
- Annulé le point n°8 de la lettre d'observations (412 euros),
- Dit que le montant du redressement est de 107.065 euros de cotisations,
- Validé la mise en demeure du 14 juin 2019 pour la seule somme de 107.065 euros de cotisations,
- Condamné la SAS [17] à payer à l'URSSAF la somme de 107.065 euros augmentée des majorations de retard, année par année, à calculer à nouveau par l'URSSAF,
- Condamné la société SAS [17] à payer à l'URSSAF la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné la SAS [17] aux dépens (article 696 du code de procédure civile).
Par acte électronique du 06 juin 2024, la SAS [17] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
L'affaire a été appelée à l'audience du 08 avril 2025 puis renvoyée à l'audience du 16 septembre 2025 à laquelle elle a été retenue.
Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l'appui de ses prétentions, la SAS [17] demande à la cour de :
- réformer le jugement contesté en ce qu'il a :
- débouté la SAS [17] de ses demandes d'annulation du contrôle et de la lettre d'observations,
- déclaré irrecevable la contestation du point n°13 de la lettre d'observations,
- annulé le point n°8 de la lettre d'observations (412 euros),
- dit que le montant du redressement est de 107.065 euros de cotisations,
- validé la mise en demeure du 14 juin 2019 pour la seule somme de 107.065 euros de cotisations,
- condamné la SAS [17] à payer à l'URSSAF la somme de 107.065 euros augmentée des majorations de retard, année par année, à calculer à nouveau par l'URSSAF,
- condamné la SAS [17] à payer à l'URSSAF la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SAS [17] aux dépens.
par conséquent statuant à nouveau :
à titre in limine litis :
- constater l'absence d'envoi d'un avis de contrôle respectant les dispositions de l'article R243-59 du code de la sécurité sociale,
- constater le défaut de motivation du contrôle au regard de l'absence de mention des textes législatifs applicables et de leurs modalités d'application aux chefs de redressement,
- déclarer nul et de nul effet l'ensemble de la procédure de contrôle et de redressement effectuée par l'URSSAF provence alpes côte d'azur,
à titre principal :
- dire que l'URSSAF ne justifie pas du bienfondé des chefs de redressement,
- déclarer irrecevable le redressement effectué auprès de la SAS [17],
- constater que la SAS [17] ne s'oppose pas à la mise en place d'une expertise aux frais de l'URSSAF,
en tout état de cause :
- réformer la décision rendue par la commission de recours amiable de l'URSSAF du 25/09/2019,
- annuler les opérations de contrôle, de redressement et de recouvrement subséquentes,
- débouter l'URSSAF de l'ensemble de ses demandes,
- condamner l'URSSAF au paiement au profit de la société [17] de la somme de 3.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens au titre de la procédure de première instance,
- condamner l'URSSAF au paiement au profit de la société [17] de la somme de 3.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens au titre de la procédure d'appel.'
Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens soutenus à l'appui de ses prétentions, l'Urssaf PACA demande à la cour de :
- Débouter la SAS [17] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 16 mai 2024 par le Pôle social judiciaire d'Avignon,
En conséquence, statuant à nouveau,
- valider la mise en demeure du 14 juin 2019 pour son montant ramené à 107 065 euros en cotisations et 11 844 euros de majorations de retard, soit au total 118 909 euros,
- condamner la SAS [17] à payer à l'URSSAF PACA 107 065 euros en cotisations et 11 844 euros de majorations de retard, soit au total 118 909 euros,
- condamner la SAS [17] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- laisser à la charge les entiers dépens de la SAS [17].'
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l'audience.
MOTIFS
Sur la régularité de la procédure de contrôle :
Moyens des parties
La SAS [17] soulève l'annulation de la procédure de contrôle, au motif que les pièces qu'elle a reçues ne lui ont pas permis de s'assurer des modalités du contrôle au regard des dispositions légales et réglementaires applicables. Elle fait valoir que l'Urssaf lui a adressé un 'avis de contrôle' daté du 06 novembre 2018 accompagné d'un accusé de réception mentionnant une date de réception au 13 novembre 2018, soit moins de quinze jours avant la date de la première visite du 27 novembre 2018, en sorte que le délai minimal de quinze jours entre ces deux dates, prévu réglementairement, n'a pas été respecté, et que faute pour l'Urssaf de justifier l'accomplissement de cette formalité substantielle, le redressement encourt la nullité.
Elle ajoute que dans l'hypothèse où cet avis lui aurait été régulièrement adressé, l'Urssaf doit être en mesure de justifier que l'avis comporte les mentions suivantes à peine de nullité : l'existence d'une 'Charte cotisant contrôlé' et le droit pour l'entreprise contrôlée de se faire assister du conseil de son choix, rappelant que l'absence d'une seule de ces mentions est de nature à entraîner la nullité de la procédure de contrôle et l'annulation des redressements opérés à l'issue de cette procédure. Elle fait observer que l'Urssaf produit un document qui ne fait que renvoyer au site de l'Urssaf pour accéder à la Charte du cotisant, qu'il ne s'agit pas d'une adresse électronique mais d'un simple lien, le cotisant devant effectuer plusieurs démarches pour parvenir à consulter la Charte, et que contrairement à ce que soutient l'Urssaf, l'accès n'est pas 'aisément consultable'. Elle considère que l'Urssaf qui est débitrice de l'obligation de porter à la connaissance du cotisant contrôlé le contenu de la Charte, ne saurait lui reprocher de ne pas l'avoir sollicitée pour obtenir la communication du document, ni se prévaloir utilement que la Charte est accessible sur le site 'service public.fr'. Elle considère que c'est dès lors à juste titre que le tribunal a dit que l'avis de contrôle était nul et de nul effet, que cela emportait annulation des opérations de contrôle, de redressement et de recouvrement subséquentes.
Elle soutient, par ailleurs, que l'Urssaf a mentionné dans la lettre d'observations du 10 décembre 2018 deux articles, '242 nonnies' et '242 nonnies A' du code général des impôts qui n'existent pas, en sorte que l'Urssaf ignore les manquements à ses obligations légales, alors qu'il est impératif que l'entreprise contrôlée puisse connaître le ou les textes législatifs ou réglementaires et leurs modalités d'application. Elle précise qu'une telle information est d'autant plus importante que l'Urssaf entend recourir à la méthode de la taxation forfaitaire. Elle conclut que faute pour l'Urssaf de justifier l'accomplissement de l'ensemble des formalités substantielles, la procédure de contrôle doit être annulée.
L'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur soutient que contrairement à ce que prétend la SAS [17], la procédure de contrôle est parfaitement régulière. Elle indique que le formalisme entourant les opérations de contrôle a été respecté, qu'elle produit l'avis de contrôle qu'elle a adressé à la société le 06 novembre 2018 pour une vérification fixée au 27 novembre 2018 , en sorte que le délai de 15 jours prévu aux dispositions réglementaires est respecté et que c'est vainement que la SAS [17] conteste la date d'envoi en tentant de prétexter qu'elle ne justifie pas de cette date, alors que l'ayant réceptionné le 13 novembre 2018, c'est qu'a minima, l'envoi a été effectué la veille, soit le 12 novembre.
Elle ajoute que l'avis de contrôle du 06 novembre 2018 est conforme aux dispositions réglementaires, que la SAS [17] a été informée de l'existence de la Charte et des moyens dont elle disposait pour l'obtenir, que si elle ne parvenait pas à y accéder à partir du lien internet figurant sur l'avis de contrôle, elle avait la possibilité de se rapprocher d'elle ou de l'inspecteur pour qu'elle lui soit adressée, ce qu'elle n'a pas entendu faire.
Enfin, elle prétend que la lettre d'observations indique pour chaque chef de redressement les bases retenues qu'elle distingue en 'base totalité' et en 'base plafonnée', les taux de cotisations appliqués à chaque 'code type de personnel' ainsi que le montant des cotisations et contributions sociales ventilées par année, rappelle le contenu et les modalités d'applications des chefs de redressement entrepris.
Réponse de la cour :
L'article R243-59 I du code de la sécurité sociale dispose, dans sa version applicable au litige, issue du décret n°2017-1409 du 25 septembre 2017, que :
I.-Tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé, au moins quinze jours avant la date de la première visite de l'agent chargé du contrôle, de l'envoi par l'organisme effectuant le contrôle des cotisations et contributions de sécurité sociale d'un avis de contrôle. Toutefois, l'organisme n'est pas tenu à cet envoi dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail. Dans ce dernier cas, si l'organisme entend poursuivre le contrôle sur d'autres points de la réglementation, un avis de contrôle est envoyé selon les modalités définies au premier alinéa. (...)
Cet avis fait état de l'existence d'un document intitulé " Charte du cotisant contrôlé " présentant à la personne contrôlée la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement et à son issue, sur le fondement du présent code. Il précise l'adresse électronique où ce document approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable et indique qu'il est adressé au cotisant sur sa demande. Les dispositions contenues dans la charte sont opposables aux organismes effectuant le contrôle.
II.-La personne contrôlée a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l'avis prévu aux précédents alinéas.
La personne contrôlée est tenue de mettre à disposition des agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7 tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle.
L'agent chargé du contrôle peut demander que les documents à consulter lui soient présentés selon un classement nécessaire au contrôle dont il aura au préalable informé la personne contrôlée.
Ces agents peuvent interroger les personnes rémunérées, notamment pour connaître leurs nom et adresse ainsi que la nature des activités exercées et le montant des rémunérations y afférentes, y compris les avantages en nature. (...)
III.-A l'issue du contrôle ou lorsqu'un constat d'infraction de travail dissimulé a été transmis en application des dispositions de l'article L. 8271-6-4 du code du travail afin qu'il soit procédé à un redressement des cotisations et contributions dues, les agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7 communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant une lettre d'observations datée et signée par eux mentionnant l'objet du contrôle réalisé par eux ou par d'autres agents mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du code du travail, le ou les documents consultés, la période vérifiée, le cas échéant, la date de la fin du contrôle et les observations faites au cours de celui-ci. (...)
Les observations sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l'indication du montant des assiettes correspondant, ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l'indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 qui sont envisagés.(...)
La période contradictoire prévue à l'article L. 243-7-1 A est engagée à compter de la réception de la lettre d'observations par la personne contrôlée, qui dispose d'un délai de trente jours pour y répondre. La lettre mentionne la possibilité de se faire assister d'un conseil de son choix.
Dans sa réponse, la personne contrôlée peut indiquer toute précision ou tout complément qu'elle juge nécessaire notamment en proposant des ajouts à la liste des documents consultés.
Lorsque la personne contrôlée répond avant la fin du délai imparti, l'agent chargé du contrôle est tenu de répondre. Chaque observation exprimée de manière circonstanciée par la personne contrôlée fait l'objet d'une réponse motivée. Cette réponse détaille, par motif de redressement, les montants qui, le cas échéant, ne sont pas retenus et les redressements qui demeurent envisagés.
IV.-A l'issue du délai mentionné au huitième alinéa du III ou des échanges mentionnés au III, afin d'engager la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement, l'agent chargé du contrôle transmet à l'organisme effectuant le recouvrement le rapport de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s'il y a lieu, de la réponse de l'intéressé et de son propre courrier en réponse.
Le cas échéant, l'organisme de recouvrement communique également les observations ne conduisant pas à redressement mais appelant la personne contrôlée à une mise en conformité en vue des périodes postérieures aux exercices contrôlés, et exposant cette personne, si elle n'y procède pas, aux dispositions du septième alinéa du III du présent article. (...)
La période contradictoire prévue à l'article L. 243-7-1 A prend fin à la date de l'envoi de la mise en demeure ou de l'avertissement mentionnés à l'article L. 244-2 du présent code.
Les dispositions du chapitre II du titre IV du livre Ier sont applicables aux observations de l'organisme ainsi qu'à l'avis de crédit, mentionnés respectivement aux deuxième et troisième alinéas du présent IV.
V.-Les documents mentionnés au présent article sont adressés à la personne contrôlée selon les modalités définies au troisième alinéa du I.
L'information du cotisant quant à l'existence de la Charte du cotisant contrôlé constitue une formalité substantielle, conditionnant la validité du contrôle.
En l'espèce, l'Urssaf PACA produit au débat un avis de contrôle daté du 06 novembre 2018, adressé à la SAS [17], qui mentionne un début des opérations au 27 novembre 2018 à 09h00, qui a été envoyé par lettre recommandée avec accusé de réception (n°2C12892440024) et l'accusé de réception correspondant sur lequel sont apposées une date de réception au 13 novembre 2018 et une signature.
Si l'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur ne justifie pas de la date d'envoi dudit avis, alors qu'il lui appartient d'en apporter la preuve, il n'en demeure pas moins que l'avis a été adressé nécessairement, au plus tard, la veille de la réception, ce qui correspond à l'hypothèse la plus favorable pour l'appelante comme le rappellent les premiers juges, soit le 12 novembre 2018.
Dans la mesure où la vérification était prévue le 27 novembre 2018, il s'en déduit que le délai de quinze jours prévu à l'article R243-59 alinéa 1, susvisé, a bien été respecté.
Par ailleurs, l'avis de contrôle mentionne in fine :'je vous informe qu'un document intitulé 'charte du cotisant contrôlé' dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable sur le site 'http://www.urssaf.fr'. A votre demande, cette charte peut vous être adressée. Ce document vous présente la procédure de contrôle et les droits dont vous disposez pendant son déroulement, tels qu'ils sont définis par le code de la sécurité sociale'.
Si l'Urssaf PACA n'a pas mentionné l'adresse électronique où la Charte est consultable et téléchargeable, elle a néanmoins précisé le lien lui permettant d'y accéder par voie électronique et a rappelé les dispositions de l'article R243-59 susvisées selon lesquelles le document lui est envoyé, à sa demande.
Contrairement à ce que la SAS [17] prétend, les formalités qui doivent être effectuées pour accéder à la Charte du cotisant ne constituent pas des opérations informatiques complexes ; dans tous les cas de figure, si ses démarches informatiques se révélaient vaines et si la société souhaitait en prendre connaissance, elle avait la possibilité de solliciter l'Urssaf pour qu'elle la lui envoie, ce qu'elle ne justifie pas avoir fait.
Enfin, contrairement à ce que prétend la SAS [17], les articles '242 nonnies' et '242 nonies A' du code général des impôts existent, comme l'ont justement relevé les premiers juges, et sont applicables, le premier depuis le 18 août 1993, le second depuis le 09 juillet 2003.
La lettre d'observations datée du 10 décembre 2018 mentionne l'objet du contrôle - vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires - , la période contrôlée - les années 2015, 2016 et 2017 -, le ou les documents consultés - Livre et fiches de paie, convention collective applicable dans l'entreprise, les états justificatifs mensuels des allègements de la réduction générale des cotisations, Grand Livre, pièces justificatives de frais de déplacements, extrait d'inscription au RCI et ou RM, Statuts, factures fournisseurs et prestataires -, la date de fin de contrôle - 10 décembre 2018 -, les observations motivées faites pour chaque chef de redressement envisagé qui comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et le montant des cotisations et contributions sociales ventilées par année.
Il s'en déduit que la lettre d'observations est motivée conformément aux dispositions réglementaires susvisées.
La procédure de contrôle est régulière et les moyens développés par la SAS [17] au soutien de sa demande d'annulation sont inopérants et seront donc rejetés.
Le jugement entrepris sera confirmé.
Sur le fond :
Sur le chef de redressement n°5 :
Moyens des parties
La SAS [17] fait valoir qu'elle a fourni les explications sur les écritures comptables mises en évidence au cours du contrôle, dans son courrier du 10 janvier 2019 : ces écritures avaient pour objectif de justifier comptablement le paiement de factures de la société par le dirigeant de l'entreprise, M. [H], soit en espèces, soit à partir de son compte personnel. Elle prétend avoir fourni à cet effet des pièces justificatives, que dès lors, les opérations ont pu être vérifiées non seulement à partir de la comptabilité mais également à l'appui de pièces justificatives et des commentaires de l'entreprise.
Elle ajoute que pour se conformer à la législation, elle a indiqué dans son courrier du 10 janvier 2019, qu'en fin d'année, au moment de l'établissement du bilan, 'si après avoir passé tous les remboursements de frais qui incombent à Mr [H] la position du compte courant se trouve débitrice, une provision de salaire complémentaire est faite et cotisée sur l'année suivante'. Elle considère que dans ces conditions, elle peut difficilement être plus transparente et qu'on ne saurait lui reprocher de chercher à éluder ses obligations comptables et fiscales.
Elle fait observer que lorsque le dirigeant procède avec son compte personnel ou en espèces, au paiement de factures de l'entreprise, ces opérations doivent être enregistrées comptablement à partir du compte 455 'compte courant d'associé', qu'il appartient à l'Urssaf de justifier de la méthode à utiliser pour passer ces écritures en comptabilité, que son désaccord quant aux modalités de passation des écritures comptables ne sauraient établir la preuve d'une comptabilité non probante.
Elle indique qu'elle a fait l'objet d'un contrôle fiscal pour la période 2016/2017 prolongée jusqu'au 30/10/2018 pour la TVA, et qu'à cette occasion, l'inspecteur chargé du contrôle n'a pas remis en cause les documents comptables qu'elle avait présentés. Elle conclut qu'il n'est pas établi que des revenus auraient été éludés pour échapper non seulement à ses obligations sociales mais également fiscales.
A l'appui de ses allégations, la SAS [17] produit notamment au débat :
- une lettre du 10 janvier 2019 adressée par la SAS [17] à l'Urssaf, dans laquelle elle formule ses observations consécutivement à la lettre d'observations '5. Comptes courants débiteurs : lorsque le dirigeant règle des factures fournisseurs en espèces ou avec son compte personnel on ne peut que débiter le compte 401...Fournisseur par le crédit du compte 455..Compte courant. Le compte de charge a été mouvementé par l'enregistrement de la facture du fournisseur. En respectant les règles comptables françaises en partie double, les écritures sont les suivantes...Si elle était passée en journal de Banque «BQ » cela fausserait le compte de trésorerie.
Cette écriture solde le compte Fournisseur, il n'y a donc pas lieu de la « répercuter sur l'exercice suivant par des écritures d'à nouveau », cela équivaudrait à constater que le fournisseur n'a pas été payé. (...)
En ce qui concerne le lettrage des comptes, un lettrage ne peut se faire qu'à l'intérieur d'un même compte et en règle générale un compte Fournisseur « Classe 401 » ou un compte Client « Classe 411 ».
Les comptes de charges ne se lettrent pas.
Il n'est pas possible de lettrer deux comptes différents entre eux.
Ci-joint toutes les factures payées par Mr [H] avec sa carte bleue personnelle ou en espèces.
Il est redressé 7500.00 de salaire en 2016 puis de nouveau en 2017.
En fin d'année à l'établissement du bilan, si après avoir passé tous les remboursement de frais qui incombent à Mr [H] la position du compte courant se trouve débitrice, une provision de Salaire complémentaire est faite et cotisée sur l'année suivante.
En effet, la DADS devant être déclarée avant le 31 janvier, à l'établissement du bilan, au mois de mars ou avril, on ne peut plus cotisé sur l'année. (...)',
- un document intitulé 'contrôle Urssaf/écritures de compte courant' joint au courrier précédent, où sont insérés plusieurs tableaux qui mentionnent, pour chaque années contrôlée, le montant des opérations comptables visées par le chef de redressement n°5, le numéro de la pièce jointe et le justificatif correspondant,
- plusieurs factures adressées à la SAS [17] datées de la période contrôlée établies : par [J] [L] au nom de la SAS [17] qui n'est pas datée et relative à une somme de 1100 euros avec la mention manuscrite 'réglé en espèces', par Autodistribution adressée à [9] pour un montant de 191,59 euros, par [8] en date du 23/05/2016 au nom de M. [R] [O], le 01/03/2016 au nom de 'particulier comptant', par [11] le 05/02/2016 au nom de Mme [N] [P], par [12] le 09/11/2016 au nom de 'Client comptant [Localité 6]' n°60237, par [10] le 13/07/2017 au nom de M. [Z] [H] d'un montant de 900,22 euros,
- des tickets d'achat auprès de plusieurs fournisseurs, comme [7], [5]..
- des extraits du Grand livre concernant le compte [XXXXXXXXXX03] 'compte associés, comptes courants', de 2015 à 2018, sur lesquels apparaissent des retraits, et concernant le compte 'fournisseurs' pour l'année 2016.
L'Urssaf PACA réplique que la SAS [17] a été dans l'impossibilité de prouver que son président, M. [H], aurait réglé ces factures avec ses propres deniers, que les Grands livres présentés faisaient apparaître des écritures d'OD ( ordres divers) entre le compte courant associé et les comptes fournisseurs qui n'ont pas été justifiés, des écritures d'OD de fin d'année non répercutées l'année suivante par des écritures 'd'à nouveau' des écritures comptables d'OD qui n'ont pas de contrepartie en compte de charge ou de produit, ce qui explique que l'agent de contrôle a réintégré dans l'assiette des cotisations et contributions l'intégralité des écritures OD, ce qui a généré un rappel de cotisations de 47 447 euros.
Elle ajoute que contrairement à ce qu'elle prétend, la SAS [17] n'apporte aucun élément de preuve pour justifier ses allégations, les factures produites dans le cadre de la phase contradictoire du contrôle ne permettant pas à elles seules d'attester que M. [H] les aient réglées avec ses propres deniers. Elle s'étonne que la société ou son président n'a pas jugé utile de conserver les justificatifs des règlements pour assurer la contrepartie des écritures portées au crédit du compte courant et permettre le remboursement de ces dépenses.
Elle ajoute que l'analyse des factures produites par la SAS [17] met en évidence des incohérences ou des insuffisances, voire parfois leur caractère abusif et elle considère qu'au vu des seules pièces recevables, un total de 83,94 euros pourrait être justifié.
Elle affirme que contrairement à ce que prétend la SAS [17], la doctrine comptable infirme la présentation qu'elle a faite quant au lettrage des comptes.
Elle entend préciser que les législations fiscale et sociale sont indépendantes et que le particularisme des règles propres à chacune de ces matières a été rappelé par la Cour de cassation, en sorte qu'en raison de l'indépendance de ces législations, l'interprétation retenue par l'administration fiscale concernant les sommes inscrites au compte courant du dirigeant de la SAS [17], n'a juridiquement aucune incidence sur le régime social de ces mêmes sommes.
Enfin, elle considère que la demande d'expertise comptable n'est pas justifiée dans la mesure où la SAS [17] ne peut pas faire peser sur l'Urssaf la charge d'une telle mesure d'instruction pour pallier sa propre carence en la matière.
Réponse de la cour :
La lettre d'observations mentionne les constatations faites par l'inspecteur du travail sur ce chef de redressement :
'Lors de la vérification de la comptabilité sur les trois années contrôlées, il a été constaté des écritures comptables d'OD passées au crédit du compte [XXXXXXXXXX03] 'Associés compte courant'. Ces dernières proviennent des comptes de la 401 "Fournisseurs".
Ainsi le compte associé est créditeur de part ce jeu d'écritures comptables.
En vertu des textes susvisés, lorsque le compte associé est débiteur, le solde doit être réintégré dans l'assiette des cotisations et contributions. De plus en vertu de l'article R 243-59-4 du Code de la Sécurité sociale, lorsque la comptabilité n'est pas probante, l'inspecteur du recouvrement est habilité à procéder à une taxation forfaitaire.
Enfin les règles comptables françaises imposent la mise en oeuvre d'une comptabilité en partie double. Ainsi la contrepartie d'un compte de bilan doit être dans un compte de produit ou de charge.
En l'espèce, la comptabilité présentée ne peut être retenue comme probante puisque suivant les grands livres présentés :
- Les écritures d'OD entre le compte courant associé et les comptes fournisseurs ne sont justifiés.
- Les écritures d'OD de fin d'année ne sont pas répercutées l'année suivante par des écritures d'à nouveau.
- Les écritures comptables d'OD n'ont pas de contrepartie en compte de charge ou de produit.
- Suivant le lettrage partiel apparaissant dans les grands livres permettent de constater que les comptes sont lettrés entre les comptes de la classe 4 uniquement.
- il n'y a aucun lettrage avec les comptes de banques ou de charges et de produits.
In fine une régularisation est effectuée en réintégrant dans l'assiette des cotisations et contributions sociales l'intégralité des écritures d'OD dont par exemple celle de salaire, [16] ou [14].
Soit les régularisations suivantes :
- Année 2015: 12 738.29 Euro net soit 15 543 Euro brut
- Année 2016: 15 742.62 Euro net soit 19 206 Euro brut
- Année 2017 : 50 123.18 Euro net soit 61 011 Euro brut. (...)'
Les éléments produits par la SAS [17] qui avaient déjà été communiqués à l'Urssaf PACA au cours de la phase contradictoire du contrôle, ne permettent pas, contrairement à ce que la société prétend, de faire correspondre exactement l'ensemble des sommes figurant au crédit du compte associés 455 à celles provenant du compte Fournisseurs '401" et figurant sur les factures et tickets qu'elle a versés au débat.
Les pièces versées par la société sont insuffisantes pour démontrer que toutes les sommes litigieuses facturées à la SAS [17] ont été payées de façon effective par son président avec son propre argent ; certaines factures ont été libellées soit à des clients non identifiés, soit à des personnes dont le lien avec la société appelante n'a pas été caractérisé ; la SAS [17] ne procède que par affirmations lorsqu'elle indique que les tickets d'achats et les factures réglées en espèces correspondent à des sommes effectivement payées par M. [H] sur ses deniers personnels. La production de relevés du compte personnel de M. [H] ne permet pas de corréler avec certitude les achats qu'il aurait effectués pour le compte de la société avec les sommes créditées sur le compte associé.
En outre, comme le rappelle justement l'Urssaf PACA, les règles applicables en matière de législation sociale ne concordent pas en totalité avec la législation fiscale ; il en résulte que l'argument développé par la SAS [17] selon lequel les conclusions de l'Urssaf sur les anomalies de sa comptabilité ne sont pas pertinentes dans la mesure où l'administration fiscale n'a pas réalisé de redressement alors qu'elle s'est fondée sur les mêmes pièces comptables et sur une période comprise dans la période de contrôle, sera rejeté.
La SAS [17] ne justifie donc pas toutes les écritures d'OD relevées entre le compte courant associé et les comptes fournisseurs.
Dans un document 'justificatifs contrôle Urssaf [17]', joint à un courrier du 08 avril 2019, la société appelante reconnaît des lacunes dans la production de certains justificatifs des dépenses que le président aurait engagées puisqu'il est indiqué : ' il nous est difficile de prouver le règlement par M. [H] de factures réglées par cartes bleues personnelles car il n'a pas gardé le détail de ses paiements personnels...'.
La demande d'expertise comptable sollicitée par la SAS [17] ne peut pas prospérer en l'absence de démonstration de son utilité ; en effet, l'expertise ne pourrait porter que sur les pièces déjà communiquées par la SAS [17] au cours du contrôle ou lors de la phase contradictoire, celles communiquées ultérieurement, sans qu'elles aient été transmises préalablement à l'Urssaf, ne sont pas recevables. Or, l'Urssaf PACA a déjà analysé ces pièces et la SAS [17] ne parvient pas à remettre en cause sérieusement son analyse.
Enfin, il convient de rappeler qu'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de pallier la défaillance d'une partie dans l'administration de la preuve.
C'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande et ont maintenu ce chef de redressement.
Le jugement entrepris sera donc confirmé.
Sur le chef de redressement n° 10 :
Moyens des parties :
La SAS [17] fait valoir que l'Urssaf, en rejetant les indemnités de panier versées à certains salariés par l'entreprise ne prend pas en compte les situations particulières correspondant à la réalité des bénéficiaires : M. [K] est le seul à travailler à temps complet et à prendre tous ses repas sur les chantiers ; elle avait indiqué sa méthode de calcul de l'indemnité de panier . Elle fait observer que les autres salariés ne bénéficient pas de cette indemnité parce que, soit ils travaillent à temps partiel et ne viennent que quelques jours ou quelques heures sur les chantiers, soit ils rentrent à leur domicile par leur propre moyen, compte tenu de la distance du chantier, soit ils font le trajet aller avec l'employeur après avoir déposé leur cyclomoteur dans le camion avant de quitter le chantier par leur propre moyen et dans ce cas ils ne déjeunent pas sur place.
Elle considère qu'il ne saurait lui faire grief de n'attribuer les indemnités de panier qu'en fonction de la réalité du travail et des déplacements de chacun, et de ne pas la verser globalement à tout le monde, ce qui constituerait une méconnaissance des dispositions légales et réglementaires.
Elle affirme que les juges du fond ne peuvent pas se contenter d'indiquer que les incohérences soulevées tant par l'inspectrice que par la CRA ne sont pas clarifiées devant eux pour écarter sa contestation.
A l'appui de ses allégations, la SAS [17] produit notamment au débat :
- le courrier d'observations qu'elle a adressé à l'Urssaf, daté du 10/01/2019 'ci-joint en pièces 54,55 et 56 les notes de frais retrouvées, 174,82 euros, 40 euros en 2016 et 77 en 2017",
- un courrier adressé à l'Urssaf, daté du 08/04/2019.
L'Urssaf PACA fait valoir que l'inspecteur a constaté que des salariés à temps plein ne bénéficiaient pas des indemnités de repas, qu'il a relevé que la société attribuait forfaitairement le même nombre d'indemnités de panier, mais sans tenir compte du nombre de jours travaillés, qu'ainsi, certains salariés bénéficient d'indemnités et pas d'autres et que certaines indemnités n'étaient pas versées en contrepartie de la restauration sur les chantiers, que dès lors ces frais professionnels n'étaient pas justifiés.
Elle ajoute que la SAS [17] rapporte la preuve que le seul salarié qui bénéficie de repas est M. [K], puisque c'est le seul qui se restaure sur le chantier, que l'employeur se contredit néanmoins dans ses explications.
Elle fait observer que dans la méthode de calcul retenue par la SAS [17], les absences des salariés ne sont pas prises en compte.
Sur les pièces produites par SAS [17], elle expose que M.[Y] est un salarié qui a travaillé à temps plein en avril et en mai 2016, que les autres salariés bien que travaillant à temps partiel étaient susceptibles de percevoir des indemnités de panier dès lors qu'ils étaient présents sur les chantiers et ne pouvaient pas regagner leur résidence principale pour y déjeuner, rappelant que le statut de travailleur à temps partiel n'exonère pas nécessairement l'employeur de verser une prime de panier.
Elle conclut que devant les incohérences soulevées et l'absence d'éléments probants permettant de définir où se trouvent les chantiers et les salariés réellement présents sur ces chantiers, l'argument de l'employeur doit être écarté.
Réponse de la cour :
Selon l'article 3, 3° de l'arrêt du 20 décembre 2002, abrogé par arrêté du 04 septembre 2025, 'l'indemnité de repas ou de restauration hors des locaux de l'entreprise : lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement hors des locaux de l'entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas et qu'il n'est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 9,90 euros.
Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est placé simultanément au cours d'une même période de travail dans des conditions particulières de travail énoncées aux 1°, 2° et 3°, une seule indemnité peut ouvrir droit à déduction.
Lorsque le salarié est en déplacement hors des locaux de l'entreprise ou sur un chantier et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu de travail pour le repas et qu'il n'est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant, l'indemnité destinée à compenser les dépenses complémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet.
Toutes les indemnités qualifiées d'indemnités de casse-croûte sont assimilables à une indemnité de restauration hors des locaux de l'entreprise si les circonstances de fait (travail hors des locaux de l'entreprise, salariés occupés sur des chantiers, des entrepôts, des ateliers extérieurs...) se trouvent établies. Si ces conditions ne sont pas remplies, l'employeur ne peut pas bénéficier de l'exonération de cette indemnité et doit la réintégrer dans l'assiette des cotisations.
Il appartient à l'employeur de justifier qu'il s'est libéré de son obligation de paiement de la prime de repas.
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a fait les constatations suivantes s'agissant de ce chef de redressement :
'Lors du contrôle, il a été constaté que vous versiez des indemnités de paniers de chantiers à certains de vos salariés. Après vérification, il s'avère que vous donnez forfaitairement le même nombre d'indemnités de paniers et ce sans prendre en compte le nombre de jours travaillés.
De plus certains salariés n'en bénéficient.
En vertu des textes susvisés, les frais professionnels sont exonérés de cotisations et contributions sociales lorsqu'il est démontré les circonstances de faits c'est-à-dire entre autres les déplacements sur un chantier.
Durant l'entretien de début de contrôle, monsieur [H] a indiqué que l'ensemble de ses salariés se rendaient sur les chantiers. Pour autant il est constaté que des salariés à temps plein n'en bénéficient pas.
En l'espèce, le fait que certains salariés bénéficient d'indemnités et pas d'autres permet de constater que ces indemnités ne sont pas versées en contrepartie de se restaurer sur les chantiers.
Puis le fait qu'il soit versé un nombre supérieur de jours travaillés permet de déterminer que ces frais professionnels ne sont pas justifiés.
In fine l'intégralité des frais de repas des salariés sont réintégrés dans l'assiette des cotisations et contributions sociales soit
- Année 2015 : 422.40 Euro net soit 542 Euro brut
- Année 2016 : 1 645.60 Euro net soit 2 114 Euro brut.
- Année 2017 : 1 742.40 Euro net soit 2 240 Euro brut. (...)'
Force est de constater que la SAS [17] qui soutient qu'il ne peut pas lui être fait grief 'de n'attribuer les indemnités de panier qu'en fonction de la réalité du travail et des déplacements de chacun', ne produit aucun élément de nature à justifier le versement d'indemnités de panier à M. [K], en fonction de la localisation des chantiers sur lesquels il serait intervenu et du lieu de son domicile.
Par ailleurs, la SAS [17] ne conteste pas sérieusement le fait que M. [Y] aurait travaillé à temps plein en avril et mai 2016, soit pendant la période de contrôle, avant de travailler à temps partiel, alors qu'il n'a perçu aucune indemnité de paniers. La SAS [17] n'apporte aucune explication sur ce point.
Enfin, l'argument de la SAS [17] selon lequel les salariés qui travaillaient à temps partiel ne pouvaient pas percevoir cette indemnité au motif qu'ils n'étaient présents que quelques heures ou quelques jours par mois est inopérant, dans la mesure où l'exécution d'un contrat de travail à temps partiel n'exclut pas la possibilité pour le salarié de travailler sur des chantiers pendant la pose repas.
Il y a lieu dans ces conditions de maintenir le redressement et le jugement entrepris sera donc confirmé.
Sur le chef de redressement n°13:
Moyens des parties :
La SAS [17] fait valoir que dans la mesure où la SAS [17] conteste les redressements au titre des frais professionnels évoqués ci-avant et où la CRA a admis la déduction des frais de déplacement, cela doit entraîner une réduction corrélative du redressement sollicité initialement par l'Urssaf.
Elle prétend que les juges du fond ne peuvent se contenter d'indiquer que ce point n'avait pas été contesté au moins dans son principe, sans répondre à son argumentaire.
A l'appui de ses allégations, la SAS [17] produit notamment au débat :
- le courrier du 08/04/2019 de saisine de la CRA '... A la suite d'un contrôle effectué dans notre entreprise le 27/11/2018 Mme [E] [G], inspecteur à 1'URSSAF, a requalifié en salaires certains versements et procédé à leur reintégration dans l'assiette des cotisations de Sécurité Sociale. En conclusion de sa lettre d'observation datée du 10/12/2018 le rappel s'é1eve à 149 073 €.
Suite à notre lettre du 10/1/2019 avec laquelle nous avons donné les explications complémentaires et produit les pièces justificatives à chaque chapitre de la lettre d'observation. Cette somme a été ramenée à 135 873 € par la prise en compte de 3 factures de sous traitants sur 21.
Toutes les autres pièces produites ne sont pas prises en compte, toutes nos explications sont rejetées.
Vous trouverez en pièces jointes les différents chapitres de la lettre d'observation pour lesquels le redressement est maintenu, malgré nos explications complémentaires et malgré la production de pièces justificatives. Nous contestons le recouvrement de ces sommes et demandons à la Commission de bien vouloir réexaminer la décision de l'inspecteur de l'URSSAF et de réviser les cotisations sociales complémentaires mises à notre charge...'.
L'Urssaf PACA soutient que dans sa lettre de saisine de la CRA, la SAS [17] a entendu limiter sa contestation amiable aux seuls chefs de redressement n° 5,8,10,12 et 14, qu'elle n'a jamais saisi la CRA de la moindre contestation du point n°13 de la lettre d'observations, en sorte que faute d'avoir satisfait à cette formalité substantielle, elle ne pouvait pas valablement saisir la juridiction contentieuse et conclut que c'est à juste titre que le tribunal a déclaré sa contestation irrecevable.
Elle ajoute qu'en tout état de cause, la cour ne saurait être saisie, comme tente de le faire la société, d'une demande d'infirmation de la décision de la CRA.
A titre subsidiaire, elle prétend que le chef de redressement n°13 est bien fondé.
Réponse de la cour :
L'article R142-1 du code de la sécurité sociale dispose que les réclamations relevant de l'article L. 142-4 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil, du conseil d'administration ou de l'instance régionale de chaque organisme.
Cette commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation.
Il résulte de ces dispositions que l'étendue de la saisine de la CRA d'un organisme de sécurité sociale, se détermine au regard du contenu de la lettre de réclamation et non en considération de la décision ultérieure de cette commission.
Il résulte des éléments produits au débat que la SAS [17] a saisi la CRA par un courrier du 08 avril 2019, que dans le document joint à ce courrier, elle a listé les chefs de redressement contestés, et que le chef de redressement envisagé au point n°13 de la lettre d'observations n'y figure pas.
Il convient d'en déduire que la SAS [17] a en définitive limité à son courrier de saisine de la CRA sa critique aux seuls points de redressement opérés au titre 'des indemnités de trajet', 'comptes courants débiteurs', 'restaurants', 'paniers ouvriers', 'factures de sous traitants manquantes', à l'exclusion des autres chefs de redressement.
Il convient de constater que le délai de forclusion de l'article R142-1 susvisé était expiré à la date de la saisine du tribunal judiciaire d'Avignon intervenue le 28 janvier 2020 et d'en déduire que le chef de redressement n°13 ne pouvait plus être contesté devant la juridiction contentieuse.
Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.
Sur le chef de redressement n°14 :
Moyens des parties:
La SAS [17] soutient que suite à l'envoi du courrier du 10 janvier 2019 auquel étaient jointes plusieurs pièces justificatives, le service de contrôle a répondu par un courrier du 20 février 2019, que le rappel de cotisation a été ramené de 60 814 euros à 47 614 euros, que cependant, la CRA a considéré que ce chef de redressement n'était pas contesté, alors que non seulement dans son courrier du 10 janvier 2019 elle contestait ce point, mais ce grief à l'encontre des redressements de l'Urssaf figurait bien dans la saisine de la CRA. Elle précise qu'elle avait pris soin d'établir un tableau récapitulatif justifiant de sa contestation et visant les documents communiqués à ce titre.
Elle ajoute que les juges du fond se contentent d'indiquer que certaines factures 'sont douteuses' sans prendre en compte les éléments détaillés qu'elle avait produits.
A l'appui de ses allégations, la SAS [17] produit notamment au débat :
- le courrier que l'Urssaf lui a adressé en réponse à ses observations, daté du 20/02/2019,
- la lettre de saisine de la CRA du 08/04/2019 dans laquelle ont été intégrés des tableaux qui mentionnent les dates, les noms des sous-traitants, les montants des factures qui auraient été communiquées, 'les factures non fournies ou non conformes', les attestations de vigilance envoyées.
L'Urssaf PACA soutient que l'inspecteur a parfaitement motivé en droit son recours à la taxation forfaitaire et que sur le fond, ce redressement est justifié en droit et en fait. Elle fait valoir que l'inspecteur a sollicité la société pour la communication des factures comptabilisées dans le compte de sous traitant, que malgré une nouvelle demande présentée le 27 novembre 2018, la société n'a pas produit tous les documents sollicités, que certaines factures produites ne comportaient aucun numéro de Sirene, en sorte que l'inspecteur a fait application des dispositions réglementaires.
Elle ajoute que durant la phase contradictoire, la SAS [17] a produit quelques factures complémentaires qui ont été prises en compte par l'inspecteur, lequel a néanmoins formulé des observations dans un courrier du 20 février 2019.
Elle entend rappeler que selon la jurisprudence de la Cour de cassation, l'inspecteur de l'Urssaf est seul juge de la pertinence des pièces qui lui sont présentées, que la SAS [17] produit de nouveaux éléments qui n'avaient pas été portés à sa connaissance et que l'inspecteur avait explicité chacune des factures comptabilisées par la société dont il rejetait le caractère probant en raison soit de l'absence de leur communication, soit de leur non conformité aux règles fixées par les articles 242 nonies et 242 nonies A du code général des impôts, par absence de mentions obligatoires.
Elle précise que sur 32 factures visées lors de la vérification et après acceptation de 3 factures conformes dans le cadre de la période contradictoire du contrôle, 29 n'étaient finalement pas retenues par l'inspecteur, et que la SAS [17] a elle-même reconnu que sur ces 29 factures, 6 n'étaient pas conformes, en sorte que l'analyse a porté sur 23 factures restantes que la SAS [17] persiste à vouloir admettre. Elle conclut que la SAS [17] ne dispose au final que de 8 factures respectant les critères requis par la réglementation.
Réponse de la cour :
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a fait les constatations suivantes concernant ce chef de redressement :
' Lors de la vérification, des grands livres et plus précisément dans le compte de sous traitance " 611 090 Sous Traitance générale ", des factures ont été sollicitées.
Plusieurs n'ont pu être présentées lors du contrôle, aussi elles ont été demandées par mail en date du 27 Novembre 2018 pour une date de transmission au 30 novembre 2018.
A cette date ces pièces n'ont pas été transmises.
Puis certaines factures présentées étaient sans numéro SIREN comme [13] et [15].
En vertu des textes cités préalablement, l'absence de document ou la fourniture de documents non probants permet à l'inspecteur le pouvoir réintégrer ces sommes dans l'assiette de cotisation par le biais d'une fixation forfaitaire.
En l'espèce l'absence de pièces comptables et la présence de factures non conformes du fait de l'absence des mentions obligatoires prévues aux articles 242 nonies et 242 nonies A du Code général des impôts et à l'article L 441-3 du Code de commerce permet de déterminer qu'il est possible d'avoir recours à la taxation forfaitaire.
In fine un redressement est effectué en réintégrant dans l'assiette des cotisations les factures non probantes et les écritures non justifiées soit :
- Année 2015: 43443.33 Euro net soit 54 408 Euro brut
- Année 2016: 16 550 Euro net suit 20 793 Euro brut.
- Année 2017:24845 Euro net soit 31 193 Euro brut.
Vous trouverez le détail des montants repris en annexe.(...)'
Il résulte des tableaux joints à la lette de saisine de la CRA que la SAS [17] reconnaît que 3 factures n'ont pas été produites ou étaient non conformes pour l'année 2015 correspondant à un montant total de 8 300 euros, 1 en 2016 pour un montant de 2 000 euros et 4 en 2017 pour un montant de 10 575 euros.
Dans ses écritures soutenues oralement à l'audience, l'Urssaf PACA a inséré un tableau récapitulatif relatif aux factures litigieuses, sur lequel sont mentionnés ses commentaires pour chacune des factures visées et duquel il résulte que quelques factures seulement sur l'ensemble de celles qui avaient été communiquées avaient été acceptées, les autres étant pour l'essentiel non conformes.
En outre, comme le relèvent justement les premiers juges , certaines factures manuscrites portent un cachet d'entreprises différentes - Meven, Sarikabadayi, Ozturc - mais supportent une écriture identique, ce qui crée un doute sur leur authenticité ; la SAS [17] n'apporte aucune explication sur ce point.
Au vu des éléments qui précèdent, il apparaît que la SAS [17] n'apporte pas d'éléments de nature à remettre en cause sérieusement les rejets opérés par l'Urssaf pour les factures rejetées.
La SAS [17] ne conteste pas davantage le fait que les attestations de vigilance n'ont pas été produites pour les factures d'un montant supérieur à 4 000 euros.
Il s'en déduit qu'en raison d'une comptabilité peu probante, le recours par l'Urssaf PACA à la taxation forfaitaire était justifié.
Il y a lieu en conséquence de maintenir le redressement et de confirmer le jugement entrepris.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 16 mai 2024 par le tribunal judiciaire d'Avignon, contentieux de la protection sociale,
Y ajoutant,
Condamne la SAS [17] à payer à l'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne la SAS [17] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/01929 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JG7I
EM/DO
POLE SOCIAL DU TJ D'AVIGNON
16 mai 2024
RG :20/00114
Société [17]
C/
URSSAF PROVENCE ALPES COTE D'AZUR
Grosse délivrée le 13 NOVEMBRE 2025 à :
- Me EL MABROUK
- Me MALDONADO
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
5e chambre Pole social
ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2025
Décision déférée à la Cour : Jugement du Pole social du TJ d'AVIGNON en date du 16 Mai 2024, N°20/00114
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président
Madame Evelyne MARTIN, Conseillère
Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère
GREFFIER :
Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision.
DÉBATS :
A l'audience publique du 16 Septembre 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 13 Novembre 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
Société [17]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentée par Me Chaima EL MABROUK de la SELARL CHAIMA EL MABROUK, avocat au barreau D'AVIGNON
INTIMÉE :
URSSAF PROVENCE ALPES COTE D'AZUR
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représenté par Me Hélène MALDONADO, avocat au barreau de NIMES
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par M. Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 13 Novembre 2025, par mise à disposition au greffe de la cour.
FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SAS [17] a fait l'objet, pour son établissement de [Localité 6], d'un contrôle portant sur l'application de la législation de la sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires, par les services de l'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur (PACA) pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017.
Par une lettre d'observations du 10 décembre 2018, l'Urssaf PACA a notifié à la SAS [17] le redressement envisagé, pour un montant global de 149 073 euros, au titre des chefs de redressement suivants :
- n°1 :contribution FNAL,
- n°2: prise en charge par l'employeur des cotisations ouvrières,
- n°3 : assiette minimum des cotisations BTP, indemnités de trajet,
- n°4 : CSG/CRDS sur part patronale aux régimes de prévoyance complémentaire,
- n°5 : comptes courants débiteurs,
- n°6 : rémunérations non déclarées,
- n°7 : prise en charge par l'employeur des cotisations,
- n°8 : frais professionnels non justifiés, restaurations hors des locaux de l'entreprise,
- n°9 : frais professionnels non justifiés, allocations forfaitaires dirigeants de sociétés et mandataires,
- n°10 :frais professionnels non justifiés, limites d'exonération, restauration hors locaux et hors restaurant,
- n°11 : frais professionnels non justifiés ; principes généraux,
- N°12 : frais professionnels : limites d'exonération, utilisation du véhicule personnel,
- n°13 : réduction générale des cotisations, rémunération brute à prendre en compte dans la formule,
n°14 : non fourniture de documents ou documents non conformes, fixation forfaitaire de l'assiette.
En réponse aux observations de la SAS [17] formulées dans un courrier du 10 janvier 2019, l'Urssaf PACA a, par courrier du 20 février 2019, informé la société que le chef de redressement n°14 était ramené de 60 814 euros à 47 614 euros, et que le redressement total s'élevait désormais à 135 873 euros.
La SAS [17] a contesté le montant du redressement et a saisi à cet effet la commission de recours amiable ( CRA) de l'Urssaf PACA par courrier du 08 avril 2019.
Le 14 juin 2019, l'Urssaf PACA a mis en demeure la SAS [17] de lui régler la somme de 149 554 euros correspondant à 135 977 euros de cotisations et contributions sociales et 13 677 euros de majorations de retard.
Le 27 novembre 2019, la CRA de l'Urssaf PACA a, dans sa décision rendue en sa séance du 25 septembre 2019, maintenu l'ensemble des redressements contestés à l'exception du point 12 qu'elle a annulé en totalité, soit 28 396 euros.
Par requête du 28 janvier 2020, la SAS [17] a saisi le tribunal judiciaire d'Avignon- contentieux de la protection sociale aux fins de contester cette décision.
Par jugement contradictoire rendu le 16 mai 2024, le pôle social du tribunal judiciaire d'Avignon a :
- Débouté la SAS [17] de ses demandes d'annulation du contrôle et de la lettre d'observations,
- Déclaré irrecevable la contestation du point n°13 de la lettre d'observations,
- Annulé le point n°8 de la lettre d'observations (412 euros),
- Dit que le montant du redressement est de 107.065 euros de cotisations,
- Validé la mise en demeure du 14 juin 2019 pour la seule somme de 107.065 euros de cotisations,
- Condamné la SAS [17] à payer à l'URSSAF la somme de 107.065 euros augmentée des majorations de retard, année par année, à calculer à nouveau par l'URSSAF,
- Condamné la société SAS [17] à payer à l'URSSAF la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné la SAS [17] aux dépens (article 696 du code de procédure civile).
Par acte électronique du 06 juin 2024, la SAS [17] a régulièrement interjeté appel de cette décision.
L'affaire a été appelée à l'audience du 08 avril 2025 puis renvoyée à l'audience du 16 septembre 2025 à laquelle elle a été retenue.
Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens développés à l'appui de ses prétentions, la SAS [17] demande à la cour de :
- réformer le jugement contesté en ce qu'il a :
- débouté la SAS [17] de ses demandes d'annulation du contrôle et de la lettre d'observations,
- déclaré irrecevable la contestation du point n°13 de la lettre d'observations,
- annulé le point n°8 de la lettre d'observations (412 euros),
- dit que le montant du redressement est de 107.065 euros de cotisations,
- validé la mise en demeure du 14 juin 2019 pour la seule somme de 107.065 euros de cotisations,
- condamné la SAS [17] à payer à l'URSSAF la somme de 107.065 euros augmentée des majorations de retard, année par année, à calculer à nouveau par l'URSSAF,
- condamné la SAS [17] à payer à l'URSSAF la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SAS [17] aux dépens.
par conséquent statuant à nouveau :
à titre in limine litis :
- constater l'absence d'envoi d'un avis de contrôle respectant les dispositions de l'article R243-59 du code de la sécurité sociale,
- constater le défaut de motivation du contrôle au regard de l'absence de mention des textes législatifs applicables et de leurs modalités d'application aux chefs de redressement,
- déclarer nul et de nul effet l'ensemble de la procédure de contrôle et de redressement effectuée par l'URSSAF provence alpes côte d'azur,
à titre principal :
- dire que l'URSSAF ne justifie pas du bienfondé des chefs de redressement,
- déclarer irrecevable le redressement effectué auprès de la SAS [17],
- constater que la SAS [17] ne s'oppose pas à la mise en place d'une expertise aux frais de l'URSSAF,
en tout état de cause :
- réformer la décision rendue par la commission de recours amiable de l'URSSAF du 25/09/2019,
- annuler les opérations de contrôle, de redressement et de recouvrement subséquentes,
- débouter l'URSSAF de l'ensemble de ses demandes,
- condamner l'URSSAF au paiement au profit de la société [17] de la somme de 3.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens au titre de la procédure de première instance,
- condamner l'URSSAF au paiement au profit de la société [17] de la somme de 3.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens au titre de la procédure d'appel.'
Par conclusions écrites, déposées et développées oralement à l'audience auxquelles il convient de se reporter pour connaître les moyens soutenus à l'appui de ses prétentions, l'Urssaf PACA demande à la cour de :
- Débouter la SAS [17] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 16 mai 2024 par le Pôle social judiciaire d'Avignon,
En conséquence, statuant à nouveau,
- valider la mise en demeure du 14 juin 2019 pour son montant ramené à 107 065 euros en cotisations et 11 844 euros de majorations de retard, soit au total 118 909 euros,
- condamner la SAS [17] à payer à l'URSSAF PACA 107 065 euros en cotisations et 11 844 euros de majorations de retard, soit au total 118 909 euros,
- condamner la SAS [17] à payer à l'URSSAF PACA la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- laisser à la charge les entiers dépens de la SAS [17].'
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l'audience.
MOTIFS
Sur la régularité de la procédure de contrôle :
Moyens des parties
La SAS [17] soulève l'annulation de la procédure de contrôle, au motif que les pièces qu'elle a reçues ne lui ont pas permis de s'assurer des modalités du contrôle au regard des dispositions légales et réglementaires applicables. Elle fait valoir que l'Urssaf lui a adressé un 'avis de contrôle' daté du 06 novembre 2018 accompagné d'un accusé de réception mentionnant une date de réception au 13 novembre 2018, soit moins de quinze jours avant la date de la première visite du 27 novembre 2018, en sorte que le délai minimal de quinze jours entre ces deux dates, prévu réglementairement, n'a pas été respecté, et que faute pour l'Urssaf de justifier l'accomplissement de cette formalité substantielle, le redressement encourt la nullité.
Elle ajoute que dans l'hypothèse où cet avis lui aurait été régulièrement adressé, l'Urssaf doit être en mesure de justifier que l'avis comporte les mentions suivantes à peine de nullité : l'existence d'une 'Charte cotisant contrôlé' et le droit pour l'entreprise contrôlée de se faire assister du conseil de son choix, rappelant que l'absence d'une seule de ces mentions est de nature à entraîner la nullité de la procédure de contrôle et l'annulation des redressements opérés à l'issue de cette procédure. Elle fait observer que l'Urssaf produit un document qui ne fait que renvoyer au site de l'Urssaf pour accéder à la Charte du cotisant, qu'il ne s'agit pas d'une adresse électronique mais d'un simple lien, le cotisant devant effectuer plusieurs démarches pour parvenir à consulter la Charte, et que contrairement à ce que soutient l'Urssaf, l'accès n'est pas 'aisément consultable'. Elle considère que l'Urssaf qui est débitrice de l'obligation de porter à la connaissance du cotisant contrôlé le contenu de la Charte, ne saurait lui reprocher de ne pas l'avoir sollicitée pour obtenir la communication du document, ni se prévaloir utilement que la Charte est accessible sur le site 'service public.fr'. Elle considère que c'est dès lors à juste titre que le tribunal a dit que l'avis de contrôle était nul et de nul effet, que cela emportait annulation des opérations de contrôle, de redressement et de recouvrement subséquentes.
Elle soutient, par ailleurs, que l'Urssaf a mentionné dans la lettre d'observations du 10 décembre 2018 deux articles, '242 nonnies' et '242 nonnies A' du code général des impôts qui n'existent pas, en sorte que l'Urssaf ignore les manquements à ses obligations légales, alors qu'il est impératif que l'entreprise contrôlée puisse connaître le ou les textes législatifs ou réglementaires et leurs modalités d'application. Elle précise qu'une telle information est d'autant plus importante que l'Urssaf entend recourir à la méthode de la taxation forfaitaire. Elle conclut que faute pour l'Urssaf de justifier l'accomplissement de l'ensemble des formalités substantielles, la procédure de contrôle doit être annulée.
L'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur soutient que contrairement à ce que prétend la SAS [17], la procédure de contrôle est parfaitement régulière. Elle indique que le formalisme entourant les opérations de contrôle a été respecté, qu'elle produit l'avis de contrôle qu'elle a adressé à la société le 06 novembre 2018 pour une vérification fixée au 27 novembre 2018 , en sorte que le délai de 15 jours prévu aux dispositions réglementaires est respecté et que c'est vainement que la SAS [17] conteste la date d'envoi en tentant de prétexter qu'elle ne justifie pas de cette date, alors que l'ayant réceptionné le 13 novembre 2018, c'est qu'a minima, l'envoi a été effectué la veille, soit le 12 novembre.
Elle ajoute que l'avis de contrôle du 06 novembre 2018 est conforme aux dispositions réglementaires, que la SAS [17] a été informée de l'existence de la Charte et des moyens dont elle disposait pour l'obtenir, que si elle ne parvenait pas à y accéder à partir du lien internet figurant sur l'avis de contrôle, elle avait la possibilité de se rapprocher d'elle ou de l'inspecteur pour qu'elle lui soit adressée, ce qu'elle n'a pas entendu faire.
Enfin, elle prétend que la lettre d'observations indique pour chaque chef de redressement les bases retenues qu'elle distingue en 'base totalité' et en 'base plafonnée', les taux de cotisations appliqués à chaque 'code type de personnel' ainsi que le montant des cotisations et contributions sociales ventilées par année, rappelle le contenu et les modalités d'applications des chefs de redressement entrepris.
Réponse de la cour :
L'article R243-59 I du code de la sécurité sociale dispose, dans sa version applicable au litige, issue du décret n°2017-1409 du 25 septembre 2017, que :
I.-Tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé, au moins quinze jours avant la date de la première visite de l'agent chargé du contrôle, de l'envoi par l'organisme effectuant le contrôle des cotisations et contributions de sécurité sociale d'un avis de contrôle. Toutefois, l'organisme n'est pas tenu à cet envoi dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail. Dans ce dernier cas, si l'organisme entend poursuivre le contrôle sur d'autres points de la réglementation, un avis de contrôle est envoyé selon les modalités définies au premier alinéa. (...)
Cet avis fait état de l'existence d'un document intitulé " Charte du cotisant contrôlé " présentant à la personne contrôlée la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement et à son issue, sur le fondement du présent code. Il précise l'adresse électronique où ce document approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable et indique qu'il est adressé au cotisant sur sa demande. Les dispositions contenues dans la charte sont opposables aux organismes effectuant le contrôle.
II.-La personne contrôlée a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l'avis prévu aux précédents alinéas.
La personne contrôlée est tenue de mettre à disposition des agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7 tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle.
L'agent chargé du contrôle peut demander que les documents à consulter lui soient présentés selon un classement nécessaire au contrôle dont il aura au préalable informé la personne contrôlée.
Ces agents peuvent interroger les personnes rémunérées, notamment pour connaître leurs nom et adresse ainsi que la nature des activités exercées et le montant des rémunérations y afférentes, y compris les avantages en nature. (...)
III.-A l'issue du contrôle ou lorsqu'un constat d'infraction de travail dissimulé a été transmis en application des dispositions de l'article L. 8271-6-4 du code du travail afin qu'il soit procédé à un redressement des cotisations et contributions dues, les agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7 communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant une lettre d'observations datée et signée par eux mentionnant l'objet du contrôle réalisé par eux ou par d'autres agents mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du code du travail, le ou les documents consultés, la période vérifiée, le cas échéant, la date de la fin du contrôle et les observations faites au cours de celui-ci. (...)
Les observations sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l'indication du montant des assiettes correspondant, ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l'indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 qui sont envisagés.(...)
La période contradictoire prévue à l'article L. 243-7-1 A est engagée à compter de la réception de la lettre d'observations par la personne contrôlée, qui dispose d'un délai de trente jours pour y répondre. La lettre mentionne la possibilité de se faire assister d'un conseil de son choix.
Dans sa réponse, la personne contrôlée peut indiquer toute précision ou tout complément qu'elle juge nécessaire notamment en proposant des ajouts à la liste des documents consultés.
Lorsque la personne contrôlée répond avant la fin du délai imparti, l'agent chargé du contrôle est tenu de répondre. Chaque observation exprimée de manière circonstanciée par la personne contrôlée fait l'objet d'une réponse motivée. Cette réponse détaille, par motif de redressement, les montants qui, le cas échéant, ne sont pas retenus et les redressements qui demeurent envisagés.
IV.-A l'issue du délai mentionné au huitième alinéa du III ou des échanges mentionnés au III, afin d'engager la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement, l'agent chargé du contrôle transmet à l'organisme effectuant le recouvrement le rapport de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s'il y a lieu, de la réponse de l'intéressé et de son propre courrier en réponse.
Le cas échéant, l'organisme de recouvrement communique également les observations ne conduisant pas à redressement mais appelant la personne contrôlée à une mise en conformité en vue des périodes postérieures aux exercices contrôlés, et exposant cette personne, si elle n'y procède pas, aux dispositions du septième alinéa du III du présent article. (...)
La période contradictoire prévue à l'article L. 243-7-1 A prend fin à la date de l'envoi de la mise en demeure ou de l'avertissement mentionnés à l'article L. 244-2 du présent code.
Les dispositions du chapitre II du titre IV du livre Ier sont applicables aux observations de l'organisme ainsi qu'à l'avis de crédit, mentionnés respectivement aux deuxième et troisième alinéas du présent IV.
V.-Les documents mentionnés au présent article sont adressés à la personne contrôlée selon les modalités définies au troisième alinéa du I.
L'information du cotisant quant à l'existence de la Charte du cotisant contrôlé constitue une formalité substantielle, conditionnant la validité du contrôle.
En l'espèce, l'Urssaf PACA produit au débat un avis de contrôle daté du 06 novembre 2018, adressé à la SAS [17], qui mentionne un début des opérations au 27 novembre 2018 à 09h00, qui a été envoyé par lettre recommandée avec accusé de réception (n°2C12892440024) et l'accusé de réception correspondant sur lequel sont apposées une date de réception au 13 novembre 2018 et une signature.
Si l'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur ne justifie pas de la date d'envoi dudit avis, alors qu'il lui appartient d'en apporter la preuve, il n'en demeure pas moins que l'avis a été adressé nécessairement, au plus tard, la veille de la réception, ce qui correspond à l'hypothèse la plus favorable pour l'appelante comme le rappellent les premiers juges, soit le 12 novembre 2018.
Dans la mesure où la vérification était prévue le 27 novembre 2018, il s'en déduit que le délai de quinze jours prévu à l'article R243-59 alinéa 1, susvisé, a bien été respecté.
Par ailleurs, l'avis de contrôle mentionne in fine :'je vous informe qu'un document intitulé 'charte du cotisant contrôlé' dont le modèle est fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable sur le site 'http://www.urssaf.fr'. A votre demande, cette charte peut vous être adressée. Ce document vous présente la procédure de contrôle et les droits dont vous disposez pendant son déroulement, tels qu'ils sont définis par le code de la sécurité sociale'.
Si l'Urssaf PACA n'a pas mentionné l'adresse électronique où la Charte est consultable et téléchargeable, elle a néanmoins précisé le lien lui permettant d'y accéder par voie électronique et a rappelé les dispositions de l'article R243-59 susvisées selon lesquelles le document lui est envoyé, à sa demande.
Contrairement à ce que la SAS [17] prétend, les formalités qui doivent être effectuées pour accéder à la Charte du cotisant ne constituent pas des opérations informatiques complexes ; dans tous les cas de figure, si ses démarches informatiques se révélaient vaines et si la société souhaitait en prendre connaissance, elle avait la possibilité de solliciter l'Urssaf pour qu'elle la lui envoie, ce qu'elle ne justifie pas avoir fait.
Enfin, contrairement à ce que prétend la SAS [17], les articles '242 nonnies' et '242 nonies A' du code général des impôts existent, comme l'ont justement relevé les premiers juges, et sont applicables, le premier depuis le 18 août 1993, le second depuis le 09 juillet 2003.
La lettre d'observations datée du 10 décembre 2018 mentionne l'objet du contrôle - vérification de l'application des législations de sécurité sociale, d'assurance chômage et de garantie des salaires - , la période contrôlée - les années 2015, 2016 et 2017 -, le ou les documents consultés - Livre et fiches de paie, convention collective applicable dans l'entreprise, les états justificatifs mensuels des allègements de la réduction générale des cotisations, Grand Livre, pièces justificatives de frais de déplacements, extrait d'inscription au RCI et ou RM, Statuts, factures fournisseurs et prestataires -, la date de fin de contrôle - 10 décembre 2018 -, les observations motivées faites pour chaque chef de redressement envisagé qui comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et le montant des cotisations et contributions sociales ventilées par année.
Il s'en déduit que la lettre d'observations est motivée conformément aux dispositions réglementaires susvisées.
La procédure de contrôle est régulière et les moyens développés par la SAS [17] au soutien de sa demande d'annulation sont inopérants et seront donc rejetés.
Le jugement entrepris sera confirmé.
Sur le fond :
Sur le chef de redressement n°5 :
Moyens des parties
La SAS [17] fait valoir qu'elle a fourni les explications sur les écritures comptables mises en évidence au cours du contrôle, dans son courrier du 10 janvier 2019 : ces écritures avaient pour objectif de justifier comptablement le paiement de factures de la société par le dirigeant de l'entreprise, M. [H], soit en espèces, soit à partir de son compte personnel. Elle prétend avoir fourni à cet effet des pièces justificatives, que dès lors, les opérations ont pu être vérifiées non seulement à partir de la comptabilité mais également à l'appui de pièces justificatives et des commentaires de l'entreprise.
Elle ajoute que pour se conformer à la législation, elle a indiqué dans son courrier du 10 janvier 2019, qu'en fin d'année, au moment de l'établissement du bilan, 'si après avoir passé tous les remboursements de frais qui incombent à Mr [H] la position du compte courant se trouve débitrice, une provision de salaire complémentaire est faite et cotisée sur l'année suivante'. Elle considère que dans ces conditions, elle peut difficilement être plus transparente et qu'on ne saurait lui reprocher de chercher à éluder ses obligations comptables et fiscales.
Elle fait observer que lorsque le dirigeant procède avec son compte personnel ou en espèces, au paiement de factures de l'entreprise, ces opérations doivent être enregistrées comptablement à partir du compte 455 'compte courant d'associé', qu'il appartient à l'Urssaf de justifier de la méthode à utiliser pour passer ces écritures en comptabilité, que son désaccord quant aux modalités de passation des écritures comptables ne sauraient établir la preuve d'une comptabilité non probante.
Elle indique qu'elle a fait l'objet d'un contrôle fiscal pour la période 2016/2017 prolongée jusqu'au 30/10/2018 pour la TVA, et qu'à cette occasion, l'inspecteur chargé du contrôle n'a pas remis en cause les documents comptables qu'elle avait présentés. Elle conclut qu'il n'est pas établi que des revenus auraient été éludés pour échapper non seulement à ses obligations sociales mais également fiscales.
A l'appui de ses allégations, la SAS [17] produit notamment au débat :
- une lettre du 10 janvier 2019 adressée par la SAS [17] à l'Urssaf, dans laquelle elle formule ses observations consécutivement à la lettre d'observations '5. Comptes courants débiteurs : lorsque le dirigeant règle des factures fournisseurs en espèces ou avec son compte personnel on ne peut que débiter le compte 401...Fournisseur par le crédit du compte 455..Compte courant. Le compte de charge a été mouvementé par l'enregistrement de la facture du fournisseur. En respectant les règles comptables françaises en partie double, les écritures sont les suivantes...Si elle était passée en journal de Banque «BQ » cela fausserait le compte de trésorerie.
Cette écriture solde le compte Fournisseur, il n'y a donc pas lieu de la « répercuter sur l'exercice suivant par des écritures d'à nouveau », cela équivaudrait à constater que le fournisseur n'a pas été payé. (...)
En ce qui concerne le lettrage des comptes, un lettrage ne peut se faire qu'à l'intérieur d'un même compte et en règle générale un compte Fournisseur « Classe 401 » ou un compte Client « Classe 411 ».
Les comptes de charges ne se lettrent pas.
Il n'est pas possible de lettrer deux comptes différents entre eux.
Ci-joint toutes les factures payées par Mr [H] avec sa carte bleue personnelle ou en espèces.
Il est redressé 7500.00 de salaire en 2016 puis de nouveau en 2017.
En fin d'année à l'établissement du bilan, si après avoir passé tous les remboursement de frais qui incombent à Mr [H] la position du compte courant se trouve débitrice, une provision de Salaire complémentaire est faite et cotisée sur l'année suivante.
En effet, la DADS devant être déclarée avant le 31 janvier, à l'établissement du bilan, au mois de mars ou avril, on ne peut plus cotisé sur l'année. (...)',
- un document intitulé 'contrôle Urssaf/écritures de compte courant' joint au courrier précédent, où sont insérés plusieurs tableaux qui mentionnent, pour chaque années contrôlée, le montant des opérations comptables visées par le chef de redressement n°5, le numéro de la pièce jointe et le justificatif correspondant,
- plusieurs factures adressées à la SAS [17] datées de la période contrôlée établies : par [J] [L] au nom de la SAS [17] qui n'est pas datée et relative à une somme de 1100 euros avec la mention manuscrite 'réglé en espèces', par Autodistribution adressée à [9] pour un montant de 191,59 euros, par [8] en date du 23/05/2016 au nom de M. [R] [O], le 01/03/2016 au nom de 'particulier comptant', par [11] le 05/02/2016 au nom de Mme [N] [P], par [12] le 09/11/2016 au nom de 'Client comptant [Localité 6]' n°60237, par [10] le 13/07/2017 au nom de M. [Z] [H] d'un montant de 900,22 euros,
- des tickets d'achat auprès de plusieurs fournisseurs, comme [7], [5]..
- des extraits du Grand livre concernant le compte [XXXXXXXXXX03] 'compte associés, comptes courants', de 2015 à 2018, sur lesquels apparaissent des retraits, et concernant le compte 'fournisseurs' pour l'année 2016.
L'Urssaf PACA réplique que la SAS [17] a été dans l'impossibilité de prouver que son président, M. [H], aurait réglé ces factures avec ses propres deniers, que les Grands livres présentés faisaient apparaître des écritures d'OD ( ordres divers) entre le compte courant associé et les comptes fournisseurs qui n'ont pas été justifiés, des écritures d'OD de fin d'année non répercutées l'année suivante par des écritures 'd'à nouveau' des écritures comptables d'OD qui n'ont pas de contrepartie en compte de charge ou de produit, ce qui explique que l'agent de contrôle a réintégré dans l'assiette des cotisations et contributions l'intégralité des écritures OD, ce qui a généré un rappel de cotisations de 47 447 euros.
Elle ajoute que contrairement à ce qu'elle prétend, la SAS [17] n'apporte aucun élément de preuve pour justifier ses allégations, les factures produites dans le cadre de la phase contradictoire du contrôle ne permettant pas à elles seules d'attester que M. [H] les aient réglées avec ses propres deniers. Elle s'étonne que la société ou son président n'a pas jugé utile de conserver les justificatifs des règlements pour assurer la contrepartie des écritures portées au crédit du compte courant et permettre le remboursement de ces dépenses.
Elle ajoute que l'analyse des factures produites par la SAS [17] met en évidence des incohérences ou des insuffisances, voire parfois leur caractère abusif et elle considère qu'au vu des seules pièces recevables, un total de 83,94 euros pourrait être justifié.
Elle affirme que contrairement à ce que prétend la SAS [17], la doctrine comptable infirme la présentation qu'elle a faite quant au lettrage des comptes.
Elle entend préciser que les législations fiscale et sociale sont indépendantes et que le particularisme des règles propres à chacune de ces matières a été rappelé par la Cour de cassation, en sorte qu'en raison de l'indépendance de ces législations, l'interprétation retenue par l'administration fiscale concernant les sommes inscrites au compte courant du dirigeant de la SAS [17], n'a juridiquement aucune incidence sur le régime social de ces mêmes sommes.
Enfin, elle considère que la demande d'expertise comptable n'est pas justifiée dans la mesure où la SAS [17] ne peut pas faire peser sur l'Urssaf la charge d'une telle mesure d'instruction pour pallier sa propre carence en la matière.
Réponse de la cour :
La lettre d'observations mentionne les constatations faites par l'inspecteur du travail sur ce chef de redressement :
'Lors de la vérification de la comptabilité sur les trois années contrôlées, il a été constaté des écritures comptables d'OD passées au crédit du compte [XXXXXXXXXX03] 'Associés compte courant'. Ces dernières proviennent des comptes de la 401 "Fournisseurs".
Ainsi le compte associé est créditeur de part ce jeu d'écritures comptables.
En vertu des textes susvisés, lorsque le compte associé est débiteur, le solde doit être réintégré dans l'assiette des cotisations et contributions. De plus en vertu de l'article R 243-59-4 du Code de la Sécurité sociale, lorsque la comptabilité n'est pas probante, l'inspecteur du recouvrement est habilité à procéder à une taxation forfaitaire.
Enfin les règles comptables françaises imposent la mise en oeuvre d'une comptabilité en partie double. Ainsi la contrepartie d'un compte de bilan doit être dans un compte de produit ou de charge.
En l'espèce, la comptabilité présentée ne peut être retenue comme probante puisque suivant les grands livres présentés :
- Les écritures d'OD entre le compte courant associé et les comptes fournisseurs ne sont justifiés.
- Les écritures d'OD de fin d'année ne sont pas répercutées l'année suivante par des écritures d'à nouveau.
- Les écritures comptables d'OD n'ont pas de contrepartie en compte de charge ou de produit.
- Suivant le lettrage partiel apparaissant dans les grands livres permettent de constater que les comptes sont lettrés entre les comptes de la classe 4 uniquement.
- il n'y a aucun lettrage avec les comptes de banques ou de charges et de produits.
In fine une régularisation est effectuée en réintégrant dans l'assiette des cotisations et contributions sociales l'intégralité des écritures d'OD dont par exemple celle de salaire, [16] ou [14].
Soit les régularisations suivantes :
- Année 2015: 12 738.29 Euro net soit 15 543 Euro brut
- Année 2016: 15 742.62 Euro net soit 19 206 Euro brut
- Année 2017 : 50 123.18 Euro net soit 61 011 Euro brut. (...)'
Les éléments produits par la SAS [17] qui avaient déjà été communiqués à l'Urssaf PACA au cours de la phase contradictoire du contrôle, ne permettent pas, contrairement à ce que la société prétend, de faire correspondre exactement l'ensemble des sommes figurant au crédit du compte associés 455 à celles provenant du compte Fournisseurs '401" et figurant sur les factures et tickets qu'elle a versés au débat.
Les pièces versées par la société sont insuffisantes pour démontrer que toutes les sommes litigieuses facturées à la SAS [17] ont été payées de façon effective par son président avec son propre argent ; certaines factures ont été libellées soit à des clients non identifiés, soit à des personnes dont le lien avec la société appelante n'a pas été caractérisé ; la SAS [17] ne procède que par affirmations lorsqu'elle indique que les tickets d'achats et les factures réglées en espèces correspondent à des sommes effectivement payées par M. [H] sur ses deniers personnels. La production de relevés du compte personnel de M. [H] ne permet pas de corréler avec certitude les achats qu'il aurait effectués pour le compte de la société avec les sommes créditées sur le compte associé.
En outre, comme le rappelle justement l'Urssaf PACA, les règles applicables en matière de législation sociale ne concordent pas en totalité avec la législation fiscale ; il en résulte que l'argument développé par la SAS [17] selon lequel les conclusions de l'Urssaf sur les anomalies de sa comptabilité ne sont pas pertinentes dans la mesure où l'administration fiscale n'a pas réalisé de redressement alors qu'elle s'est fondée sur les mêmes pièces comptables et sur une période comprise dans la période de contrôle, sera rejeté.
La SAS [17] ne justifie donc pas toutes les écritures d'OD relevées entre le compte courant associé et les comptes fournisseurs.
Dans un document 'justificatifs contrôle Urssaf [17]', joint à un courrier du 08 avril 2019, la société appelante reconnaît des lacunes dans la production de certains justificatifs des dépenses que le président aurait engagées puisqu'il est indiqué : ' il nous est difficile de prouver le règlement par M. [H] de factures réglées par cartes bleues personnelles car il n'a pas gardé le détail de ses paiements personnels...'.
La demande d'expertise comptable sollicitée par la SAS [17] ne peut pas prospérer en l'absence de démonstration de son utilité ; en effet, l'expertise ne pourrait porter que sur les pièces déjà communiquées par la SAS [17] au cours du contrôle ou lors de la phase contradictoire, celles communiquées ultérieurement, sans qu'elles aient été transmises préalablement à l'Urssaf, ne sont pas recevables. Or, l'Urssaf PACA a déjà analysé ces pièces et la SAS [17] ne parvient pas à remettre en cause sérieusement son analyse.
Enfin, il convient de rappeler qu'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de pallier la défaillance d'une partie dans l'administration de la preuve.
C'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande et ont maintenu ce chef de redressement.
Le jugement entrepris sera donc confirmé.
Sur le chef de redressement n° 10 :
Moyens des parties :
La SAS [17] fait valoir que l'Urssaf, en rejetant les indemnités de panier versées à certains salariés par l'entreprise ne prend pas en compte les situations particulières correspondant à la réalité des bénéficiaires : M. [K] est le seul à travailler à temps complet et à prendre tous ses repas sur les chantiers ; elle avait indiqué sa méthode de calcul de l'indemnité de panier . Elle fait observer que les autres salariés ne bénéficient pas de cette indemnité parce que, soit ils travaillent à temps partiel et ne viennent que quelques jours ou quelques heures sur les chantiers, soit ils rentrent à leur domicile par leur propre moyen, compte tenu de la distance du chantier, soit ils font le trajet aller avec l'employeur après avoir déposé leur cyclomoteur dans le camion avant de quitter le chantier par leur propre moyen et dans ce cas ils ne déjeunent pas sur place.
Elle considère qu'il ne saurait lui faire grief de n'attribuer les indemnités de panier qu'en fonction de la réalité du travail et des déplacements de chacun, et de ne pas la verser globalement à tout le monde, ce qui constituerait une méconnaissance des dispositions légales et réglementaires.
Elle affirme que les juges du fond ne peuvent pas se contenter d'indiquer que les incohérences soulevées tant par l'inspectrice que par la CRA ne sont pas clarifiées devant eux pour écarter sa contestation.
A l'appui de ses allégations, la SAS [17] produit notamment au débat :
- le courrier d'observations qu'elle a adressé à l'Urssaf, daté du 10/01/2019 'ci-joint en pièces 54,55 et 56 les notes de frais retrouvées, 174,82 euros, 40 euros en 2016 et 77 en 2017",
- un courrier adressé à l'Urssaf, daté du 08/04/2019.
L'Urssaf PACA fait valoir que l'inspecteur a constaté que des salariés à temps plein ne bénéficiaient pas des indemnités de repas, qu'il a relevé que la société attribuait forfaitairement le même nombre d'indemnités de panier, mais sans tenir compte du nombre de jours travaillés, qu'ainsi, certains salariés bénéficient d'indemnités et pas d'autres et que certaines indemnités n'étaient pas versées en contrepartie de la restauration sur les chantiers, que dès lors ces frais professionnels n'étaient pas justifiés.
Elle ajoute que la SAS [17] rapporte la preuve que le seul salarié qui bénéficie de repas est M. [K], puisque c'est le seul qui se restaure sur le chantier, que l'employeur se contredit néanmoins dans ses explications.
Elle fait observer que dans la méthode de calcul retenue par la SAS [17], les absences des salariés ne sont pas prises en compte.
Sur les pièces produites par SAS [17], elle expose que M.[Y] est un salarié qui a travaillé à temps plein en avril et en mai 2016, que les autres salariés bien que travaillant à temps partiel étaient susceptibles de percevoir des indemnités de panier dès lors qu'ils étaient présents sur les chantiers et ne pouvaient pas regagner leur résidence principale pour y déjeuner, rappelant que le statut de travailleur à temps partiel n'exonère pas nécessairement l'employeur de verser une prime de panier.
Elle conclut que devant les incohérences soulevées et l'absence d'éléments probants permettant de définir où se trouvent les chantiers et les salariés réellement présents sur ces chantiers, l'argument de l'employeur doit être écarté.
Réponse de la cour :
Selon l'article 3, 3° de l'arrêt du 20 décembre 2002, abrogé par arrêté du 04 septembre 2025, 'l'indemnité de repas ou de restauration hors des locaux de l'entreprise : lorsque le travailleur salarié ou assimilé est en déplacement hors des locaux de l'entreprise ou sur un chantier, et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu habituel de travail pour le repas et qu'il n'est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant, l'indemnité destinée à compenser les dépenses supplémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet pour la fraction qui n'excède pas 9,90 euros.
Lorsque le travailleur salarié ou assimilé est placé simultanément au cours d'une même période de travail dans des conditions particulières de travail énoncées aux 1°, 2° et 3°, une seule indemnité peut ouvrir droit à déduction.
Lorsque le salarié est en déplacement hors des locaux de l'entreprise ou sur un chantier et lorsque les conditions de travail lui interdisent de regagner sa résidence ou son lieu de travail pour le repas et qu'il n'est pas démontré que les circonstances ou les usages de la profession l'obligent à prendre ce repas au restaurant, l'indemnité destinée à compenser les dépenses complémentaires de repas est réputée utilisée conformément à son objet.
Toutes les indemnités qualifiées d'indemnités de casse-croûte sont assimilables à une indemnité de restauration hors des locaux de l'entreprise si les circonstances de fait (travail hors des locaux de l'entreprise, salariés occupés sur des chantiers, des entrepôts, des ateliers extérieurs...) se trouvent établies. Si ces conditions ne sont pas remplies, l'employeur ne peut pas bénéficier de l'exonération de cette indemnité et doit la réintégrer dans l'assiette des cotisations.
Il appartient à l'employeur de justifier qu'il s'est libéré de son obligation de paiement de la prime de repas.
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a fait les constatations suivantes s'agissant de ce chef de redressement :
'Lors du contrôle, il a été constaté que vous versiez des indemnités de paniers de chantiers à certains de vos salariés. Après vérification, il s'avère que vous donnez forfaitairement le même nombre d'indemnités de paniers et ce sans prendre en compte le nombre de jours travaillés.
De plus certains salariés n'en bénéficient.
En vertu des textes susvisés, les frais professionnels sont exonérés de cotisations et contributions sociales lorsqu'il est démontré les circonstances de faits c'est-à-dire entre autres les déplacements sur un chantier.
Durant l'entretien de début de contrôle, monsieur [H] a indiqué que l'ensemble de ses salariés se rendaient sur les chantiers. Pour autant il est constaté que des salariés à temps plein n'en bénéficient pas.
En l'espèce, le fait que certains salariés bénéficient d'indemnités et pas d'autres permet de constater que ces indemnités ne sont pas versées en contrepartie de se restaurer sur les chantiers.
Puis le fait qu'il soit versé un nombre supérieur de jours travaillés permet de déterminer que ces frais professionnels ne sont pas justifiés.
In fine l'intégralité des frais de repas des salariés sont réintégrés dans l'assiette des cotisations et contributions sociales soit
- Année 2015 : 422.40 Euro net soit 542 Euro brut
- Année 2016 : 1 645.60 Euro net soit 2 114 Euro brut.
- Année 2017 : 1 742.40 Euro net soit 2 240 Euro brut. (...)'
Force est de constater que la SAS [17] qui soutient qu'il ne peut pas lui être fait grief 'de n'attribuer les indemnités de panier qu'en fonction de la réalité du travail et des déplacements de chacun', ne produit aucun élément de nature à justifier le versement d'indemnités de panier à M. [K], en fonction de la localisation des chantiers sur lesquels il serait intervenu et du lieu de son domicile.
Par ailleurs, la SAS [17] ne conteste pas sérieusement le fait que M. [Y] aurait travaillé à temps plein en avril et mai 2016, soit pendant la période de contrôle, avant de travailler à temps partiel, alors qu'il n'a perçu aucune indemnité de paniers. La SAS [17] n'apporte aucune explication sur ce point.
Enfin, l'argument de la SAS [17] selon lequel les salariés qui travaillaient à temps partiel ne pouvaient pas percevoir cette indemnité au motif qu'ils n'étaient présents que quelques heures ou quelques jours par mois est inopérant, dans la mesure où l'exécution d'un contrat de travail à temps partiel n'exclut pas la possibilité pour le salarié de travailler sur des chantiers pendant la pose repas.
Il y a lieu dans ces conditions de maintenir le redressement et le jugement entrepris sera donc confirmé.
Sur le chef de redressement n°13:
Moyens des parties :
La SAS [17] fait valoir que dans la mesure où la SAS [17] conteste les redressements au titre des frais professionnels évoqués ci-avant et où la CRA a admis la déduction des frais de déplacement, cela doit entraîner une réduction corrélative du redressement sollicité initialement par l'Urssaf.
Elle prétend que les juges du fond ne peuvent se contenter d'indiquer que ce point n'avait pas été contesté au moins dans son principe, sans répondre à son argumentaire.
A l'appui de ses allégations, la SAS [17] produit notamment au débat :
- le courrier du 08/04/2019 de saisine de la CRA '... A la suite d'un contrôle effectué dans notre entreprise le 27/11/2018 Mme [E] [G], inspecteur à 1'URSSAF, a requalifié en salaires certains versements et procédé à leur reintégration dans l'assiette des cotisations de Sécurité Sociale. En conclusion de sa lettre d'observation datée du 10/12/2018 le rappel s'é1eve à 149 073 €.
Suite à notre lettre du 10/1/2019 avec laquelle nous avons donné les explications complémentaires et produit les pièces justificatives à chaque chapitre de la lettre d'observation. Cette somme a été ramenée à 135 873 € par la prise en compte de 3 factures de sous traitants sur 21.
Toutes les autres pièces produites ne sont pas prises en compte, toutes nos explications sont rejetées.
Vous trouverez en pièces jointes les différents chapitres de la lettre d'observation pour lesquels le redressement est maintenu, malgré nos explications complémentaires et malgré la production de pièces justificatives. Nous contestons le recouvrement de ces sommes et demandons à la Commission de bien vouloir réexaminer la décision de l'inspecteur de l'URSSAF et de réviser les cotisations sociales complémentaires mises à notre charge...'.
L'Urssaf PACA soutient que dans sa lettre de saisine de la CRA, la SAS [17] a entendu limiter sa contestation amiable aux seuls chefs de redressement n° 5,8,10,12 et 14, qu'elle n'a jamais saisi la CRA de la moindre contestation du point n°13 de la lettre d'observations, en sorte que faute d'avoir satisfait à cette formalité substantielle, elle ne pouvait pas valablement saisir la juridiction contentieuse et conclut que c'est à juste titre que le tribunal a déclaré sa contestation irrecevable.
Elle ajoute qu'en tout état de cause, la cour ne saurait être saisie, comme tente de le faire la société, d'une demande d'infirmation de la décision de la CRA.
A titre subsidiaire, elle prétend que le chef de redressement n°13 est bien fondé.
Réponse de la cour :
L'article R142-1 du code de la sécurité sociale dispose que les réclamations relevant de l'article L. 142-4 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil, du conseil d'administration ou de l'instance régionale de chaque organisme.
Cette commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation.
Il résulte de ces dispositions que l'étendue de la saisine de la CRA d'un organisme de sécurité sociale, se détermine au regard du contenu de la lettre de réclamation et non en considération de la décision ultérieure de cette commission.
Il résulte des éléments produits au débat que la SAS [17] a saisi la CRA par un courrier du 08 avril 2019, que dans le document joint à ce courrier, elle a listé les chefs de redressement contestés, et que le chef de redressement envisagé au point n°13 de la lettre d'observations n'y figure pas.
Il convient d'en déduire que la SAS [17] a en définitive limité à son courrier de saisine de la CRA sa critique aux seuls points de redressement opérés au titre 'des indemnités de trajet', 'comptes courants débiteurs', 'restaurants', 'paniers ouvriers', 'factures de sous traitants manquantes', à l'exclusion des autres chefs de redressement.
Il convient de constater que le délai de forclusion de l'article R142-1 susvisé était expiré à la date de la saisine du tribunal judiciaire d'Avignon intervenue le 28 janvier 2020 et d'en déduire que le chef de redressement n°13 ne pouvait plus être contesté devant la juridiction contentieuse.
Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.
Sur le chef de redressement n°14 :
Moyens des parties:
La SAS [17] soutient que suite à l'envoi du courrier du 10 janvier 2019 auquel étaient jointes plusieurs pièces justificatives, le service de contrôle a répondu par un courrier du 20 février 2019, que le rappel de cotisation a été ramené de 60 814 euros à 47 614 euros, que cependant, la CRA a considéré que ce chef de redressement n'était pas contesté, alors que non seulement dans son courrier du 10 janvier 2019 elle contestait ce point, mais ce grief à l'encontre des redressements de l'Urssaf figurait bien dans la saisine de la CRA. Elle précise qu'elle avait pris soin d'établir un tableau récapitulatif justifiant de sa contestation et visant les documents communiqués à ce titre.
Elle ajoute que les juges du fond se contentent d'indiquer que certaines factures 'sont douteuses' sans prendre en compte les éléments détaillés qu'elle avait produits.
A l'appui de ses allégations, la SAS [17] produit notamment au débat :
- le courrier que l'Urssaf lui a adressé en réponse à ses observations, daté du 20/02/2019,
- la lettre de saisine de la CRA du 08/04/2019 dans laquelle ont été intégrés des tableaux qui mentionnent les dates, les noms des sous-traitants, les montants des factures qui auraient été communiquées, 'les factures non fournies ou non conformes', les attestations de vigilance envoyées.
L'Urssaf PACA soutient que l'inspecteur a parfaitement motivé en droit son recours à la taxation forfaitaire et que sur le fond, ce redressement est justifié en droit et en fait. Elle fait valoir que l'inspecteur a sollicité la société pour la communication des factures comptabilisées dans le compte de sous traitant, que malgré une nouvelle demande présentée le 27 novembre 2018, la société n'a pas produit tous les documents sollicités, que certaines factures produites ne comportaient aucun numéro de Sirene, en sorte que l'inspecteur a fait application des dispositions réglementaires.
Elle ajoute que durant la phase contradictoire, la SAS [17] a produit quelques factures complémentaires qui ont été prises en compte par l'inspecteur, lequel a néanmoins formulé des observations dans un courrier du 20 février 2019.
Elle entend rappeler que selon la jurisprudence de la Cour de cassation, l'inspecteur de l'Urssaf est seul juge de la pertinence des pièces qui lui sont présentées, que la SAS [17] produit de nouveaux éléments qui n'avaient pas été portés à sa connaissance et que l'inspecteur avait explicité chacune des factures comptabilisées par la société dont il rejetait le caractère probant en raison soit de l'absence de leur communication, soit de leur non conformité aux règles fixées par les articles 242 nonies et 242 nonies A du code général des impôts, par absence de mentions obligatoires.
Elle précise que sur 32 factures visées lors de la vérification et après acceptation de 3 factures conformes dans le cadre de la période contradictoire du contrôle, 29 n'étaient finalement pas retenues par l'inspecteur, et que la SAS [17] a elle-même reconnu que sur ces 29 factures, 6 n'étaient pas conformes, en sorte que l'analyse a porté sur 23 factures restantes que la SAS [17] persiste à vouloir admettre. Elle conclut que la SAS [17] ne dispose au final que de 8 factures respectant les critères requis par la réglementation.
Réponse de la cour :
En l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a fait les constatations suivantes concernant ce chef de redressement :
' Lors de la vérification, des grands livres et plus précisément dans le compte de sous traitance " 611 090 Sous Traitance générale ", des factures ont été sollicitées.
Plusieurs n'ont pu être présentées lors du contrôle, aussi elles ont été demandées par mail en date du 27 Novembre 2018 pour une date de transmission au 30 novembre 2018.
A cette date ces pièces n'ont pas été transmises.
Puis certaines factures présentées étaient sans numéro SIREN comme [13] et [15].
En vertu des textes cités préalablement, l'absence de document ou la fourniture de documents non probants permet à l'inspecteur le pouvoir réintégrer ces sommes dans l'assiette de cotisation par le biais d'une fixation forfaitaire.
En l'espèce l'absence de pièces comptables et la présence de factures non conformes du fait de l'absence des mentions obligatoires prévues aux articles 242 nonies et 242 nonies A du Code général des impôts et à l'article L 441-3 du Code de commerce permet de déterminer qu'il est possible d'avoir recours à la taxation forfaitaire.
In fine un redressement est effectué en réintégrant dans l'assiette des cotisations les factures non probantes et les écritures non justifiées soit :
- Année 2015: 43443.33 Euro net soit 54 408 Euro brut
- Année 2016: 16 550 Euro net suit 20 793 Euro brut.
- Année 2017:24845 Euro net soit 31 193 Euro brut.
Vous trouverez le détail des montants repris en annexe.(...)'
Il résulte des tableaux joints à la lette de saisine de la CRA que la SAS [17] reconnaît que 3 factures n'ont pas été produites ou étaient non conformes pour l'année 2015 correspondant à un montant total de 8 300 euros, 1 en 2016 pour un montant de 2 000 euros et 4 en 2017 pour un montant de 10 575 euros.
Dans ses écritures soutenues oralement à l'audience, l'Urssaf PACA a inséré un tableau récapitulatif relatif aux factures litigieuses, sur lequel sont mentionnés ses commentaires pour chacune des factures visées et duquel il résulte que quelques factures seulement sur l'ensemble de celles qui avaient été communiquées avaient été acceptées, les autres étant pour l'essentiel non conformes.
En outre, comme le relèvent justement les premiers juges , certaines factures manuscrites portent un cachet d'entreprises différentes - Meven, Sarikabadayi, Ozturc - mais supportent une écriture identique, ce qui crée un doute sur leur authenticité ; la SAS [17] n'apporte aucune explication sur ce point.
Au vu des éléments qui précèdent, il apparaît que la SAS [17] n'apporte pas d'éléments de nature à remettre en cause sérieusement les rejets opérés par l'Urssaf pour les factures rejetées.
La SAS [17] ne conteste pas davantage le fait que les attestations de vigilance n'ont pas été produites pour les factures d'un montant supérieur à 4 000 euros.
Il s'en déduit qu'en raison d'une comptabilité peu probante, le recours par l'Urssaf PACA à la taxation forfaitaire était justifié.
Il y a lieu en conséquence de maintenir le redressement et de confirmer le jugement entrepris.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 16 mai 2024 par le tribunal judiciaire d'Avignon, contentieux de la protection sociale,
Y ajoutant,
Condamne la SAS [17] à payer à l'Urssaf Provence Alpes Côte d'Azur la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Rejette les demandes plus amples ou contraires,
Condamne la SAS [17] aux dépens de la procédure d'appel.
Arrêt signé par le président et par le greffier.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,