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Cass. com., 13 décembre 2017, n° 16-14.672

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Rémery

Cass. com. n° 16-14.672

12 décembre 2017

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 21 janvier 2016), que les 8 septembre et 25 octobre 2008, la Caisse d'épargne et de prévoyance (la Caisse) Centre Val de Loire, aux droits de laquelle est venue la Caisse Loire-Centre, a consenti à la société X... (la société) deux crédits de trésorerie garantis par un gage sur stock et par les cautionnements solidaires de MM. Jean et Dominique X... ; que la société, mise en redressement judiciaire, a bénéficié d'un plan de redressement, qui a été résolu par un jugement du 13 novembre 2012 prononçant la liquidation judiciaire ; que cette décision a été confirmée par un arrêt du 30 janvier 2013 ; que le 30 avril 2013, le juge-commissaire a ordonné la vente aux enchères publiques du stock ; qu'entre-temps, la Caisse a assigné les cautions en paiement puis, le 28 août 2013, le mandataire liquidateur de la société X... en intervention forcée, afin de voir ordonner l'attribution judiciaire du stock gagé ; qu'elle s'est ensuite désistée de cette demande, le liquidateur lui ayant opposé que celle-ci relevait de la compétence du juge-commissaire ; que le tribunal a déchargé MM. Jean et Dominique X... de leurs engagements sur le fondement de l'article 2314 du code civil ; que la cour d'appel a infirmé cette décision ;

Attendu que MM. Jean et Dominique X... font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer à la Caisse la somme de 130 000 euros, outre intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que commet une faute le créancier qui, garanti par un cautionnement, s'abstient de demander l'attribution judiciaire du gage et prive ce faisant la caution d'un droit qui pouvait lui profiter ; qu'en l'espèce, en retenant, pour refuser de décharger les cautions, que la banque aurait été contrainte, comme le liquidateur judiciaire, de procéder à une vente aux enchères si elle avait réclamé l'attribution de son gage de sorte qu'il ne peut lui être reproché aucune omission ou négligence empêchant la subrogation des cautions dans ses droits ou leur ayant causé un préjudice dans l'exercice de ces droits conservés, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à établir qu'en ne demandant pas l'attribution judiciaire du gage, la Caisse n'a commis aucune faute, a violé les articles 2314 du code civil et L. 642-20-1 du code de commerce ;

2°/ que c'est au créancier qu'il appartient de prouver que la perte du droit préférentiel dont se plaint la caution n'a causé aucun préjudice à celle-ci ; qu'en l'espèce, en retenant pour refuser de décharger les cautions, qu'il leur appartient de démontrer qu'elles ont subi un préjudice en raison du choix de leur créancier de ne pas solliciter une attribution judiciaire mais de recevoir le prix d'une vente forcée, et que l'existence d'un tel préjudice n'est pas établi, la cour d'appel, qui a renversé la charge de la preuve, a violé les articles 1315 et 2314 du code civil ;

3°/ que la caution est déchargée lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution ; qu'en l'espèce, en affirmant, pour refuser de décharger les cautions, que la banque se serait heurtée aux
mêmes difficultés que le mandataire judiciaire, qui s'était borné à faire paraître une publicité sur internet, pour trouver un acquéreur amiable et aurait été contrainte de procéder à une vente aux enchères si elle avait réclamé l'attribution de son gage, de sorte que l'existence d'un préjudice subi par les cautions n'est pas établie, sans s'expliquer sur l'absence de réaction de la Caisse à la proposition, qui lui a été faite par M. Dominique X... dans sa lettre du 22 avril 2013, d'organiser la vente du stock par l'intermédiaire d'un magasin de proximité sur une durée de vingt-quatre mois, sans frais de stockage, ou de le brader plus rapidement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2314 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que la Caisse ne pouvait demander l'attribution judiciaire du gage qu'à compter du 30 janvier 2013, tandis que le mandataire liquidateur avait, dès le 13 mars 2013, saisi le juge-commissaire d'une requête tendant à obtenir la vente forcée du stock gagé, laquelle a été ordonnée aux enchères publiques le 30 avril 2013, l'arrêt retient que la Caisse fait observer à juste titre que la valeur du stock n'a pu se déprécier de manière significative entre ces deux dates ; qu'il retient encore que le liquidateur, qui avait, à la fin de l'année 2012, procédé à une publicité sur internet pour vendre le stock, n'avait reçu qu'une unique offre d'achat pour 150 000 euros, jugée insuffisante, que la Caisse justifie n'avoir pu, malgré ses demandes, obtenir aucune information sur les résultats de la vente ensuite ordonnée par le juge-commissaire, et qu'il ne peut être prétendu par les cautions, d'une part, qu'elles n'avaient pas plus d'informations que la Caisse et, d'autre part, que "le stock avait été réalisé à vil prix tandis qu'une opération braderie aurait permis d'en obtenir au moins 600 000 euros" ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, d'où il résulte que, nonobstant l'envoi, le 22 avril 2013, par M. Dominique X... d'une lettre reçue par la Caisse un ou deux jours plus tard, soit, quelques jours avant le prononcé de la décision du juge-commissaire l'invitant à organiser la vente du stock par l'intermédiaire d'un magasin de proximité sur une durée de vingt-quatre mois sans frais de stockage ou de le brader plus rapidement, la preuve n'était pas rapportée que, dans les circonstances de la cause, le fait pour la banque de s'être abstenue de demander l'attribution judiciaire du stock gagé avait entraîné une dépréciation de la valeur de celui-ci et, par conséquent, un préjudice pour la caution, la cour d'appel a, sans inverser la charge de la preuve, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Jean X... et M. Dominique X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Loire-Centre la somme globale de 2 900 euros ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille dix-sept.

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