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Décisions

Cass. com., 20 novembre 2001, n° 99-11.419

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

DUMAS

Rapporteur :

Favre

Avocat général :

Lafortune

Cass. com. n° 99-11.419

19 novembre 2001

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris,1er septembre 1998), que la Banque monétaire et financière (la BMF) a consenti à la société Hôtel Invest international un prêt de 5 250 000 francs, remboursable au 30 septembre 1993 ; que la société Murabail (Murabail), aux droits de laquelle vient la société Sélectibanque, a signé, le 17 mars 1993, un document intitulé caution bancaire, garantissant à la BMF le paiement de la somme de 5 250 000 francs majorée de tous intérêts courus et devenus exigibles ; qu'à défaut de remboursement, la BMF a assigné en paiement la société Hôtel Invest international et la société Murabail ; que celle-ci a prétendu, d'une part, que son engagement devait être qualifié de cautionnement, d'autre part, qu'elle n'était pas habilitée à délivrer des cautions ou garanties autonomes en dehors de toute opération relevant de son objet social ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Sélectibanque fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la BMF la somme de 6 674 428,54 francs avec intérêts au taux du contrat plus 3 % à compter du 21 mars 1995, alors, selon le moyen, qu'un engagement à première demande doit être exprès et dénué de toute ambiguïté ; qu'ainsi en considérant qu'était autonome la garantie souscrite par Murabail le 17 mars 1993 qui comportait une mention manuscrite "bon pour caution solidaire" inconciliable avec l'autonomie de l'engagement, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1326 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, ayant relevé que la société Murabail, professionnelle avertie, s'était obligée à payer une certaine somme, dès la demande de la BMF, et sans pouvoir soulever aucune contestation que ce soit, en a exactement déduit qu'elle avait contracté, non un simple cautionnement, mais une garantie autonome, en dépit de l'utilisation des termes "caution solidaire" qui ne traduisaient nullement la volonté de la société Murabail, laquelle, transmettant son engagement, avait, de nouveau, précisé qu'il s'agissait d'un acte de garantie à première demande ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que la société Sélectibanque fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :

1 / qu'il résulte de l'article 18 de la loi du 24 janvier 1984 qu'un établissement financier ne peut effectuer que les opérations autorisées par la décision l'agréant quelles que soient les dispositions de ses statuts ; qu'ainsi la société Murabail n'ayant été agréée par décision du 11 juillet 1984 que pour effectuer des opérations de crédit-bail immobilier, la cour d'appel, en se fondant sur l'article 2 de ses statuts et sur l'article 3 de la même loi, pour considérer qu'elle pouvait exercer toute activité de crédit, telle que la délivrance d'une garantie autonome, même en dehors de toute opération de crédit-bail, a violé les textes susvisés et l'article 1131 du Code civil ;

2 / que la règle "nemo auditur" ne fait pas obstacle à ce que chacune des parties puisse, pour en écarter les effets, se prévaloir du caractère illicite d'une convention lorsque celle-ci n'est pas fondée sur une cause immorale ; qu'ainsi en considérant que la société Sélectibanque, qui excipait de la nullité d'un engagement non exécuté en raison de son objet illicite, ne pouvait se prévaloir de sa propre faute, la cour d'appel a violé les articles 6 et 1131 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que, dès lors qu'elle ne soutenait pas avoir effectué à titre habituel des opérations de crédit telles que la prise, dans l'intérêt d'une autre personne, d'un engagement par signature d'un cautionnement ou d'une garantie, la société Murabail ne pouvait utilement exciper de la nullité de l'engagement souscrit ;

Attendu, d'autre part, qu'il résulte du rejet du premier grief que la discussion relative à l'invocation du caractère illicite de la convention est inopérante ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Sélectibanque aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Sélectibanque à payer à la Banque monétaire et financière la somme de 12 000 francs ou 1 829,39 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt novembre deux mille un.

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