CA Rennes, 3e ch. com., 18 novembre 2025, n° 25/03738
RENNES
Arrêt
Autre
PARTIES
Demandeur :
Deloffre (SAS)
Défendeur :
Kerbea France (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Contamine
Conseillers :
Mme Ramin, Mme Desmorat
Avocats :
Me Lephilibert, Me Bourges, Me Lavisse
FAITS ET PROCEDURE :
Par jugement du 21 mars 2024, le tribunal de commerce de Rennes a :
- Dit que les demandes de la société Kerbea France sont recevables,
- Dit que la demande de la société Kerbea France n'est pas prescrite,
- Débouté la société Deloffre de sa fin de non-recevoir,
- Condamné la société Deloffre à payer à la société Kerbea France la somme de 110.000 euros au titre du préjudice financier et débouté la société Kerbea du surplus de sa demande,
- Débouté la société Deloffre de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Débouté la société Kerbea de sa demande au titre du préjudice moral et d'image,
- Débouté la société Kerbeau de sa demande au titre des autres manquements contractuels et au titre du non-respect de la clause de non concurrence,
- Débouté la société Kerbea de sa demande de production de documents sous astreinte,
- Débouté la société Deloffre de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Condamné la société Deloffre à payer à la société Kerbea France la somme de 5.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et débouté la société Kerbea du surplus de sa demande,
- Condamné la société Deloffre aux entiers dépens.
La société Deloffre a interjeté appel le 28 mars 2024.
Par arrêt du10 juin 2025, la cour d'appel de Rennes a :
- Infirmé le jugement en ce qu'il a dit que la demande de la société Kerbea France n'est pas prescrite,
- Confirmé le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant :
- Déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de paiements formées par la société Kerbea et afférentes à des sommes dues au titre de la période antérieure au 4 avril 2018,
- Rejeté les demandes contraires ou plus amples des parties,
- Condamné la société Deloffre à payer à la société Kerbea France la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné la société Deloffre aux dépens d'appel.
Le 1er juillet 2025, la société Deloffre a saisi la cour d'une requête en omission de statuer.
Les dernières conclusions de la société Kerbéa France sont en date du 19 septembre 2025.
PRETENTION ET MOYENS DES PARTIES :
La société Deloffre demande à la cour de :
- Compléter sa décision en date du 10 juin 2025 RG n°24/01837,
- Statuer sur la demande d'infirmation de la décision de première instance, en ce qu'elle a condamné la société Deloffre à régler à la société Kerbéa France une somme de 110.000 euros au titre de son préjudice économique, considération prise de la prescription déclarée,
- Ordonner qu'il soit fait mention de la présente décision en marge de la minute de l'arrêt rendu, et des expéditions qui en seront délivrées,
- Dire que la décision complétive à intervenir devra être notifiée au même titre que la précédente décision,
- Statuer ce que de droit sur les frais et dépens.
La société Kerbéa demande à la cour de :
- Retenir l'absence d'omission de statuer,
- Déclarer irrecevable à tout le moins débouter la société Deloffre de l'ensemble de ses demandes totalement infondées,
- Condamner la société Deloffre à payer à la société Kerbea France les sommes suivantes :
- 10.000 euros pour procédure abusive
- 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la société Deloffre aux entiers dépens dont distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.
DISCUSSION :
La société Deloffre fait valoir que la cour n'aurait pas tiré les conséquences de sa décision de déclarer irrecevables comme prescrites les demandes de paiement formées par la société Kerbéa et afférentes à des sommes dues au titre de la période antérieure au 4 avril 2018.
Elle indique que du fait de cette prescription, la cour aurait du réformer le jugement en ce qu'il avait condamné la société Deloffre à payer à la société Kerbéa une somme de 110.000 euros au titre de son préjudice économique.
Il apparait que la cour d'appel a effectivement retenu comme prescrites les demandes indemnitaires de la société Kerbéa afférentes à la période antérieure au 4 avril 2018.
La cour a cependant tiré les conséquences de cette prescription en n'examinant, au titre des demandes indemnitaires de la société Kerbéa, que la période postérieure à cette date :
Sur le préjudice économique et financier :
Il résulte de ce qui précède que la société Kerbea ne peut pas se prévaloir des sommes dues relatives à la période antérieure au 4 avril 2018.
La société Kerbea demande le paiement d'une certaine somme au titre du préjudice économique et financier correspondant aux redevances dues et non payées jusqu'à la fin du contrat le 8 juin 2019. Comme l'a retenu le tribunal, elle ne demande pas le paiement des redevances.
Elle ajoute que la non transmission au franchiseur des chiffres correspondant aux ventes et le non paiement des redevances dues créent incontestablement un préjudice très grave et mettent en péril la franchise elle même.
Au vu de l'activité passée et prévisible de la société Deloffre, la société Kerbea se prévaut de redevances estimées pour 2018 à hauteur de 121.920 euros et au titre de l'année 2019 pour 24.000 euros TTC. La société Deloffre ne conteste pas utilement ces estimations ni ne produit de justificatif de ses activités au cours de cette période permettant de les contredire.
Au vu de ces éléments, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu un préjudice économique et financier subi par la société Kerbea pour la somme de 110.000 euros.
II apparaît ainsi que, quoique prenant comme référence une période plus courte, la cour a retenu un préjudice du même montant que celui retenu par le premier juge. Elle n'avait donc pas à infirmer le jugement quant à la condamnation à payer la somme de 110.000 euros.
La cour a donc examiné le moyen soulevé par la société Deloffre d'infirmation du montant de sa condamnation en prenant en compte l'acquisition partielle de la prescription.
Aucune omission de statuer n'est caractérisée. Il y a lieu de rejeter la requête de la société Deloffre.
Sur la demande de paiement de dommages intérêts :
La société Kerbéa fait valoir qu'en saisissant la cour d'une requête en omission de statuer, la société Deloffre aurait usé d'un artifice procédural pour retarder le paiement dû. Ce retard lui occasionnerait un préjudice.
Il n'est cependant pas justifié que la société Deloffre ait présenté cette requête dans un but autre que celui de faire valoir ses droits. Il n'est pas non plus justifié que la société Kerbéa subisse un préjudice du fait du retard de paiement qui ne soit pas indemnisé par les intérêts de retard.
Il y aura lieu de rejeter cette demande de paiement de dommages-intérêts.
Sur les frais et dépens :
Il y a lieu de condamner la société Deloffre aux dépens de la présente instance en omission de statuer, dont distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile, et à payer à la société Kerbéa la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour :
- Rejette la requête en omission de statuer,
- Rejette les autres demandes des parties,
- Condamne la société Deloffre à payer à la société Kerbéa France la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne la société Deloffre aux dépens de la présente instance en omission de statuer dont distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile.