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Décisions

CA Bordeaux, ch. soc. A, 18 novembre 2025, n° 23/02736

BORDEAUX

Arrêt

Autre

CA Bordeaux n° 23/02736

18 novembre 2025

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 18 NOVEMBRE 2025

PRUD'HOMMES

N° RG 23/02736 - N° Portalis DBVJ-V-B7H-NJOP

Madame [M] [U] [F]

c/

S.C.E.A. CHATEAU MOULINET

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Me Iwann LE BOEDEC de la SELARL LE BOEDEC, avocat au barreau de BORDEAUX

Me Hélène JANOUEIX de l'AARPI MONTESQUIEU AVOCATS, avocat au barreau de LIBOURNE

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 mai 2023 (R.G. n°F 21/00146) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LIBOURNE, Section Agriculture, suivant déclaration d'appel du 05 juin 2023,

APPELANTE :

Madame [M] [U] [F]

née le 14 Avril 1966 à

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

assistée et représentée par Me Iwann LE BOEDEC de la SELARL LE BOEDEC, avocat au barreau de BORDEAUX substitué par Me DUBIE

INTIMÉE :

S.C.E.A. CHATEAU MOULINET, pris en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité [Adresse 3]

N° SIRET : 477 712 160

assistée et représentée par Me Hélène JANOUEIX de l'AARPI MONTESQUIEU AVOCATS, avocat au barreau de LIBOURNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 septembre 2025 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Tronche, conseillère chargée d'instruire l'affaire et Monsieur Jean Rovinski, magistrat honoraire,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Paule Menu, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Monsieur Jean Rovinski, magistrat honoraire

Greffière lors des débats : Sandrine Lachaise

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

1- Mme [M] [U] [F], née en 1966, a été engagée à compter du 4 octobre 1999, en qualité de secrétaire comptable, coefficient D, relevant de la convention collective des exploitations agricoles de la Gironde, par la Scea des Domaines Viticoles Armand Moueix, aux termes d'un contrat de travail transféré le 25 juin 2004, à la Scea [Adresse 2].

En 2016, la propriété a été rachetée par un groupe d'investisseurs d'Asie du Sud-Est, présidé par la société holding The 3 Thinkers.

A compter de 2017, Mme [U] [F] a exercé une partie de ses fonctions pour le compte de la société holding aux termes de conventions de mise à disposition annuelles.

2- Par courrier du 17 février 2020, Mme [U] [F] s'est vu notifier un avertissement, l'employeur lui reprochant, d'une part, d'avoir sollicité le 29 janvier 2020 un document auprès du commissaire aux comptes alors que Mme [D], directrice administrative et financière de la société The 3 Thinkers le lui avait déjà transmis la veille, ce qui aurait discrédité cette dernière et remis en cause son degré de responsabilité'et d'autre part, d'avoir adressé, le 13 février 2020, un courriel agressif à Mme [D] en réponse à ses reproches formulés relatifs à la perte de documents.

Le 3 juin 2020, la salariée était destinataire d'un courrier l'invitant à suivre les instructions données pour éviter les erreurs d'affectation.

Par courrier électronique du 9 juin 2020, Mme [U] a sollicité une réévaluation de son salaire, réitérant sa demande le 20 novembre 2020.

Par courrier électronique du 12 février 2021, Mme [U] a demandé à l'employeur de cesser les pressions exercées à son encontre pour obtenir sa signature à l'avenant de mise à disposition en rappelant, outre l'ensemble des tâches accomplies, qu'elle s'était toujours soumise à la signature des avenants, y compris lorsqu'ils avaient été antidatés (2017, 2018, 2019), qu'elle avait débuté son activité pour le compte des différentes sociétés à compter du 1er janvier 2021, de sorte qu'aucun préjudice n'en résultait et que le retard d'environ trois semaines était justifié par la nécessité de clarifier le document au regard de sa rédaction susceptible de générer un litige. Cependant l'avenant de mise à disposition pour l'année 2021 n'a pas été signé par la salariée.

Le 25 février 2021, ne souhaitant pas quitter ses fonctions, Mme [U] a refusé la proposition de rupture conventionnelle formulée par la société [Adresse 2], ce que cette dernière a confirmé lors de l'entretien préalable du 11 mars 2021.

3- Par lettre datée du 24 février 2021, Mme [U] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 26 février 2021, avec mise à pied à titre conservatoire.

Mme [U] a ensuite été licenciée pour faute grave par lettre datée du 30 mars 2021, motifs pris d'actes d'insubordination et de la suppression de fichiers de travail collectifs sur un outil informatique ne lui appartenant pas, sans ordre et en dehors de ses horaires de travail, de son refus, pendant la mise à pied, de restituer les documents comptables en sa possession et de s'être connectée de manière récurrente à la plateforme Dropbox pour modifier des fichiers et changer les mots de passe.

À la date du licenciement, Mme [U] justifiait d'une ancienneté de 21 ans et 5 mois, et la société [Adresse 2] occupait habituellement moins de onze salariés.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de Mme [U] s'élevait à 3 938,17 euros.

4- Par requête reçue le 15 octobre 2021, Mme [U] a saisi le conseil de prud'hommes de Libourne aux fins de contester, à titre principal la validité de son licenciement (faisant état d'une discrimination liée à l'âge) et à titre subsidiaire, sa légitimité et solliciter l'allocation de diverses indemnités ainsi que l'annulation de son avertissement.

Par jugement rendu le 11 mai 2023, le conseil de prud'hommes a :

- déclaré irrecevable la demande de dommages et intérêts pour licenciement discriminant lié à l'âge,

- confirmé le licenciement pour faute grave de Mme [U] [F],

- débouté Mme [U] [F] de l'intégralité de ses demandes,

- condamné Mme [U] [F] aux dépens et frais de procédure.

Par déclaration communiquée par voie électronique le 5 juin 2023, Mme [U] [F] a relevé appel de cette décision.

5- Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 22 janvier 2024, Mme [U] [F] demande à la cour de:

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande d'annulation du licenciement discriminatoire fondé sur son âge,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes :

* d'annulation de l'avertissement du 17 février 2020,

* d'annulation de son licenciement,

* de requalification de son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* indemnitaires fondées sur les manquements de l'employeur à ses obligations en matière de formation et d'adaptation des compétences professionnelles de la salariée,

Statuant à nouveau,

Sur le licenciement :

- déclarer recevable et bien fondée la demande visant à l'annulation de son licenciement en ce qu'il repose sur un motif discriminatoire, à savoir son âge,

En conséquence,

- annuler son licenciement compte tenu de son caractère discriminatoire en lien avec son âge,

Subsidiairement,

- requalifier son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Sur les autres demandes :

- annuler l'avertissement du 17 février 2020,

- considérer que l'employeur a manqué à ses obligations en matière de formation et d'adaptation des compétences professionnelles et que ces manquements ont provoqué des préjudices dont elle est bien fondée à solliciter l'indemnisation,

- considérer que l'employeur a retenu abusivement ses documents de rupture et faire droit à la demande indemnitaire née des préjudices consécutifs,

En conséquence,

- condamner la société Château Moulinet à lui verser les sommes suivantes :

* 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés de l'avertissement illégitime,

* 80 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article L. 1235-3-1, à titre principal, et 63 010,68 euros, à titre d'indemnité, en application de l'article L. 1235-3, à titre subsidiaire,

* 3 571,83 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied à titre conservatoire, outre 357,18 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

* 25 151,78 euros à titre d'indemnité de licenciement,

* 7 876,34 euros, à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 787,63 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

* 21 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés des manquements de l'employeur en matière d'adaptation des compétences et de formation,

* 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive des documents de rupture,

* 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'intimée à lui remettre des bulletins de salaire et documents de rupture rectifiés sous astreinte de 50 euros par document et par jour de retard courant à compter du prononcé de la décision à intervenir

- débouter l'intimée de l'ensemble de ses demandes,

- condamner l'intimée aux dépens et aux éventuels frais d'exécution forcée.

6- Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 2 novembre 2023, la société [Adresse 2] demande à la cour de :

- confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions,

En conséquence,

- débouter Mme [U] [F] de l'intégralité de ses demandes,

Y ajoutant,

- condamner Mme [U] [F] à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [U] [F] aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2025 et l'affaire a été fixée à l'audience du 30 septembre 2025.

7- Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la discrimination liée à l'âge

- Sur la recevabilité de la demande

8- Pour infirmation de la décision entreprise qui a déclarée irrecevable sa demande au titre de la nullité de son licenciement, Mme [U] considère que cette demande se rattache aux demandes initiales par un lien suffisant, soit pour en constituer l'accessoire, la conséquence ou le complément en visant les dispositions de l'article 565 du code de procédure civile et soutient qu'il importe peu qu'elle soit présentée en première instance ou au stade de l'appel, car il s'agit toujours d'une demande postérieure à la saisine.

9- La société soulève une fin de non-recevoir considérant que la demande au titre de la discrimination liée à l'âge présentée pour la première fois aux termes des écritures de Mme [U] le 5 juillet 2022 est une demande nouvelle par rapport à la demande initiale tendant à constater l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement en cause.

Réponse de la cour

10- Le régime applicable aux demandes venant s'ajouter aux prétentions initiales est différent selon qu'il s'agit de demandes additionnelles présentées en première instance ou de demandes nouvelles devant la cour. Dans le premier cas ce sont les dispositions de l'article 70 du code de procédure civile qui s'appliquent et dans le second celles des articles 564 et suivants.

Ainsi, en application de l'article 70 du code de procédure civile, il est possible de présenter en cours d'instance des demandes additionnelles si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant, l'appréciation du lien suffisant relevant de l'appréciation souveraine du juge du fond.

En effet, si l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties fixées par la requête et par les conclusions originaires, il peut être modifié par des demandes incidentes (additionnelles ou reconventionnelles) lorsqu'elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant, ainsi que par des moyens de droit supplémentaires.

11- En l'espèce, la nouvelle demande tendant à la nullité du licenciement et ses conséquences indemnitaires tend à la même fin que la demande initiale de l'appelante, à savoir la réparation du préjudice né de la rupture injustifiée de son contrat de travail.

12- Dès lors, la demande additionnelle relative à nullité du licenciement pour discrimination liée à l'âge est recevable.

- Sur le fond

13- Mme [U] soutient avoir été licenciée à raison de son âge.

14- La société conteste toute discrimination et considère que l'attestation du conseiller du salarié ayant assisté Mme [U] lors de l'entretien préalable est insuffisante à cet effet.

Réponse de la cour

15- Il résulte des dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail un principe de non discrimination qu'elle soit directe ou indirecte à raison de critères qui y sont énoncés de manière limitative comprenant notamment l'âge. Le régime probatoire est celui de l'article L. 1134-1 du code du travail et il incombe à la partie qui invoque une discrimination de présenter des éléments de fait laissant supposer une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments il incombe à l'autre partie de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

16- En l'espèce, hormis l'attestation du conseiller du salarié qui reprend les propos suivants de Mme [C], directrice : ' 'si on fait une analyse pour la société T3T, on pourrait recruter une personne qui est plus jeune et qui coûte beaucoup moins cher que Mme [U]' mais qui rajoute que : 'ce n'est pas pour faire des économies qu'on est là, que ça n'a rien à voir', Mme [U] ne se prévaut d'aucun fait précis et matériellement vérifiable.

17- En conséquence, sa demande à ce titre sera rejetée.

Sur l'avertissement du 17 février 2020

18- Mme [U] demande à la cour l'annulation de son avertissement, contestant les faits reprochés et sollicite l'allocation d'une somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice.

19- De son côté, la société ne conclut pas sur ce point.

Réponse de la cour

20- Il appartient à la cour, par application de l'article L. 1333-1 du code du travail, d'apprécier si les faits reprochés au salarié étaient de nature à justifier une sanction; la cour forme sa conviction au vu des éléments retenus par l'employeur et de ceux fournis par le salarié; si un doute subsiste, il profite au salarié.

21- En l'espèce, il est reproché à Mme [U] d'une part, d'avoir sollicité un document auprès du commissaire aux comptes alors que Mme [D], directrice administrative et financière de la société, le lui avait déjà transmis la veille, ce qui aurait discrédité cette dernière et remis en cause son degré de responsabilité et d'autre part, d'avoir adopté un comportement agressif et insultant à l'égard de Mme [D] dans la réponse apportée à son courriel mais également lors d'une réunion le 14 février 2020 en lui demandant 'si elle passait encore les portes avec sa grosse tête', en la qualifiant de 'sainte nitouche' et en lui demandant de 'la fermer' en présence de Mme [C] directrice générale.

22- Il est versé aux débats le seul mail de Mme [U] du 13 février 2020 adressé à sa supérieure hiérarchique, ainsi libellé : 'ça commence à me fatiguer grave ce genre de réponse!!!!!!!!!!!! c'est pour m'amuser que je demande sans doute! Mais qui es tu pour faire ce genre de réponse ''''' Si je demande c'est que j'ai perdu non seulement ceux-là mais TOUS mes mails!...si tu veux montrer à tout le monde que tu es la seule à tout faire (ce qui n'est pas tout à fait le cas quand même...) Il y a 6 révisions comptables à faire pour le 24".

Si ainsi que le fait valoir la salariée, elle entretenait de mauvaises relations avec Mme [D], ce dont il n'est pas justifié au moins pour la période contemporaine de l'avertissement critiqué, celles-ci ne sauraient autoriser l'agressivité du ton et du contenu de son courriel de réponse du 13 février 2020, tant par l'emploi excessif des points de suspension et d'interrogation que par la teneur de ses écrits, Mme [D] lui demandant simplement : 'tu as reçu ces documents deux fois, par moi puis par [S]. Les deux mails ont disparus''.

23- L'avertissement, non contesté par Mme [U], est donc justifié pour ce seul grief.

24- Par ajout au jugement entrepris, Mme [U] sera déboutée de sa demande à ce titre.

Sur le licenciement pour faute grave

- Sur le pouvoir du signataire de la lettre de licenciement

25- Mme [U] fait valoir que la société ne justifie pas que Mme [C], directrice administrative et financière, disposait du pouvoir de signer la lettre de licenciement dans la mesure où la délégation de pouvoir versée aux débats est imprécise. Elle considère en conséquence que son licenciement est privé de cause réelle et sérieuse.

26- En réplique, la société argue du caractère régulier du licenciement discuté et produit les statuts de la société ainsi qu'une délégation de pouvoir pour en justifier.

Réponse de la cour

27- Il est de jurisprudence constante que dans les sociétés, aucune disposition légale n'exige que la délégation du pouvoir de licencier soit donnée par écrit ni même qu'elle ait été portée à la connaissance des salariés. La délégation du pouvoir de licencier peut être tacite et découler des fonctions du salarié qui conduit la procédure de licenciement.

En outre, il est jugé que dans les sociétés, le mandat de signer la lettre de licenciement, y compris en cas de dépassement de pouvoir par le mandataire, est considéré comme ratifié par l'employeur par le simple fait que la procédure de licenciement a été menée à son terme ou que durant la procédure prud'homale l'employeur soutient la validité du licenciement.

28- En l'espèce, la lettre de licenciement critiquée a été signée pour Mme [O], gérante de la société, au nom de Mme [C], directrice générale de la Sas The 3 Thinkers. Il s'ensuit que Mme [C] a agi au nom de la gérante de la société et le contrat de travail qui est versé atteste bien que Mme [C] est salariée de la société depuis le 1er février 2021. Elle a d'ailleurs été destinataire d'une délégation de pouvoir le 26 février 2021 afin de représenter la gérante lors de l'entretien préalable au licenciement et d'établir tous documents utiles à la procédure.

La société justifie ainsi, par les pièces produites, que Mme [C] était la supérieure hiérarchique de Mme [U] et avait reçu une délégation de pouvoirs pour la gestion de la procédure de licenciement de cette salariée.

29- En conséquence, la lettre de licenciement a été régulièrement signée et le licenciement n'est pas dénué de cause réelle et sérieuse de ce chef.

- Sur le fond

30- Sollicitant l'infirmation de la décision entreprise sur ce point, Mme [U] soutient que son licenciement pour faute grave est infondé et que le périmètre de ses fonctions était incertain puisqu'au moment de son licenciement, l'avenant de mise à disposition pour l'année en cours n'était toujours pas signé alors que les griefs retenus trouvaient leur origine dans son exécution. Elle affirme que la société ne justifie pas de son remplacement.

31- La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, adressée le 30 mars 2021 à Mme [U], est ainsi rédigée :

« [...]

Vous exercez les fonctions de secrétaire comptable depuis le 4 octobre 1999 pour le compte de notre société.

Depuis l'année 2017, vous exercez une partie de vos fonctions pour le compte de la société THE 3 THINKERS par convention de mise à disposition.

Votre lieu de travail et vos attributions sont restés inchangés.

Or, nous sommes informés que depuis un certain temps vous refusez d'exécuter les ordres qui vous sont donnés. Le 17/02/2020, vous avez reçu un avertissement que vous n'avez pas contesté. Il vous était reproché d'entraver le bon fonctionnement du service administratif et comptable, de véhiculer une mauvaise image de l'entreprise par vos agissements et également, de vous comporter de manière insultante et agressive avec votre responsable.

Le 16 février dernier, suite à divers échanges houleux par mail avec Mme [D], vous avez supprimé, aux alentours de 20 heures, environ 550 fichiers administratifs et comptables contenus dans la dropbox de la société THE 3 THINKERS.

Cet outil informatique a pour but de faciliter le stockage et le partage de fichiers.

Le 17 février 2021, Mme [C] vous a invité à vous expliquer sur cette suppression et a, en parallèle, fait restaurer les fichiers par Mme [D].

Or, tel n'a pas été la surprise de Mme [C] de constater que, quelques minutes après la restauration, les fichiers ont à nouveau été supprimés...

Mme [C] vous a alors adressé un nouveau mail vous sommant de vous expliquer.

Vous avez alors, sans fournir aucune explication, recréé les fichiers supprimés et nous sommes restés sans explications de votre part jusqu'au 11/03/2021 date à laquelle s'est tenu notre entretien.

Cette man'uvre nécessite qu'une copie des fichiers supprimés avait préalablement été réalisée par vos soins dans un dossier dont vous seule avez accès et sans notre autorisation. Nous ne pouvons pas accepter cette manière de travailler, que, vous n'êtes pas censée l'ignorer, [nous] avions voulu éviter en ayant recours à la dropbox. Ces fichiers contiennent des données confidentielles de nos clients et nous ne pouvons vous laisser en faire des copies sans autorisations.

Nous avons, au surplus, constaté que vous persistiez à verrouiller certains fichiers alors que nous vous avions expressément indiqué que nous ne souhaitions pas que vous opériez de la sorte.

Ces suppressions de très nombreux fichier de travail collectif sur un outil informatique qui ne vous appartient pas, sans ordres, et en dehors de vos horaires de travail constituent une incontestable faute sur laquelle vous ne nous avez fourni aucune explication satisfaisante pendant l'entretien préalable du 11/03/2021. De plus, afin de nous assurer d'avoir les bons fichiers à disposition, nous avons dû les vérifier un par un.

En outre nous déplorons que vous n'ayez pas, pendant la période de votre mise à pied et avant l'entretien préalable, déféré à notre demande de remise des documents comptables, ce qui ne nous a pas permis d'enregistrer les nombreuses factures du mois de janvier de nos fournisseurs, prenant ainsi un retard considérable dans la préparation de leurs paiements et nous obligeant à faire appel à notre cabinet comptable pour nous aider à rattraper le retard.

De plus, nous avons constaté que vous n'avez pas respecté votre mise à pied. En effet, nous avons pu constater que vous vous êtes connectée à la Dropbox en date du 01/03/2021 afin de modifier votre mot de passe, de multiples connexions également à la Dropbox ont eu lieu entre le 01/03 et le 14/03. Et nous avons noté qu'en date du 09/03/2021 vous vous êtes connectée à la Dropbox et avez modifié deux fichiers. Lors de notre entretien du 11/03, nous vous avons demandé des explications sur ces connexions pendant votre mise à pied et vous ne nous en avez fourni aucune.

Nous considérons que l'ensemble de ces faits constitue une faute grave rendant impossible votre maintien, même temporaire, dans notre entreprise.

Nous vous signalons, à cet égard, qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé.

[...] ».

Réponse de la cour

32- L'employeur ayant choisi de se placer sur le terrain d'un licenciement pour faute grave doit rapporter la preuve des faits allégués et démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise.

33- En l'espèce, l'employeur évoque un échange houleux avec la salariée le 16 février 2021 à la suite duquel des suppressions de documents sur la 'dropbox' sont intervenues.

Il considère qu'en supprimant environ 550 fichiers administratifs et comptables contenus dans la 'dropbox' à deux reprises et en les recréant sur la 'Dropbox' après un mail de demande d'explication, qu'en copiant lesdits dossiers supprimés sans y être autorisée, qu'en refusant de restituer des documents comptables et qu'en multipliant les connexions à la 'dropbox' afin de modifier son mot de passe pendant sa période de mise à pied à titre conservatoire, la salariée a contrevenu à ses obligations contractuelles et a ainsi adopté un comportement constitutif d'une faute grave rendant impossible la poursuite de la collaboration pendant la durée d'un préavis, justifiant la rupture immédiate du contrat de travail.

34- L'employeur verse notamment aux débats :

- un échange de courriels du 17 février 2021 entre Mme [U] et Mme [C], cette dernière demandant à la salariée à 11h21 : 'bonjour [M], ce matin, nous avons constaté par surprise que tu as supprimé plus de 551 dossiers dans dropbox. Je peux savoir 'de 'raison que as supprimé ces dossiers''; puis un nouveau courriel quelques minutes plus tard à 11h45 : '[M], nous avons restauré les fichiers et tu recommences à supprimer. Dis moi ce que tu fais'; Mme [U] répond à 12h15: 'les fichiers sont toujours et seront bien entendu comme chaque année, dans la dropbox pour la révision comptable qui débute lundi 22/02. Merci de ne pas intervenir non plus sur les fichiers de mes dossiers dans la dropbox'; en réponse, Mme [C] écrit à 12h30: 'ce ne sont pas tes dossiers personnels mais les dossiers que te confie T3T, en tant que directrice générale et responsable comptable, nous devons avoir accès à l'ensemble de ces dossiers que ce soit en consultation ou en modification'; Mme [U] lui indique à 12h44: 'c'est moi qui alimente les fichiers de la dropbox sur mes dossiers tout au long de l'année, hormis le social. La finalité étant que les dossiers soient à jour dans la dropbox pour la révision comptable et c'est bien entendu le cas pour mes 6 dossiers. Si je fais une manipulation à un moment donné, c'est qu'il y a une bonne raison, autant me demander avant et non après',

- un constat dressé par un huissier de justice le 24 février 2021 dont il résulte que Mme [C] et Mme [D] ont indiqué à l'officier ministériel que Mme [U] a supprimé le 16 février 2021 aux alentours de 20 heures environ 550 fichiers comptables et administratifs, qu'elles s'en sont rendues compte le lendemain et qu'elles ont restauré l'ensemble des fichiers supprimés, que de nouveau ils ont été supprimés par Mme [U] et de nouveau restaurés par cette dernière qui n'a pas nié ces faits mais ne les a pas expliqués, que cette suppression fait suite à un échange houleux la veille; que les dossiers supprimés proviennent du partage du dossier BSF;

L'huissier de justice constate à l'examen de l'ordinateur portable de Mme [D] des lignes de suppression de dossiers par Mme [U] mais également des ajouts et des déplacements de fichiers; Mme [D] précise que cette opération sous-entend qu'une copie des fichiers a été réalisée par Mme [U] dans un dossier qui lui est privé et cela sans l'autorisation de l'employeur; l'officier ministériel constate ensuite une concordance entre les fichiers supprimés et les fichiers restaurés; concernant les dossiers verrouillés par Mme [U], l'officier ministériel constate qu'un bandeau apparaît sur lesdits fichiers, ainsi libellé: '[M] [U] a verrouillé temporairement ce fichier il y a 5 mois vous pouvez toutefois le consulter même s'il est verrouillé ou demander à cette personne de le déverrouiller'.

35- Outre le fait, qu'aucun élément probant n'est versé témoignant des échanges houleux allégués le 16 février 2021, il résulte des pièces produites par l'employeur que les éléments supprimés ont été restaurés à l'identique par lui-même et par Mme [U] et que ceux verrouillés étaient toutefois consultables ou pouvaient être déverrouillés sur demande, l'employeur n'alléguant pas cependant avoir sollicité Mme [U] à cet effet.

Par ailleurs, et ainsi que le fait valoir Mme [U] sans être contredite sur ce point, pour l'exercice de ses missions elle devait créer un ficher de travail sur son PC, charger les documents comptables sur la 'dropbox' pour leur mise à la disposition de l'expert comptable et effectuer des mises à jour, ce que manifestement elle était en train de faire en supprimant les anciens fichiers pour les remplacer par ceux mis à jour; l'examen de la notice tirée du site 'Dropbox' fournie par la salariée permet de relever que lorsqu'un utilisateur supprime un fichier ou un dossier partagé, ce document reste accessible aux autres utilisateurs de sorte que tous les membres du dossier peuvent le restaurer, ce que l'employeur n'a pas manqué de faire. A l'instar de la salariée, la cour observe qu'il n'est pas justifié de l'interdiction de cette pratique pourtant sanctionnée.

En outre, la cour constate que l'employeur qui invoque l'existence de copies privées desdits fichiers n'en rapporte pas la preuve et surtout n'allègue ni ne justifie d'un quelconque préjudice, les dossiers en cause ayant été retaurés.

Il n'est pas davantage justifié des demandes que l'employeur auraient adressées à Mme [U] afin qu'elle restitue des documents comptables pendant sa mise à pied à titre conservatoire et de ce qu'elle aurait tenté de modifier ses mots de passe pendant cette période.

Enfin il est vain, pour l'employeur de produire des pièces relatives aux éventuelles mauvaises relations que Mme [U] auraient entretenues avec son nouvel employeur.

36- Compte tenu de ces éléments, de l'absence de préjudice, de l'ancienneté de la salariée dans l'entreprise, le licenciement pour faute grave est sans cause réelle et sérieuse.

37- La décision de première instance sera donc infirmée de ce chef.

Sur les demandes indemnitaires au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse

38- L'appelante est fondée à demander le paiement du rappel de salaire pendant la mise à pied à titre conservatoire et les congés payés afférents, l'indemnité'compensatrice'de'préavis'et les congés payés afférents, l'indemnité de licenciement, outre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

39- La société ne conclut pas autrement qu'en sollicitant le rejet de l'ensemble des demandes de Mme [U].

Réponse de la cour

- Sur la demande au titre du rappel de salaire sur les jours de mise à pied

40- Le licenciement de l'appelante étant sans cause réelle et sérieuse, l'employeur sera condamné à lui verser la somme de 3 571,83 euros brut indument retenue ainsi que celle de 357,18 euros brut au titre des congés payés afférents.

- Sur l'indemnité compensatrice de préavis

41- La salariée sollicite l'allocation d'une somme de 7 876,34 euros brut représentant 2 mois de salaire outre la somme de 787,63 euros brut au titre des congés payés afférents.

42- En application des dispositions des'articles L.1234-1-1° et L. 1234-5 du code du travail, le montant de l'indemnité de'préavis's'élève à 2 mois. Il sera donc fait droit à cette demande après avoir retenu un salaire de référence de 3 938,17 euros brut, non contesté par l'employeur.

- Sur l'indemnité légale de licenciement

43- Mme [U] sollicite l'allocation d'une somme de 25 151,78 euros en application des articles L.1234-9, R.1234-1 et R.1234-2 du code du travail.

44- Au regard de son ancienneté de 21 ans et 8 mois tenant compte du préavis, il lui sera alloué la somme de 25 051,12 euros.

- Sur les dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse

45- L'appelante sollicite l'allocation d'une somme équivalente à 16 mois de salaire en réparation de son préjudice lié non seulement à la perte de son emploi et de ses conséquences financières, l'obligeant à s'inscrire à Pôle emploi mais également du fait de l'interruption de sa carrière.

46- Les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail qui octroie au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l'ancienneté du salarié permettent raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi.

47- En l'espèce, compte tenu de l'ancienneté de la salariée et de l'effectif de la société, le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est compris entre 3 et 16 mois de salaire.

48- Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme [U], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, telles qu'elles résultent des pièces et des explications fournies, il convient de lui allouer la somme de 55 000 euros.

49- En application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, il sera ordonné le remboursement par l'employeur à France Travail (anciennement Pôle Emploi) des indemnités de chômage éventuellement versées à la salariée depuis son licenciement dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Sur le manquement à l'obligation de formation

50- Mme [U] demande par infirmation du jugement, la somme de 21 000 euros à titre de de dommages et intérêts pour non-respect de son obligation de formation et d'adaptation. Elle fait valoir que durant plus de 20 années de service, elle n'a bénéficié d'aucun entretien professionnel, ni d'aucune évaluation et formation. Elle soutient que le manquement de l'employeur à son obligation de formation et d'adaptation lui a ainsi causé un préjudice qu'il convient d'indemniser, n'ayant pu évoluer dans sa carrière et étant restée secrétaire-comptable.

51- En réplique, la société s'oppose à cette demande et soutient que Mme [U] a bénéficié d'une formation de deux jours en janvier 2019 et qu'une formation devait être dispensée au premier trimestre 2021 que la salariée n'a pu suivre du fait de la procédure de licenciement. Elle ajoute que la formation sollicitée par Mme [U] portant sur l'exercice d'activités liées aux animaux de compagnie, validée par ses soins, avait été annulée en raison du premier confinement consécutif à la crise sanitaire.

Réponse de la cour

52- Aux termes de l'article L.6321-1 du code du travail « L'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail.Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations »

53- A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que Mme [U] est bien fondée à invoquer le manquement de la société à son obligation de formation au motif qu'elle n'a bénéficié que d'une seule formation au cours de sa carrière au sein de la société. Il convient en conséquence de retenir que l'indemnité à même de réparer intégralement le préjudice subi par Mme [U] du chef de ce manquement doit être évaluée à la somme de 5 000 euros.

54- Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a débouté Mme [U] de sa demande à ce titre.

Sur la demande au titre de la remise tardive des documents de rupture

55- La salariée demande l'allocation d'une somme de 2 000 euros à ce titre, soutenant que l'employeur ne lui a pas remis les documents de fin de contrat après la rupture.

56- L'employeur objecte que la salariée ne lui a pas remis les codes d'affilation auprès de Pôle Emploi.

Réponse de la cour

57- Aux termes de l'article R.1234-9 du code du travail, l'employeur délivre au salarié, au moment de l'expiration ou de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d'exercer ses droits aux prestations mentionnées à l'article L 5421-2 et transmet sans délais ces mêmes attestations à Pôle Emploi.

Il en résulte qu'en cas de licenciement pour faute grave, l'employeur délivre ces documents au salarié dès la rupture, qui intervient au moment de la notification du licenciement.

Il est admis que ces documents comme l'attestation destinée à pôle emploi, doivent être remis à l'expiration du contrat de travail, c'est-à-dire à l'issue du préavis effectué ou non, et qu'en cas de remise tardive, le salarié peut prétendre à des dommages - intérêts s'il prouve le préjudice qui en est résulté.

58- En considération de la date du licenciement intervenu le 30 mars 2021, la remise le 7 avril 2021 ne peut caractériser un manquement de l'employeur à son obligation d'autant que Mme [U] ne justifie pas d'un quelconque préjudice.

La décision des premiers juges doit être confirmée de ce chef.

Sur les autres demandes

- Sur la remise de documents

59- La société devra délivrer à Mme [U] une attestation France Travail et un bulletin de salaire rectifiés tenant compte des condamnations prononcées et ce, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision, sans qu'il soit besoin de l'assortir d'une astreinte.

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

60- La société, partie perdante à l'instance, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à payer à Mme [U] la somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il n'y a pas lieu de se prononcer actuellement sur les frais d'exécution forcée d'une décision dont l'exposé reste purement hypothétique et qui sont réglementés par l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution qui prévoit la possibilité qu'ils restent à la charge du créancier lorsqu'il est manifeste qu'ils n'étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés, étant rappelé qu'en tout état de cause, le titre servant de fondement à des poursuites permet le recouvrement des frais d'exécution forcée.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Déclare recevable la demande de Mme [N] tendant à l'annulation du licenciement en raison de la discrimination liée à l'âge,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeter la demande de Mme [U] au titre de la remise tardive des documents de rupture,

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute Mme [U] de sa demande tendant à l'annulation du licenciement en raison de la discrimination liée à l'âge,

Déboute Mme [U] de sa demande d'annulation de l'avertissement du 17 février 2020,

Dit que le licenciement pour faute grave de Mme [U] est sans cause réelle et sérieuse,

Dit que l'employeur a manqué à son obligation de formation,

Condamne la Scea [Adresse 2] à verser à Mme [U] les sommes suivantes':

- 3 571,83 euros brut au titre des salaires retenus pendant la mise à pied à titre conservatoire,

- 357,18 euros brut au titre des congés payés afférents,

- 7 876,34 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 787,63 euros brut au titre des congés payés afférents,

- 25 051,12 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 55 000 euros à titre de dommages et intrérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 5 000 euros au titre du manquement à l'obligation de formation,

- 3'500 euros au titre des frais irrépétibles exposées en première instance et en cause d'appel,

Ordonne à la Scea Château Moulinet de rembourser à France Travail (anciennement Pôle Emploi) les indemnités de chômage éventuellement versées à Mme [U] depuis son licenciement, dans la limite de 6 mois d'indemnités,

Dit que la Scea [Adresse 2] devra délivrer à Mme [U] une attestation France Travail et un bulletin de salaire rectifiés tenant compte des condamnations prononcées et ce, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,

Dit n'y avoir lieu à prononcer une astreinte,

Condamne la Scea [Adresse 2] aux dépens de première instance et d'appel,

Dit n'y avoir lieu à statuer sur les frais d'exécution éventuels.

Signé par Madame Marie-Paule Menu, présidente et par Sandrine Lachaise, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Sandrine Lachaise Marie-Paule Menu

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